Sophie Tuchscherer
Guide
28 janvier
6 février 2022
Sophie Tuchscherer
Guide
Voici venue notre première journée de voyage vers la Norvège, « le Chemin du Nord ».
Nous partons à une heure matinale pour l’aéroport et, après les formalités de rigueur et la patience qui les accompagnent. En plein vol, nous apercevons quelques lueurs vertes étranges qui s’avèrent être une petite aurore boréale! Réalisant notre incroyable chance, nous profitons de cette aubaine céleste, mise en bouche nous l’espérons des ciels qui nous attendent là-bas.
À l’atterrissage à Tromsø, nous sommes pris en charge et embarquons sur Le Grand Large, joli navire cosy et accueillant qui sera notre demeure pour ces 10 prochains jours. Le sympathique personnel nous assigne les cabines et nous a préparé un bon repas avant de larguer les amarres sitôt embarqués, optimisant notre temps de navigation de la nuit pour être positionnés au nord dès le lendemain.
Nous nous abandonnons à un sommeil profond qui ne tarde en rien à venir.
Après une nuit de repos bien méritée, nous prenons notre petit déjeuner dans la baie de Kvænangen, dans un décor surréaliste. Les sommets enneigés d’un blanc immaculé contrastent avec le bleu sombre de la mer baignée par les pâles lueurs pastels. Le soleil et ses rayons transforment progressivement les blancs en tons chauds et chamarrés. La nature nous offre son plus beau réveil.
Nous naviguons en quête de vie aquatique sur les flots et guettons le moindre signe. Nous avons vent de la présence de cétacés et guettons les alentours. Soudain, quelques taches blanches jaillissent au loin : des souffles de baleines à bosse. Nous nous en rapprochons et avons l’agréable surprise d’être témoins d’un moment unique : les placides animaux ne sont pas dérangés par notre présence et déjeunent, le dos légèrement émergé, le souffle tranquille. Nous les observons passer tout près du bateau à cinquante mètres à peine, nageant en cœur pour notre plus grand plaisir. Les mégaptères montrent leur queue reconnaissable lors de plongées plus profondes, réapparaissant plus loin dans les flots. Nous les regardons longtemps.
Notre repas est servi et après le café, les instructions Zodiacs nous sont données par notre guide Sophie : poignée du marin, gilets, consignes, nous voici parés. Nicolas, notre guide en formation, poursuit lui pendant ce temps la recherche aux jumelles. Une autre baleine à bosse plus discrète est entrevue, trop furtive pour une réelle observation.
Nous continuons cependant à ouvrir les yeux jusqu’à ce que la nuit tombe.
Un peu plus tard, Sophie nous fait une présentation de la Norvège avec une approche sur plusieurs sujets: géographie, histoire, actualité, faune, habitants; nous nous familiarisons avec ce pays dont nous seront les hôtes le temps d’un voyage. Nous jetons l’ancre dans le fjord, loin des lumières extérieures et prenons l’air, levant le nez, scrutant le ciel : les innombrables étoiles semblent encore plus claires dans le froid vif (-5ºC) et la voie lactée traverse le ciel.
Il est temps de nous retrouver au salon où nous est offert un pot de bienvenu et nous faisons la connaissance de l’équipage dont certains visages nous étaient encore inconnus, cachés dans les coulisses des machines et les recoins du navire, main d’œuvre invisible mais indispensable à la bonne marche du bateau.
Un petit récap’ et prévision de l’itinéraire nous sont exposés après quoi nous attaquons le repas du soir. Sophie et Nicolas se relayent pour des “rondes d’aurores” afin de mieux chercher ce phénomène naturel propre aux régions boréales. Le timing s’enchaine magnifiquement puisque qu’une aurore se dessine effectivement à l’horizon.
Vite, nous sortons sur les ponts pour la voir et c’est une vraie représentation à laquelle nous assistons:
Ouverture : les lueurs diffuses à l’horizon se brouillent et se condensent, se présentant au public.
Acte I : la lumière s’intensifie puis s’amenuise; l’aurore est vaste mais d’une intensité modérée.
Acte II : elle change de posture et bouge légèrement puis s’éteint presque.
Entracte. Nous nous réchauffons avec un thé chaud et la plupart regagnent leur cabines.
Acte III : l’aurore reprend de la vigueur et de l’ampleur.
