Marianne Duruel
Coordination et Photographie
12 septembre
21 septembre 2015
À bord de l’Amazon Dream, septembre 2015
Marianne Duruel
Coordination et Photographie
Partis de Paris ou de Lisbonne, nous nous retrouvons tous pour le vol transatlantique. Il s’avère excellent, mais un peu plus long que prévu, car nous faisons une escale à Madère pour y déposer un passager mal-en-point… Nous profitons de la perspective sur de bien belles falaises volcaniques avant d’atterrir… Puis, nous survolons la forêt amazonienne avant d’atterrir à Manaus. Par rapport au mois dernier, l’eau a baissé, des plages sont maintenant bien visibles. Mais malheureusement, de grands panaches de fumée se mêlent aux nuages générés par la respiration de la grande forêt. Un dernier vol et nous voici à Belèm. Rute, notre guide francophone, nous attend à l’aéroport et nous filons nous installer dans notre hôtel au coeur du Belèm historique. C’est l’occasion d’un premier dîner brésilien. Bienvenue au Brésil !
Aujourd’hui, notre découverte de l’univers amazonien commence par la visite de Belèm (Bethléem, en portugais), la « ville des manguiers ».
De la forteresse bâtie par les Portugais en 1616 sur le territoire des Tupinambas, il reste un parfum de métissage : des habitants, mais aussi des façades colorées, quelques azulejos par-ci, par-là, ambiance exotique des marchés, musique omniprésente… D’ailleurs, nous sommes dans le quartier du nom du marché « ver-o-peso » (soit : « avoir le poids »), évocation d’un temps où les Amérindiens traversaient la baie de Guajara pour vendre le fruit de leurs cueillettes et pêche. Et leurs produits étaient pesés par les Portugais pour en vérifier le poids…
Ici, chaque quartier a son marché et nombreux sont ceux qui en vivent dans une ville de 2 millions d’habitants où la vie n’est pas toujours facile. Ces marchés ont lieu tous les jours de l’année, sauf 1… Le jour de la grande fête et procession : « Le Círio de Nossa Senhora de Nazaré » (Le cierge de Notre-Dame de Nazareth). Elle rassemble plus de deux millions de personnes. C’est considéré comme l’une des plus grandes fêtes catholiques au monde. Le festival du Círio de Nazaré rend hommage à Notre-Dame de Nazareth. Lors du 2e dimanche d’octobre a lieu la grande procession, point d’orgue des festivités, au cours de laquelle une image sur bois de Notre-Dame de Nazareth est transportée de la cathédrale de la Sé jusqu’à l’esplanade du Sanctuaire, 2,4 kilomètres… De très nombreux pèlerins viennent de tout le Brésil pour y assister. En attendant, nous découvrons la baie de Guajara, la perspective sur la vaste île de Marajo, sa superficie représente 2 fois 1/2 la superficie de la Suisse… et explorons les divers secteurs spécialisés du marché. Noix du Brésil, préparations à base de manioc, marchés aux poissons aussi impressionnants par leurs tailles que variés. Puis, c’est le marché aux volatiles, aux épices, aux fruits et légumes…
Couleurs et parfums sont au rendez-vous ! Les produits médicinaux locaux nous occupent un certain temps : cela va des huiles aux vertus anti-inflammatoires aux « philtres d’amour »… Nous continuons vers la cathédrale, fort animée : c’est dimanche et le moment des baptêmes… La visite de la forteresse et de son musée est intéressante. Rute nous raconte toutes sortes de pratiques amérindiennes. Mais il faut dire que les photographes ont un peu « dévié » de leur sujet, car une danseuse exécutait quelques sauts et entrechats sur la muraille du fort…
Le jardin zoo-botanique du centre de recherches E. Goeldi nous permet, ensuite, de découvrir quelques espèces que nous avons peu de chance de rencontrer, mais barreaux et grillages sont trop nombreux à notre goût… Enfin, un déjeuner sur le port est très apprécié de tout notre petit groupe après cette matinée bien remplie. Ce soir : bienvenue à bord de l’Amazon Dream !
