13 août
21 août 2016
À bord du Sea Endurance, août 2016
Départs vers le Grand Nord à l’aube de ce samedi 13 août… Marion et Jean Marie sont là pour nous accueillir à l’aéroport de Paris Charles de Gaulle dès 5 heures du matin. Du terminal 3, un avion de la compagnie ASL spécialement affrété par Grands Espaces nous attend. Quatre heures plus tard et un vol direct, nous quittons l’été parisien pour l’air frais et vivifiant de Longyearbyen. 78° de latitude nord, un soleil généreux pour une température de 7°C… Nous sommes au Spitzberg.
Nous nous dirigeons en bus pour une excursion de la vallée de l’Advent, « l’Adventdalen ». À un peu plus de 1 km du port, c’est la découverte de la ville de Monsieur John Munro Longyear : Longyearbyen. Fondée en 1906, c’est aujourd’hui la plus grande « ville » de l’archipel avec 2100 habitants de 44 nationalités différentes. C’est un lieu bien singulier.
En s’enfonçant dans la toundra, la vallée nous offre un avant-goût de ce que nous offrira le Spitzberg. Des rennes et des groupes de bernaches nonnettes croisent notre route. Sur le chemin du retour, nous admirons les linaigrettes en graines et la toundra qui se pare de ses couleurs automnales.
Embarquement à bord de notre navire polaire, le Sea Endurance, aux alentours de 17h. Nous larguons les amarres pour quitter l’Isfjord, cap au nord. Pendant ce temps, nous assistons à l’exercice obligatoire d’abandon du navire. Après cette longue journée, nous nous installons dans le confortable salon panoramique. Notre capitaine, Lindstrom Ulf-Peter, nous offre le traditionnel pot de bienvenue.
L’île du Prince Karl défile sur bâbord, nous nous enfonçons dans le Forlandsundet. Nous vivons ainsi une navigation rare, uniquement réalisable par des bateaux à faible tirant d’eau. Il est 22h, les coursives se vident, de nombreuses personnes dorment déjà profondément dans leur cabine…
La croisière commence très bien. A 6h ce matin, un ours blanc ! Couché sur la toundra, mais à l’approche prudente du bateau, il se lève et déambule sur les pentes du Lilliehook (Baie de la croix) et finit par se recoucher… Nous décidons d’aller voir le front du Lillehookbreen. Le vent force, 35 noeuds, la mer se forme, nous empêchant de faire notre croisière zodiac. Le capitaine va manoeuvrer le bateau pour nous approcher au plus près du front du glacier en lisière de brash. Nous admirons quelques beaux vêlages et décidons de faire demi tour pour nous rendre à Ossian Sierfellet (Baie du Roi) dans un fjord plus abrité. Nous débutons notre randonnée avec un temps arctique; au fur et à mesure, le temps devient pluvieux. Nous pouvons admirer un superbe renne mâle broutant la frêle végétation et nullement dérangé de nous voir. En fin d’après-midi, retour en zodiac jusqu’au bateau pour nous sécher un peu.
3e jour. Nous nous levons vers 7h; nous longeons Moffen. La température est de 5°C et la visibilité est excellente. Quelques morses se reposent sur cet atoll nordique.
Après un copieux petit-déjeuner pris vers 8h, nous nous dirigeons vers le fjord Murchison. Sur l’itinéraire nous profitons de la présence de 2 baleines bleues (pouvant atteindre 30m pour un poids de 100 tonnes) pour réaliser nos premières photos de cétacés.
Vers 14h, nous débarquons dans la baie de Murchison pour visiter la base scientifique suédoise de Kinvinka, dont les recherches sont axées sur les géosciences. Suite à cette visite, le groupe se scinde en 2: le 1er entreprend une marche sur les hauteurs tandis que le second part en zodiac effectuer une petite croisière. Bien leur en a pris puisque qu’ils ont pu observer dans d’excellentes conditions 2 beaux morses adultes se reposer sur la grève. Les marcheurs jouissent d’une vue exceptionnelle sur la calotte Vestfonna de Nordauslandet. De l’autre côté du détroit de Hinlopen, nous apercevons les glaciers de la Terre de Fries.