Acte Final : nous sommes rappelés illico de nos cabines par nos guides, le phénomène est maintenant à son maximum et une large courbe se dessine dans le ciel, l’intensité et les couleurs sont plus fortes et notre admiration va crescendo. Nous repartons nous coucher bien plus tard après le rappel, heureux comme des rois. Pour la première, quel beau programme!
C’est dans une brume monochrome que commence notre matinée; le bateau est entouré de blanc: celui de la neige des montagnes, celui du ciel bas et celui de la mer d’un calme plat et presque monotone, sans frontière avec la mer. On peut presque comprendre les vikings qui craignaient de tomber dans la mer s’arrêtant brusquement et de finir dans le grand vide de Ginnungagap. Le silence est quasi palpable. Nous observons longtemps les eaux du fjord que quelques animaux fréquentent mais nous sommes peu nombreux à voir les trop rapides apparitions: un pingouin torda (jeune ou plumage d’hiver, le doute plane) et un dos noir qui surgit trois fois au dessus de la surface à une vitesse étonnante mais disparait encore plus vite, tel un fantôme : marsouin ou jeune cétacé ? Nous ne le saurons jamais. Un aigle pygargue juvénile (la queue blanche viendra avec le temps) vient inspecter bateau depuis les airs avant que nous ne nous retrouvions cette fois vraiment seuls. Les imposantes alpes de Lyngen sont les gardiennes de ce paysage étrange.
Point de cétacé en vue quand il est temps de manger, nous continuerons le guet plus tard. Et c’est juste au moment du dessert que le commandant repère et met le cap sur une baleine à bosses. Nous la suivons doucement, toujours aussi impressionnés par cet équilibre entre nonchalance et puissance. Puis il est temps de poursuivre la route vers le sud, profitant d’une fenêtre météo pour naviguer vers les Lofoten – un petit point prévision et itinéraire nous est donné pour mieux comprendre la route et le temps prévus ces prochains jours.
Puis nous est organisée la visite de la passerelle avec les explications de Zibi, le second commandant sur les machines de ce poste de pilotage qui n’est pas sans rappeler un cockpit. Que d’écrans, de boutons et de manettes! Grâce aux éclaircissements de Zibi, nous comprenons mieux les fonctionnement et manipulation de cette technologie qui nous propulse sur ces mers nordiques.
Un peu plus tard, Nicolas et Sophie nous donnent une conférence sur les baleines à bosses avec de nombreuses explications scientifiques à la clef. Lors de l‘une de leurs rondes, Sophie repère une aurore qui s’accroît et traverse le ciel en une belle courbe mouvante. Tout le monde est vite dehors malgré le froid mordant et profite de l’instant.
L’heure du repas est donnée alors que nous descendons par la route intérieure, les lumières des villes et hameaux croisés se reflétant dans les hublots. Après le repas, nous jouons quelques parties du Hnefatafl, ce jeu de stratégie viking qui nous étonne et nous captive; plusieurs candidats s’affrontent sous les yeux (et les conseils) des autres passagers.
Plus d’aurores en vue lors des rondes, le ciel se voilant d’ailleurs légèrement, nous regagnons peu à peu nos cabines et retrouvons le confort douillet de nos couettes pour une belle nuit sans houle.
Une fois de plus , c’est une sublime lumière diaphane qui accompagne notre réveil. Les côtes des Lofoten se dressent à tribord et l’ombre des pics montagneux se dessine dans un halo de lumière, tel un projecteur naturel.
La lumière…c’est l’avantage de partir à cette saison sous ces latitudes et nous comprenons bien pourquoi cet archipel fut prisé de tous temps par des peintres et des artistes.
La séance photo terminée, nous assistons après le petit déjeuner à une conférence sur les vikings. Ce peuple des mers, mythiques héros d’une période de l’histoire somme toute brève, furent les habitants de ces îles, où des traces d’habitation et de leur présence y furent détectées. Sophie nous raconte leur histoire, leurs croyances ou les routes incroyables qu’ils parcoururent par la mer et fais tomber aussi de nombreuses idées reçues sur ce peuple décidément étonnant.
Encore un peu de navigation cette fois plus musclée dans le Vestfjord et le repas est pris lors de l’accalmie précédant l’arrivée à Henningsvaer.