Notre premier débarquement à Santarém nous amène directement vers le marché aux poissons. Il est intéressant de noter la différence par rapport à celui de Belèm. Il y a ici une bien plus grande variété d’espèces. Les petites embarcations arrivent au port et régulièrement, un pêcheur, son stock de poissons sur la tête, approvisionne un étal. Partout, on s’affaire ! Bientôt sont alignés les tucunarés avec les taches imitant un oeil pour « tromper l’ennemi » et mieux chasser ainsi, les acaris dont la farine permet de faire des boulettes, les aruanas réputés pour leurs sauts pour attraper des fruits… Un boto vient jouer avec le poisson qu’un poissonnier lui lance au bout d’une ficelle… Cela nous donne l’occasion de bien observer le mythique dauphin. Des morceaux de poissons donnés aux grandes aigrettes attirent les grandes silhouettes blanches qui se succèdent dans de grandes envolées… Parfois, un cormoran s’invite au repas. Là, il a volé un morceau au pacifique boto. Plus loin, les bananes sont déchargées. Vertes, elles seront mangées salées, jaunes, elles seront dégustées sucrées. La pharmacopée présente des réponses à toutes les situations « délicates ». Nous retrouvons certains produits, mais là, il y a encore plus de choix. La forêt offre les bienfaits de ses arbres. Le guarana est très énergétique, il est vendu en poudre.
Au Brésil, la canette de guarana est plus bue en boisson énergisante que le coca… Le carapanauba est un antipaludéen, le bois du preciosa est un excellent parfum d’intérieur, l’huile d’andiroba sert aux massages, comme antidouleur, comme répulsif contre les insectes et en cas de problèmes respiratoires; l’huile de copaïba est un anti-inflammatoire… Les fruits exotiques, pour nous, sont présentés par notre guide Karim. Notamment, la noix du Brésil ou noix du Para. Le fruit, plus dur que la noix de coco, en contient 10 à 35. Un petit trou donne accès à une petite graine riche en quinine. C’est un excellent moyen de défense contre les insectes. Plongée dans un verre d’eau, on l’utilise contre la malaria. C’est aussi un répulsif pour l’homme. Seuls les agoutis et certains singes parviennent à l’ouvrir. Les noix de cajou et la partie charnue du fruit sont aussi consommés. Les multiples utilisations du manioc sont ensuite illustrées. Nous assistons à la préparation du jus d’açaï… De retour à bord, déjeuner, puis l’Amazon Dream amorce notre périple… L’Amazone et le Tapajós longent pendant plusieurs kilomètres la ville, côte à côte, sans se mélanger. Ce phénomène est appelé « La rencontre des eaux » par les habitants. Les eaux de l’Amazone, chargées des sédiments arrachés à la Cordillère des Andes présentent une opacité « laiteuse », tandis que l’eau de Tapajós, un peu plus chaude, est d’un bleu profond. Les « volutes » chargées de sédiments de l’Amazone se voient bientôt en transparence. Les eaux du Tapajos se densifient et se troublent. Finalement, le gigantesque Amazone intègre dans ses flots les eaux du Tapajos. Nous descendons un peu le cours du vaste fleuve puis prenons un bras longeant l’île d’Ituqui.
C’est le « canal » d’Ituqui. Là, nous découvrons l’univers de cabocles et le monde de la Varzea. Les cabocles sont des métis d’Indiens et de Portugais. Leurs maisons sur pilotis leurs permettent de vivre environ 6 mois de l’année dans le secteur de Varzea. En effet, les forêts de Varzea, inondées 6 mois sur 12, ont laissé la place à des pâturages. Le spectacle est permanent, à 360° et nous le suivons jusqu’au coucher du soleil…
C’est au lever du soleil sur le Rio Curua-una tout rosissant que nous partons explorer ses rives. Les photos prises au lever du jour présagent d’une belle journée. Nous partons de l’Amazon Dream, ancré en face du petit village de Pacoval, pour explorer les rives. La lumière est rasante et chaleureuse. Les oiseaux se réveillent et se sèchent de la rosée nocturne avant de redevenir actifs. Ils sont nombreux : un couple de tyrans des savanes dont la longue queue noire offre un vol spectaculaire surtout lorsqu’ils chassent des insectes en vol. Un milan des marais est en train de déguster un crabe sur une branche. Régulièrement, nous sommes survolés par des aigrettes.
