Vincent Lecomte
Écologie Polaire
9 août
24 août 2022
Vincent Lecomte
Écologie Polaire
Xavier Allard
Arctique
Alain Desbrosse
Spitzberg
Christophe Bassous
Arctique et Antarctique
Nathanaël Vetter
Arctique et Antarctique
Christiane Drieux
Spécialiste Groenland et Culture Inuit
Fabrice Jonckheere
Guide polaire
Certaines photos d’illustrations ont été prises lors de précédentes croisières au Spitzberg. Lorsque le voyage sera terminé, nous publierons les photos de la croisière. Le manque de connexion internet nous empêche de recevoir les photos en temps réel.
Pour commencer notre périple vers le Grand Nord, nous nous retrouvons de bonne heure à l’aéroport. L’équipe se présente et accueille notre groupe. Quelques heures plus tard, nous survolons la Norvège, puis apparaissent les premières cimes du Spitzberg, début de l’aventure. qui nous mènera jusqu’au Groenland.
Avant d’embarquer sur notre navire polaire l’Ocean Nova, nos guides Fabrice et Alain nous mènent (en autocar pour l’instant) jusqu’à la vallée de l’Advental. Un avant goût de notre expédition au Spitzberg, avec quelques bernaches nonnettes, des rennes et de vastes plaines humides, mais également la mine numéro 7, la dernière en activité au Svalbard.
La dernière heure a été consacrée à une brève visite de la capitale, Longyearbyen. Nous sommes déjà dans un autre monde. Quelques rues, une petite église, et des rennes broutant paisiblement ci et là
entre les habitations en bois.
17.00. Arrive enfin l’heure d’embarquer sur l’Ocean Nova. L’équipage nous accueille chaleureusement, et nous rencontrons l’ensemble de l’équipe d’expédition autour d’un verre de bienvenue au salon panoramique. Les consignes de sécurité nous préparent à partir demain, en randonnée et en zodiac, à la rencontre des terres boréales. Bienvenue à bord pour 16 jours d’expédition polaire !
C’est parti ! L’Ocean Nova a fait route pendant notre sommeil pour jeter l’ancre à 79° 37’ 962 N 11 ° 31’ 166 Est.
Notre premier petit déjeuner face au magnifique Alkehornet présage des émotions à venir ! Spectacle époustouflant d’un sommet hérissé de pics dénudés dominant des pentes douces verdoyantes.
A 9 heures, tout le monde est équipé pour un premier débarquement en Zodiac. Gilets, anorak, bottes, sont vérifiés : nous partons. Les zodiacs sont amarrés sur une petite plage de galets lovée dans une crique. Un premier groupe « sportif », guidé par Nathanaël, Vincent et Fabrice, prend de la hauteur pour contempler l’embouchure du fjord.
Tandis qu’un groupe plus bucolique préfère musarder dans la prairie à la recherche de petites fleurs aussi graciles qu’éphémères : saxifrages, œil de bouc, cardamines… La prairie est parcourue d’un réseau de dépressions moussues s’entrecoupant pour former de larges figures géométriques : les « ice wedges ». Il y a près de 10 000 ans, la glace recouvrait Alkehornet. En se retirant, elle a laissé place, sous nos pieds, à un manteau souple de pergélisol qui atteint maintenant environ 5 mètres d’épaisseur. Au-dessus de nos têtes, dans les vertigineuses parois de roches carbonatées, nichent des milliers de mouettes tridactyles. Leurs déjections contribuent à former un humus sur lequel la végétation a pu se développer. Cela f ait le bonheur des rennes. L’un d’entre eux, un jeune au pelage sombre, broute à quelques pas de nous, indifférent à notre présence.
Dans les airs, un labbe poursuit une mouette tridactyle effarouchée, dans l’espoir de lui subtiliser, au vol, sa pitance. En contre bas, juste au-dessus de la plage, on distingue dans les herbes deux grands carrés de pierres, témoignant de la présence de camps pomores antérieurs à l’arrivée des baleiniers norvégiens.
En début d’après-midi, le bateau s’est repositionné devant Poolpynten, une presqu’île affleurant le niveau de la mer. Les zodiacs sont à nouveau mis à l’eau et nous permettent d’aller observer un troupeau de morses qui se prélassent sur la plage.
De retour à bord de l’Ocean Nova, notre chef d’expédition Christophe, nous initie aux mystères des miles, des nœuds, des cartes des vents et autres spécialités maritimes… puis le cocktail de bienvenue du commandant nous rassemble tous au salon panoramique. Peu de temps après, des rorquals sont repérés sur notre route.
Nous mettons maintenant cap au large pour quitter le Spitzberg et entamer la traversée vers la côte est du Groenland. Cette première journée s’achève par un dîner doucement bercé par la houle.
Bercés par les mouvements lents du navire, nous nous réveillons dans le détroit de Fram, entre Svalbard et Groenland, sous un ciel uni et une mer à la houle longue.
Cette journée sera la première de notre nouveau périple. Notre objectif : la banquise de la cote Est du Pays vert.
Vers 9h15 Xavier tient la première conférence du matin. Son sujet : le Svalbard. On s’y remémore les aspects historiques, environnementaux, géopolitiques de l’archipel. Cet exposé synthétise tous les aspects de ce lieu chargé d’histoire et à la faune riche.
Une introduction idéale à la conférence qui suit, cette fois exposée par Alain sur les morses. De ceux que nous avons vus hier à Poolpynten Un animal de la famille des phoques et des otaries, reconnaissable entre tous à ses longues défenses. Un mammifère toujours plus présent sur les littoraux du Svalbard.
Après le déjeuner et un temps calme, nous voilà embarqués par Vincent dans le monde des rennes, cet autre animal emblématique de l’Arctique. Un déroulé original et inattendu, articulé autour de quelques questions, permet de mieux comprendre qui est cet ongulé. Présent dans la culture populaire, le renne voisine en effet avec l’homme depuis des milliers d’années, du Magdalénien à aujourd’hui, des chasseurs de Cro Magnon jusqu’aux Sames et Inuit. Un voyage dans l’espace, à travers la géographie des mers et des toundras polaires expose les 35 populations de rennes dans le monde, du Canada, à la Russie en passant par la Finlande, le Groenland, le Svalbard.
Vers 16 heures nous franchissons la longitude zéro, le méridien de Greenwich. Le Groenland est désormais plus proche de l’Océan Nova que ne l’est le Svalbard.
S’ensuit une conférence technique sur la photographie dirigée de main de maître par le médecin du navire, Laurent. ISO, ouverture, diaphragme, vitesse n’ont plus de secret pour les nombreux preneurs d’images du bord.
L’Ocean Nova poursuit sa route vers Kangerlugssuaq. Cette nuit, les premières glaces.
