Sophie Tuchscherer
Guide
14 mai
25 mai 2022
Sophie Tuchscherer
Guide
Nous quittons la France et la Suisse dans la fraîcheur de l’aube pour rejoindre avec notre voyage une fraîcheur plus grande encore: l’Islande. À l’aéroport, nous faisons la connaissance de notre guide Sophie et embarquons pour 3 heures au dessus de l’océan. Notre vol se passe paisiblement et à notre arrivée nous avons semble-t-il voyagé un peu dans l’espace-temps: le décalage horaire et la longueur de la saison nous font grâce de nombreuses heures de jour. Quel dépaysement!
Le décor n’est comparable avec rien de connu et les repères sont bouleversés: la route traverse des champs de lave à n’en plus finir et l’horizon du ciel se brouille avec la mer. Nous suivons des yeux ce paysage lunaire et des oreilles quelques commentaires de notre guide sur notre pays d’adoption pour les prochains jours.
Halldór, notre chauffeur nous conduit à travers ces étendues noires, longeant en passant une ville d’elfes (!!), panneau municipal à l’appui! Sophie nous parle de la tolérance islandaise aux croyances, légendes et surnaturel. On ne pouvait donc rêver meilleur cadre que notre hôtel au milieu d’un désert de pierres et au pied de la cascade des trolls. Mythes et folklore sont au rendez-vous et même mis en valeur avec le sentier du jardin du troll: un parcours au pied des chutes et vers la plaine infinie qui raconte des histoires locales. Le décor est posé, la vue sur la cascade superbe et le dîner délicieux. Ça commence donc très bien!
Ce n’est que parce que la fatigue du voyage a raison de nous que nous allons nous coucher dans nos chambres-cabanes du bout du monde, impatients d’être déjà demain.
Le départ pour la péninsule de Snaefellsnes se fait sans encombre et sous un ciel pour le moment stable et clément. En chemin, notre guide Sophie nous parle des marins et infortunés qui périrent sur ces côtes dangereuses, tel le commandant Charcot, ce grand homme polaire resté dans les mémoires. Les légendes et récits de cette région abondent et certains nous font froid dans le dos…les islandais cultivent l’art du mystérieux et on comprend bien pourquoi ils sont si enclins à croire au surnaturel quand on voit les décors dans lequel ils grandissent : champs de lave à perte de vue, plages de sable noir et brouillards recouvrant le sommet de volcans, voilà de quoi croire au Huldufólk, le peuple caché… Le site est d’ailleurs réputé pour ses énergies mystérieuses et bienfaisantes dont Jules Vernes en fait d’ailleurs dans son roman l’entrée vers le centre de la terre…
Nous nous arrêtons près d’une plage cachée où nous avons la chance d’observer une douzaine de phoques gris! Le groupe se prélasse et nous les observons à la jumelle. Quel plaisir! Nous repartons ensuite pour la petite église noire de Buđir au charme discret et son minuscule cimetière.
L’arrêt suivant est une surprise de taille : les falaises noires de Gatklettur ont été en quelques jours colonisées par des milliers d’oiseaux qui s’agitent en tous sens pour préparer l’une des périodes les plus agitées de l’année: la nidification. Fulmars, mouettes rieuses et tridactyles, goélands, sternes, cormorans et même un fou de Bassan cohabitent à grand renfort de vocalises et piaillements intenses. Un autre arrêt photo se transforme en exploration sur une plage aux galets de lave aux tailles imposantes et variées, les cris des mouettes et fulmars se mêlant au chuintement des vagues, étonnamment calmes aujourd’hui.
Nous déjeunons et continuons cette fois ci par la pointe nord (après une pause sur une plage où nous nous essayons à la coutume locale de tenter de soulever de lourds blocs de pierre, comme le faisaient les marins autrefois. Notre conducteur, local, qui connait son affaire, s’essaye à l’une des épreuves de force avec succès.
La suite nous amène à la montagne de Kirkjufell, la plus photographié d’Islande paraît-il et qui se doit d’avoir sa place dans notre album. Son érosion bien entamée et sa magnifique cascade au premier plan lui donnent un air résolument photogénique. Nous continuons pour notre dernier arrêt de la journée à Stykkishólmur, cette ville de pêcheurs au charme certain. D’aucun font une promenade sur les collines vers le point de vue face à la mer; d’autres se promènent au port et font même un brin de causette avec les pêcheurs du coin déchargeant leurs prises.
Le délicieux dîner (de lingue fraîche aux algues-tout juste pêchée à quelques brasses de là) achève notre intégration islandaise de la journée et nous terminons la soirée avec pour certains de folles histoires et franches rigolade autour d’un verre d’alcool local aux saveurs étonnantes.
