À l’instar d’un Jean-Baptiste Charcot, Paul-Émile Victor a eu une vie bien remplie. Véritable figure du monde de l’exploration polaire, il a passé une grande partie de son existence à voguer entre les régions les plus froides de notre monde. Fondateur des Expéditions polaires Françaises, ce dernier reste, 25 ans après sa disparition, l’un des pionniers du genre en France. Ethnologue, écrivain et aventurier. Il a aidé à mieux comprendre le monde et les effets du changement climatique, grâce à ses nombreuses recherches, en Arctique comme en Antarctique.
Influencé par de nombreux explorateurs, Paul-Émile Victor n’avait pas pour vocation, de parcourir et étudier le monde. Né en Suisse, le 28 juin 1907, ce dernier passe une grande partie de son enfance à Saint-Claude, un petit village au beau milieu du Jura, où son père après avoir déménagé, décide de monter une petite société de fabrication de pipes et de stylos. Une jeunesse assez classique, qui va prendre une tournure insolite lorsqu’il va se découvrir une véritable passion pour les pôles. Une passion qui va le mener aux quatre coins du monde, devenant par la même occasion, une référence mondiale dans le secteur de la recherche.
Cette passion pour les régions polaires, Paul-Émile Victor a mis quelques années avant de parfaitement l’apprivoiser. Dès la fin de son baccalauréat, ce dernier se rend à l’École centrale de Lyon et tente d’y obtenir un diplôme universitaire, qu’il ne passera finalement jamais puisque c’est vers l’École nationale de la marine marchande qu’il va décider de se tourner. Son existence prend une nouvelle tournure en 1933, lorsqu’il rencontre pour la première fois un certain Jean-Baptiste Charcot. Un an plus tard, il organise sa toute première expédition, en direction du Groenland, probablement motivé par les exploits et les histoires des explorateurs qu’il a pu rencontrer. D’ailleurs, c’est le commandant Charcot qui l’y emmène., un homme dont il restera proche jusqu’à son décès. Il restera sur place un an durant, apprivoisant tranquillement la culture locale. Une première expédition scientifique couronnée d’un certain succès, ce qui le pousse à très vite envisager une seconde aventure. En 1936, il repart pour le Groenland et s’installe cette fois-ci, du côté de Kangerlussuaq, la capitale locale. Durant 14 mois, il va alors partager la vie d’une famille esquimaude, apprenant la langue et les coutumes locales.
Ses appréciations elles, sont retranscrites dans un ouvrage d’expédition qui rencontrera un petit succès. Une première partie de vie particulièrement remplie, que la Seconde Guerre mondiale vient rapidement stopper, du moins, d’un point de vue scientifique puisque Paul-Émile Victor s’engage. En effet, alors que des millions d’hommes sont sur le front, l’ethnologue est envoyé à Stockholm, en tant qu’agent du renseignement et officier de liaison avec la Finlande. Il effectue ensuite un court voyage au Danemark, mais se retrouve pris au piège suite à l’invasion de Copenhague par les forces Nazis. S’il réussit à retourner en France, il est très vite renvoyé en Suède. La situation devient une nouvelle fois difficile à gérer et Victor retourne en France une seconde fois, avant de reprendre la route en direction du Maroc puis de la Martinique. Il s’installe finalement aux États-Unis. Nous sommes alors en 1941.
Washington entre en guerre quelques semaines plus tard, Paul-Émile Victor lui, s’engage au sein de l’US Air Force. Pilote et parachutiste, il devient en 1943, instructeur à l’École d’entraînement polaire et créé dès 1944 plusieurs escadrilles permettant aux forces américaines d’engager des missions de recherche et de sauvetage, notamment d’équipages aériens en détresse. Alaska, Canada, Groenland, une grande partie du Nord est quadrillée par les équipes de Paul-Émile Victor. Ses connaissances sur les lieux et son expérience militaire semblent ainsi parler en sa faveur. Ses faits d’armes lui permettent d’ailleurs d’obtenir la nationalité américaine. Il reste alors mobilisé jusqu’en 1946, date à laquelle il reçoit l’autorisation de quitter l’US Air Force. De retour en France, il se lance dans de nouveaux projets et se tourne vers ses premières amours, l’ethnologie, l’exploration et les régions polaires. C’est alors que les expéditions polaires françaises vont voir le jour, le 28 février 1947.
