Mon mari et moi avons choisi le Spitzberg comme destination, car nous rêvions de découvrir cette région située au-dessus du cercle polaire.
Nous avions à cœur de choisir une compagnie française qui organise des croisières d’expédition à taille humaine et dont l’approche s’inscrit dans le respect de la nature. Nous avons opté pour une croisière de 12 passagers ; ce format intimiste nous a permis d’être très mobiles et discrets lors des observations animalières et des déplacements sur terre. Ainsi, nous avons pu contempler pendant de longues heures et à distance raisonnable des petits troupeaux de rennes, un ours marchant sur la banquise, une colonie de morse se reposant sur une plaque de glace, de jeunes renards blancs peu farouches et des phoques très curieux.
(Gauche) Une mère et son petit renne. (Droite) Ours marchant sur la banquise ©Jonalynne Maisonneuve
(Gauche) Phoque annelé. (Droite) Renard avec son pelage d’hiver au mois d’août ©Jonalynne Maisonneuve
(Gauche) Observation d’une grande colonie de Guillemots à la falaise de Alkefjellet. (Droite) Morses sur une plaque de glace ©Jonalynne Maisonneuve
Ce cadre confidentiel nous a également permis de tisser des liens forts entre passagers, mais aussi avec l’équipage et nos guides d’expéditions. Fait assez rare pour être souligné, nous avions accès à la passerelle de commandement à tout moment et pouvions observer l’équipage s’affairer autour des nombreux écrans de contrôle.
La passerelle ©Jonalynne Maisonneuve
La passerelle était également un réel lieu de vie ; lors de notre quatrième jour de croisière, nous sommes tous invités à monter, car des souffles de baleines ont été vus au loin. Nous remarquons avec surprise et enthousiasme qu’elles se dirigent vers nous ; c’est le début d’un spectacle absolument inoubliable ; des grands rorquals et de gigantesques baleines bleues chassent des bancs de krill, et des oiseaux marins tournoient, virevoltent et plongent en piqué pour attraper de petits poissons. Les cétacés se rapprochent toujours plus, plongent et refont surface de tous les côtés du bateau, si bien que nous pouvons distinctement entendre et sentir leurs puissants souffles. Le silence se fait sur le bateau et c’est avec des yeux d’enfants que nous nous émerveillons tous devant ce ballet aquatique.
Ballet aquatique autour du bateau ©Jonalynne Maisonneuve
Nous avons également choisi Grands Espaces car les guides et conférenciers sont francophones et issus de formations scientifiques ; cela est un réel avantage puisque nous sommes revenus de cette croisière avec des outils de compréhension nécessaire à mieux appréhender cet écosystème aussi beau qu’hostile et fragile.
Pour être honnête, j’avais certaines appréhensions à l’idée de partir sur le toit du monde avec dix parfaits inconnus. Avec mon mari, nous craignions notamment d’avoir du mal à nous intégrer dans un groupe de personnes avec qui nous aurions sûrement une grande différence d’âge. C’est à l’aéroport de Paris que nous rencontrons pour la première fois ceux et celles qui seront nos compagnons de route. Nous étions en effet les plus jeunes, et de nombreuses années nous séparaient de nos ainés. Je venais pour ma part de fêter mes 29 ans ; deux, trois et quatre décennies me séparaient des autres passagers.
Une fois les présentations faites et la timidité des premiers instants envolée, je me rends rapidement compte que nous partageons tous les mêmes valeurs et avons la même conception du voyage. Nous sommes tous des passionnés d’aventures, baroudeurs dans l’âme avides d’expériences au grand air et surtout des amoureux de la nature. Les barrières de l’âge sont transcendées et nous écoutons avec émerveillement les récits de voyages d’un autre temps, parfois en camping-car, à travers le Moyen-Orient, l’Afrique, l’Asie et l’Amérique du Sud.
Une fois arrivée à bord du bateau, nous rencontrons l’équipage lors du cocktail du Capitaine, une ambiance chaleureuse et conviviale s’installe assez rapidement ; c’est le début de belles amitiés qui perdureront bien après la croisière.
Nous étions partis vers le grand Nord avec certains aprioris ; nous avions fantasmé et imaginé une terre de glace, froide et presque lunaire. Après une première nuit de navigation vers le nord de l’archipel du Svalbard, nous découvrons au réveil la majestueuse baie de la Madeleine sous un soleil éclatant. Nous sommes saisis par la beauté et la richesse des paysages ; des montagnes assez peu enneigées, se dressent face à nous ; des fronts de glacier se dessinent au loin, et à mesure que nous nous rapprochons, des icebergs de tailles et formes variables se font plus nombreux autour du bateau.
Autour de la baie de la madeleine ©Jonalynne Maisonneuve
Ce premier réveil restera gravé dans ma mémoire, mais si je devais choisir un événement particulièrement marquant, cela serait sûrement nos « Noces de Glaces », une petite célébration surprise et informelle organisée par l’équipage avec les moyens du bord. Mon mari et moi n’avons pas pu nous marier à la suite d’importantes déconvenues liées au COVID ; l’équipage ayant eu vent de nos mésaventures, nous a offert le plus beau des cadeaux. Même dans nos rêves les plus fous, nous n’aurions jamais osé imaginer nous dire « oui » sur un morceau de banquise. Au-delà de la beauté inouïe du monde polaire, nous avons aussi été marqués par la spontanéité, bonté et générosité de personnes que nous ne connaissions que depuis huit jours.
Dans la nuit du cinquième jour à bord, je suis tiré de mon sommeil par un bruit sourd contre la coque du navire, suivi d’un crissement interminable. Je me précipite vers le hublot et soulève le lourd volet métallique qui nous permet d’avoir de l’obscurité la nuit, et distingue malgré l’épaisse brume un paysage d’une beauté froide et inquiétante ; il est 4 heures du matin et nous naviguons entre des plaques de banquise disloquée. Un mélange d’exaltation et de fascination s’empare de moi, nous nous rapprochions enfin du mythique 80° parallèle nord !
Iceberg et banquise ©Jonalynne Maisonneuve
Front de glacier à 1h30 du matin ©Jonalynne Maisonneuve
Nous recommandons sans aucune hésitation cette croisière au Spitzberg car pour mon mari et moi, ça a été le voyage d’une vie. Nous avons voulu profiter de chaque instant au maximum et avons passé de nombreuses nuits à veiller jusqu’au petit matin sur le pont avant. Une sorte de fureur de vivre et fascination dévorante s’étaient emparées de nous au point que nous en oublions le froid mordant. Nous nous souviendrons longtemps de ces instants suspendus pendant lesquels nous étions tous les deux, presque seuls au monde, à observer en silence les sublimes paysages du Spitzberg illuminés par le soleil de minuit.
23h30 – Le jour polaire ©Jonalynne Maisonneuve
Nous avons également rencontré des personnes qui sont devenus des proches et avec qui nous avons vécu des expériences hors du commun. Voici d’ailleurs une petite vidéo que nous avons tourné et monté sur le bateau et que nous avons présenté aux passagers et à l’équipage pour les remercier de leur bonté et bienveillance au quotidien :