Sur un bosquet, un grand Kamichi cornu est posé et nous l’observons tout à loisir. Mais il n’est pas seul et le kamichi est bruyant… D’autant plus en période de reproduction. Un peu plus loin, un urubu royal s’épouille sur une souche. Il est de profil et on voit bien, sur les photos ou aux jumelles, que les 2 narines communiquent, on voit le jour à travers… C’est un des rares oiseaux avec le kiwi et l’albatros à sentir… Mais chez les kamichis cornus, on s’agite beaucoup. 3 grandes silhouettes noires et blanches décollent et vont se poser dans des herbes derrière un grand radeau de jacintes d’eau. Et loin des spectateurs indiscrets, le couple se reproduit. Puis, c’est le balbuzard pêcheur qui est suivi. Il déploie son 1,70 m d’envergure pour décoller. Ce pêcheur efficace peut sortir une proie de son propre poids de l’eau. Son poitrail blanc est bien reconnaissable.
C’est l’heure où les sternes amazoniennes s’ébrouent. Les jacanas arpentent de leurs longs doigts de pied la végétation aquatique à la recherche d’insectes. Un bond dans une envolée de plumes claires qui contrastent avec le fauve sombre et le noir de son dos. Puis, nous croisons des singes hurleurs noirs qui commencent tranquillement leur journée à la recherche des premiers fruits et feuilles tendres. Mais malgré l’intérêt porté aux singes, en général, les appareils photos et les caméras se concentrent vite vers un superbe colibri dont les couleurs sont flamboyantes. La petite femelle de dryade à queue fourchue est particulièrement coopérative même s’il ne nous quitte pas de son petit oeil noir. Il sèche ! La forêt de Varzea se reflète dans l’eau.
C’est superbe ! Un héron cocoï, des petits perroquets verts, une buse à tête blanche, des buffles… plus loin et c’est le retour au bateau pour le petit-déjeuner. La suite de la matinée se passe en forêt, derrière le village de Pacoval. Une piste y mène. Nous observons la dextérité avec laquelle le propriétaire des lieux prépare une palme du palmier curua pour en faire un parfait élément de la couverture d’une toiture traditionnelle. Les nids de cigales, semblables à des silhouettes de petits « phares » maçonnés, sortent régulièrement du sol du sous-bois. Le nid se poursuit par un petit tunnel qui peut descendre à 1 m sous terre. Karim nous identifie la liane « escalier de tortue », le cumaru au parfum de vanille, les robustes troncs de picias, d’itauba si résistants aux termites et aux méfaits de l’eau… Le massaranduba est le bois le plus exporté, notamment aux États-Unis.
Les utilisations des différentes essences sont nombreuses. Les insectes sont également présents comme le phasme, l’insecte lanterne… L’apéritif se passe au bar de Pacoval avant de traverser le village et de regagner le bord pour le déjeuner. Après un petit détour pour découvrir les nénuphars géants : Victoria regia ! L’après-midi est consacré à la navigation vers Monte Alegre.
Un petit tour en annexes au coucher du soleil nous offre un beau spectacle ponctué de libellules…
Sur le port de Monte Alegre nos 4X4 nous attendent, aujourd’hui nous pénétrons plus à l’intérieur des terres. Nous quittons les rues pentues du port vers la campagne. Partout, des barrières ferment les gigantesques parcelles des fazendas. Dans un paysage de savane, du bétail efflanqué s’échine à trouver les derniers brins d’herbe. Un grand caracara huppé cherche son petit-déjeuner. Nous sommes dans une région d’élevage extensif rythmé par l’Amazone et le niveau de ses crues. Le bétail passe 6 mois environ de l’année sur la « terra firma », littéralement « terre ferme » sur les hauteurs et redescendent vers les secteurs de Varzea, inondés pendant 6 mois. Les sols riches de sédiments donnent un aliment riche et à croissance rapide. Cette année, le niveau de l’Amazone a été particulièrement haut et, dans ce cas, les troupeaux doivent patienter en haut avant de pouvoir profiter des verts herbages ponctués de lambeaux de forêt de Varzea. Mais cette journée est surtout sous le signe de l’histoire. Nous nous dirigeons vers les montagnes « Serra de la Lune » et « Serra Ireré » pour y découvrir aussi bien les très beaux paysages liés à l’histoire géologique de cette région que son aspect historique humain.