Cet adorable petit village est notre escale pour l’après-midi. Nous dégourdir les jambes en une longue balade le long des quais et dans ses rues nous fait beaucoup de bien et nous découvrons des détails de la vie quotidienne sous ces latitudes, comme ces trottinettes-luges pour se déplacer sur ces rues enneigées. Nous faisons un crochet par les séchoirs à morue où le village s’offre à nous en une vue panoramique, avec toujours ces montagnes imposantes en arrière plan, et franchissons la longue digue qui relie les deux pans de ces îles qui ne forment aujourd’hui qu’un seul et même bourg, devenu presqu’île.
Une pause dans une minuscule échoppe plus tard et nous revenons au bateau chacun à son rythme, photographes ou flâneurs, sous les rayons rosés du soir.
Nous appareillons et naviguons vers la pointe sud-est après le dîner, voguant vers Reine, notre prochaine destination. Nous y accostons le soir même et profitons même d’une petite aurore boréale qui joue à cache-cache avec nos yeux et nos appareils.
Les montagnes abruptes et immaculées de Reine se découpent dans le bleu de la nuit, telles les sentinelles de la baie ou le Grand Large se reposera aujourd’hui.
Comment ne pas être répétitif et rester original en commentant la lumière matinale des Lofoten? Comment décrire cette magie absolue qui, une fois de plus nous accompagne en ce début de journée dans des tons roses et vermeils (ou roses et merveilles) ? Nous capturons ses couleurs folles en route vers le village de Å qui sera notre étape du matin.
Le musée de ce minuscule hameau nous montre les bâtiments de la grande époque de la pêche au skrei, parfaitement conservés. Nous y visitons son hangar à bateau qui présente les barques du Norland, ces embarcations qui peuplaient alors les eaux du large par milliers, mais aussi les légendaires Rorbuer, ces modestes demeures des pêcheurs d’alors avec les objets du quotidien de ces hommes rudes et solides qui chaque année revenaient pour cette pêche miraculeuse. Sans oublier la petite installation où était fabriqué le médicament le plus radical de tout un peuple et plusieurs générations : l’huile de foie de morue. L’odeur qui semble imprégnée à jamais dans les pans des murs sombres en fait grimacer plus d’un, rappelant de traumatiques souvenirs d’enfance… L’air vif du dehors nous revigore et nous nous promenons dans ce décor au charme rustique. Nous continuons ensuite notre exploration de l’archipel, nous arrêtant ça et là pour des photos de paysages ou détails des villages côtiers de notre route avant de stopper sur le chemin du retour pour LA photo souvenir : la vue panoramique de Reine depuis les hauteurs. Une authentique carte postale !
Nous rentrons à bord pour le déjeuner et ne tardons pas à ressortir pour une petite balade dans ce village de 300 âmes. Depuis le quai, nous longeons la route bordée de séchoirs à morue jusqu’aux petites cabanes de pêcheurs d’un rouge vif, tranchant avec l’épaisse couche de neige fraîche.
Chacun a ensuite quartier libre: d’aucuns achètent des cartes postales, rentrent au bateau ou s’aventurent plus loin. Le rendez-vous est donné plus tard pour la visite de la salle des machines avec Tiger, le matelot qui nous explique le fonctionnement de ces gros cylindrés et multiples engins, machines et appareils complexes de ce monde invisible.
Après le goûter, nous suivons une petite conférence de Sophie sur les aurores boréales. Les protagonistes de la conférence font pourtant défaut ce soir et ne se manifestent pas dans le ciel… Mais ne soyons pas trop gourmands. Ou plutôt au sens propre alors : le repas est bientôt servi et Nicolas nous propose ensuite une mini conférence sur les manchots des Lofoten, de quoi nous éclairer sur ces espèces et leur histoire. Après une dernière boisson chaude, nous regagnons ensuite nos cabines sous un ciel couvert qui laisse néanmoins apparaître quelques étoiles brillantes.
Nous quittons Reine au matin pour une navigation côtière et dans les fjords voisins. Les poignées de maisons sur le rivage ressemblent à des maquettes tant les montagnes surgissant à pic de la mer en imposent. Certains villages, si reculés et isolés ne sont accessibles aujourd’hui encore que par la mer et ne doivent pas recevoir beaucoup de visiteurs dans les fjords qui les bordent. Nous sentons à nouveau les bénéfices d’une navigation en si petit comité, conscients de l’exclusivité de nos itinéraires et comprenons encore plus à quel point les norvégiens sont un peuple dépendant de la mer, en harmonie totale avec elle.