En soirée, l’Ocean Nova navigue dans la banquise fragmentée soulevée par la houle. Les zodiacs rapidement mis à l’eau se dirigent vers les chenaux resserrés. Survolés par des fulmars, nous abordons les plaques de glace et y débarquons. Nous les sentons tourner, dériver, s’entrechoquer doucement. Le ciel s’entrouvre. L’expérience est magique. L’horizon s’éclaircit. Il est 23H30.
Bercés par le mouvement lent de la houle, la nuit fut paisible, emplie de rêves de cette mer gelée dérivant au gré des courants et des vents. Nous nous réveillons les yeux encore remplis des images de la veille où nous avions pu marcher sur la glace de mer.
Aujourd’hui, nous avons une longue journée de navigation. Nous devons relier la terre de Blosseville, navigateur français qui explora cette côte.
La mer est calme et donc propice à la réalisation de conférences.
Xavier débute par une conférence sur la banquise. Il nous parle de sa formation, son évolution au cours de l’année et sa disparition progressive au fil des ans à tel point que la banquise d’été pourrait avoir totalement disparu d’ici une vingtaine d’années. Il nous familiarise avec les termes hummock, frasil, pollinies, banquise pluriannuelle. Le merveilleux livre de Pierre Taverniers complètera vos connaissances sur le sujet.
Christophe, notre chef d’expédition, nous parle ensuite de son explorateur favori : Fridtjof Nansen. L’admiration qu’a Christophe pour ce grand explorateur se ressent dans la passion avec laquelle il nous décrit les grandes étapes de sa vie. Sa traversée de la calotte du Groenland à ski, ses études brillantes, son esprit scientifique, son aventure avec le FRAM, son épopée à ski et à chiens de traineau pour tenter de rallier le Pôle nord, son hivernage en Terre François-Joseph avec Hjalmar Johansen dans des conditions extrêmes, la coïncidence des dates de retour en Norvège entre le FRAM et Nansen. Tout est exposé avec passion.
La conférence est ponctuée de temps à autre par des souffles de baleines qui nous accompagneront une bonne partie de la matinée et de l’après-midi.
Après le repas, l’atelier cartographie organisé à la bibliothèque remporte un vif succès. Alain nous détaillera la géologie du Groenland, Christiane évoque les aspects civilisationnel, Mathilde parlera de la géopolitique, de la relation entre le Danemark et le Groenland, et Vincent nous embarque dans un cours de mathématiques appliqué aux longitudes et latitudes, alors que Nathanaël nous passionne avec les cartes des glaces et des vents. Ces ateliers se prolongent bien au-delà de l’horaire prévu.
Ensuite Nathanaël nous expose les techniques photographiques afin de réussir les meilleurs clichés : nombre d’or, surexposition, sujet, lignes directrices et tant d’autres aspects techniques ou artistiques. Agrémentés de nombreuses photos et illustrations, Nathanaël nous fera comprendre la sensibilité qu’il faut donner à une photo afin de la rendre encore plus belle.
Juste avant le repas, Christophe nous explique notre navigation, notre destination, les contraintes de temps, de bathymétrie, de distance et sa proposition pour atteindre la côte de Blosseville avec un débarquement prévu vers 1h du matin. Tous les passagers répondent présent pour cette sortie très tardive dans notre premier fjord du Groenland.
Après le repas le film Nanook est projeté avec une Introduction de Christiane sur les inuits.
Quelques-uns s’attardent au bar par la suite puis les coursives du bateau se vident progressivement, laissant l’Océan Nova à sa navigation vers le Sud.
Hier soir, après la projection du film Nanook de Flaherty, nous avons contemplé nos premières lueurs flamboyantes d’un coucher de soleil sans fin à ces latitudes où l’astre commence à tangenter l’horizon dans le Nord-Ouest.
Nous avons depuis navigué toute la nuit sur la mer du Groenland sur des eaux parfaitement calmes, seulement agitées par un minuscule clapot, noyées dans les brumes infinies, loin au large du dédale du labyrinthe des grands fjords, Kayser François Joseph et Roi Oscar. Nous nous trouvons ce matin à 150 kilomètres au large du Kap Brown, extrémité nord de la Terre de Liverpool. Notre objectif est d’atteindre en soirée la côte de Blosseville, au Sud de l’entrée du Scoresby Sund. 300 kilomètres nous en séparent encore. La brume qui règne en maître tout autour du bateau se lève momentanément pour laisser apparaître la mer gris sombre sous la chape des stratus gris clairs, espace sans limites où seuls errent quelques fulmars et mouettes tridactyles.
Les instruments de la technologie moderne dont nous disposons à bord nous permettent de savoir que nous sommes au milieu de nulle part par 71° 53’ de latitude nord et 17° 50’ de longitude ouest.
Dès le plantureux petit déjeuner englouti, nous ouvrons la troisième session de « l’Université Charcot » instituée par Christophe Bouchoux, notre chef d’expédition, en mémoire des pratiques de partage des connaissances instituées au cours des longs hivernages dans la nuit australe par le « Prince des Explorateurs ». L’université polaire commencera ce matin par la présentation du Groenland, historique et géopolitique de la seconde plus grande île au monde, conférence concoctée par Christophe Bassous.
Elle se prolongera par un récapitulatif des observations naturalistes effectuées avant-hier dans la banquise et en mer : Mouette ivoire, Mergule nain, Phoque du Groenland, Rorqual commun, Fulmar et Mouette tridactyle par les ornithologues et mammalogues du bord, Vincent, Nathanaël, Alain. Dans l’après-midi, c’est Christiane qui nous présente les différentes phases de colonisation du Groenland par les civilisations paléo-eskimos, jusqu’à l’arrivée des Vikings et d’eskimos de Thulé, ancêtres des Groenlandais contemporains.
Le ciel gris et les brumes se dissipent progressivement pour laisser place à un grand soleil et une mer quasi d’huile au large de la côte de Blosseville, hérissée de pics alpins au pied desquels défilent, en silence, de grands icebergs tabulaires. Vers 19h00, nous sommes à hauteur de l’entrée du colossal Scoresby Sund, le plus grand fjord au monde. Des icebergs géants, tout hérissés, s’en échappent vêlés par le Nordvestfjord et son glacier issu de la calotte polaire.
Ils passent tranquillement le Cap Brewster pour aller dériver lentement en direction de l’Atlantique nord.
Le soleil s’abaisse sur l’horizon pour inonder les ponts et les cabines tribord de l’Ocean Nova. Christophe nous réunit à 20h45 au salon panoramique pour faire un point sur les activités de la soirée qui consisteront en une croisière zodiac dans un fjord de la partie nord de la côte de Blosseville, celle qui ferme le Sud de l’entrée du Scoresby Sund. Le fond du fjord Sulussuutikajik est occupé par un glacier descendu des hauteurs constituées des dépôts titanesques de basalte, sur plusieurs milliers de mètres d’épaisseur, témoins de l’ouverture de l’Atlantique il y a une soixantaine de millions d’années.
Vous l’aurez compris, nous voilà au Groenland, pays des superlatifs, taillé pour les géants !….