Nous quittons la péninsule sous un beau et fidèle soleil qui nous accompagnera toute la journée. Une fois à l’intérieur des terres, les paysages changent radicalement et les côtes bleues font place à de vastes vallées et de hauts plateaux aux herbes encore sèches. Pendant le trajet, entre les arrêts photo, notre guide nous fait une présentation sur les vikings : depuis leur mythologie, rites et traditions mais aussi leur mode vie, leur histoire et victoires, leurs fabuleux bateaux et les routes maritimes empruntées par ces rois des mers.
Plusieurs arrêts panoramiques s’imposent dans ce décor dramatique: les pics acérés de montagnes noires ressemblent à des forteresses de contes fantastiques dont les sommets sont encore pris par la neige.
Nous descendons de l’autre côté de la vallée et traversons champs, tourbières, exploitations agricoles et terrains où paissent de nombreux chevaux islandais, ces fameux équidés à l’allure
robuste et solide qui font la réputation de l’Islande dans le monde équestre. La région de Skagafjörđur est l’une des plus fertiles du pays et des bottes de foin sont déjà prêtes pour le fourrage.
Nous découvrons ensuite le musée historique folklorique de Glaumbær, un charmant regroupement de minuscules maisons en tourbes serrées les unes contre les autres au milieu de
prairies verdoyantes où cabriolent de jeunes agneaux, une vraie carte postale! Nous déjeunons dans une authentique maison du 18e siècle et goûtons de délicieuses spécialités culinaires fait-
maison entièrement préparées sur place dans un cadre hors du temps.
Après une halte à l’adorable petite église de tourbe de Viđimyri, nous partons toujours plus à l’est. Notre guide nous parle des spécialités gastronomiques du cru (dont certaines sont franchement douteuses) et nous voilà à Akureyri, deuxième ville d’Islande. Halldór et Sophie et nous invitent à un petit tour de ville et nous découvrons cette ville à l’aspect singulier.
Nous profitons d’un temps libre pour nous promener au petit centre ou le long de la lagune (est-ce un groupe de fuligules milouin ou le fameux et plus rare garrot d’Islande que nous apercevons?). Certains font des emplettes, mangent une glace (recommandée par Halldór notre conducteur) ou vont au centre culturel avec ses échoppes de design.Nous nous retrouvons et rentrons à l’hôtel par la courte route qui nous amène au pied du fjord ou certains curieux font encore une promenade ornitho avant de passer à table. Le reste de la soirée se passe dans la tranquille lumière du soir, avec un coucher de soleil saisissant.
Nous sommes très curieux de découvrir aujourd’hui un nouveau coin de l’Islande qui ne ressemble à rien d’autre…et à rien de connu : la région de Myvatn.
Notre première halte nous mène à la cascade de Gođafoss où des trombes d’eau surgissent de ce fer à cheval de roche panoramique.
Une première mise en jambe avec une pause photo de chaque côté et nous poursuivons vers le célèbre lac, haut lieu actif du volcanisme islandais.
Nous découvrons les pseudo-cratères de Skutustađir et ses “bulles figées”, hasard de la création quand eau et lave se rencontrent. Une petite boucle sur ces collines en bord de lac, un arrêt photo spécial ornithologie (avec ses fuligules et grèbes à cou noir) et nous continuons vers Dimmuborgir, le château sombre.
Les légendes veulent que ces étranges colonies de piliers formées par un lac de lave érodé soient peuplées de gnomes facétieux et fourbes. Heureusement, ils semblent n’apparaitre qu’en hiver…nous sommes donc tranquilles et pouvons nous promener sur les sentiers balisés entre ces sculptures naturelles aux formes bizarroïdes et aux noms évocateurs (l’église, le trou dans la roche, les crochets).
Certains achètent des cartes postales de ce lieu magique et nous reprenons la route pour nous restaurer. Un délicieux omble chevalier nous est servi, une vue panoramique somptueuse sur le lac en prime. Nous ne perdons pas de temps car la suite du programme s’annonce très intriguant: Sophie nous
a promis l’enfer, la lune et même Mars!… Nous commençons la montée des collines du Krafla, ce système volcanique où une station
géothermique a vu le jour en 1973, alimentant ainsi la région en électricité. Nous poursuivons encore plus haut jusqu’au cratère de Viti (l’enfer) dont le lac turquoise est encore prisonnier des glaces. Son nom, qui vient de la violence de son éruption pourrait tout aussi bien se référer au vent du diable qui règne dans le plus grand chaos et manque de nous renverser tant sa puissance est grande! l’Islande peur vraiment se révéler une terre âpre et rude…
La pause est de courte durée et nous redescendons pour chercher l’accalmie. Cette fois oui, nous comprenons pourquoi on nous parlait de Mars : le site est époustouflant: fumerolles, solfatares, mares de boue : nous pouvons illustrer et réviser tout notre vocabulaire vulcanologique! Nous ne savons où donner de la tête tant le dépassement est grand.