Cette nouvelle structure d’études va vite permettre à la France de regagner une place centrale au sein des nations scientifiques les plus importantes, de celles qui comptent dans les régions polaires. Entre 1948 et 1953, les expéditions s’enchaînent à vive allure, notamment au Groenland. Les résultats eux, sont excellents. Mais Paul-Émile Victor vise plus loin. Dès 1956, il part alors en Terre Adélie, en Antarctique. Une première mission sur le continent là encore concluante, ce qui le pousse à y revenir plusieurs fois, notamment dans le cadre de la construction de la base scientifique permanente. Une base qui aura permis à des dizaines d’experts de venir étudier les environs.
Reconnu par ses pairs, Paul-Émile Victor va dès lors, occuper diverses fonctions au sein de plusieurs groupes et comités ayant un rapport avec la recherche et les régions polaires, preuves de son implication. Nommé président du sous-comité Antarctique constitué en 1953 par le CNRS, il sera également chef de l’Expédition glaciologique internationale au Groenland (EGIG), ainsi que président du Scientific Committee on Antarctic Research (SCAR) et enfin, président du Comité antarctique français pour l’année géophysique internationale (AGI). De nombreux rôles et diverses casquettes pour cet individu à la vie passionnante qui, de manière ironique, ne cessera de répéter qu’il a toujours eu horreur du froid.
Son engagement auprès des régions polaires le pousse naturellement à devenir l’une des voix les plus importantes en faveur de la sauvegarde de l’environnement. Premier spectateur du changement climatique et des effets de ce dernier sur les glaces, ses multiples études lui permettent, données à l’appui, de défendre corps et âme sa cause. En 1968, il est par exemple, nommé délégué général de la Fondation pour la sauvegarde de la nature. Un rôle qui lui tient à cœur et qui le pousse à aller encore plus loin, notamment en 1974, lorsqu’il annonce la création avec certains de ses proches, dont le commandant Cousteau, le groupe Paul-Émile Victor pour la défense de l’homme et de son environnement.
Sa retraite, Paul-Emile Victor en profite loin, très loin de la métropole même, puisqu’il se rend du côté de la Polynésie française, sur le Motu Tane. Le 7 mars 1995, alors âgé de 87 ans, il décéde, laissant derrière lui un immense héritage, aussi bien scientifique qu’historique. Aventurier de l’extrême, ce dernier a fait rêver des milliers de personnes à travers ses histoires et ses découvertes. Véritable figure du XXe siècle, Paul-Émile Victor a réussi à faire figurer l’hexagone sur les cartes polaires. Ethnologue, écrivain, explorateur, ce dernier a également passé les dernières années de sa vie à défendre son héritage et la nature, relativement importante à ses yeux. « Il fait partie des quelques personnages qui ont fabriqué une petite part du récit national » disait d’ailleurs de lui son fils, Jean-Christophe Victor. Un récit qui aujourd’hui, continue de trouver un écho tout particulier.
À l’instar de Jean-Baptiste Charcot, Paul-Émile Victor a vécu une vie pleine et particulièrement mouvementée. Ce dernier, après avoir participé à de multiples expéditions, réussira à structurer et faire vivre sa pensée grâce aux Expéditions polaires françaises, qui vont lui permettre d’aller plus loin encore dans ses objectifs, grâce par exemple, à la mise en place d’une base permanente en Terre Adélie. L’IPEV, l’Institut polaire Paul-Émile Victor a depuis repris le flambeau et continue de mener à bien les nombreuses missions françaises en terre froide. Un héritage qui continue à se perpétrer, près de 25 ans après la mort de cet explorateur à la renommée mondiale.
L’explorateur Jean-Louis Étienne revient sur son métier et cette passion qu’il partage avec Paul-Émile Victor :
*Les prix indiqués sont ceux des cabines les moins chères. Le descriptif des programmes est donné à titre indicatif.