Sophie Tuchscherer
Guide
20 juillet
29 juillet 2022
Sophie Tuchscherer
Guide
Christophe Bassous
Arctique et Antarctique
Certaines photos d’illustrations ont été prises lors de précédentes croisières au Spitzberg. Lorsque le voyage sera terminé, nous publierons les photos de la croisière. Le manque de connexion internet nous empêche de recevoir les photos en temps réel.
Notre voyage commence à Paris dans une canicule … et nous nous envolons vers les glaces avec nos deux guides Sophie et Christophe. En 4 heures et demi, nous arrivons à Longyearbyen, la « capitale » de l’archipel du Svalbard. Personne ne sait où cela se trouve, à part les lecteurs de ces quelques lignes. Oui, nous sommes bien proche du pôle Nord à environ 1000km, et c’est déjà un dépaysement total.
Après avoir déposé nos bagages, nous visitons cette ancienne petite cité minière de 2000 âmes. Il ne reste que peu de vestiges de cette ancienne activité remplacé par le tourisme. Enfin, un tourisme avec peu de touristes justement ; moins de cent mille personnes viennent ici chaque année pour y pratiquer de la randonnée à ski ou en motoneige ou encore en navire de croisière expédition. Les deux musées sont particulièrement intéressants et nous n’avons que peu de temps avant d’embarquer sur l’Explorer.
Nous avons de la chance, il est à quai, les bagages sont déjà dans nos cabines et nous faisons connaissance avec l’équipage et le bateau. Les exercices de sécurité obligatoires sont effectués
avant de lever l’ancre. Nos guides nous parlent de la vie à bord et de notre programme. Nous savons ce que nous devrions faire demain, si la météo continue à être de notre cote. Il faut être flexible car
dans ces contrées, c’est la nature qui commande et tout peut changer d’une journée à l’autre. Il fait tout de même 14°c à Longyearbyen ! C’est peu courant. Il est temps de se mettre à table …
Nous avons navigué une bonne partie de la nuit, enfin la nuit … il fait toujours jour sous ces latitudes et en ce mois de juillet. C’est assez curieux, mais on s’y fait très vite. La mer est belle, la visibilité est
bonne et il fait encore 12°c. La voix de Christophe nous sort de nos rêves et de notre lit. C’est parti, et nous apercevons nos premiers morses sur la plage de Poolpyten ! Quels énormes animaux que ces
morses ; au bas mot plus d’une tonne de gras ! Une belle observation avant un copieux petit déjeuner, et délicieux comme notre repas de la veille. Notre but ce matin, est d’aller voir de près
l’échouerie des morses de Sarstangen. C’est un endroit que seuls les bateaux à très faible tirant d’eau (moins de 4m) peuvent aller visiter. En plus nous sommes protégés de la houle du large par la belle
Ile du Prince Charles.
Notre premier débarquement en Zodiac ! Nous les ancrons solidement sur la grève et avançons doucement vers un énorme groupe de morses alanguis sur la plage. Il y en a aussi qui batifolent dans
l’eau. Nous nous approchons lentement… Les morses nous ont bien entendu repérés et ne jettent qu’un œil vague sur notre petit groupe. Nous resterons un long moment à observer ces animaux
grégaires et placides, si gauches sur terre, mais si extraordinaires sous l’eau.
Quelques-uns se chamaillent, montrent leurs défenses, se bousculent ou se mettent à l’eau en roulant sur eux- mêmes. Ce sont des animaux vraiment attachants et nous ne nous lassons pas de les contempler. Il faut, hélas, rentrer à bord, mais la houle à rempli d’eau nos petits zodiacs. Qu’à cela ne tienne, quelques courageux commencent à écoper, on prend des vagues, on se trempe, on écope encore mais sans beaucoup de succès, mais finalement nous regagnons l’Explorer avec une belle aventure pour nos souvenirs !