En soirée, nous visitons les falaises d’Alkfjellet (littéralement « montagnes des Alk »… Alk signifiant alcidé) riches en guillemots de brünnich, guillemots à miroir, mouettes tridactyles ainsi que goélands bourgmestres. Nous terminons par l’observation de 3 renards polaires.
Ce quatrième jour du voyage qui avait commencé par un triomphal soleil de minuit sur le fjord d’Hinlopen, et s’est poursuivi, après quelques heures de sommeil, par un réveil aux aurores quand Christian nous annonce la présence de baleines à bosse devant la proue du Sea Endurance à 6h30 du matin. Nous naviguons sur une mer d’huile, sous un soleil resplendissant avec, à babord, l’immense calotte glaciaire de Nordauslandet, la Terre du Nord-Est.
Une bonne douzaine de baleines fait surface très régulièrement par petits escadrons sous un nuage de mouettes tridactyles et de fulmars.
La vue sur la calotte du Brasvellbreen est l’occasion de constater un événement caractéristique et hautement spectaculaire du Spizberg, la « surge » d’un glacier, purge titanesque dans laquelle la calotte libère des quantités gigantesques de glace. On voit parfaitement le front glaciaire distant de 25 kilomètres dont nous sépare une mer totalement encombrée des icebergs et du brash générés par cette avance galopante de la masse glacée.
Nous faisons route pendant le repas de midi vers les îles d’Isis qui formaient autrefois une péninsule (Isispynten des cartes avant leur mise à jour où l’on peut désormais lire Isisoya), le recul de la calotte d’au moins deux kilomètres laisse ces roches rabotées couvertes de nombreuses collines pointues constituées par la moraine qu’a accumulée la glace lors d’avancées antérieures. Un gros phoque barbu au pelage bien sec profite du soleil à son zénith. Dans cette zone, nous retrouvons la sage bordure de la calotte qui vient dessiner des caps et des anses à mesure qu’elle fracasse sa falaise en séracs hauts de 20 à 30 mètres dans la mer.
Après le dîner, nous mettons les zodiacs à l’eau pour une visite du site de Andréeneset, à la pointe sud-ouest de la grande île de Kvitoya recouverte d’une calotte de 400 mètres d’épaisseur dont on peut admirer la belle courbe arrondie venant mourir en arrière du rivage à cet endroit. Ce site fut le théâtre du drame de l’expédition d’Andrée dont les trois membres furent retrouvés ici trente ans après leur disparition en 1897, suite à leur tentative d’atteindre le pôle au moyen d’un ballon gonflé à l’hydrogène.
C’est la voix régulière et grave de notre chef d’expédition qui sonne le réveil ce matin, mais son horloge Suisse a-t-elle eu des problèmes ? Car il est 5h45 !. Nous apprenons très vite l’objet du délit : un ours a été vu sur l’île de Foyn (Foynoya), du nom d’un célèbre tueur de baleines Norvégien. Nous partons immédiatement en zodiac pour inciter cet ours à venir nous voir en bord de plage. Nous faisons route maintenant vers l’île Charles XII (Karl XII-oya), une île de 2km et qui culmine à 105 m où nous attendent peut-être ours et morses… A propos de morse, c’est Alain qui nous immerge dans la vie de ces étranges créatures au cours d’une petite conférence. Dés notre arrivée, un superbe ours nous accueille, celui-ci est plus coopératif et c’est à bord des zodiacs que nous pouvons le suivre dans ses pérégrinations, le long de la côte, venant à moins de 50m du bord (encore quelques milliers de photos à trier). La sieste est interrompue par l’annonce de la banquise et de son premier ours. Repéré par les veilleurs de Grands Espaces, celui-ci vient d’abord au devant de nous, jusqu’à environ 300m, puis décide de s’éloigner, sans précipitation, de ce monument mouvant, peuplé d’étranges bipèdes avec des yeux énormes. 18h30, c’est l’heure du « recap », et avant même que nous ayons fini cette brève réunion, un ours est aperçu au loin. Nous décidons d’aller à sa rencontre après le diner afin d’avoir un maximum de temps pour l’observation. Ce mâle « obèse » vient d’avaler visiblement quelques kilos de graisse et les restes de son repas sont à proximité, nous l’approchons lentement jusqu’à quelques dizaines de mètre, il est paisible et ne manifeste aucune inquiétude. Soudain, arrivant à grand pas, un autre ours, plus jeune et plus svelte fonce vers le repas du premier ours, nous nous attendons à une confrontation, mais elle n’aura pas lieu, le premier ours repus, va simplement s’allonger pour une sieste profonde. Nous observons ce nouvel arrivant qui cherche à grappiller quelques morceaux dans les restes, quand soudain, pris d’une grande curiosité, celui-ci vient à notre rencontre à quelques centimètres de notre bateau. Ce dernier évènement, après plus de 2h30 d’observation, marque la fin d’une journée chargée et très riche en émotions.