Vers 21h30, heure locale (+ 3 heures par rapport à la France et la Suisse), le soleil plonge derrière les pics acérés dans un flamboiement de teintes pourpres. La lumière continue à diminuer pour laisser en ombres chinoises les reliefs de cette côte indentée sculptée par l’action millénaire des glaces. Nous descendons les zodiacs à l’eau pour partir embouquer le fjord dans lequel Ocean Nova viendra nous retrouver à petite vitesse. Les 7 zodiacs filent sur l’onde noire, au pied du « château du diable », fruit de l’empilement des laves vomies à la naissance de l’Atlantique. Nous embouquons le fjord en direction du glacier qui vêle d’infinies quantités de brasch et de glaçons gros comme notre navire amiral.
Un calme olympien règne dans ce monde où seuls quelques tuniques colorées émergent des petites embarcations caoutchoutées. Près de la côte, de massives orgues de basalte résistent à l’action rageuse des grandes tempêtes du Détroit de Fram, un petit groupe de cabanes de chasse inuit est implanté dans une anse. Progressivement, l’astre des nuits crève la dernière ceinture nébuleuse persistant dans l’Est pour nous gratifier d’une resplendissante pleine lune en conjonction avec Jupiter. Les glaces scintillent et crépitent de tous leurs feux tandis que, très progressivement, les lueurs du Nord-Nord-Ouest commencent à remettre le décor en lumières. De retour au bateau, elles se sont transformées en teintes rosées caractéristiques du lever du soleil. Nous rejoignons la chaleur ouatée de nos couettes, il est 2h30 du matin, ou plus exactement 1h30 à la nouvelle heure groenlandaise, soit 5h30 du matin de l’autre côté de l’Atlantique. Nous nous endormons en rêvant à la course infinie des montagnes de glaces qui caracolent dans cette mer du Groenland et au gargantuesque anglo-groenlando-philipinno-oceannovo brunch concocté par notre chef Floro qui nous attend demain matin.
Après une nuit consacrée à une sortie nocturne dans les glaces du Groenland, non loin du fjord de Scoresby (qui est considéré comme le plus grand fjord au monde), le réveil est marqué par les souvenirs de ces heures vécues, dans la nuit du 13 au 14 août, sous la clarté lunaire au milieu des icebergs pyramidaux, du « brash » cristallin et des monts volcaniques.
Au matin, l’Ocean Nova vogue à une vitesse de 10 nœuds par 68° de latitude nord, au-delà du cercle polaire arctique. Sous un grand ciel bleu estival, se déploie, majestueuse, la chaîne montagneuse de la côte de Blosseville, paradis sauvage et dépeuplé d’où émergent de puissants sommets pyramidaux et enneigés, notamment le point culminant Groenland, le Gunnbjorn Fjeld, qui culmine à près de 3700 mètres. Cette partie du Groenland, montagneuse, sauvage, envoutante, rarement visitée, est en effet marquée par la présence d’une immense chaîne de montagnes dont une vie entière ne suffirait pas à explorer les innombrables reliefs ocres, noirs, rouges et chamois qui se découpent à l’horizon.
Un brunch, servi à 11 heures du matin, permet à chacun de récupérer quelques heures de sommeil, ou, au contraire, de flâner sur les ponts extérieurs face au panorama minéral et glaciaire de ce littoral entaillé de multiples fjords et de langues glaciaires qui dévalent de la calotte du Groenland pour se jeter dans des eaux bleu roi que fend la proue du navire.
Le temps est au beau fixe, avec une très légère brise, et une température extérieure frôlant parfois les 14° (!). Les lumières éclatantes du soleil transforment les icebergs en miroirs multifacettes, irréels bijoux plurimillénaires mais pourtant éphémères, car destinés à fondre peu à peu en voguant vers le sud.
Cette journée de navigation est marquée par un programme instructif d’interventions et de conférences données par les différents membres de l’équipe d’expédition : Christiane Drieux donne une conférence sur le peuplement Eskimau de la région et ses traditions séculaires. Vincent intervient sur l’origine du jour continu et la construction géométrique du cercle polaire. Alain revient sur les observations de basaltes du Groenland faites hier dans la nuit et leurs étonnantes formations en orgues polygonaux : cette partie de la côte est du Groenland est un ouvroir géologique, un véritable voyage dans le temps, où se déploient sur plusieurs centaines de mètres d’épaisseur les vestiges d’éruptions volcaniques monumentales datant de plusieurs dizaines de millions d’années.
Nathanaël intervient sur les icebergs tabulaires qui sont régulièrement observés depuis le salon panoramique, immenses plateformes de glace que les puissants courants de la mer du Groenland déportent peu à peu vers le sud. Enfin, Xavier narre l’histoire de Blosseville dont le navire, la Lilloise, fit naufrage dans le secteur, en des temps où la navigation polaire relevait tout autant de l’exploration pure que de l’aventure au bord des gouffres du monde antique.
Vincent et Mathilde, notre directrice de croisière, reproduisent les cartes marines utilisées en passerelle et les affichent au pont 3 pour que chaque passagère et passager puisse examiner de près les outils de travail de l’équipe ainsi que les trajets effectués par l’Ocean Nova, en fonction des lignes de sonde (indiquant la profondeur de l’eau là où elle est connue, c’est-à-dire à peu d’endroits dans le secteur !), des traits de côtes et des distances à parcourir, immenses, dans ce bout du monde grand comme cinq fois la France : l’éternel Groenland. Pour visiter ce vaste pays, la patience est de rigueur : la longueur totale du trait de côte, supérieure à 40 000 km, est tout simplement plus grande que le périmètre de la planète Terre toute entière !
Le soir, alors que la brume tombe subitement, un phénomène météorologique rare est observé, à savoir un « Arc en Brume » : imaginez un arc-en-ciel sans couleur, un halo semi-circulaire de lumière balayant d’un étonnant sourire le ciel soudain refermé sur le paysage. Ce phénomène typique des hautes latitudes fait le bonheur des photographes depuis les ponts extérieurs du navire. L’absence de diffraction (c’est-à-dire l’absence de couleur) visible dans cet arc en brume s’explique par la très fine taille des gouttelettes d’eau qui ne permettent pas de diffraction assez fine pour décaler les différentes longueurs d’onde composant le spectre lumineux (à l’inverse, les gouttes de pluie, présentant des surfaces importantes, permettent cette décomposition du spectre et génèrent des arcs-en-ciel multicolores à des latitudes davantage pluvieuses).
La soirée se termine par un point sur la navigation présenté par notre chef d’expédition, Christophe, tandis qu’une surprise est réservée aux voyageuses voyageurs : un dîner pris en extérieur, au pont 5, sous la forme d’un « barbecue polaire ».
Nous arrivons ce matin, après une nouvelle nuit de navigation particulièrement calme au Sud de la Baie de Kangerdlugssuaq. L’Ocean Nova se fraye un passage au milieu des icebergs jusque vers l’île Sondre Aputiteq, qui sera le point de départ de nos excursions de la journée.
