2 février
12 février 2015
À bord du Plancius, février 2015
Nous sommes arrivés à Ushuaia en fin de matinée après un trajet fait de décollages et d’atterrissages. À peine le temps de sortir quelques vêtements adéquats, nous partions en bus depuis l’aéroport, direction le Parc National de Lapataia. Notre guide locale, Ilenia, nous fait découvrir les paysages magnifiques de la Terre de Feu : forêt, tourbière et lac peuplés de cygnes, canards et autres espèces d’oiseaux locaux. Demain, nous partirons sur le canal beagle pour faire connaissance de la faune marine de Terre de Feu. En attendant, c’est l’heure de dormir un peu.
Dès le matin, nous partons à bord d’un catamaran à moteur pour naviguer dans le canal de Beagle. Notre premier contact avec la faune marine : les colonies de cormorans royaux sur les rochers à fleur d’eau. Nous naviguons d’îlots rocheux en îlots rocheux, parfois colonisés par les lions de mer, parfois par les oiseaux. Et quelle surprise ! Nous observons une baleines à bosse tout près du bateau ! Nous revenons à Ushuaïa pour le déjeuner. À 16h, nous embarquons à bord du Plancius et nous levons l’ancre vers 18h. À peine partis, autre grande surprise de la journée : une espèce rare de dauphins (Lissodelphis peronnii) nous accompagne pendant de longues minutes. Nous avons le temps de bien les observer. Leurs caractéristiques : ils ne possèdent pas d’ailerons dorsal. Ce premier jour s’annonce plutôt pas mal !
Une journée complète en mer dans le passage de Drake et nous avons survécu ! Il faut dire que la météo est plutôt de notre côté. Nous avons eu hier un temps magnifique, et nous avons pu profiter des ponts extérieurs. Le seul hic : une grande houle de travers fait rouler le Plancius. Sans nous rendre vraiment malade, elle est assez forte pour retourner quelques estomacs. Heureusement le ballet des albatros hurleurs, royaux et des beaux albatros à sourcils noirs nous font oublier cette houle. Ces oiseaux jouent littéralement avec les vents et les vagues pour notre plus grand plaisir. Quelques conférences agrémentent également la traversée. Nous en avons appris beaucoup sur l’Antarctique, la géologie et les oiseaux du Grand Sud !
Nous continuons de naviguer toute la journée. Nous avons passé la convergence antarctique dans la nuit et les albatros ont laissé la place à des espèces plus antarctiques. Le matin est consacré à la « décontamination ». Pas question d’amener des plantes ou autres organismes qui pourraient être invasifs en Antarctique. Pour cela, nous aspirons scrupuleusement toutes nos affaires pour éliminer les résidus coincés dans les replis de vêtements ou de sacs. L’après-midi, Christian nous présente une conférence sur l’exploration de l’Antarctique. Mais les facétieuses baleines lui jouent un tour… comme toujours. Voilà 2 rorquals communs qui doublent le navire à pleine vitesse. Ils viennent à l’étrave. Tout le monde se précipite à l’extérieur pour observer ces géants des mers. De toutes part, on déserte le salon et la conférence. Christian arrive à récupérer son assemblée quelques 20 minutes plus tard pour finir sa conférence passionnante… les animaux de l’Antarctique ont de l’humour !
Nous sommes à Portal Point et nous nous préparons dès 8h00 à débarquer pour notre première sortie. Nous montons dans les zodiacs et débarquons. Nous avons le pied sur le continent antarctique ! Ça y est ! Nous grimpons sur la neige pour avoir un point de vue sur les alentours. Les montagnes et les paysages enneigés en bord de mer sont sublimes. Les otaries à fourrure tentent, en redescendant, de nous barrer la route. Qui ose troubler le repos de l’otarie s’expose à de graves ennuis. Nous nous en sortons sans peine. Nous repartons pour une croisière zodiac. Nous tournons autour des majestueux icebergs, on aperçoit au loin une baleine à bosse. Le vent se lève, caractéristique de la météo en Antarctique. Nous rentrons donc quelques peu humides. L’après-midi, nous repartons à terre, direction une colonie de manchots papous. Nous restons des heures à observer manchots et paysages. Des baleines à bosses et des petits rorquals sont aussi dans la baie. Au retour au bateau, certains aperçoivent même un léopard de mer dévorant un manchot papou… Triste mais belle observation !
Nous sommes ce matin à Neko Bay, prêts à débarquer à Neko Harbour. Nous débarquons près d’une colonie de manchots papous qui, comme les autres manchots à cette époque, sont affairés à aller et venir de la mer pour nourrir le poussin au nid. Nous essayons donc de nous faire petits et discrets en traversant les « autoroutes » à manchots. En effet, pour éviter de s’enfoncer dans la neige, les manchots empruntent tous le même chemin en formant une petite piste de neige tassée. Sur le chemin du retour pour le bateau, en zodiac, nous nous arrêtons pour voir les baleines à bosses qui tournent là encore dans la baie. L’après-midi, nous débarquons à la station Argentine, nommée Brown. Nous partons au point de vue qui domine la station. Pendant ce temps, d’autres font une croisière zodiac puis nous inversons. Nous partons en zodiac, la baie du Paradis porte bien son nom. Les glaciers sont splendides. Des léopards des mers se prélassent sur de petits icebergs. C’est l’occasion d’observer de près ce redoutable prédateur de manchots… En rentrant à bord, soirée festive avec le barbecue sur le pont arrière !