Cet après-midi, pendant que nous faisons route vers la baie de la Croix (nommée ainsi par le baleinier Jonas Poole il y a deux siècles), c’est Sophie qui nous passionne par une conférence introductive au
Svalbard. Finalement, au bout du fjord, c’est le magnifique glacier de Lilliehook qui s’offre à nous. Il est absolument sublime ! Cet immense arc de cercle glacé de plus de 11km, dont le front de glace s’élève à plus de quarante mètres, est l’un des plus beaux de l’archipel. C’est une croisière en zodiac que nous proposent Christophe et Sophie au milieu du « brash », cet amas de petits morceaux de glace
provenant des vêlages du glacier.
D’abord, il y a ce beau phoque barbu allongé sur un glaçon, qui nous regarde. Ses belles vibrisses sensitives lui permettent de trouver ses coquillages préférés au fond de l’eau. C’est fou ce que ça peut consommer, un phoque barbu ! Près de quinze kilos de ces espèces de palourdes chaque jour ! Et puis le bleu des glaces, c’est beau ! Et Liliehook qui tonne, qui
claque comme un coup de feu, qui parle fort et qui nous gratifie de plusieurs vêlages bruyants et très impressionnants ! C’est un glacier très vivant ! Beaucoup d’icebergs çà et là ! Notre navigation
dans le brash s’accompagne du bruit des millions de bulles d’air qui claquent à la surface de l’eau. Quand on éteint le moteur, c’est une véritable symphonie des glaces à laquelle nous assistons. Quel
spectacle grandiose !!!!
Nous longeons à l’aube la côte ouest de la terre d’Albert Ier avec ses sommets acérés et ses glaciers majestueux et prenons notre petit déjeuner dans un cadre somptueux : le front glaciaire de Smeerenburg, ce site qui fut autrefois un lieu important du commerce de la graisse et fanons de baleines. Impatients, nous mettons les zodiacs à l’eau pour une sortie dans ce décor sublime et longeons le front glaciaire en suivant les explications de nos guides sur la formation des glaciers, les parties actives ou “mortes” et assistons même à bonne distance à plusieurs vêlages dont l’onde de choc nous berce doucement.
Nous nous taisons aussi pour un moment de silence et de contemplation respectueux dans cette nature vierge et imposante qui nous ressource. Un bon nombre d’oiseaux est observé : depuis les guillemots miroirs aux belles pattes d’un rouge ardent aux mouettes tridactyles ou eiders en vol, en passant par une scène de course poursuite de labbes parasites envers une sterne contrariée, forcée de régurgiter son poisson.
A mesure que nous passons près de cavernes de glaces et îlots de roche polie découverts par le glacier, nous allons dans le brash, cette “soupe de glaçons” au bruit singulier et naviguons prudemment à cause des hauts fonds entre des blocs de glace plus ou moins épais. Quel dépaysement comparé a il y a quelques jours seulement! Nous semblons seuls au monde.… Un phoque annelé apparaît et repart sous les floes alors que nous rejoignons le bateau. Nous déjeunons avec appétit et repartons ensuite vers le nord est, en direction de la pointe de l’archipel des îles Ytrenorskøya et Indrenorskøya, scrutant les rives où tombe un brouillard de plus en plus dense.
Ce dernier nous empêchant de sortir pour une promenade, nous décidons de scruter les abords des îles en en faisant le tour avant de jeter l’ancre pour la fin d’après-midi. Christophe nous présente une conférence sur le monde insoupçonné et malheureusement si méconnu du plancton et des petits animaux sous-marins qui éveille notre curiosité et augmente nos connaissances sur cet étrange et si riche milieu qui nous entoure.
Après le goûter, certains lisent ou papotent, d’autres jouent au Hnefatafl, cet ancien jeu de table de stratégie viking. Puis, nous assistons à la présentation de la passerelle où Jonathan le second nous montre et nous explique les machines et appareils du poste de pilotage, cerveau du bateau. Quel monde se cache sous les boutons et les écrans! Paradoxal alors que nous sommes si coupés du monde et des communications. Nous assistons ensuite à la présentation de l’équipage sous la houlette de Kai Hansen, notre capitaine et son équipe dont nous découvrons certains visages (affairés au travail dans les coursives ou en machines). Nous dînons ensuite et nous régalons de bons plats en poursuivant des discussions animées avant de nous installer confortablement au salon pour un documentaire enrichissant sur les mondes polaires. L’ancre est levée pendant la nuit et nous prenons la direction de l’est vers de nouvelle aventures.