Puis nous avons rendez-vous sur la lune et parcourons la courte distance qui nous sépare du cratère de Hverfjell: un immense cratère de 1200m de diamètre! Nous atteignons le rebord de cet immense gouffre noir en grimpant par une marche régulière sur ses flancs.
Au sommet, la surprise est de taille et nous ne pouvons nier l’énergie qui s’en dégage. Nous sommes bien peu de choses. Certains méditent, d’autres se promènent sur son arête offrant une vue à 360º saisissante. Nous redescendons pensifs et reprenons la route pour notre dernière étape qui sera placée sous le signe de la détente : les sources chaudes naturelles de Myvatn.
L’opportunité qu’offre l’activité volcanique permet d’en faire profiter les locaux et c’est en maillot de bain que nous concluons cette journée en nous relaxant dans une eau riche en silice et minéraux dans un cadre encore une fois incroyable. L’appel du diner se fera sentir à la sortie des thermes et c’est à nouveau un excellent menu qui nous est servi une fois rentrés à l’hôtel.
Les plus motivés font encore une balade au milieu des craquelures de couches de lave énormes au pied de l’hôtel avant de regagner le pays du sommeil, peuplé de rêves d’elfes et lutins…
C’est de bon matin que nous commençons notre journée pour faire route vers le nord où nous aurons une activité très attendue : l’excursion d’observation de baleines. En route, notre guide nous parle des cétacés de la région et de l’histoire de la chasse à la baleine en Islande depuis les premiers harponneurs jusqu’à l’actualité. À Húsavík, le mignon petit port de pêche minuscule niché dans la baie de Skjálfandi nous attend
le bateau qui nous emmènera pour l’excursion. Équipés, préparés, nous attendons impatiemment le départ.
Les instructions techniques et de sécurité données, nous embarquons sur le Náttfari, cet ancien bateau de pêche robuste reconverti en navire d’observation. Nous n’avons pas navigué depuis 15mn que les premiers
animaux se font voir, à notre grande surprise ! De petits ailerons dansent au dessus de la surface: il s’agit de marsouins ! Ils jouent dans les vagues mais repartent rapidement dans les flots. Nous poursuivons nos
recherches et avons une chance à peine croyable: une baleine à bosse montre son souffle et son dos à quelques centaines de mètres. Nous la rattrapons jusqu’à pouvoir observer son manège: des allées venues
entre la surface et les fonds pour se nourrir, sa principale activité en ce moment. Nous l’observons encore alors que le signalement d’une autre baleine est donné: un petit rorqual est lui aussi repéré et bien que plus rare et plus véloce que la jubarte, nous avons là encore le loisir de la regarder. Nous sommes émerveillé par cette géante des mers et les plus chanceux peuvent même voir la blancheur de ses nageoires pectorales sous l’eau.
Durant l’heure qui suit nous observons leur ballet et découvrons de nouvelles venues qui se laissent regarder elles aussi. Les « Oooh! » et les « whaaaa! » De surprise et d’admiration accompagnent le crépitement des appareils photo. Notre excitation est à son comble lorsqu’un groupe de lagénorynques à bec blancs est repéré et nous réalisons notre chance en les voyant jouer dans les flots : ils sautent, virevoltent, font des pirouettes en retombant sur le flanc ou le dos en de bonds gracieux. Quel éblouissement!
Nous n’avons pas vu les trois heures passer et restons docilement assis quand le commandant met le cap vers le port pour le retour. Fascinés, nous repassons ces instants de grâce dans nos mémoires, les yeux dans le vague et un chocolat chaud dans les mains avant d’arriver au port. C’est dans un accueillant vieux bâtiment de bois des quais que nous savourons notre repas avant de poursuivre vers l’est. En route, nous voyons des perdrix des neiges, leur couleur d’hiver immaculée tranchant avec le brun des mottes où elles nichent.
