
Sylvain Mahuzier
Oiseaux et Mammifères
11 octobre
19 octobre 2014
À bord de l'Amazon Dream, octobre 2014
Sylvain Mahuzier
Oiseaux et Mammifères
Journal de bord
Notre arrivée nocturne à Santarem nous a juste permis de découvrir l’Amazon Dream, qui dès le premier instant nous a séduits. Pour que la fin de nuit soit calme et réparatrice, le Capitaine, Angelo, a eu la délicatesse d’amarrer le bateau dans l’Igarape Açu, un canal aux rives arborées à quelques encablures de Santarem. Les premiers sons qui nous parviennent au petit matin sont entièrement naturels : des volées de petits perroquets verts jacassent à qui mieux mieux en quittant leurs dortoirs…
Tout de suite, nous sommes dans l’ambiance, d’autant que Grandes Aigrettes, Aigrettes bleues, Vanneaux du Chili et autres Jacanas noirs s’activent dans la végétation riveraine. Les sternes pêchent, les Urubus noirs planent, et nous apercevons même furtivement quelques Inies de Geoffroy, ces dauphins fluviatiles de couleur rosée qu’on appelle ici « Botos ». Mais le côté expédition de notre voyage attendra encore un peu, car nous profitons de notre passage à Santarem pour aller tâter le pouls du quotidien de cette ville animée et accueillante, la seconde de l’état de Para après Belem.
Cap sur le marché aux Poissons, où nous découvrons avec l’aide de notre guide Wilson les piranhas, le gigantesque Pirarucu ou encore le Tucunare, avec ses ocelles situées sur la nageoire caudale afin de tromper les prédateurs. L’ambiance est bon enfant, chaleureuse et on nous renseigne bien volontiers. Un peu plus à l’intérieur de la ville, ce sont les fruits et légumes qui nous intéressent, et parmi moult parfums exotiques, nous goûtons aux petits fruits rouges de l’acerola, si riches en vitamine C. Enfin, d’autres curiosités nous attirent : les étalages de remèdes traditionnels extraits des plantes médicinales de la forêt, dont Wilson nous parle avec passion. Après le déjeuner à bord, pendant lequel le souriant équipage de l’Amazon Dream nous est présenté, notre première navigation nous amène au point de rencontre entre les eaux claires du fleuve Tapajos, qui baignent le port de Santarem, et les eaux limoneuses de l’Amazone. Les eaux de température, d’acidité et de densités différentes, tardent à se mêler, pendant des kilomètres les deux couleurs sont encore bien distinctes.
Puis, nous quittons la grande artère de l’Amazone pour une navigation plus confidentielle dans le canal d’Ituqui. Les maisons sur pilotis des cabocles, métis d’Indiens et de Portugais, nous offrent une première approche du mode de vie amazonien… Finalement, c’est l’arrivée dans un secteur de « varzea », ces zones inondées en période de hautes eaux, où le bateau jette l’ancre pour une nuit calme…
Aujourd’hui, nous démarrons avant le lever du soleil, pour une croisière d’observation des oiseaux. Déjà, les Dendrocygnes à ventre noir, canards qui se perchent volontiers sur les piquets et les buissons, ainsi que les Martins-Pêcheurs à collier sont actifs… Nous sommes témoins du vol grâcieux du Tyran des savanes, un passereau au double brin de queue démesurément long.
Le soleil se lève et la lumière change, les couleurs sont chaudes et intenses. Nous pénétrons dans un lac et percevons dans un buisson de bruyantes manifestations : c’est un groupe d’Hoatzins huppés, ces oiseaux mythiques au plumage fauve et aux yeux rouges cerclés de bleu, dont les jeunes possèdent deux griffes au poignet de chaque aile afin de remonter dans les arbres après s’être laissés tomber à l’eau en cas de danger. Sur le retour, magnifique observation d’un grand pic noir orné de lignes blanches et d’une calotte rouge vif, le Pic ouentou, qui nous fait une véritable démonstration en forant des trous à grands coups de bec, à la recherche de larves.
Après un copieux petit-déjeuner, surprise : partie de pêche aux piranhas ! Trois espèces différentes sont attrapées… et aussitôt relâchées. Cap maintenant sur le village de Pacoval, dont la plupart des 1300 habitants sont des Quilombos, descendants du métissage d’esclaves noirs et de Portugais. Ils y vivent de la pêche, de la réparation des bateaux montés à terre en hautes eaux et d’une agriculture vivrière qui leur fournit l’essentiel de leur alimentation. Nous sommes à 140 km de Santarem et l’école reçoit tous les enfants des environs… Mais aujourd’hui, c’est dimanche et le terrain de foot est successivement occupé par les garçons puis par les filles, dont les matches sont chaleureusement soutenus. Un sergent nous invite aimablement à visiter le poste de police, puis nous sommes reçus par une famille qui tient un petit bar bien sympathique, où une bière bien fraîche nous remet les idées en place. En repartant, petite halte auprès des célèbres et immenses nénuphars Victoria regia, puis retour à bord pour un excellent déjeuner.
L’après-midi de navigation sur l’Amazone nous offre encore de belles observations, et juste avant le dîner, nous sortons une dernière fois les annexes pour nous régaler du spectacle des Botos, les dauphins roses de l’Amazone qui sont très actifs, en pleine séance de pêche. De surcroît, le couchant est somptueux, et le fleuve se teinte de pourpre et de fuchsia…
Pour une meilleure expérience, nous vous conseillons de tourner votre tablette en paysage