Nous nous réveillons dans le fjord de Murchinson par une température plus fraîche que les jours précédents, 8°c, la mer est un peu agitée avec un vent de sud-est de 20 nœuds. La visibilité est bonne. Le fjord le plus occidental de la Terre du Nord-Est est séparé du Détroit de Hinlopen par un groupe de petites îles. Il pénètre sur 15 km à l’intérieur des terres et fait partie de la Réserve Naturelle du Nord-Est du Svalbard. Le fjord est parsemé de petites îles et de baies abritées, dont celle de Kinvika sur la côte nord du Murchisonfjord, où nous allons débarquer. Comme ailleurs sur la Terre du Nord-Est ce paysage ouvert frappe par son immensité et son vide apparent.
C’est un désert froid avec peu de végétation. Jadis les Pomores ont exploité les produits de la mer et avaient installé au moins une station de trappe dans le Murchisonfjord. Une particularité de ce dernier sont deux croix orthodoxes pratiquement complètes, l’une sur Krossøya et l’autre sur Nordre Russeøya. Après les Pomores, le fjord, comme la Terre du Nord-Est en général, fut peu utilisé comme terrain de chasse.
Notre zodiac nous dépose devant une série de cabanes en bois fort bien conservées. Lors de l’Année Géophysique Internationale de 1957/1958 (IGY), une station finno-suédoise fut construite sur le site
de Kinnvika. Cela pour y observer, dans le cadre d’un programme international de mesures, des phénomènes météorologiques et géophysiques (magnétisme, aurores boréales). Les travaux scientifiques y furent menés avec succès. Cette grande station possédait un sauna et sa propre piste d’atterrissage. Il reste quelques vestiges bien rouillés de cette époque, dont un « wiesel » sorte d’autochenilette de transport de matériel que Paul Emile Victor avait déjà utilisé en Antarctique lors de la construction de la base de Dumont d’Urville. Dans le cadre de l’Année Polaire Internationale (IPY) 2007/2008, l’ancienne station fut réactivée par un groupe de recherche international. L’objectif scientifique porta essentiellement sur les aspects glaciologiques et climatologiques des calottes glaciaires Vestfonna et Austfonna.
Trois personnes du service du Sysselman se trouvent là pour une semaine pour y faire des réparations et un peu de maintenance. Il y a de quoi faire ! On s’en aperçoit en ouvrant quelques portes dans les bâtiments. Il y avait même un sauna. Mais une des cabanes présente quelques défauts de stabilité ; en y regardant de plus près, c’est un ours qui a arraché à moitié deux câbles de soutien. Et ce sont de gros câbles ! Et c’est arrivé il y a quelques semaines seulement … Puis nous nous dirigeons vers un site de fossiles parmi les plus vieux du monde, les stromatolithes. Ce sont en fait des conglomérats de bactéries anaérobies qui ont permis le développement de la couche d’ozone protectrice de notre Terre, en fabricant de l’oxygène. Pour ces cyanobactéries vieilles de plus de 3,5 milliards d’années, l’oxygène était un déchet !
Pendant le déjeuner, nous naviguons au milieu des îles du fjord et prenons la direction du Sorgfjord à quelques heures de là. Le Sorgfjord aussi appelé « La Baie des Soupirs » en rappel à cette fameuse
bataille navale entre des baleiniers Hollandais et trois frégates Françaises. Celles-ci ayant été largement victorieuses en 1693, sur les 40 baleiniers largement moins armés …
Nous débarquons près du site d’Eoluneset où quelques tombes rappellent la dureté de ces endroits glacés. Mais à peine arrivés au sommet du petit pic, nos guides nous font rebrousser chemin … Christophe vient de repérer un ours au loin, qui marche tranquillement dans notre direction !
