Peut-être l’un des derniers grands explorateurs français, Jules Dumont d’Urville s’inscrit dans la lignée de Bougainville et La Pérouse. Navigateur reconnu, la France lui doit de nombreuses découvertes, l’Histoire aura surtout gardé en mémoire la Vénus de Milo et la Terre Adélie, territoire qu’il découvre le 21 janvier 1820 et dont nous célébrons en ce moment les 180 ans !
Né dans le Calvados en 1790, Jules Sébastien César Dumont d’Urville débute sa carrière très jeune. Il a dix-sept ans lorsqu’il s’engage comme militaire. Polyglotte, il est également autodidacte et s’intéresse à une grande variété de disciplines parmi lesquelles, la botanique. Ce goût pour les plantes lui vient de son oncle, l’abbé de Croisilles.
Loin d’être attiré par les guerres ou les combats, c’est plutôt le goût des voyages et l’attrait pour l’exploration qui guident Dumont d’Urville vers une carrière militaire. Il apprend que les bateaux de la Marine explorent régulièrement les moindres recoins du globe et en rapportent plantes exotiques, animaux en tous genre et drôles d’insectes. C’est donc tout naturellement que ces voyages attirent Dumont d’Urville, qui pourrait, à son tour, avoir l’opportunité de découvrir de nouvelles espèces.
Ses premiers voyages d’exploration débutent en 1819 dans la Mer Noire, il se rendra également en Méditerranée Orientale où il sera chargé des observations d’histoire naturelle et archéologique.
Ce n’est pas en tant qu’explorateur ou marin que Dumont d’Urville commence par se faire connaître. En escale sur l’île grecque de Milos, il rend visite à un paysan en 1820. L’homme grec lui fait voir une statue qu’il a fait sortir de terre, probablement à l’occasion de travaux dans les champs. Même si la statue n’a plus ses bras, Dumont d’Urville reconnaît une jolie Vénus antique.
Comprenant l’importance de la découverte, il écrit à l’ambassadeur français à Constantinople pour le convaincre d’acheter l’antiquité. Bientôt, la statue devient propriété de la France et l’ambassadeur l’offre au roi Louis XVIII. Cette statue de marbre est, encore aujourd’hui, l’un des plus beaux joyaux du Musée du Louvre. La découverte de la Vénus de Milo vaudra à Dumont d’Urville le grade de capitaine de vaisseau.
Dumont d’Urville n’effectuera pas moins de trois tours du monde, chacun durant environ trois ans, ce qui place l’explorateur à la première place du podium : Bougainville n’aura fait qu’une fois le tour du monde et La Pérouse n’aura pas réussi à terminer le sien.
Dumont d’Urville embarque sur le navire ‘La Coquille’ comme commandant en second en 1822, en direction de l’Océanie. En plus des nombreux relevés topographiques, Dumont d’Urville rapportera de son expédition plus de 3 000 espèces de plantes, dont plusieurs centaines seront nouvelles. Il rapportera également 1 200 espèces d’insectes, les nouvelles espèces seront placées au Muséum d’Histoire Naturelle de Paris.
L’explorateur français entame son deuxième tour du monde en 1828 comme capitaine. Lors de ce voyage, il localisera les vestiges de l’expédition de La Pérouse, dont les membres ont péri quarante ans plus tôt sur une petite île au Nord de la Nouvelle-Calédonie. Ce tour du monde est l’occasion pour Dumont d’Urville de collecter de nombreux objets artisanaux venus des peuples qu’il rencontre.
Son troisième voyage a lieu entre 1837 et 1840. Il retourne en Océanie et voyagera à Tahiti, en Nouvelle-Zélande, en Tasmanie… Il se voit confier une nouvelle mission du roi Louis-Philippe en personne : atteindre le pôle sud.
Si Dumont d’Urville rêve d’approcher le pôle sud, il n’est pas le seul, Anglais, Russes et Américains se sont fixé le même objectif. Si on s’interroge encore quant à la nature de ce territoire à l’époque (s’agit-il de terres ou d’une immense mer ?), Dumont d’Urville devra faire vite pour répondre à la question et atteindre ce point resté inexploré avant ses concurrents.
Son expédition part de Toulon le 11 septembre 1837. L’Astrolabe et la Zélée, les deux bateaux, parviennent à naviguer à travers les glaces et l’équipage aperçoit la terre le 21 janvier…1840 ! Une première tentative infructueuse aura obligé Dumont d’Urville à emprunter un autre itinéraire. Le second essai sera le bon ! L’équipage atteint l’Antarctique et Dumont d’Urville donne à ce territoire le nom de sa femme Adèle, la zone découverte portera donc le nom de Terre Adélie. Les marins plantent un drapeau français et foulent le continent. Moment historique, c’est la toute première fois que des Européens marchent sur ce territoire ! L’explorateur sera parvenu à repousser la limite australe de la navigation établie par James Cook et malgré le scorbut et les nombreux glaciers, il atteindra la terre dont il a tant rêvé.
Menacée par la glace, l’expédition met cap au Nord dès le début du mois de février 1840 et prend le chemin de la France en passant par la Nouvelle-Zélande et l’Océanie. Dumont d’Urville rentre à Toulon le 6 novembre 1840, chassé par le mauvais temps et ayant perdu une partie de son équipage : certains membres sont morts du scorbut, d’autres ont déserté.
À son retour du troisième et dernier tour du monde, tous reconnaissent les exploits du navigateur français, même les Anglais, rivaux et navigateurs réputés. Dumont d’Urville reçoit la grande médaille d’or de la Société de Géographie. Les cartes établies par Dumont d’Urville serviront encore pendant la Seconde Guerre mondiale. Ses multiples expéditions ont contribué à la connaissance de la faune, de la flore et des peuples de l’Océanie.
Cet explorateur hors pair, devenu contre-amiral mourra tragiquement dans un accident ferroviaire en 1842, lors de l’inauguration de la ligne Paris-Versailles. Il est enterré au cimetière du Montparnasse.
La station scientifique française en Antarctique porte le nom de ce grand explorateur français : la base Dumont d’Urville. Deux montagnes et deux îles portent également son nom en Antarctique et en Océanie. On a aussi rendu hommage à Dumont d’Urville dans sa région natale : un lycée et un collège portent son nom ! Plusieurs espèces végétales ainsi que des insectes ont été nommés en son honneur. Dumont d’Urville nous aura aussi laissé une œuvre : il est l’auteur d’une Flore des îles Malouines (1825).