En effet, certaines grottes abritent des peintures rupestres datant de 11 200 ans. C’est Anna Roosvelt qui a travaillé sur ces sites et fait des fouilles dans cette région dans de 1990 à 1992. Les mouvements tectoniques qui ont animé depuis 90 millions d’années le bassin amazonien tandis que la plaque de Nazca s’enfonçait plus ou moins vite sous la plaque de l’Amérique du Sud ont soulevé certains secteurs tandis que la mer Pebas se retirait. Ces pressions énormes ont donné les 7000 km des Andes… et engendré quelques soulèvements et fractures, laissant ainsi s’échapper du magma. Les hauteurs volcaniques sont spectaculaires. Le contraste est saisissant entre ces roches sombres et les fines particules noires du sol, dans une région de sable doré et de roches sédimentaires formées sous la mer Pebas… Nous faisons plusieurs arrêts. Au premier, des peintures rupestres évoquent, pense-t-on, les phases de la lune. L’érosion a donné de belles cheminées de fée, à grande échelle et en réduction. En effet, les précipitations sont, ici, si violentes que le moindre petit caillou sert de protection au sol sablonneux sur lequel il est posé. Ainsi de petites cheminées bordent la piste par endroits. Nous pénétrons dans des grottes spacieuses ornées, par endroits d’étranges représentations, ocre foncé ou jaune orangé, réalisées à partir de roche broyée et donc de pigments minéraux mélangés à… de l’urine. De toute évidence, ça résiste très bien au temps. Du point culminant de notre trajet, la perspective s’étend lac de Monte Alegre et toute la région. Là, en plus des représentations de scorpion… dans une anfractuosité vit toute une colonie de petites chauves-souris que notre présence inquiète. Notre dernière étape se gagne en voiture et à pied. Le site est très peu visité et les pistes sont peu entretenues, il y a peu, des arbres tombés la rendaient inaccessible. Le dernier site se fait en deux temps : les grottes et dans les éboulis l’accès à un très bel ensemble avec des mains, la « femme qui accouche » selon certaines interprétations… Puis, c’est le retour où notre déjeuner a été préparé spécialement… pour nous aujourd’hui… Après une belle navigation, nous avons rejoint le cours de l’Amazone et le tour d’un petit îlot au coucher du soleil nous offre un superbe spectacle de dauphins en pleine pêche : sotalies et botos ensemble, de multiples oiseaux regagnant leurs dortoirs, notre premier paresseux… Une journée bien remplie !
Ce matin, l’Amazon Dream a commencé à naviguer tôt et, lorsque nous prenons notre petit-déjeuner, nous sommes sur l’Amazon et « doublons » des barges au chargement très impressionnant. Elles sont poussées par un seul petit remorqueur. Cela peut être : une barge ou deux chargées de remorques de camions, des barges de sable et leur pelleteuse… Pour le soja, le remorqueur en pousse 3… Le convoi vient charger à Santarem et redescend à Belèm. Pour nous, il s’agit d’explorer un nouveau secteur de Varzea. Pour ce faire, nous passons par un canal sur les berges duquel paît du bétail. Certaines zones sont cultivées: bananiers, canne à sucre… Les petites pirogues des pêcheurs vont et viennent. Puis, c’est la traversée très « dans le vent »… de l’extrémité du lac de Monte Alegre et l’arrivée dans les chenaux. Le calme y règne, même si le courant y est bien perceptible. Au loin, les « allées et venues » d’un grand rassemblement de dendrocygnes à ventre noir créent une belle agitation. Nous nous enfonçons dans la forêt inondée et suivons les méandres des chenaux principaux. De petits hérons striés aussi timides que bruyants s’envolent régulièrement. Les clôtures couvertes de végétation sèche par la crue ressemblent à des haies… Soudain, dans de grands arbres retentissent de petits sifflements facilement assimilables à ceux d’une colonie d’oiseaux. En fait, il s’agit de saïmiris ou singes-écureuils. Le petit groupe d’une vingtaine d’individus se déplace en se nourrissant tout en discutant. Les petites créatures à