Sitôt retournés à nos zodiacs, nous allons bien entendu contempler le plantigrade ! C’est une jeune femelle qui nous régale de son spectacle, pendant un très long moment, en marchant paisiblement le long de la grève. Quelle splendide et merveilleuse observation ! Tout le monde est très excité et les appareils photos ne cessent de crépiter. Il faut néanmoins rentrer et on peut facilement imaginer l’ambiance joyeuse du repas ! Le jacuzzi est plein tandis que d’autres ont entamé des parties de cartes ou de scrabble.
Et dans cette ambiance cacophonique, Sophie arrive tout de même à nous informer sur le programme de la journée à suivre, mais quelles surprises nos guides nous réservent-ils encore…
Notre réveil se fait dans la brume avec une visibilité très réduite pour les premières heures de la matinée alors que nous naviguons dans le détroit de Hinlopen. Après le petit déjeuner, nous profitons de cet instant pour suivre avec Sophie un petit cours de norvégien et nous essayer à la langue des vikings. Les Ø, Æ et Å n’ont bientôt plus de secret pour nous.
Pour notre première sortie du matin, nos guides ne nous ont donné que le strict minimum des instructions pour nous vêtir, nous laissant la surprise de la découverte d’un site exceptionnel : les falaises d’Alkefjellet. Laissant le bateau à la bonne distance réglementaire, nous nous approchons en zodiac de ces immenses falaises de dolérite avec les explications de nos guides sur la géologie et la surprenante formation de ce site.
Or l’effet de surprise vient aussi de la faune et il est de taille et garanti : nous sommes entourés d’une nuée de guillemots de Brünnich qui volent par milliers autour de nous, un festival de plumes et de cris s’offrent à nos sens. Nous sommes émerveillés par le foisonnement de vie de cet endroit. Les alcidés élisent en effet cet endroit pour nicher en énormes colonies et élever leurs petits à fleur d’eau sur ces falaises abruptes. Plus de 60 000 couples de guillemots et des milliers de mouettes tridactyles et goélands ont en effet élu ici domicile, le temps d’assurer l’avenir de leur progéniture dans cet endroit fabuleux.
Nous dérivons le long de ce mur imprenable, ébahis par la beauté de cette nature sauvage. Les guillemots vaquent à leur pêche dans un ballet incessant entre mer et falaise, baignés d’une douce lumière filtrée par un brouillard nonchalant qui a daigné se lever un peu depuis notre réveil. De retour à bord, nous déjeunons en continuant la navigation dans le détroit pour notre prochaine étape.
C’est à Wahlbergøya que nous stoppons notre route pour nous approcher d’une langue de terre où nous avons aperçu une colonie de morses. Empêchés de débarquer à cause d’un brouillard à nouveau dense et très changeant, nous faisons quelques allers-retours silencieux depuis les zodiacs en observant les gros pinnipèdes. Leurs sentinelles nagent jusqu’à nous pour jauger le potentiel danger que nous représentons et après quelques rondes autour des zodiacs, repartent rassurés quant à nos intentions. À terre, les animaux débonnaires, affalés les uns contre les autres comme il se doit pour ces hédonistes polaires restent paisibles et roupillent sur la grève. Nous percevons même leurs ronflements! Certains se grattent ou font un brin de toilette entre les rots et grognements sonores de leurs congénères alors que d’autres gagnent la mer le temps d’un casse croûte. Nous somme surpris par le contraste entre leur lourdeur à terre et leur agilité dans l’eau et ne nous lassons pas de les regarder.
Nous assistons avec chance à la mystérieuse formation d’un arc-en-brume, ce phénomène d’optique subjuguant dû à la lumière et à la brume qui nappe d’enchantement ce décor déjà singulier.