Réveil dans une banquise assez dense, arrosée d’une lumière basse orangée. La journée commence bien, surtout qu’un ours, le gros mâle aperçu la veille et reconnaissable à une grosse cicatrice ronde derrière l’épaule gauche, rôde à quelque distance du navire.
Nous le laissons finalement à son errance sur glace. Nico complète notre découverte de la banquise par une conférence sur le sujet.
Après l’excellent déjeuner, nous partons en croisière zodiac pour voir de plus près cette glace de mer. Nous débarquons sur une plaque assez solide pour faire une photo de groupe et s’imaginer un instant la vie de ces animaux qui dérivent sur les eaux arctiques. Les mouettes blanches et les labbes sont au rendez-vous.
Au retour, c’est Christophe qui nous emporte dans l’aventure du Fram de Fridtjof Nansen.
Après le dîner, et les deux anniversaires du jour, nos guetteurs trouvent à nouveau deux ours sur la banquise qui se partagent la carcasse fraîche d’un phoque barbu.
Rijpforden, Benngtssenbukta – 80°07’N et 21°39’E
Il est 7h du matin quand la voix de notre chef d’expédition nous tire de notre profond sommeil. Nous voilà de nouveau près des côtes de la Terre du Nord-est et plus particulièrement dans la Nordenskiöldbukta.
Le bateau jette l’ancre devant Bengtssenbukta. Nous partons en croisière zodiac dès 8h30 en direction d’une belle falaise aux oiseaux où nichent des centaines de mouettes tridactyles. Les roches ocres, dénudées de végétation, exhibent les traces de leur histoire géologique. Les schistes ont été métamorphisés, chauffés à cœur et soumis à d’importantes pressions, ils se sont dotés de très beaux filons de calcite blancs.
Durant notre croisière zodiac, le ciel se dégage complètement pour laisser place à une tempête de ciel bleu. La chance nous sourit encore une fois. Ces excellentes conditions météo nous laissent admirer ce spectacle que seul les grands déserts polaires peuvent nous offrir. D’immenses calottes dévalent entre les falaises pour venir déverser leur surplus de glace dans les bras du fjord. Les séracs du Rijpbreen ne cessent de vêler des icebergs.
Le déjeuner est rapidement avalé que déjà les zodiacs sont de nouveau en action. Direction la rive droite du glacier de Rijp pour une après-midi randonnée. Au même moment, un ours est signalé sur la rive opposée. Nous faisons un rapide crochet pour observer le plantigrade. Etalé sur un névé, l’animal ne semble en aucun cas intéressé par nos zodiacs. Nous le laissons à sa sieste.