la face blanche sont tout étonnées devant les cliquetis des appareils photo et se penchent en tournant la tête dans tous les sens, pour les plus imprudents… Les autres ont continué leur « chemin », en file indienne sur des « axes de circulation » choisis par les plus expérimentés. Nous reprenons notre navigation, un peu à regret… Toucans, grandes aigrettes, martins-pêcheurs à ventre roux, d’Amazonie, anis des palétuviers… nous occupent un certain temps. Puis, nous empruntons un plus grand chenal. Les terres récemment sorties de l’eau sont très fréquentées. Là, les iguanes verts font le « spectacle »: sur les buissons, dans les arbres, au sol. Ici passent des pirogues, petits bateaux familiaux, plus grands de transport de bétail. Des pêcheurs s’activent. Sur les rives, on se « douche », on fait la lessive. Dans un petit décrochement tranquille, un onoré rayé semble statufié tant il est concentré sur sa pêche. Le final se fait dans un bosquet où une famille de singes hurleurs roux est aperçue avant notre retour vers le bateau. Après le déjeuner, Santarem nous attend. Karim nous entraîne dans sa ville… Nous pénétrons dans la cathédrale à la façade portugaise. Quelques rares façades portent encore cette « signature » architecturale. Au centre de la place des pêcheurs, une statue du « mocorongo », celui qui est né et a vécu à Santarem, porte la clé de la ville et une pagaie. Il est protégé par la muiraquita, grenouille fétiche, symbole de la cité. L’Amazon Dream lève l’ancre pour le canal de Jari. Il relie le fleuve Tapajos à l’Amazon. Nous arrivons au coucher du soleil. Et, c’est bientôt le moment de la traditionnelle caïpirinha et de la causerie du soir…
Hier soir, au moment où quelques-uns d’entre nous testaient leur talent en matière de pêche au poisson-chat, un bateau de transport de bétail était arrivé. Les meuglements ne laissaient aucun doute là-dessus… Ce matin, nous comprenons l’excitation que ces animaux pouvaient ressentir. Certains sont tellement maigres que, comme l’a très bien dit quelqu’un du groupe: »on pourrait presque voir à travers »… Manifestement, il ne reste plus rien à manger sur les hauteurs. Certains bovins se prélassent dans l’eau tout en mâchant des joncs, d’autres savourent la jeune herbe qui commence à sortir de la terre limoneuse. Les plus curieux viennent nous voir et nous observent. Tout le monde s’en amuse: « De vrais touristes », « Il ne leur manque plus l’appareil photo »… Il faut dire qu’elles sont amusantes ces résistantes vaches brahmas. Les cabocles les plus récemment arrivés sont en pleine réfection de leur maison sur pilotis et des dépendances. Il faut dire que lorsque les hautes eaux sont de l’ampleur de celles de cette année, les installations en ont parfois un peu… pâti.
Certaines constructions penchent dangereusement… Les toits de palmes déjà refaits tranchent par leur couleur de paille parmi les vieilles couvertures délavées. Malheureusement, le modernisme et la facilité les font de plus en plus remplacer par de la tôle ondulée, certes, bien plus rapide à installer, mais tellement moins adaptée au climat… Ainsi, beaucoup de hamacs sont accrochés dehors ou en plein courant d’air près des ouvertures. Dans ces habitations, l’atmosphère devient vite plus proche de celle d’un sauna que d’une maison où il fait bon vivre. Et, là, elles sont sur pilotis… Quand les murs sont en briques, c’est pire. Pour l’heure, c’est le réveil des orioles jaunes. Ils quittent leur arbre-dortoir et de multiples « éclairs » jaunes animent la végétation environnante. Ils gagnent les lieux où ils vont se nourrir sur les terres récemment sorties de l’eau. Elles sont très fréquentées. Des limicoles s’y affairent déjà en grand nombre: vanneaux téro, chevaliers grivelés, vanneaux de Cayenne… On y rencontre aussi les ibis mandore. En bordure de l’eau, entre les clôtures et les plantes aquatiques, vont et viennent de petits groupes d’anis à bec lisse. Dans un arbre, des engoulevents sommeillent.