Christophe profite de l’eau cristalline et de son abondante vie animale pour nous faire un cours de sciences naturelles sur le plancton abordé l’avant veille avec exemples à l’appui. Il a en effet attrapé (le temps d’observer, nous faire passer et de contempler) d’étonnants petits organismes qui nous captivent et nous nous sentons l’âme de chercheurs en biologie fouillant des yeux les eaux claires. Docteur Christophe nous montre ainsi un ange des mers et sa proie préférée la Limacina Helicina (un gastéropode qui a perdu son pied transformé en voile de nage),une Pleurobrachia aux filaments collants et colorés dont la réflexion de la lumière donne des irisations du plus bel effet et même une petite méduse! Nous écoutons avidement ses explications sur ces sympathiques petits organismes qui représentent plus de la moitié de la vie animale marine ! Peu soucieux de notre présence, sternes, mouettes et guillemots miroirs sont de la partie et picorent allègrement copépodes, crustacés et petits alvins des eaux froides.
Il est temps de rentrer et nous regagnons le bateau pour continuer cette belle journée. Après le goûter, Sophie nous fait une conférence sur le morse et nous ne cessons de nous étonner de cet animal remarquable.
Certains profitent du jacuzzi pour un moment de détente, d’autres immortalisent la vue le temps d’une éclaircie de brume.
Dans l’esprit du grand nord, de la découverte et pour honorer le nom de notre bateau l’Explorer, Christophe choisit de nous emmener découvrir un site nouveau jamais abordé : le glacier de Chydeniusbreen. Naviguant entre icebergs et bourguignons, le navire se fraye un chemin jusqu’au front glaciaire de ce nouvel endroit et nous nous sentons l’âme d’explorateurs en découvrant ce superbe décor dans la lumière du soir.
Pas moins de trois phoques barbus sont observés sur la glace du brash et nous imprimons dans notre mémoire cet endroit inattendu. Nous repartons sous un brouillard à nouveau épais et changeant, ne facilitant pas la tâche des hommes de quart qui doivent veiller aux blocs de glace sournois dans ce monochrome de blanc. La brume choisira la “nuit” pour se lever, sous un soleil de minuit éclatant que seuls quelques joueurs de cartes auront le privilège de contempler alors que nous mettons cap vers l’est.
Glace ! Glace ! C’est Brasvelbreen, une énorme et immense barrière de glace de quelques dizaines de mètres de hauteur qui domine le sud de la Terre du Nord Est sur plus de 160 km. La calotte glaciaire recouvre toute l’île, mais ce rebord est fantastique ! on le dirait tranché net par un couteau géant. Ce matin, le réveil par 8°C, une mer d’huile et une très bonne visibilité, nous promet une journée encore extraordinaire. Soudain, nous voici gratifiés d’un superbe vêlage avec des pans entiers de glace qui tombent dans la mer en un rugissement furieux. C’est pour cette raison qu’il y a de nombreux et très gros icebergs dans les alentours. Nous longeons cette clôture bleutée depuis un bon moment et nous croisons la route de notre deuxième bateau des glaces de Grands Espaces. Nous ferons d’ailleurs une sortie commune avec les autres zodiacs pour admirer de plus près ces géants. D’immenses cascades jaillissent depuis les bédières du glacier. L’une d’entre elles explose depuis le pied du front de glace dans un bruit de tonnerre. C’est encore un vêlage impressionnant !
Çà et là, quelques phoques et beaucoup de morses sont posés sur un glaçon et nous regardent passer avec un peu d’inquiétude. Nous approchons de la pointe de Torellneset, où une colonie de
morses a établi ses quartiers habituels. Mais ils ne sont pas seuls ! Il y a un gros ours en train de manger quelque chose. Difficile de dire quoi. Ni une ni deux, nous ressortons les zodiacs et allons voir de plus près (pas trop quand même) de quoi il s’agit. Nous n’arriverons pas à déterminer la nature de la proie que notre Ursus maritimus est en train de macher. En revanche, quel spectacle formidable (un peu moins pour la proie) à quelques dizaines de mètres de nous.
Voila que monsieur se redresse, se recouche, se remets à manger puis se met à l’eau. Du moins il fait trempette avant d’aller se recoucher à nouveau. Nous le laissons à ses rêves de nourriture et partons voir à nouveau nos amis les morses. Ils sont toujours aussi placides et endormis ceux-ci. Quelques-uns sont dans l’eau, se grattent, émettent des sons que la morale nous interdit de décrire ici, … Bref, une belle vie tranquille
de morse malgré la présence de l’ours à quelques encablures. C’est étonnant, bien qu’un ours ne s’attaque que rarement à ces pinnipèdes. On se promène autours d’icebergs dont les formes et les
couleurs sont toujours changeantes, et notre imagination fait le reste. C’est juste une journée formidable !