Notre prochain arrêt est l’étrange et fascinant canyon de Ásbyrgi. La légende raconte que sa forme en gigantesque fer à cheval vient de l’empreinte du sabot de Sleipnir, le cheval à huit pattes d’Odin. L’endroit
est solennel et nous chuchotons en pénétrant dans sa forêt dont on dit qu’elle est peuplée d’êtres du Huldúfolk, le peuple caché. Même si nous n’en croisons aucun, notre silence nous permet de mieux apprécier le cri les oiseaux du site : bécasseau, fulmars, canard siffleur, courlis et même (cette fois c’est sûr): le rare garrot d’Islande aux yeux yeux jaunes comme de l’or.
En quittant silencieusement les lieux, nous ne nous attendons pas au contraste bruyant de notre prochain arrêt: la chute de Dettifoss. Cette gigantesque cascade est en effet la plus abondante d’Europe et ses centaines de mètres cubes d’eau par seconde en ferrai trembler les murs de la forteresse de Mitgard !!
Nous contemplons longtemps l’inexorable et violent cours de l’eau et la plupart poursuivent jusqu’à la non moins belle chute de Selfoss, à un jet de pierre (c’est le cas de le dire!) de celle-ci. C’est détendus que nous nous installons pour le dernier trajet de route traversant les paysages exclusivement minéraux du plateau désertique de Möđrudalr s’étendant à perte de vue. Notre hôtel, véritable petit bourg d’un clan familial perdu sur ces hauteurs, possède même sa propre petite église (construite des mains d’un aïeul de la famille) et c’est dans de minuscules maisons de tourbes serrées les unes contre les autres (au confort discret et moderne) que nous passerons notre nuit dans l’hébergement le plus en altitude d’Islande, la tête un peu plus près des étoiles donc..
Les plus matinaux d’entre nous ont eu la chance d’observer un renard polaire furetant dans les parages de l’hôtel, sans doute familier de cet endroit où les os jetés aux chiens lui feront un repas ou deux. Nous abandonnons le plateau de Möđrudalur, croisant sur la seule route de terre battue un petit groupe de chèvres domestiques qui presse loin de la piste les chevreaux affolés. De nombreuses oies à bec court et quelques lagopèdes et sont aussi observés.
Alors que de vastes étendues s’offrent à nos yeux, nous suivons une présentation de la langue islandaise et ses particularités dont certains mots ou expressions nous amusent ou nous envoûtent. Les islandais sont des poètes hors-pairs et leur amour des mots est sans limite. Nous faisons notre premier arrêt dans un lieu à couper le souffle: le canyon de Stuđlagil, ces impressionnantes gorges que nous atteignons après plusieurs kilomètres d’une route de terre. La vue est magnifique et nous sommes fascinés par ces formations rocheuses parfaitement géométriques aux proportions ahurissantes que la rivière Jökulsá a terminé d’éroder, poursuivant sa route furieuse.
Nous repartons pour la cascade des perdrix (Rjúkandafoss) à quelques pas de la route et vers les fjords de l’est, passant par le lac Lagarfljót, connu pour le mythe de son monstre lacustre du même nom, très sérieusement étudié. A défaut de le voir, nous écoutons les commentaires de Sophie sur les contes et légendes du folklore islandais dont certains nous font sourire mais d’autres, sombres et lugubres, nous font frémir.
C’est sous une petite bruine que nous arrivons à Fáskrúðsfjörður, ce petit village dont l’histoire est intimement (et souvent tragiquement) liée à celle de marins français venus jusqu’à ces régions extrêmes lors de l’époque des grandes pêches à la morue. Nous visitons le musée qui leur est consacré et Fjóla, la très sympathique responsable du musée nous invite dans la petite chapelle dont elle nous raconte l’histoire, ponctuée de récits de marins. Elle chante même pour nous un vieux chant de la mer islandais qui en émeut certains jusqu’aux larmes. Nous quittons le village en passant devant la rivière des mémoires, la sculpture en hommage à Charcot et son équipage et clôturons par une visite recueillie au petit cimetière des marins, au bas d’une colline battue par les vents et dominant la mer, dernière demeure de ces des hommes disparus parfois si jeunes.
Le vent et la pluie s’intensifient et les montagnes s’effacent dans la brume. Nous repartons pour la route côtière et Sophie nous parle de la pêche et son évolution en Islande. Nous apercevons plus tard quelques rennes sur les collines verdoyantes et admirons la capacité d’adaptation au froid et à la rudesse de la vie de ces herbivores. C’est à Djúpivogur que nous sommes accueillis par l’affable personnel du petit hôtel coquet où nous nous installons pour un délicieux repas de poisson. La pluie s’est invitée elle aussi et teinte de gris le décor du fjord où nous passerons la nuit.