Ce matin nous partons pour une longue sortie à la rencontre des milles visages des icebergs. La météo est exceptionnelle : vent nul, grand ciel bleu et un vif soleil…
Nous partons ainsi en petit groupe, par binôme de deux zodiacs explorer les alentours emplis de glaces. Au détour d’un iceberg énorme de peut-être une centaine de mètres de large nous croisons un groupe de phoques du Groenland. Un peu plus loin, ce sont plusieurs guillemots à miroirs et goélands bourgmestres qui sont observés.
Chaque iceberg, petit ou grand est une véritable œuvre d’art : certains ont des cupules, qui dénotent leur fonte au contact de l’eau, d’autres ont des profils très arrondis, quelques-uns font carrément de véritables clochers de glace avec des pointes qui culminent à plus de 20 ou 30 mètres…
Nous finissons par rentrer vers midi pour le repas, tout sourires, encore ébahis de ces instants étincelants.
Cet après-midi Christophe notre chef d’expédition nous propose une nouvelle sortie, dans la même zone, mais sur un secteur différent. Ce sera l’occasion de passer à travers une petite brèche qui sépare l’île Sondre Aputiteq en deux parties. Le passage n’est pas large, mais suffisamment profond et toute la flotte de zodiac le traverse sans encombre malgré de forts courants qui font bouger les glaces présentes.
Nous nous séparons ensuite à nouveau et partons explorer la côte qui se trouve devant nous. Certains secteurs sont bien pourvus en plaques de banquise et nos guides sont rivés à leurs jumelles à la recherche d’ours… ces derniers resterons hors de portée, mais d’autres animaux seront observés : de nouveaux phoques de Groenland ainsi que plusieurs espèces aviaires (mouette ivoire, goéland bourgmestre, guillemot à miroir et même un grand corbeau !).
Après cette incartade vers l’entrée du Kruuse fjord, complètement barré de glaces sur des kilomètres, nous contournons la pointe Sud de Sondre Aputiteq pour regagner l’Ocean Nova. Sur le chemin encore de magnifiques immenses icebergs, entre cathédrales et arches de glaces…
De retour à bord et après un petit moment, nous avons rendez-vous au salon panoramique pour une conférence de Christophe sur son explorateur polaire favori : Jean-Baptiste Charcot, le « gentleman des mers ». Nous ne le savions pas, mais après plusieurs voyages en Antarctique, Charcot est venu également sur la côte Est du Groenland, et ce à plusieurs reprises.
Après un excellent repas concocté par notre chef Floro et toute son équipe, Alain nous attend de nouveau au salon pour une lecture d’un des racontars polaires de Jorn RIEL. Sa voix grave nous promène, les icebergs tabulaires glissent à nos côtés et la lune se lève à notre babord. Ce soir nous passeront au-delà du cercle polaire ; les nuits vont devenir vraiment noires désormais.
Une navigation très calme nous porte ce matin vers 65°36’N et 37°41’O. La mer est belle, la visibilité excellente et la température est de 5°C. Nous voguons toujours le long de cette côte Est, montagneuse et rude, parsemée de glaciers. D’énormes icebergs entourent le navire. C’est toujours un spectacle extraordinaire que de passer entre ces géants immobiles, même si, de temps à autre un petit bout de glace s’en détache. Quelques baleines à bosses sont aperçues dans le lointain.
Notre matinée est ponctuée par une conférence passionnante de Nathanael, sur les calottes et glaciers. Ceux-là même qui, en vêlant des morceaux gigantesques, nous ont offert la fantastique journée d’hier.
Avant le déjeuner, nous assistons à une réunion d’information sur notre première escale terrestre en terre Groenlandaise, le village de Tassilaq.
Tassilaq est situé au bord d’une baie extrêmement bien protégée, entourée de hautes montagnes.
Cette petite communauté a été découverte en 1882 par Gustav Holm. 442 Eskimos y vivaient.. Son premier nom était Ammassalik, le nom donné au capelan, petit poisson très abondant dans ces eaux, puis re baptisé Tassilaq après l’accès au statut de province autonome du Danemark. Aujourd’hui, il y a environ 2000 habitants pour 500 chiens de traineaux. Ce qui n’est pas énorme pour autant d’habitants.
Assez représentative du Sud est du Groenland avec ses petites maisons colorées typiques, la commune s’étale sur près de 4 hectares. La couleur jaune est plutôt réservée aux bâtiments sanitaires et administratifs, le rouge plutôt pour les commerces (Pillarsiosok), le bleu plutôt pour les habitations, même si de nos jours, d’autres couleurs sont utilisées. C’est assez joli, mais à y regarder de plus près, les maisons ne sont pas toutes en bon état….
La vie s’articule autour du petit port et du temple. Quand la glace le permet, deux navires assurent l’approvisionnement de la ville. Un musée, une librairie salon de thé, un magasin de souvenir sont maintenant des lieux touristiques très intéressants. Il y a même un téléski qui fonctionne dès que la neige revient ! Tasilaq est desservie par un héliport, principalement en direction de Kulusuk petit aéroport de la ville du même nom situé à une une trentaine de kilomètres, et qui accueille tout de même des avions en provenance d’Islande. Il y a bien sûr une mairie, un bureau de poste, et un hôpital, le seul sur la côte.
Difficile de se perdre car Tassilaq ne comporte que deux routes, sans embouteillages ni feux rouges pour une quarantaine de véhicules. La déchèterie à l’extrémité du village n’est évidemment pas une priorité des habitants, du moins pour le moment … C’est la première vision que l’on a du village lorsque l’on entre dans cette immense baie.
Nous débarquons avec nos zodiacs sur un ponton de service situé non loin du port, mais bien plus pratique pour y débarquer. Une première visite du musée, fort bien fait au demeurant, pour certains, tandis que d’autres vont faire quelques modestes emplettes au magasin de souvenirs. On pourra y trouver quelques » tupilaks », une créature mi-homme mi-animale, créée par un sorcier ou chaman, que l’on nomme angakok, dans le but de nuire à un individu.
En chemin vers notre prochaine activité, nous visitons une maison du siècle dernier, au toit en tourbe. Un super isolant pour le froid. A l’intérieur, des peaux de phoques tapissent les murs en bois et c’est Christiane qui nous fournit les informations sur cette maison restaurée.
C’est modeste, mais charmant. En chemin, nous nous arrêtons devant l’église, et entrons la visiter pour constater à quel point les Groenlandais sont attachés à cette religion luthérienne. Puis c’est le nourrissage de chiens de traineaux avec de la viande de phoque, auquel nous assistons. Notre guide local, un jeune Danois, Rasmus, installé depuis une dizaine d’années au Groenland, nous fournit (en anglais) des explications traduites par Vincent, et complétées par notre guide Fabrice, lui aussi ancien musher au Groenland.