Alors que nous sommes quasiment en place non loin de là, en face du glacier de Mary, l’Ocean Nova nous appelle à la radio et nous donne une information pour le moins étonnante. L’ours est en train
de mettre la pagaille dans la colonie de morses et cherche à en attraper un ! Nous faisons demi-tour illico presto ! Et en effet, le plantigrade est assis au milieu de la colonie. La plupart des morses sont dans l’eau. Il tourne autour, s’arrête, recommence son manège, mais visiblement il ne sait pas trop quoi faire pour attraper une de ces grosses bêtes et finit par s’en aller se coucher un peu plus loin.
Il y a quelques jeunes morses dans cette colonie, mais ils sont soit à l’eau soit bien défendus par leurs ainés. C’est bien plus gros qu’un ours, un morse … Quelle séquence mémorable ! Et puis, vient le temps d’un repas également mémorable (mais pas de la même manière évidement). C’est un BBQ sur le pont extérieur que nos marins ont préparé. C’est tout simplement génial !
Et notre soirée continue avec une conférence ad hoc, sur l’ours, présentée par Christophe. Il y a tant à apprendre sur cet animal étonnant, attachant et intelligent !
Ce matin nous longeons la côte du Woodfjord; nous avons prévu de descendre pour une promenade en zodiac sur la lagune proche de Mushamna où le bois flotté borde la fine langue de terre la séparant de la mer. Nous descendons à terre avec mille précautions pour marcher en regardant où nous mettons les pieds, accompagnés des vigoureuses protestations des sternes arctiques qui surveillent leurs nids de près et menacent d’attaquer.
Nous stoppons près des cabanes de trappeurs aux histoires palpitantes et rocambolesques dont certaines sont consignées dans des livres. Ainsi, les récits des saisons de Christiane Ritter qui accompagnera son mari dans ces contrées lointaines, les multiples hivernages d’affilée de Hjalmar Nøis, le roi des trappeurs du Svalbard ou les épiques histoires de chasse de Wanny Wolstad, ce petit bout de femme au grand courage nous sont contées dans le site même où elles eurent lieu.
Quelle vie extrême loin de tout, quel confort réduit et quel amour de la solitude et des grands espaces motivèrent ces hommes et femmes à se perdre là-haut ! Nous sommes admiratifs de leur volonté mais aussi surpris d’un tel choix de vie, si loin de tout et de tous. Là encore, la magie du grand nord et la fièvre polaire frappe. Nous faisons un bout de chemin dans les hauteurs et admirons la vigueur du monde végétal, observant lichens, petit oseille, mousses, silène acaule, saules nains et autres super héros du monde végétal. Les oiseaux ne sont pas en reste et de nouvelles espèces sont observées dont un couple de plongeons catmarins.
Nous rejoignons les zodiacs pour rentrer au bateau où un bon déjeuner nous est servi avant de reprendre la navigation. En route, Sophie nous fait une conférence de présentation sur la littérature polaire et nous recommande des ouvrages de genres divers sur le monde arctique pour poursuivre l’aventure à la maison. Nous retrouvons les titres de certains récits évoqués ce matin ou d’autres aventures polaires au final souvent tragique. Puis nous faisons halte à Hamiltonbukta et mettons les zodiacs à l’eau pour une navigation devant les falaises à oiseaux et les fronts glaciaires de ce site surprenant et beau.
Les guillemots sont au rendez-vous et nous avons même la chance d’observer des macareux et d’apercevoir (bien que très furtifs) de petits bruants des neiges. Nous louvoyons dans le brash entre les îlots érodés par la glace et nous faufilons dans de vrais havres tranquilles entre les pans de roche qui découvrent le bleu intense des glaciers au détour d’un virage. Nous repartons comblés mais froids et retrouvons la chaleur du bateau pour un peu de détente avant le dîner où nous avons la surprise d’avoir au menu un délicieux cabillaud pêché par l’équipage! Après le dîner, un film est projeté alors que nous longeons les côtes du nord ouest du Spitzberg.