Avec nos embarcations légères, nous pouvons remonter le canal facilement et explorer d’étroites voies secondaires. De-ci, de-là s’envolent des milans des marais. Des petites sternes amazoniennes pêchent. Nous bifurquons dans un étroit chenal où une belle surprise nous attend.
Tout un groupe de hoazins huppés font soudain entendre leurs étranges voix… Cela donne des sons ressemblant à ceux de différents animaux, mais sûrement pas à des oiseaux. Les très beaux mais très maladroits volatiles nous regardent de leurs beaux yeux rouges cernés de bleu.
Leurs huppes s’agitent dans le vent. Ils se penchent pour nous observer. Quand l’un décide que la situation peut être dangereuse, il s’élance et on ne peut pas parler d’atterrissage… Il s’écrase sur le buisson ou l’arbre voisin tout proche… C’est normal ! Il faut dire que cet extraordinaire dispose d’un système digestif qui a modifié son anatomie et l’a rendu inapte à un vol de qualité. Mais qu’il est beau et sympathique ! Un peu plus loin, un iguane tétanisé dans l’eau à notre passage, quasiment contre le bateau, fait le mort… persuadé que nous ne l’avons pas vu… Un peu plus loin, tandis que certains sont concentrés sur la pêche aux piranhas, d’autres observent et photographient les voisins: petits perroquets verts en plein repas, cassique cul jaune s’affairant autour de leur nid. Que ce lieu est riche ! La journée se poursuit par une baignade sur un sublime banc de sable et la navigation vers Maguari.
Lever du jour, aujourd’hui sur une journée spéciale: celle de la grande marche en forêt secondaire puis primaire dans la réserve extractiviste de Tapajoara. Elle représente 600 000 ha. Sur la partie qui longe le Tapajos, de communautés indiennes sont établis dans de petits villages. Traditionnellement, ils vivaient de pêche, de chasse et de cueillette sans porter préjudice à la forêt. Les réserves de ce type sont un « bouclier » pour ces descendants des peuples premiers qui tentent de sauver leur mode de vie face aux « machines de guerre de la civilisation »: bulldozers, tronçonneuses… Leurs langues ne sont transmises qu’oralement et leurs rituels basés le respect de « mère nature » qu’ils remercient pour ses bienfaits et sa générosité pour les faire vivre en harmonie avec elle… Pour l’heure, nous sommes à Maguari où un superbe ipé jaune en fleurs nous accueille, puis, « bon pied, bon oeil », nous voilà maintenant parés pour l’immersion dans l’ »océan vert ». D’abord, une démonstration d’extraction du latex, même si la meilleure saison va de janvier à août. Au pied d’un andiroba, nous apprenons comment se fabrique l’huile aux nombreuses propriétés bien utiles. Elle a une place de choix sur les présentoirs de la pharmacopée naturelle à Belem, Santarem , Manaus et… L’urucum, petit arbre buissonnant voisin, présente en même temps: boutons floraux, fleurs, fruits mûrs et fruits désséchés… Avec les graines contenues dans ses fruits, une fois écrasées, certains se retrouvent avec de beaux dessins rouges sur les bras… La forêt secondaire dans laquelle nous nous enfonçons, en suivant un petit sentier, offre remèdes et solutions à bien des maux… La sève du sucuba contre la gastrite, celle du breu comme combustible pour faire une torche, les fourmis tachis sont écrasées sur la peau comme répulsif. Mais il faut supporter de mettre la main sur la fourmilière en « ébullition »…
Le jatoba fournit des graines pour l’artisanat. Son fruit au goût farineux sucré se consomme aussi. La racine de « l’arbre qui marche » ou imbauba, coupé avec art, donne de l’eau à qui veut survivre dans la forêt. Au bord du sentier, des morceaux d’un grand itauba tombé, il y a 10 ans, sont encore parfaitement intacts… Preuve, s’il en était besoin, de sa résistance à l’eau et aux insectes, en plus de sa flexibilité légendaire qui en fait un excellent bois pour la construction des bateaux. Une fois montés sur le petit plateau à 200 m d’altitude, nous sommes dans la forêt primaire. Fini, le sous-bois quasi impénétrable, si ce n’est équipé d’une machette, l’outil indispensable et inséparable de tout local qui se rend en forêt. La forêt primaire présente un sous-bois nettement plus « aéré ». Certains troncs forcent notre admiration: picias (aux pieds desquels on trouve leurs fleurs jaunes), ficus, itauba, noyers du Brésil… Certains possèdent d’impressionnants contreforts.