Puis Xavier entraine une partie des passagers pour une courte marche vers un superbe point de vue sur la ville. Nous nous retrouvons tous devant l’ancienne église-musée pour un petit spectacle de chants et de danses traditionnels Toute proche, la statue du dernier « angakok » de Tassilaq veille sur nous …
Il est temps de rentrer sur l’Ocean Nova. Le diner pris dans la Baie est suivi d’une projection du film « Les noces de Palo », tourné à Tasilaq dans les années 30. Deux Inuits s’affrontent pour une belle jeune fille …
C’était bon de se dégourdir les jambes ; le vent a quelque peu forci et demain sera un autre jour au Groenland.
Après une nuit bercée par la houle, ce matin les conditions extérieures sont tempétueuses avec des vagues de 4 m et un vent de 35 nœuds. Nous continuons de longer la côte et d’admirer de grands champs d’icebergs. Nous avons un point programme durant lequel Christophe notre chef d’expédition nous annonce que nous allons changer nos plans pour la journée car le fjord de Bernstorff n’est pas protégé de cette tempête.
Durant la matinée nous assistons à une conférence de Christiane Drieux sur la place du chien chez les inuits Groenlandais. Puis Fabrice, notre guide Historien nous parle de son expérience de handler dans le village d’Ummanaq.
Après cela il est temps d’aller déjeuner.
Nous arrivons en début d’après midi dans le canal de Morkesund autour de l’île de Skjoldungen. La houle se calme car le lieu est protégé par de hautes montagnes et le vent diminue au fur et à mesure que nous pénétrons au fond du chenal. Durant la navigation Alain nous commente la géologie et géomorphologie de cette partie du Groenland.
Nos guides nous donnent ensuite des explications depuis les ponts extérieurs sur les glaciers environnants. Nous prenons le temps d’admirer un grand front glaciaire, puis nous continuons pour contourner l’île par le Nord Ouest. L es paysages sont de plus en plus beaux, de haute montagnes tombent à pic dans la mer.
De grandes vallées glaciaires verdoyantes partent du bord de mer pour s’étendre au loin. Plusieurs langues glaciaires dégringolent du sommet des falaises verticales, certaines ornées de puissantes cascades. Nous avons navigué dans l’un des plus beaux fjords de cette partie du Groenland.
En fin de journée, une vente de livres à lieu et nous passons à table vers 19h30
Après le dîner Mathilde et Nathalie nous proposent un quiz sur le Groenland. Les corrections nous permettent d’en apprendre davantage sur ce pays des superlatifs.
Et durant ce temps l’Ocean Nova continue sa route en direction du sud.
« Mesdames et messieurs, chères exploratrices et explorateurs polaires, il est huit heures moins le quart…. ». La voix de notre chef d’expédition Christophe nous réveille par 61°44 de latitude Nord et 42°18 de longitude Ouest, alors que l’Ocean Nova fait route vers le Fjord de Napassossuak.
Le calme des eaux du fjord nous surprend après une nuit houleuse, marquée par de belles vagues issues d’un système dépressionnaire que nous avons traversé durant la nuit, donnant une sensation d’aventure et de voyage. Le soleil est radieux. Les zodiacs filent à vive allure sur une eau cristalline : en route pour une belle matinée d’exploration de cette côte étonnante et variée, où une belle surprise nous attend.
Nous embouquons un canal bordé de pics englacés, émergeant d’un très vieux socle Archéen, véritable page d’histoire géologique nous ramenant quelques 3 milliards d’années en arrière, au temps où les premiers continents se formaient à la surface de la Terre.
Notre équipée se répartit le terrain à la recherche de la faune, et nous explorons chaque baie. Quelques phoques du Groenland sortent leur museau curieux de ci de là. Nous arrivons jusqu’à un cimetière d’icebergs monumentaux, dont certains sont mesurés : leur hauteur émergée dépasse 40 mètres.
Les lumières sont incroyables et soulignent le bleu et la beauté des immensités glacées qui parsèment cette région très rarement visitée par les bateaux de croisière. Nous resterons dans ce détroit, près de 3 heures.
Soudain, un appel radio retentit sur nos frêles embarcations. Xavier, l’un de nos guides, a repéré une ourse et son ourson sur une petite île. C’est une observation exceptionnelle dans le Sud du Groenland, où réside une sous-population méconnue et génétiquement isolée des autres populations d’ours polaires, d’où son caractère exceptionnel.
Nous approchons à vitesse très réduite pour ne pas les effrayer. Les deux plantigrades se dirigent vers un bras de mer. Nous restons à bonne distance pour leur laisser le champ libre. Aux jumelles, le spectacle est émouvant : la maman nage devant l’ourson, montrant son museau et son dos au beau pelage jaune doré émergeant des flots. Nous les observons de loin en train de nager vers de nouvelles aventures, sans chercher à les approcher. Les deux ours sont en transit dans le fjord et ne souhaitent manifestement pas sortir de l’eau.
Après un déjeuner rapide, nous sautons à nouveau dans nos zodiacs pour explorer une autre partie du fjord. Celui ci est un véritable défilé labyrinthique d’où dévalent des cascades de plus de 260 mètres, à travers des toundras bien formées et ponctuées du rose vif de l’épilobe (fleur nationale du Groenland) ainsi que du vert argenté de curieux saules arbustifs. Les affleurements géologiques sont traversés de dykes (des intrusions de laves noires à travers le socle, vestige de mouvements tectoniques anciens).
De petites lagunes en baies secrètes, nous naviguons jusqu’au fond du fjord, à travers un brash dense. L’avifaune se montre, entre grands corbeaux , fulmars, goélands bourgmestres et nombreux puffins.
Après plus 7 heures passées sur l’eau, cette journée revigorante en extérieur se conclut par un spectacle à couper le souffle. Tandis qu’une lune rouge se lève à bâbord, une timide volute lumineuse se dessine à tribord. Une annonce nous rappelle aussitôt sur le pont, à temps pour observer d’immenses draperies roses, rouges et vertes danser dans le ciel étoilé. Les aurores boréales sont le point d’orgue d’une magnifique journée.
A 8h30, au matin montant, l’Ocean Nova pénètre dans le Passage du Prince Christian. Nous nous réveillons encore émus par les magnifiques aurores observées cette nuit.
Dominée sur toute sa longueur par des montagnes culminant à 2200m, tombant à pic dans des eaux d’un bleu profond, parsemées de cascades abondantes, cette voie d’eau de 100 kms au Sud du Groenland sépare l’île continent de l’archipel du Cap Farewell.
Le navire arpente ce dédale de fjords, parsemé de ramifications nombreuses et de glaciers producteurs d’icebergs. Les hôtes de l’Ocean Nova depuis les ponts extérieurs se laissent aller à cette navigation contemplative. Un moment festif rassemble l’ensemble des passagers autour d’un verre au pont 5, sous le soleil.