Nous ancrons en Baie du Roi proche de la réserve ornithologique de OssianSarFjellet par 78°53 ,2N et 012°29,7 E. Mer belle, visibilité excellente et température de 12°C. Dès potron minet, nos guides nous réveillent avec un beau renard polaire comme petit déjeuner. Bien entendu, sitôt celui-ci avalé (on ne parle pas du goupil bien sûr), nous filons débarquer sur la plage et commençons notre ascension. Des rennes broutent ça et là les herbes tendres ; il faut en effet se remplir la panse et faire des réserves pour passer l’hiver ! Quels paysages magnifiques lorsque nous arrivons sur les promontoires. D’un côté, la Baie du Roi, de l’autre le glacier du même nom, et encore une vue sur la cité de Ny Alesund avec toutes ses installations scientifique, antennes gigantesques, petits immeubles d’habitations et de laboratoires, et même le mat d’accrochage des dirigeables du temps des explorations d’Amundsen.
Mais là où nous sommes, ce sont des renards polaires qui occupent notre attention. Ils sont bicolores, pas plus gros qu’un chat et d’une vivacité formidable. Il y en a même un qui s’allonge à moins d’un mètre d’un renne ! Sont-ils devenus copains ? C’est un comportement curieux que nous
n’avions pas observé auparavant … Il y a aussi trois scientifiques en plein milieu d’une falaise à oiseaux pleine de mouettes tridactyles (c’est évidemment pour cela que nos chers petits amis à poils sont ici ; il y a un garde-manger à ciel ouvert) qui sont en équilibre précaire pour effectuer leurs observations. Nous sommes discrets et je ne crois pas qu’ils nous aient vu. Nous les laissons à leurs études et entamons la descente. Et juste en arrivant sur la plage, encore une belle surprise ! Ce sont deux renardeaux qui nous passent quasiment sous les pieds, qui batifolent, reniflent notre ancre et un gilet de sauvetage que nous avions laissé là. Pas apeurés pour deux sous par notre présence, ils filent à toute allure vers le fond de la baie et continuent de jouer à se chamailler et à cavaler.
Cet après-midi, nous allons en croisière zodiac devant cet immense glacier qu’est celui du Roi. Il est réellement magnifique, et surtout très actif. De nombreux vêlages se produisent sous nos yeux toujours dans des grondements assourdissants. Même si nous sommes à bonne distance, les vagues formés par la chute de ces immenses blocs de glaces, nous atteignent rapidement. C’est un des plus beaux spectacles que de voir de ces murailles bleutées tomber en mer !
Et il y a de la vie. Trois gros phoques barbus, toujours allongés sur un bout de glaçon, nous regardent puis se rendorment dès que nous sommes passés. Ces grosses saucisses à ours sont d’une nature plus que paisible, et se laissent photographier de près. Le vent vient de se lever et il commence à recoller les millions de morceaux de brash provenant des vêlages glaciaires. Il est temps de rentrer si nous ne voulons pas rester bloqués derrière une barrière congelée. Nous le serions aussi …
Le gouter nous attend, et le jacuzzi aussi ! Oui, une vie difficile sur ce bateau … ! Et ce soir, ce sera Sophie qui nous en apprendra encore plus sur les rennes que nous avons vu pendant notre randonnée. Sans oublier les nombreuses espèces d’oiseaux qui nous accompagnent à chaque sortie dans une ambiance toujours joyeuse à bord des zodiacs et du bateau ! Bientôt nous levons l’ancre, pour une autre aventure et d’autres merveilles !
L’Explorer a ancré ce matin dans la baie de Trygghamna où une brume capricieuse se lève enfin et nous permet de mettre les zodiacs à l’eau pour une sortie à terre. Nous sortons pour une jolie promenade à Alkhornet : ce haut piton rocheux abrite des colonies d’oiseaux dont le guano alimente une végétation qui permet à quelques rennes de paître sur ses flancs. Certains s’approchent tout près de nous à notre grande surprise et nous avons tout le loisir d’observer leur beau pelage et leurs bois recouverts de velours.