Plus loin, c’est à Nusfjord que nous accostons, autre village “de poche” aux nombreuses maisons de bois dont beaucoup sont protégées, témoins d’une époque révolue qui semble pourtant bien vivante. Il nous semble faire un bond dans le passé : son petit port aux couleurs vives, ses fameuses « rorbuer », maisons de pêcheurs sur pilotis ou son échoppe d’un autre temps lui donne un air délicieusement désuet qui nous ravit. Nous nous y promenons et certains poursuivent sur les hauteurs, d’autres préfèrent prendre un café dans la boutique/épicerie /estaminet qui était autrefois le lieu de rencontre de tous et dont les vieux murs de bois, s’ils pouvaient parler, nous révèleraient sans doute plus d’un secret bien gardé…
Nous continuons avec le déjeuner avant de quitter les lieux pour une navigation de quelques heures pendant laquelle nous contemplons les paysages et les sommets des Lofoten baignés d’une clarté onirique. La nuit tombe doucement et ne cesse d’être repoussée, la lumière gagnant chaque jour un peu plus son combat contre les ombres.
Sophie, notre guide, nous fait ensuite une conférence sur la littérature de Norvège. Plus que de l’histoire littéraire, il s’agit de recommandations et conseils de lecture allant de grands classiques aux contes, sans oublier les polars dont les norvégiens ont le secret. Nous annotons les titres pour poursuivre le voyage une fois rentrés.
Et nous voici arrivés à Svolvær, une ville enfin digne de ce nom et qui contraste radicalement avec les villages miniatures de la matinée. Nous observons depuis le pont supérieur les manœuvres de l’équipage, habiles et rapides malgré le froid, le temps d’une aurore boréale surprise qui disparait aussitôt.
Bien équipés, nous descendons du bateau pour une courte promenade dans Svolvær avant une visite des plus originales : le Ice-bar. Ce lieu surprenant comporte des sculptures intégralement gravées ou polies dans la glace. Les œuvres d’art sont mises en valeur par un jeu de lumière et nous en ressortons impressionnés par le travail et l’inspiration des artistes qui les créèrent. Le temps de retourner au bateau et se changer et nous voici à nouveau attablés devant les bons plats de Norman, notre chef qui décidément nous gâte.
Un petit point info est donné pour les prévisions de demain et la soirée continue dans la bonne humeur, échangeant sur les belles impressions du jour et ses surprises.
Notre départ de Svolvær se fait dans le calme d’un matin paisible, les montagnes la bordant rapetissant à mesure que le Grand Large s’éloigne. Nous jetons un dernier regard à ses quais, ses séchoirs et son port dont l’entrée est flanquée d’une haute colonne avec la statue d’une femme de marin qui guette l’horizon. Toute l’histoire de ces sites est reliée à l’océan. Voguant vers le nord et sous un ciel bleu lavande, le bateau s’engage bientôt dans le détroit du Raftsundet, jusqu’au Trollfjord. Tous les passagers sont conviés sur le pont ou en passerelle pour assister à l’entrée dans cet imposant fjord étroit qui n’a rien à envier à ses frères des régions du sud. Nous pénétrons dans ce décor solennel tels des pèlerins recueillis et découvrons le fond du fjord recouvert d’une fine couche de glace. Le froid et l’éloignement ce goulot finissant en cul de sac ont eu raison du Gulf Stream qui sinon pourtant, empêche la mer de geler et permet tout simplement la vie sous de telles latitudes.
Le cadre est magnifique et plus encore lorsque nous recevons la visite de d’abord un, puis deux et jusqu’à six aigles pygargues à queue blanche ! Ces oiseaux majestueux planent comme les gardiens du site.
Comme prévu, nous mettons le zodiac à l’eau pour une meilleure approche du site et sommes bientôt entourés de ces somptueux animaux qui planent à une dizaine de mètres de nous à peine. Nous distinguons très nettement les jeunes des adultes à leur plumage dont nous observons les détails même sans jumelles. Certains se chamaillent en plein vol et nous pouvons voir leurs serres jaunes vif et leur bec crochu; certains tournant la tête pour mieux nous observer à leur tour. Nous écoutons avec surprise leurs cris depuis les arbres où ils se posent, découpés sur le fond gris clair de la roche à nu. Quelle rencontre inouïe!
Nous poursuivons près des parois rocheuses aux cascades figées par le gel et flânons jusqu’au détroit avant de retourner au navire, fidèle au poste, attendant notre retour.