C’est sous une pluie fine que nous nous réveillons ce matin et profitons d’un départ un peu plus tardif. En quittant le village, nous tombons sur un petit groupe d’une douzaine de rennes, une aubaine! Halldór parvient à se garer de manière à ce que nous puissions tous faire des clichés; nous sommes ravis!
Nous empruntons la route sinueuse le long des fjords et après un arrêt panoramique dans un décor dramatique, nous continuons jusqu’à Höfn où une nous faisons une pause. La toute petite boutique
d’artisanat locale est prise d’assaut : l’originalité et la qualité des pièces uniques font le bonheur de plusieurs d’entre nous qui reviennent les mains chargées de souvenirs ou cadeaux. Nous repartons sous un ciel instable où mer, horizon et glaciers jouent à cache-cache avec les nuages.
Notre première visite est pour la plage des diamants: une sublime plage de sable noir où viennent s’échouer les blocs de glace des icebergs détachés de l’immense glacier du Vatnajökull qui finissent leurs jours ici…pour le plus grand bonheur des photographes! Les tons et couleurs sont si monochromes que les clichés semblent pris en noir et blanc.
Nous observons aussi le manège de sternes et mouettes attirées par le remue-ménage des eaux douces qui, en entrant dans la mer, agitent et font remonter à la surface petits crustacés et copépodes qui font la joie des oiseaux y trouvant un déjeuner facile et abondant. Nous observons un labbe parasite qui importune ses voisines ailées pour leur chiper leur déjeuner et y parvient malgré leurs habiles acrobaties aériennes. Nous repartons déjeuner à quelques kilomètres de là et revenons pour une promenade digestive sur les bords du lac mais la pluie en décourage quelques uns. Malgré tout,
nous ne pouvons nier la puissance du glacier et la beauté du site. Ce jeune lac glaciaire est là où des blocs de glace d’une taille allant d’un immeuble à une voiture se détachent du grand glacier du Vatnajökull, cette immense calotte de glace, la deuxième d’Europe avec ses 8 300 km2, soit presque l’équivalent de la Corse!
Ils se poussent, se bousculent et semblent faire une file d’attente jusqu’à la mer, attendant impassibles et nonchalants que les plus gros atteignent la fin de leur périple flottant. Nous profitons d’une accalmie pour faire une photo panoramique d’une des innombrables langues glaciaires de ce mastodonte d’eau solide et mettons le cap sur Ingolsfhöfđi, un promontoire rocheux perdu au bout d’une lagune sablonneuse qui s’étend à perte de vue.
Si notre but est d’aller voir des macareux, nous ne nous attendions pas une expérience aussi…lunaire! C’est dans des remorques tirées par un gros camion conduit par notre guide Einar que nous embarquons, incertains de notre devenir dans les prochaines heures.. L’expérience dépasse nos meilleures expectatives : Après une longue route sur le sable noir de la lagune où l’horizon se fond dans le ciel et le sol, nous arrivons au pied d’une superbe falaise dominant la mer.
Nous suivons Einar et grimpons la pente parsemée de touffes de végétation (silène acaule, petite oseille et même thym arctique) jusqu’au promontoire de 70 m où nous attend une surprise de taille: des centaines de macareux vaquent à leurs occupations : creuser le terrier et préparer l’emplacement qui recevra leur œuf unique.
Ils sont insolemment indifférents à notre présence, confiants et tranquilles, et nous voyons à quel point si l’homme le veut, il peut vivre en harmonie avec les animaux. Nous les observons longtemps et continuons plus loin au milieu du plus grand territoire au monde du grand labbe, cet oiseau majestueux qui plane au dessus de nous et en recensons une douzaine en un seul coup d’oeil. Ils sont nombreux et agités, certains se chamaillent et luttent à grand renfort de cris et coups d’ailes. Eux aussi préparent la nidification.
Un dernier point de vue au sommet de cette sublime falaise nous donne envie d’avoir des ailes et planer comme les quelques fulmars que nous apercevons aussi. Einar nous montre un emplacement privilégié où nous pouvons même apercevoir des guillemots de Brunnick, serrés contre les rochers et reconnaissables à leur plumage noir et blanc. Nous sommes absolument comblés et repartons émus et gonflés d’une énergie nouvelle et généreuse, conscients de nos privilèges.
Plus tard, après le dernier tronçon de route où, fourbus, nous nous laissons aller à nos rêveries avant d’arriver à l’hôtel, nous partageons un délicieux repas et échangeons sur les émotions de la journée et
la chance incroyable qui nous est donnée. Et c’est comme sous le coup d’un enchantement que nous allons nous coucher, heureux et comblés.