De gros rochers clairs parsèment ce paysage dont la verdure est étonnante et la flore épanouie. Marchant dans les pas les uns des autres pour épargner fleurs, mousses et lichen, nous nous suivons sur ce joli site surprenant baigné par une douce lumière et accompagnés du jacassement de mouettes, guillemots et fulmars qui planent au dessus de nos têtes. Quelques macareux sont même observés ! Lors de notre retour en zodiac nous faisons la rencontre improbable d’un morse solitaire qui s’éloigne rapidement. Nous prenons notre déjeuner alors que la brume et la bruine s’épaississent mais avons la chance d’observer un superbe arc en ciel !
Après le déjeuner nous découvrons les entrailles du bateau grâce à la visite de la salle des machines en compagnie du chef mécanicien Edwin. Nous sommes impressionnés par la machinerie, l’ordre et aussi la propreté de ce lieu mystérieux où nous découvrons les pompes, moteurs, générateurs, propulseurs d’étraves, réservoirs, tableau de commandes et autres engins et appareils qui font tourner le navire sous la houlette des membres de l’équipage que nous croisons peu et qui travaillent dans cet univers de bruit et de métal.
Puis nous poursuivons la navigation dans les fjords voisins et Christophe repère un ours au loin, marchant sur la grève. Un beau cadeau pour ce dernier jour! Nous nous en approchons autant que nous pouvons à cause des hauts fonds très dangereux qui ne nous permettent en effet pas de nous en approcher en zodiac et nous le contemplons depuis le navire. Nous jetons un dernier regard au seigneur de l’Arctique avant de continuer vers l’Isfjord.
Un petit arrêt est organisé pour une partie de pêche où un loup de mer est attrapé mais remis à l’eau ensuite. Nos guides nous donnent rendez-vous pour un petit récap’ avec les instructions pour le lendemain puis nous disposons d’un peu de temps et contemplons une dernière fois le paysage superbe de cet archipel qui fut notre hôte pour ce splendide voyage.
Vient ensuite le moment du cocktail de départ et nous nous retrouvons dans la bonne ambiance qui nous a accompagné jusqu’alors avant de nous attabler pour un repas philippin spécialement concocté par notre chef Ed qui s’est surpassé et est une fois de plus (comme depuis le début de notre voyage) aux petits soins avec nous. Après le café, une projection de photos souvenirs du voyage est organisée par Christophe et nous nous remémorons les instants forts de cet incroyable périple. La gaité et un certaine nostalgie est au rendez vous pour profiter de notre dernière soirée au Svalbard. Quel voyage mémorable!!
Suivez nos voyages en cours, grâce aux carnets de voyages rédigés par nos guides.
Messages
« Des millions de bulles…. » Yvonne a sans doute beaucoup apprécié ….
Bonne continuation ..nous attendons la suite
Quel plaisir de suivre vos aventures depuis mon van en Espagne! Salutations à mes parents, Martine et Jean-Jacques ❤️
Nous découvrons les premières émotions de ce voyage magnifique et hors du temps.
Nous pensons à vous et à la chance que vous avez de découvrir ces paysages et ces animaux.
Bonne continuation « petit pingouin » et sa compagne
Sabine et Jean-Rene
Un grand coucou des vieux thononais ! portez vous bien les filles et soyez sages
Profitez-bien, on pense bien à vous
😘😘😘
Les planta-durand
salut les amis
quelle chance vous avez d’avoir 12° ici c’est 32° belle balade
Coucou mon petit pingouin 🐧 et Anne-Marie. Nous voyons que vous êtes dans un endroit féerique. Nous pensons que vos yeux brillent de mille feux en voyant ce décor. L ours est splendide. Celui-là Marie-Christine tu ne pourras pas l emmener chez toi. Rapportez nous de belles photos 📷. Bonne continuation et gros bisous
Sabine (ton petit pingouin 🐧) et Jean-Rene