Un repas bien mérité s’impose et nous déjeunons puis reprenons la route. Lorsque le ciel s’obscurcit plus tard, Nicolas nous fait une petite conférence sur ces aigles de mer qui nous ont conquis. Quel incroyable animal ! Nous connaissons mieux ses mœurs et sommes heureux de les avoir côtoyés de si près!
Puis Sophie nous présente un chapitre sur les mythes, contes, légendes et folklore de Norvège. Elle nous raconte les croyances des anciens, les trolls, lutins, esprits de la nature ou bestiaire fantastique; tout un monde mystérieux et ensorcelant.
Nous jetons l’ancre dans une baie abritée et dépourvue de pollution lumineuse…comme pour mettre toutes les chances de notre côté en cas d’observation d’aurore boréale. Et c’est tant mieux car bientôt dans le ciel se diffusent les premières lueurs qui ouvrent le bal… Une aurore commence. Elle prend rapidement de l’ampleur jusqu’à dépasser nos observations antérieures et toutes nos espérances: c’est de très loin la plus belle du voyage et l’un des plus extraordinaire phénomène qui nous a jamais été donné de voir!! Une symphonie de lumière et de couleurs, le rose venant s’ajouter au vert en un mariage céleste du plus bel effet. Le sublime spectacle dure longtemps et l’aurore, pour notre plus grand bonheur, se déplace et se délie, se mouvant à une vitesse insoupçonnée! Des tourbillons de lumière sont maintenant au zénith et nous sommes absolument subjugués par ce cadeau spectaculaire de dame Nature.
Nous attendons qu’elle s’estompe pour prendre le repas, décalé pour l’occasion et commentons notre chance face à ce moment exaltant en concluant que finalement, nous sommes bien peu de choses…
C’est sous un ciel gris et bas cette fois-ci que commence pour le Grand Large une journée bien à l’abri des vents violents alentours. Les rafales à 40 nœuds à la sortie du fjord ne nous incitent pas à sortir et nous décidons de rester dans la baie calme de Ulvik et de mettre les zodiacs à l’eau pour accéder à la côte protégée en une reconnaissance terrestre et une balade après le petit déjeuner.
Couverts et équipés, nous parcourons les quelques centaines de mètres jusqu’à l’embarcadère du petit village de Siládemluokta, en terre sâmée. Le nom du bourg est d’ailleurs en langue sâmé sur les cartes marines et les panneaux d’indication qui en donnent la version originale avant la norvégienne, totalement différente.
L’épaisse couche de neige s’étend sur des kilomètres à la ronde mais l’aridité du climat l’empêche de s’agglutiner, retombant en pluie entre nos doigts. Pas de bonhomme ou de bataille de boules de neige pour cette fois. En revanche, nous reconnaissons plusieurs empreintes d’animaux dans la neige mais d’autres nous intriguent. Nous cheminons entre les bouleaux et les maisonnettes vers les hauteurs, ayant pour but d’atteindre une jolie cascade de glace au loin.
Notre enthousiasme nous mène d’un bon pas jusqu’à cette imposante masse gelée qui n’est pas sans rappeler le Palais de Glace de Tarjei Vesaas dont on nous a recommandé la lecture… Sur ces hauteurs, des rafales et tourbillons de vent se pressent autour de nous; nous redescendons vers la rive après une bonne marche qui nous a ouvert l’appétit.
De retour à bord, nous déjeunons tranquillement, attendant le moment opportun pour repartir, naviguant vers le nord.
Après le café, Sophie nous donne une conférence sur les samis incluant l’histoire, les mythes et croyances mais aussi la culture et les aspects de la vie contemporaine de ce peuple premier, arrivé ici depuis le fond des âges. Un temps de pause est donné et les plus audacieux font fi du froid et se glissent vite dans le jacuzzi chauffé à point, se prélassant dans les bulles dans ce décor improbable: les noires montagnes au sommets battus par la poudreuse ne rend que plus agréable ce bain chaud relaxant.
Plus tard, une conférence sur la bataille de Narvik est présentée par Sophie : nous sommes en effet tout près du Ofotfjord où se déroulèrent certains de ces événements marquants de la 2e Guerre Mondiale et une page douloureuse de l’histoire est abordée. Nous pensons à ceux qui combattirent sous ces latitudes glacées et y laissèrent parfois la vie.
Lors du point récap’ et infos, nous abordons le programme du lendemain et l’ambiance est égayée par une dégustation de bonbons et sucreries norvégiens, bien étranges pour nos papilles. Mais nous veillons à notre intégration et goûtons tous les spécimens!