Nous partons bien reposés pour une nouvelle journée qui démarre sous une soleil éclatant. Après un premier arrêt à une cascade presque cachée du chemin menant à notre hôtel, nous continuons vers l’ouest. Notre route est bordée de lupins, prairies et cascades fines qui débordent le long de falaises érodées au pied desquels paissent moutons et chevaux. Une carte postale là encore-mais au paysage radicalement différent de ceux, pourtant très variés vus jusqu’à présent. Nous faisons un arrêt pour une photo panoramique ou simple contemplation au milieu des étendues infinies du champ de lave de Eldrhaun (la lave de feu). Ces immenses coulées de lave furent vomies par le volcan Laki en 1783 et s’étendent bien au delà de ce que l’oeil peut percevoir puisqu’elles recouvrent plus de 560 km2 ! Nous restons admiratifs et respectueux devant tant de grandeur.
Nous poursuivons vers Vik ou un arrêt s’impose : plage, shopping, balade, cartes postales ou café, chacun dispose de son temps libre avant d’aller jouir d’un point de vue sur le village et toute la baie du haut de la petite église au toit rouge reconnaissable. Quelques kilomètres plus loin, c’est la plage de Reynisfjara qui nous offre son panorama somptueux : son sable noir et ses colonnes basaltiques rappellent le volcanisme actif de cette région. Malgré le soleil qui lui donne un air guilleret, la plage de sable est battue par les vents et des vagues sournoises peuvent apparaitre à tout moment. Ici, il ne
faut jamais baisser la garde…
Il est temps de déjeuner et nous quittons les lieux pour nous restaurer dans un endroit charmant et calme près d’un petit bosquet avent de continuer notre flânerie vers la cascade de, superbe rideau de plus de 60 mètres de haut qui tombe vertical et droit comme un rideau de théâtre. Le trésor que recèlerait la grotte cachée derrière ces trombes d’eau est paraît-il impossible d’accès.
Encore une des nombreuses légendes de la région qui foisonnent ici et nous intriguent.
La prochaine étape est une autre cascade : Seljalandfoss. Une belle chute où nous avons la surprise de voir qu’il ya a un passage possible derrière les pans d’eau mais aucune légende de trésor caché n’y est recensée cette fois- ci… Sur un sentier bordé d’anémone et d’angéliques qui ne fleurissent pas encore, nous faisons une belle promenade jusqu’à une faille dans la roche où s’infiltre l’eau, jouant avec la lumière sous nos yeux admiratifs et les objectifs des photographes.
Nous repartons pour la route qui longe le système volcanique du Katla et Sophie nous parle de volcanisme et de celui de l’Islande en particulier alors que nous pouvons suivre les volcans des yeux; leur silhouette se couronnant de brume ou y disparaissant tout à fait.
Arrivés à l’hôtel au pied du Hekkla, un autre de ces monstres, nous avons la surprise de recevoir une « initiation locale » de notre guide avec une petite dégustation…L’un de nous, incroyable coïncidence, aura la même idée et c’est donc trois sortes de chips de poissons et deux pots de Hákarl qui nous attendent !! Cette spécialité typiquement islandaise de requin fermenté va requérir toute notre motivation, force viking et volonté d’intégration pour être goûtée, accompagnée de cris, grimaces (et photos!). Un moment mémorable que nous faisons passer (et c’est le cas de dire) à grand renfort de Brennevin, un alcool fort qui malgré tout n’enlèvera pas pour certains le goût particulier et traumatisant de cette aberration gastronomique. Seul le chauffeur et quelques rares courageux reprennent un morceaux.
Notre test d’intégration validé, nous pouvons passer à table où, fort heureusement, le savoureux repas servi dans un beau décor chaleureux fait oublier à nos papilles ce souvenir douloureux. Le dîner se passe dans une humeur chaleureuse et bon enfant, s’éternisant dans la belle lumière du soir.
C’est une vraie famille de volcans qui défile par la fenêtre en panoramique le long de la route ce matin, tous différents mais remarquables : depuis le Hekla au loin et ses coulées de neige , l’imposant (et imprononçable) Þríhnúkagígur, le fameux Eyjafjallajökull dont le sommet dégagé recouvert de neige se prête parfaitement à la photo souvenir et le Myrdalsjökull, son gros voisin immaculé. Le temps est remarquable et la visibilité parfaite. Avec une météo pareille, nous nous réjouissons de la traversée en bateau jusqu’à l’archipel des Vestmannaeyjar, îles volcaniques dont certaines sont parmi les plus jeunes du globe. Effectivement, la mer est d’huile, le ciel dégagé où voltigent quelques fous de Bassan et tout le monde est sur les ponts à profiter des 40 mn de traversée vers ce qui s’avère être un paradis.