Des fourmis atta ou champignonnistes s’activent à transporter des morceaux de feuilles qu’elles ont au préalable découpé. Ils vont être mâchés par d’autres fourmis et recrachés pour servir à la production de champignons. Ces derniers sont en fait la nourriture des fourmis !
Une fleur de passiflore ressort soudain de son environnement par son rouge éclatant. Ses pollinisateurs ne peuvent pas la manquer.
Par contre, les morphos, ces grands papillons aux somptueux éclats bleu métallique, eux, s’ils sont repérables sont impossibles à suivre et encore moins à photographier car ils sont très rapides et se posent régulièrement. Leur mimétisme est alors parfait… Adieu morpho ! Chenille énorme,
pattes de mygale séchée, criquets multicolores, papillons variés, cigales venant de sortir du nid… Les insectes, même s’ils se cachent bien souvent, sont extraordinaires. Après avoir rendu visite à « la grand-mère de la forêt », son plus vieil arbre, ce soir nous avons rendez-vous avec un autre beau moment d’authenticité et de nature du rituel chez les indiens mundurucus.
L’air est encore rafraîchissant et le jour levé depuis peu quand les Mundurucus sortent de la forêt sur leurs pirogues. Ils viennent nous chercher pour une balade dans la forêt d’igapo. Sa caractéristique est d’être toujours inondée. Seule la hauteur varie dans l’année. Le niveau est encore haut et, par endroits, il nous faut nous baisser pour éviter quelques branchages… Le groupe est surpris par le peu de présence des oiseaux. Il est vrai que ces forêts sont plus pauvres en matière de variété de végétation, que les eaux sont encore hautes et que certaines espèces sont chassées… Mais nous sommes survolés par des aras macavouanne, toujours en couples et des piones à tête bleue. Dans la végétation sont posés: tyrans mélancoliques (pas tant que ça…), hirondelles à ailes blanches, un joli petit paroare rougecap… Ils restent discrets et rares, mais la balade au petit matin, en compagnie des mundurucus, est superbe ! Un beau souvenir de plus… Finalement, ils nous ramènent au bateau et l’Amazon Dream reprend sa navigation sur le fleuve Tapajos.
Tandis que nous naviguons vers Vista Alegre, une barge de transport de bétail, en train de dériver, en panne sue le Tapajos, nous demande de l’aide. Ils partent à Manaus… Heureusement pour eux, Zenilton, le mécanicien de l’Amazon Dream, est excellent et bien équipé. Rapidement, la barge poursuit sa route et nous la nôtre. Nous arrivons face à une langue de sable blanc digne des plus belles plages des caraïbes et: rien que pour nous ! Dès la passerelle descendue, personne ne résiste à l’appel de l’eau… Le sable est d’une douceur extrême et crisse étonnamment sous les pieds… Le vaste banc de sable offre ses plages paradisiaques en exclusivité pour notre petit groupe. Un vrai bain de rêve ! Le déjeuner est, comme d’habitude, très apprécié ! Un début d’après-midi consacré à la sieste ou au bain. Après ce moment de farniente, nous partons explorer une plage déserte et sa forêt, proche d’un ancien projet hôtelier, à la recherche de quelques toucans ou autres… Mais, même si nous sommes accueillis sur la plage par de minuscules charmantes petites grenouilles, les habitants restent un peu trop discrets à notre goût et nous rentrons pour poursuivre notre cycle de causeries…
Le soleil se couche avec « maestria » tandis que sur le pont supérieur nous profitons de l’agréable petite brise du soir. Mais, c’est bientôt l’heure d’embarquer pour le village de Vista Alegre. Là vit une communauté des indiens nhengatus. Leur langue est différente de celle des Mundurucus. Le cacique, ou chef de village, est un homme entreprenant. Son village est pimpant. C’est ici qu’est produit le meilleur manioc de la région. Pour l’heure, une partie des habitants est rassemblée à l’occasion de notre venue et du petit spectacle organisé à cet effet. Le protocole veut que les personnes essentielles au bon fonctionnement du village se présentent puis viennent nous saluer… Alors, le spectacle commence. De tout petits enfants nous font la démonstration de la danse du tipiti, avec enthousiasme… Un drôle de symbolisme du précieux ustensile destiné à extraire le jus nocif du manioc et à permettre sa consommation. Un enjeu majeur dans une région où il constitue la base de la nourriture… Nous rentrons au bateau après quelques jolies démonstrations de carimbo interprétées par de jeunes danseurs aux costumes colorés. Chaleureux moment partagé !