En début d’après-midi le navire prend position devant le village d’Aappilatoq , la montagne rouge. Nichée dans une hanse qui la protège des intempéries et des glaces dérivantes, nichée au pied de pics vertigineux, la communauté étale ses maisons colorées le long d’un rivage chatoyant. Contraste saisissant entre ce havre de paix et le cortège éblouissant des icebergs dans les eaux émeraudes.
Une partie des passagers se dirige en compagnie de Xavier et de Nathanael vers « les dos de baleines », des formations géologiques polies par les glaces. D’autres vers la ravissante petite église. D’autres encore entament une partie de foot avec les enfants du village.
Pour le plus grand plaisir des visiteurs et des habitants du lieu, un des passagers de l’océan Nova se met au piano et interprète des œuvres de Debussy, Ravel, Rachmaninov et Beethoven. Grand moment d’émotion et de communion avec nos hôtes groenlandais. Deux passagères entonnent ensuite l’Alleluiah de Léonard Cohen.
Nous réembarquons en fin de journée pour reprendre notre périple.
Avant le dîner, Fabrice nous fait partager l’aventure des Vikings au Groenland. Passionnant !
Christophe nous explique la carte des vents et Nathalie et Vincent exposent le programme à venir du lendemain à Qaqortoq.
Samedi 20 août
Qaqortoq / Hvalse
Nous arrivons, à l’aube, devant l’étonnante ville de Qaqortoq, ville incontournable du Sud du Groenland, dont les maisons multicolores parsèment une baie située à 60°43 de latitude nord et 46°04 de longitude ouest.
Avec ses 3000 habitants, Qaqortoq est un joli bourg dont les activités principales sont la tannerie, la pêche et l’élevage des moutons. A ces latitudes clémentes, où les prairies verdoyantes se développent abondement, le Groenland prend des airs d’Ecosse – une sensation vite dissipée par la présence de quelques icebergs à l’horizon !… ainsi que par l’observation du bâtiment longiligne d e la tannerie de peaux de phoques : nous sommes bien en terre arctique.
La météo, capricieuse en ce matin du 20 août, invite à la prudence : des rafales à 40 nœuds et une pluie intense, parfois presque horizontale, transforment le paysage en terre inquiétante, à peine visible à travers les brumes et les tourments du ciel.
Le Groenland, comme toutes les terres polaires, c’est aussi cela : une région où les éléments décident, où le paysage change de masque d’heure en heure, tantôt arborant le sourire bleu des belles journées d’été, tantôt se chargeant de nuages noirs et tourbillonnants qui jetèrent bien des esquifs sur des récifs au cours des siècles d’exploration polaire.
Toutefois, une excursion se prépare.
L’esprit d’ « expédition » nous anime jusqu’au bout, et, motivés, sous une pluie qui redouble d’intensité, nous débarquons sur le quai, dans la bonne humeur, sous nos anoraks et en pantalons étanches, à la découverte de la vieille ville.
Il faut se figurer les circonstances : par un temps si hostile (disons… revigorant !), la ville est déserte, ville fantôme où les routes se changent en ruisseaux. Toutefois, grâce à nos contacts, le conservateur nous ouvre le musée de la ville, pour une visite privée, dans une vieille maison en bois où d’antiques kayaks, dans un état de conservation exceptionnel, côtoient des outils inuits, d’émouvantes bottines d’enfants en peau, ainsi que certains des meilleurs tupilaks du pays (sculptés par Aron et Cecilie Kleist)
Bien que la région fut peuplée par les vikings puis les Inuit, la ville dans sa forme actuelle remonte à 1775, lorsque fut fondée Julianeshaab (nom originel de Qaqortoq), devenue un important centre commercial, où les Esquimaux vendaient la peau et la graisse du fruit de leur chasse . Le commerce des peaux de baleine, de la graisse et de la viande était la principale source de revenus de la colonie. L’élevage de moutons a commencé en 1900, et la région est dans le centre nuttiden de l’élevage de moutons du Groenland.
La visite se poursuit par l’observation d’une maison traditionnelle en pierres et tourbe, d’une fontaine construite par Pavia Høegh en 1932, réputée être la seule du pays. Autour d’elle se trouvent les bâtiments historiques et classés de la ville, dont le plus ancien date de 1797. Nous tombons en arrêt également devant d’étonnantes sculptures en plein air, des visages gravés dans le granite des falaises environnantes. La petite-fille de Pavia Høegh, Aka Høegh, a lancé le projet artistique « Sten og Menneske » (« pierre et hommes ») au milieu des années 1990, convoquant le talent de 18 artistes scandinaves, islandais et danois pour faire émerger des reliefs muraux souriants dans les roches séculaires.
Peu avant déjeuner, le conservateur nous ouvre, exceptionnellement, les portes de l’antique église, en bois, construite en 1832 dans l’ancien quartier colonial, pour nous en présenter les tableaux et les autres trésors datant de l’arrivée du protestantisme luthérien au Groenland. A Qaqortok, 96 % des habitants sont membres de cette église, signe d’une ferveur enracinée dans la population, bien que les influences animismes soient encore présentes – notamment au travers des visages gravés dans le paysage.
Après Qaqortoq, nous offrons à nos passagers une escale « bonus », et pas des moindres. Après une heure de navigation, en effet, nous atteignons un site historique d’une valeur inestimable (l’un des quatre sites classés au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco) : les ruines du site de Hvalsey, site le mieux préservé de la colonisation viking au Groenland.
Notre navigation dans la brume, au fond de ce fjord du bout du monde, a quelque chose de mystique : dans un brouillard à couper au couteau, des ruines noires jouent à cache-cache, en une danse macabre à flanc de colline. Et soudain, comme par magie, alors que nous mettons les zodiacs à l’eau pour débarquer « en terre viking », le plafond s’éclaircit, la pluie cesse, et le rideau se lève sur ce sanctuaire.
Cette visite avait d’autant plus d’intérêt que Fabrice, notre guide, nous a proposé ce matin une passionnante conférence sur les Viking et l’implantation Norse au Groenland, puis a assuré la visite du site.
Ces lieux, tout simplement exceptionnels, constituent un joyau de l’archéologie groenlandaise et même mondiale. Il s’agit d’un lieu parmi les mieux conservés au monde, avec son église aux larges murs noirs et ocres, son étable, ses habitations, sa halle, son écurie, son mur d’enceinte et ses entrepôts.
Construite en pierre de taille, l’église a survécu aux intempéries du temps tandis que d’autres églises islandaises de l’époque, faites en bois et en herbes, ont disparu.
Les pierres ont été posées et montées avec attention. Certaines pèsent entre 4 et 5 tonnes, si ce n’est plus ! L’église pourrait avoir été blanche à sa construction en raison de l’utilisation de mortier à base de coquilles écrasées. Qaqortoq, signifiant « le lieu blanc », pourrait avoir obtenu son nom par association à cette église.