L’arrivée en bateau est digne d’un documentaire animalier : à quelques encablures du port, une imposante falaise est le siège d’innombrables oiseaux : mouettes tridactyles, fulmars, macareux mais aussi guillemots de Brünnicks et même quelques rares et timides guillemots miroirs, une aubaine pour nos jumelles! Le débarquement est rapide et notre conducteur nous fait un tour de Heimaey où nous passerons la journée. La seule île habitée de l’archipel a une histoire pleine de rebondissements : depuis les premiers colons et constructions humaines, au plus grand festival d’Islande, de la fameuse éruption destructive qui bouleversera la géographie de l’île en 1973 à celle qui donnera naissance à l’île de Surtsey, sanctuaire intouchable, saint graal des géologues.
Après ce tour d’ensemble aux arrêts panoramiques de choix, nous sommes déposés à l’hôtel pour l’attribution des chambres et le dépôt des valises puis nous nous attablons dans un restaurant digne d’une étoile; le chef s’est (et nous) fait plaisir avec une soupe de poisson aux saint Jacques, un cabillaud parfaitement cuit et un skyr et sa glace à l’oseille! Nos papilles sont émerveillées et
nous sommes rassurés quant à la gastronomie islandaise; le requin fermenté n’étant plus qu’un souvenir lointain…
Notre après midi est aussi libre que les nuages dans le ciel et chacun choisit son programme. La plupart profitent du soleil radieux et des vues somptueuses depuis les hauteurs pour faire des
randonnées près des falaises à oiseaux ou sur la crête des cratères. Le paysage est spectaculaire et nous sommes comblés au delà de nos espérances, nous sentant plus vivants que jamais!
Nous nous retrouvons tous pour le dîner et échangeons nos expériences et sensations. Les qualificatifs “magique”, “sublime“ et “merveilleux” reviennent souvent, en plus du rappel de la chance que nous avons avec une météo bien supérieure à nos désirs (et aux normales saisonnières)! Inutile de dire que notre sommeil sera de qualité, fourbus de nos balades d’exploration sur ce territoire de volcans et la tête pleine d’images merveilleuses.
Ce matin, nous quittons Heimaey sous un ciel de plus en plus dégagé et suivons des yeux depuis le pont du ferry le repas des oiseaux de mer : les macareux flottent tels des bouchons de liège et plongent en d’habiles pirouettes sous les flots, les guillemots et fulmars rasent les vagues, les mouettes qui piaillent à tout va et semblent se traiter de tous les noms d’oiseaux et les rapides fous de Bassan qui, en un piqué contrôlé fendent la surface telles des torpilles. Nous profitons du spectacle avant de retrouver la terre ferme et notre chauffeur qui cette fois nous emmène au cercle d’or : ces étapes incontournables pour tout visiteur de
l’Islande. En chemin, Sophie nous fait un point sur l’histoire de l’Islande et son économie et politique. La première étape est la chute de Gullfoss; la chute d’Or. Elle est des plus impressionnantes avec sa plateforme panoramique donnant de l’autre côté sur le Langjökkull, le 2e plus grand glacier d’Islande. Nous flânons et photographions avant de nous retrouver pour le déjeuner.
Nous continuons vers l’une des incongruités de ce pays décidément surprenant: le geyser. Strokkur puisque tel est son nom, crache sa colonne d’eau depuis des siècles, fidèle et indifférent aux rares touristes négligeant qui restent sous le vent et se font tremper à son apparition pour le plaisir taquin de ceux restés bien au sec. Nous restons le temps d’immortaliser plusieurs colonnes et prenons de la hauteur avant de repartir sur le sentier qui chemine à travers les fumerolles et les rivières minuscules colorées par le temps et les sédiments.
Nous continuons et mettons cap sur ce qui est aujourd’hui un vrai symbole pour tout Islandais: le site de Þingvellir. C’est ici que, dès 930 se retrouvait l’assemblée d’hommes libres – un concept qui aujourd’hui
encore est inconnu à certains pays…Les hommes qui s’y retrouvaient pour écouter les textes de loi récités pendant des heures et assistaient aux litiges avant que justice soit rendue. Les noms portent encore les
marques de cette époque sombre malgré tout: la colline des potences, le lac des noyées, le rocher de la loi. Mais le site est aussi un parc naturel, classé qui plus est par l’UNESCO. Le plus grand lac du pays est bordé
de végétation protégée et quelques petits fuligules deux plongeons catmarin font trempette à quelques mètres de nous entre les lupins et angéliques qui commencent à fleurir timidement. Mais c’est son emplacement géographique rare et particulier qui vaut son originalité au site: il est situé à cheval sur les plaques tectoniques eurasienne et américaine. Chacune va tirer de son côté, élargissant ainsi
l’écart qui se creuse ente elles pour notre plus grand bonheur: marcher dans cette faille gigantesque est un plaisir rare et déroutant. Un dernier coup d’oeil à la grande plaine déchirée par cette faille et nous repartons pour la civilisation avec la capitale pour notre prochaine et dernière étape de la journée.