Retour à Vista Alegre, le village est beaucoup plus calme qu’hier soir lorsque nous débarquons. De grands urubus noirs ont quelques difficultés à prendre les ascendants tant le vent souffle. Après un petit arrêt pour voir l’artisanat produit au village, nous commençons notre balade par la petite église: Notre Dame de Lourdes… Tout un petit groupe d’enfants nous accompagne tandis que nous nous rendons à l’école où nous sommes attendus. Sagement rangés, les élèves nous présentent quelques chants et mimes de la vie quotidienne avec, tout à la fois, enthousiasme et timidité. Ils sont tout mignons! Les institutrices semblent ravis du résultat! Nous continuons notre chemin vers la « maison de farine » communautaire où une famille s’active. Chaque maison a la sienne en propre, mais doit 2 jours de production par semaine à la communauté. Cette production, vendue à Santarem, sert pour le village entier et son fonctionnement. Le reste de l’argent est partagé entre les villageois. Nous assistons à tout le processus. Les racines de manioc sont grattées. Un moteur antédiluvien permet de les écraser. Puis, la préparation est enfournée dans le tube tressé du tipiti. Ce dernier pressé permet de faire sortir le mortel jus… Après cela, il faut sécher les grains sur une grande plaque métallique sous laquelle est fait un feu. Puis, le jus sera à son tour traité pour perdre sa nocivité. En effet, cuit plusieurs heures, il devient un inoffensif jus jaune qui sera utilisé dans la confection de plats traditionnels comme le canard au tucuxi…
Un petit escarpement, une autre bifurcation et nous arrivons à l’embarcadère où nous attendent nos pirogues. Après avoir vu la forêt de Varzea, celle de « terra firma » comme à Maguari, nous voici dans un secteur d’igapo, la forêt toujours plus ou moins inondée en permanence. Les pirogues dirigées de pagaies expertes par des pêcheurs locaux glissent doucement sur l’eau. Nous descendons d’abord une petite rivière alimentée par une source située à près de 4 km de là. Puis, le paysage s’ouvre sur le monde tout en reflets de ce grand secteur d’ombre et de lumière. Régulièrement retentit le cri si particulier des caciques. À chaque fois, deux oiseaux se répondent. Finalement, nous débouchons en pleine lumière sur le lac Anuma. Et c’est le retour pour un bain bien mérité sur la petite plage de rêve! Après le déjeuner, en route pour Alter de Chao. La traversée est un peu « rouli roula », autant que le Tapajos peut l’être… L’Amazon Dream jette l’ancre juste en face de la petite station balnéaire. Dernier tour d’exploration en navette, dernier shopping et dernière soirée brésilienne, festive, bien sûr… Demain, nous quitterons l’Amazonie la tête pleine de beaux souvenirs à distiller pour les longues soirées d’hiver…
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Messages
à l’attention de Claude et Laurence Mazaux
Nous sommes ravis de participer à ce merveilleux voyage
Les images manquent un peu beaucoup !! …mais nous pensons que les photos seront tout à fait époustouflantes
Continuez à profiter de ce magnifique voyage que nous suivons avec intérêt
Bises à vous deux
Michèle et Robert
coucou à Laurence et Claude,
« Molo sur l’apéro…..
cuidado aux crocos ! ! !
gros dodo
gros mimis