Selon d’anciens récits, Thorkel Farserk, un cousin d’Erik le Rouge, aurait pris possession de ces lieux. Thorkel, était un des hommes qui avaient suivi Erik le Rouge pour explorer cette nouvelle terre en l’an 985, à l’époque où aucun occidental n’avait, à priori, connaissance de l’existence de ce qu’ils nommèrent le Groenland.
La région de Qaqortoq fut jadis l’épicentre de la colonisation viking dans le sud du Groenland. Plus de 300 sites et installations viking ont été retrouvées dans les environs.
Cette balade est l’occasion d’observer une prairie groenlandaise qui ne tarde pas à révéler ses trésors : nous y observons des bouleaux nains, des saules polaires, des carex, des camarines, une espèce boréale de serpolet (très odoriférante) et même quelques orchidées, telle la rare Platanthère hyperboréale.
La soirée, à bord, convoque l’expertise de nos guides, Alain abordant la géologie si particulière du Groenland, Terre très ancienne, Vincent revenant sur les particularités phylogénétiques et comportementales des ours du Sud-Est du Groenland observés il y a quelques jours, Christiane nous présentant un document tout à fait exceptionnel, émouvant montage photographique qu’elle a réalisé en terre inuite et montrant la vie d’une communauté isolée.
Après cette journée riche en émotions, toutefois, le sommeil ne vient pas : vers 23h, comme par enchantement, le ciel voilé laisse place à une nuit étoilée, miroir bleu que viennent zébrer, à nouveau, de belles aurores boréales. Une « veille aurorale » est organisée, afin de commenter depuis les ponts extérieurs ces ballets féériques du vent solaire et de la ionosphère.
C’est la voix de notre chef d’expédition qui nous réveille ce matin ; nous faisons route vers Nuuk, la capitale du Groenland et la mer est relativement calme. La nuit dernière à été de nouveau riche en observations d’aurores boréales… quelle chance !
Christophe nous annonce le programme fourni de conférences et interventions qui vont ponctuer cette nouvelle journée polaire…
Ainsi au cours de la matinée Christophe BASSOUS nous parlera du plancton lors d’une conférence passionnante et richement illustrée de petits films nous montrant ces êtres vivants en action. Nous comprenons encore un peu mieux le rôle crucial de ce niveau de la chaîne alimentaire.
C’est ensuite au tour de Xavier de revenir sur les magnifiques aurores boréales que nous avons observées ces derniers jours. Nous comprenons désormais à quel point nous avons été chanceux, notamment lors de la première soirée d’observations où ces étranges phénomènes lumineux ont été particulièrement intenses !
Xavier nous explique également que le prochain cycle solaire s’annonce d’une intensité particulièrement forte et que ces prochaines années (notamment 2023) vont être particulièrement favorables à l’observations des ces phénomènes si particuliers.
Après le repas de midi, nous nous retrouvons pour une présentation de l’exploration de l’Arctique par un des passagers qui vient de finir l’écriture d’un livre sur le sujet. Jean-Pierre nous brosse ainsi le portrait de différents types d’hommes et de femmes qui se sont illustrés dans la découverte de ces régions inhospitalières mais qui nous attirent tant…
Un peu plus tard, c’est à la bibliothèque qu’est organisé un atelier sur les jeux de ficelles inuit par Christiane et Mathilde et les nœuds marins par Xavier, Christophe et Nathanaël. C’est pour une partie du groupe l’occasion de découvrir ce passe-temps typiquement groenlandais que les enfants dès leur plus jeune âge pratiquent assidûment. Et pour les autres l’occasion de réviser nœud de chaise, nœud de cabestant, nœud de pêcheur ou double-pêcheur et de pratiquer avec les « bouts » que Vincent nous a dénichés à bord.
Mais à peine le premier nœud appris, un message via les hauts-parleurs nous informe que plusieurs baleines ont été trouvées à proximité de l’Ocean Nova. Nous hésitons à laisser cet atelier, mais les paroles deviennent pressantes et nous comprenons que la priorité se passe dehors !
En quelques minutes voilà tout le bateau sur les ponts extérieurs… Tout le monde est équipé pour le froid et certains ont de quoi tirer un beau portrait de ces gracieux cétacés.
Au final nous allons passer plus d’une demi-heure au contact de plusieurs petits groupes de baleines à bosses qui se nourrissent en surface. De nombreux oiseaux marins font parti du festin et grappillent les restes laissés par la petite vingtaine d’animaux présents tout autour de nous. Nous ne savons plus très bien où donner de la tête tellement les soufflent fusent dans toutes les directions. Le point d’orgue de cette observation arrive lorsqu’une des baleine vient faire surface tout contre le navire (tellement près que certains ont eu peur !!!) et fais surface plusieurs fois juste devant nous.
Peu avant le repas Christophe et Vincent nous expliquent comment va se dérouler la journée de demain à Nuuk devant l’assistance impatiente de découvrir la plus grande « ville » du Groenland !
Ce soir notre équipe d’expédition nous propose – pour compléter la présentation de Jean-Pierre sur les expéditions de la Royal Navy – un documentaire d’ARTE sur l’Expédition Franklin, un monument de l’histoire polaire impliquant à plusieurs reprise des récits Inuits.
7 heures, l’Ocean Nova est à quai dans le grand port moderne de Nuuk. Ce matin l’équipe du restaurant a ouvert le buffet du petit déjeuner à la première heure pour nous permettre de profiter pleinement de notre escale dans la capitale du Groenland.
Des navettes nous emmènent vers le vieux port, cœur historique de la ville. De là, un groupe de marcheurs guidés par Xavier, nous quitte pour une ascension vers un point de vue sur la ville. En contre bas d’une falaise, une plage de sable et de galets ourle la jolie baie de l’ancien port colonial. Sur un rocher, face à la mer, une statue de Sedna veille sur ses protégés : les mammifères marins.
Des maisons de bois et de pierres se côtoient frileusement entourées de petits enclos fleuris de plantes arctiques : angéliques, pavot Groenlandais (papaver croceum), trolles, saules nains… Tous ces bâtiments ont une histoire : une maison ocre abrita Hans Egede, missionnaire dano-norvégien, fondateur de la ville en 1728, le séculaire club de kayak entouré d’embarcations fusiformes… Entre des poteaux fichés sur l’esplanade devant le club, sont tendues des cordes. Traditionnellement, pendant l’hiver, période de moindre activité physique, les chasseurs en kayak, pour entretenir leur agilité et leur musculature, effectuaient des acrobaties sur de semblables lanières en peau de phoque tendues dans leurs maisons de tourbe.
Des presses à graisse et de gigantesques chaudrons témoignent du passé baleinier de l’implantation. Au bout d’un chemin pavé, la petite église Saint Sauveur veille sur le vieux port tandis que, du haut d’une butte herbeuse, une statue de Hans Egede semble haranguer ses fidèles. Après la présentation des lieux par l’équipe des guides, nous nous dirigeons vers le remarquable musée national. Puis chacun a tout loisir de découvrir la ville moderne, ses commerces, son centre culturel ondulant comme une aurore boréale, les librairies, cafés… Une ville vivante et accueillante.