Le retour à la civilisation se fait progressif et nous avons au restaurant une petite salle rien que pour nous, où nous pouvons partager les émotions du jour aussi bien que devinettes, anecdotes et profondes conversations. Nous avons fait dans ce voyage de vraies rencontres et l’ambiance est décidément chaleureuse et affectueuse. Chacun rentre tranquillement car rien ne presse, pas même le soleil poursuivant sa lente course dans le ciel du couchant.
Ce matin paisible commence avec des activités “à la carte” : les plus matinaux parcourent les rues de Reykjavik alors que d’autres font la grasse matinée. Nous nous retrouvons tous en milieu de matinée pour une visite guidée avec Sophie qui nous montre les lieux d’intérêts et incontournables de la capitale, à commencer par l’église de Hallgrimson. Cette impressionnant haut lieu de la religion (et de la musique) nous offre la perspective de sa tour encadrée de colones qui rappellent les orgues basaltiques.
La statue du navigateur viking Leif Erikson trône sur le parvis et rappelle les incroyables épopées des ancêtres des islandais. L’arrêt au Sólfar (le voyageur du soleil) nous donne encore plus cette impression de voyage et de découverte. Cette sculpture en acier inoxydable fait penser à un vaisseau paré pour un long voyage vers le soleil comme son nom l’indique. D’ailleurs ce dernier nous boude un peu et se cache derrière des nuages gris. Qu’importe! Les reflets irisés de la lumière jouent sur les couleurs des multiples formes géométriques que forment l’ensemble incroyablement moderne de Harpa, symbole de la culture de la ville. Un tour à l’intérieur s’impose et le bon goût et l’audace du design islandais s’offre à nos yeux surpris et séduits.
Nous continuons dans le coeur de la ville et nous ouvrons une page d’histoire en passant par le parlement, la colline de Arnarhóll, l’hôtel de ville ou la plus vielle maison de la ville. Quels changements depuis la poignée d’hommes qui fondèrent ce site autrefois! Quelle rudesse et quelle évolution depuis. Les magasins de design et de souvenirs ont remplacé les pâturages et fronts de mer depuis bien longtemps.
Nous nous attablons avec plaisir dans un petit restaurant du centre et après le café, chacun profite de son après midi comme il le souhaite : musées, boutiques ou promenade vite interrompue par une pluie fine. La soirée se clôture dans le port par un dîner de poisson digne d’un chef étoilé dans un joli cadre où l’ambiance de ce dernier repas n’est que chaleur et bienveillance. Peu importe le réveil matinal de demain, nous profitons de l’instant et de la présence les uns des autres,
conscients de la chance dont nous avons bénéficié et passant en revue les moments forts de notre voyage et les bons souvenirs. Quelle aventure merveilleuse et quelle beauté nous a-t-il été donné de voir! Les au revoirs sont effusifs et sincères et les invitations à se rendre visite chacun dans son pays respectif sont lancées…à nouveau de beaux voyages en perspective!
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Messages
Je t’aime fort Sofi !!!! Bon voyage
A l’attention de Florence et Jean-Paul…
A la vue de la photo envoyée en MP, vous êtes enchantés et cela nous fait bien plaisir.
Vous êtes désormais contaminés par le virus Grands Espaces, il n’y a aucun antidote, mais le soulagement est envisageable en préparant les expéditions suivantes… Profitez de tous les instants, nous ne connaissons pas Sophie, pour autant, votre guide est également « cablée » GE… alors vivez ces moments à fond.
Bises de nous Deux
Un grand merci pour ce voyage sur les terres islandaises , Sophie tu étais une guide super top, toujours à l’écoute , bravo ,
le voyage avec grands espaces était tellement bien que nous repartons fin juillet pour une croisière , direction le Svalbard , nous allons encore en prendre plein les yeux
bon voyage à tous
Merci pour tous ces témoignages qui font rêver et me font « repartir » dans mes souvenirs avec Christian Kempf, en août 2002 au Spitzberg et en janvier 2005 en Antarctique.
Jean-Luc