Après un petit apéritif, nous passons à table pour le dîner puis Nicolas nous présente une conférence sur l’expédition vers le pôle nord de Nansen à bord du Fram, ce bateau conçu pour un astucieux voyage immobile. Nous commentons cette entreprise incroyable et restons longtemps au salon, parlant de cartes et courants marins, voguant nous-même en direction de Tromsø, porte de l’Arctique que nous découvrirons demain matin, après une nuit de navigation.
Le port de Tromsø se dessine dans ce matin bleu qui vire au rose alors que nous petit déjeunons. Une belle journée s’annonce. Nous avons choisi l’excursion d’immersion dans le monde des samis pour une matinée au grand air chez ces éleveurs de rennes et partons à leur découverte à l’intérieur des terres. Avec un grand plaisir nous participons aux activités en traineau et écoutons avec recueillement leur histoire et un moment de poésie avec un chant traditionnel, le joïk, aux mélopées envoûtantes. Les autres profitent de leur matinée libre et flânent dans les rues ensoleillées de la ville ou visitent musées et commerces.
Après le déjeuner, nous nous retrouvons pour la visite du Polaria, ce musée à l’architecture originale qui présente le monde arctique : les films panoramiques et l’exposition des glaces nous montre mieux encore la fragilité de ce monde en sursis. Nous avons la surprise d’y découvrir aussi des représentants de la faune locale avec des poissons des eaux norvégiennes dont le loup de l’Atlantique à l’aspect peu engageant mais grand régulateur de l’écosystème local ou quelques phoques communs et barbus aux vibrisses étonnamment longues.
Nous poursuivons ensuite par une visite de Tromsø, nous arrêtant devant ses édifices rescapés des incendies ravageurs, sa cathédrale de bois ou son originale bibliothèque imposante, sa statue de Amundsen et sa rue principale avant de retrouver le Musée Polaire pour une autre approche du monde de l’Arctique. Des baleiniers aux trappeurs en passant par les navigateurs et grands héros polaires, nous (re)découvrons ce monde fascinant mais hostile, profitant de nombreux objets et héritages de ces hommes (et femmes) peu ordinaires. L’exposition temporaire nous offre quant à elle la possibilité de voir de fabuleux trésors de cartographie dont certaines des plus anciennes cartes de l’Arctique et de nombreux originaux. Ce monde encore méconnu qui sera peu à peu conquis à mesure que l’on apprendre à le connaître.
Nous nous apprêtons à poursuivre vers le téléphérique mais là encore, Borée, dieu des vents du nord en a décidé autrement : les rafales sur le sommet sont si fortes que la circulation des nacelles est interrompue jusqu’à nouvel ordre. Que pouvons faire sinon nous incliner face à la force de la nature? Nous choisissons de faire un arrêt devant la cathédrale arctique, superbe édifice massif tout en force et transparence dont l’énorme vitrail nous impressionne tant par ses dimensions, sa beauté ou ses prouesses techniques de construction.
Nous rentrons ensuite à bord pour une pause et, malheureusement, nous préparer à notre dernière soirée. Que le temps passe vite ! Après un récapitulatif du voyage et les instructions du lendemain par Sophie, un dernier verre d’adieu est donné au salon en présence de l’équipage : ses membres souriants, discrets et professionnels nous aurons rendu le voyage très agréable et nous soulignons combien ils sont indispensables à la bonne marche du navire. Du commandant au chef mécanicien, de la stewardesse aux matelots, tous sont chaleureusement remerciés et applaudis.
Notre dîner se passe dans une ambiance insouciante, comme pour mieux profiter jusqu’à la dernière miette de notre croisière nordique, sans penser au lendemain et nous ne rejoignons que tardivement nos cabines pour notre dernière nuit boréale.
Suivez nos voyages en cours, grâce aux carnets de voyages rédigés par nos guides.
Messages
un petit coucou à notre DEESSE NORVEGIENNE SOPHIE
elle est imbattable sur la NORVEGE
encore merci pour notre dernière croisière ça restera inoubliable !
bises de babeth et andre
Bien que rentrés chez nous depuis 15 jours, nous somes toujours émerveillés par ce voyage aux îles Lofoten! Sylvie est la reine des guides.Elle nous a initiés à ce monde norvégien que nous ne sommes pas prêts d’oublier!