Sous un soleil timide nous reprenons la mer. En début d’après-midi, dans une passionnante conférence richement illustrée, Fabrice nous fait découvrir les routes maritimes arctiques en soulignant les enjeux politiques et économiques de la région.
Après le tea time accompagné de petits gâteaux, c’est l’heure des « Regards croisés ». Nathanaël revient sur la dynamique des fjords, leur localisation, leur formation, leurs caractéristiques. Un monde de records : 350 km de long pour le Scoresbysund, 1300 mètres de profondeur pour le Songnefjord (Norvège) ! Puits de carbone ils stockent le carbone 10 à 100 fois plus longtemps que nos forêts ! Puis c’est au tour de Christophe de nous enchanter avec le concert sous-marin des glaces, des mammifères, des poissons et même des crevettes ! Fascinant !
Les sélections pour le concours photo nous tiennent en haleine. Fantastique revue des talents artistiques des passagers, suspens jusqu’à la finale demain…
Journée dense, la soirée est avancée, la mer et les vagues nous accompagnent jusqu’à nos cabines dans un doux tango chaloupé.
Un réveil par 65°58’N et 52°35’O et une température de 10°C. Bonne visibilité, mer belle et un peu de pluie intermittente. Nous sommes dans Kangerlussuatsiak (Evighedsfjord ou fjord de l’Eternité). L’entrée depuis la haute mer est très déchiquetée, puis les hautes montagnes granitiques de plus de 1200m plantent le décor. C’est un grand fjord de 75km de long, encaissé et majestueux dont la profondeur avoisine les 400 mètres. Au fond, un beau front de glace nous appelle avec des craquements et autres coups de fusils. Ce sera donc une sortie en zodiac pour bon nombre de courageux. Mais avant d’arriver au Taateraat, nous longeons une immense falaise où niche une grosse colonie de mouettes tridactyles et autres goélands. Puis le glacier ne tarde pas à vêler plusieurs fois de suite, certes modestement, mais c’est toujours très impressionnant. Puis une tête de phoque apparait, nous observe et replonge prestement. Il est temps de rentrer sur l’Ocean Nova pour une présentation d’Alain sur les baleines à bosse, ces magnifiques cétacés que nous avons pu observer pendant la journée d’hier.
Le temps d’un déjeuner, c’est au tour de Vincent de présenter un émouvant rappel de notre visite à l’extraordinaire musée de Nuuk et ses momies kilakitsoq. Puis Christiane évoquera l’imaginaire « Inuit ». C’est donc d’anthropologie dont il s’agit ici. On part de ce « sauvage » jusqu’à la reconstruction de l’identité « Inuit ». Un chasseur habillé de peaux de bêtes circulant en kayak avait suscité bien des idées lorsque les baleiniers les ont découverts. Puis, de « sauvage » il est devenu « semblable », puis « primitif ». C’est toute cette évolution que nous raconte l’exposé de Christiane.
Notre après-midi se poursuit avec le concours photographique animé par Laurent, Christophe et Nathanael. Plus de 120 photographies nous ont été proposées par nos passagers. Il a fallu de longues discussions au jury pour déterminer un prix dans les différentes catégories que nous avions retenu ; paysage, animaux, humains, expédition et insolite. La meilleure photo a remporté, quant à elle, le grand prix Grands Espaces. Ces œuvres seront bien sur « posté » sur le lien internet de notre croisière avec l’accord des participants.
Christophe nous donne ensuite les consignes pour le débarquement du lendemain sur le quai de Kangerlussuaq; nous ferons encore un peu de zodiac … Puis, c’est Alain et sa gouaille si particulière qui nous récapitule en images tout le déroulé de la croisière. Nous ne nous arrêtons pas puisque le commandant nous offre un apéritif et un discours de remerciements.
Pendant ce temps, nous remontons le fjord de Kangerlussuaq (Sondre tromfjord) d’une longueur de 85 miles. Un beau spectacle d’un fjord où débouchent de nombreux anciens glaciers qui ont déversé des tonnes et des tonnes de roches et cailloux. Nous naviguons d’ailleurs plutôt dans la partie gauche car tous ces déversements morainiques ont fait remonter les fonds de façon considérables. Depuis l’entrée, où nous avions environ une centaine de mètres de fond, nous ne sommes plus qu’à une trentaine de mètres en arrivant près de Kangerlussuaq et son aéroport.
Notre beau voyage prend fin, et nous aurons parcouru une distance de 2600 miles marins, soit plus de 4700 km de navigation entre notre point de départ, Longyeabyen et notre point d’arrivée, Kangerlussuaq.
Suivez nos voyages en cours, grâce aux carnets de voyages rédigés par nos guides.
Messages
Un chaleureux coucou à Fabrice et Christophe Bassous en compagnie desquels nous avons fait une tres belle croisière partie de Reykjavik le 4 juin et que nous envions beaucoup. Un grand coucou également à Gilda.
Bon voyage.
Avons découvert les informations sur la journée d hier…
Nous vous souhaitons une Bonne promenade aujourd’hui.
Ici chaud, mais tomates rafraîchissante…
Bisous
Dominique et Claude
Gros bisous à Hugo et Pierre-Yves, profitez bien de ce bon voyage !
Bon voyage chers parents,
Profitez en bien ! Hâte de découvrir les belles photos de votre périple et que vous nous rzcontiez vos multiples découvertes !
Bises 😘
Super de pouvoir voir les péripéties de votre périple! On suit tout ce qui se passe
Ici tout va bien malgré la chaleur, on s’occupe bien de mamie Suzette.
Gros bisous à Francis on pense à lui
Les arbeaumes
Gros bisous à Nathalie.
Profite bien de cet air vivifiant.
Marie-Louise et Jean-Marie
Gros bisous à Hugo et son papi Pierre-Yves !!
Profitez un max de cette superbe aventure et faites vous plein de souvenirs. Je vous embrasse fort. Sophie
Bonjour à tout l’équipage de cette belle croisière
Message depuis la Suisse et salutations particulière à Mitch
Bon voyage glacé 🌁😉👍
Philippe Petermann
Tout OK à Nemours.
Après des journées bien chaudes. enfin de la fraîcheur et 7 mm pluie.
Profitez au maxi de votre séjour.
Bises
Liliane et Maurice
Pour Pierre Yves et Hugo
Vos photos sont magnifiques, elles nous font rêver au loin !
On vous embrasse fort
Merci pour ces beaux récits et la qualité de narration et d’écriture que j’apprécie particulièrement! On a le sentiment de voyager avec vous!
Quel belle aventure ! Quelle richesse de découvertes naturelles et culturelles!
Bonne suite!
Magnifique.
Nous nous réjouissons de te revoir bientôt et de partager avec toi ces aventures.
Bisous.