Nous entrons dans le chenal Lemaire après le petit-déjeuner de 7 heures et demie. Le commandant nous offre une splendide navigation entre sommets enneigés de part et d’autre du chenal, magnifique icebergs aux formes et aux contrastes variés… Quelques baleines nous accompagnent durant quelques minutes. Nous débarquons à Port Chacot. L’endroit est splendide. 3 espèces de manchots (jugulaire, Adélie et papou) se côtoient ici sur les sites de reproduction. Le site est également hautement historique : c’est le lieu où l’expédition de Jean-Baptiste Charcot hiverna en 1904 à bord du navire le Français. Le paysage, l’ambiance, la météo, les animaux… tout y était ! Dans l’après-midi, nous nous divisons en 3 groupes. Les premiers partent visiter la station scientifique ukrainienne de Vernadsky, les seconds se rendent sur le site historique de la station qui a été restaurée et qui est entretenue par une association britannique. Pendant ce temps, les derniers se promènent en zodiac. Une belle journée dans l’ambiance antarctique.
Toujours sur les traces de Jean-Baptiste Charcot, nous débarquons au matin sur Peterman island (site du second hivernage à bord du « Pourquoi Pas ? »). Le but de la matinée est entre autres de pouvoir voir de plus près les manchots Adélie dont les colonies se réduisent en Péninsule Antarctique au profit des manchots papous. Les jeunes ont quasiment fini de muer et nous pouvons observer ces jeunes « ados » sur le point de vivre une des plus grande aventure de leur vie : quitter le nid et la terre pour partir en mer. L’après-midi, nous sommes en face de Port Lockroy, ancienne station britannique qui fut abandonnée pour être récupérée et restaurée par la suite. C’est le moment de faire un peu de « shopping » en Antarctique ! Nous remontons à bord. Il est temps de dire au revoir au grand continent blanc. Nous prenons désormais la route des îles Shetlands du Sud.
Nous entrons dans la caldéra de Deception Island à 7h00 du matin. Nous prenons ensuite le petit-déjeuner à bord, devant Whalers Bay, puis nous débarquons. L’ambiance de Deception Island est toujours spéciale : île volcanique, ancienne station baleinière dont les restes rouillés et à semi enfouis trônent sur la plage… Le paysage peut paraitre austère aux yeux de certains, mais il y a de quoi faire et de quoi regarder ! Les plus courageux d’entre nous tentent même une petite baignade polaire. Dans l’après-midi, nous descendons à Hannah Point. C’est là notre toute dernière sortie. Nous arpentons les plages et le site sous le regard des jeunes manchots curieux et téméraires. Finalement, les Shetlands du Sud nous auront réservé quelques belles surprises : éléphants de mer, colonie de manchot à jugulaires, pétrels géants et leurs petits. Cette dernière sortie fut un bel au revoir au grand Sud. Il est l’heure de remonter à bord et de se préparer pour le « terrible » Passage de Drake. A demain… si bien sûr on a encore la force de vous raconter nos aventures ;-).
Nous sommes tous à peu près debout… Plus ou moins selon certains. La mer est plutôt belle, mais la houle légèrement de travers fait rouler le Plancius. Les plus courageux se rendent tout de même au salon panoramique pour écouter la conférence de Chris au matin. Conférence si passionnante sur les expéditions de Adrien de Gerlache puis sur celles de Jean Baptiste Charcot que tout le monde en oublie le mal de mer. Même les facétieuses baleines n’ont pas osé venir l’interrompre cette fois-ci… c’est dire. Puis c’est au tour de Gérard de nous présenter une conférence sur l’Ocean Austral puis à Andrew de nous présenter une conférence sur la glace, tant de milieux qu’on a côtoyé ses jours-ci et qui nous étaient pourtant si inconnus jusque là. En fin de journée, Gérard nous fait un petit récapitulatif sur la biologie des éléphants de mer que l’on a vu la veille.
À vous qui nous lisez, parents (on vous sait assidus), enfants, amis, sachez que nous sommes toujours vivants… et entiers ! Le vent a forci dans la nuit, atteignant 45 nœuds en milieu de matinée. La grande houle qui nous accompagnait jusque-là s’est progressivement déchainée, les moutons et les traînées d’écume en disaient long sur la puissance de l’océan. Heureusement, sur le Plancius, nous sommes à l’abri, bien loin des bateaux de l’époque de l’exploration qui se lançaient à la conquête d’un nouveau monde. Nous avons beau être à l’abri, nous avons tout de même hâte que ça se termine. Les verres se renversent à table, les assiettes glissent et s’entrechoquent, les passagers sur les chaises finissent à la table des voisins et on vous passe les détails… Céline a quand même eu la force de nous faire une conférence sur les manchots en début de matinée. Nous étions nombreux à y assister… à croire que les manchots nous manquent déjà.