Des montagnes érodées par les glaces, des calottes à perte de vue, un désert polaire inondé par une belle après-midi ensoleillée s’ouvrent sous nos yeux. Un couple de plongeons catmarins est aperçu à la surface d’une mare. A notre grand plaisir, un poussin se trouve entre les deux parents. Juste avant d’arriver sur le sommet arrondi du plateau, nous croisons le regard de 5 rennes. Mais que peuvent-ils bien brouter dans cette toundra rase ? Seules quelques graminées sont aperçues ici ou là, ainsi que des saules nains, des saxifrages et des draves… Un ou deux pavots encore en fleurs finissent de décorer ce tapis minéral.
La journée se termine par une troisième sortie dans l’archipel des sept-îles : les Sjuøyane. Un débarquement pour observer une colonie de morses est prévu… Mais 2 ours rodent dans le coin. C’est donc des zodiacs que nous observons les va-et-vient de ces gros pinnipèdes. De nombreux jeunes s’amusent à se « faire peur » en approchant nos embarcations à moins de 10m. Sous la surface de l’eau, c’est l’explosion de la vie planctonique. Groseilles de mer et escargots volant (limacina helicia) nous transportent déjà dans le monde des rêves. Il est 23h30, le temps de regagner nos cabines.
Ce matin, vers 6 heures, nous sentons le bateau ralentir, la banquise ne doit plus être très éloignée. Notre route très nord-ouest nous a poussé jusqu’à 81°20′. Après le petit déjeuner, une première annonce pour un très joli phoque barbu imperturbable aux mouvements du bateau. Une très belle observation dans un environnement polaire avec un ciel qui risque de nous tomber sur la tête. De brèves lueurs nous parviennent de l’horizon. Après cette observation, Bruno nous expliquera la physiologie de l’ours blanc ainsi que son devenir. Nous poursuivons notre route au nord. Nous sommes par 81°21’N – 17°38′ E vers midi. Nous atteignons notre maximum en début d’après-midi par 81°23′ Nord. Après le repas et la sieste, Christophe nous conte l’histoire du célèbre explorateur Roald Amundsen. Nous poursuivons notre route, direction du sud pour sortir de la banquise. Sur notre chemin, nous croisons un beau phoque barbu très placide, puis quittons progressivement la banquise en direction du Woodfjord. Jean-Marie nous fait une petite session photographique avant le repas du soir.
Andøyane 79°41′ N, 13°36′ E ; Monacobreen 79°32′ N, 12°39′ E
Nous arrivons tôt le matin dans le Woodfjord et les îles Andøyanes (les îles aux canards), nous débarquons pour, d’une part une promenade sur la toundra et d’autre part une croisière zodiac. Après avoir découvert la cabane de Worsley (trappeur Norvégien), sur la péninsule de Reindsdyrflya (la plaine aux rennes), une trentaine de marcheurs ont prospecté dans la toundra, afin de découvrir avec Alain toute la flore particulière qui est maintenant bien avancée. D’autres sont partis pour une promenade à bord des zodiacs à la découverte des îles, des haltes fréquentent et longues permirent aux appareils photos, encore une fois, de crépiter, fusillant avec bienveillance : bécasseaux violet, sternes Arctique, eiders et quelques goélands bourgmestre… Après un ravitaillement dans notre hôtel flottant, dès 13h30, nous repartons découvrir une langue glacière qui se termine dans un lac aux couleurs étonnantes. Après un court repos sur le bateau, nous partons tous pour une visite du glacier de Monaco. Celui-ci nous accueille avec de nombreux vêlages aux bruits assourdissants, une bonne occasion pour réviser nos connaissances sur le monde de la glace : sérac, iceberg, growler, brash… Alors que nous contemplons ce formidable spectacle, lentement les zodiacs se sont rapprochés pour ne faire qu’un seul radeau. C’était pour fêter notre séjour en ce lieu avec une goutte d’Aquavit servie avec glaçons naturels. Après avoir passé plus de 6 heures dehors aujourd’hui, nous pensions tous prendre une bonne douche et courir au diner, c’était mal connaitre Grands Espaces, ces fous avaient organisé un barbecue sur le pont arrière du bateau, c’est donc dans le froid que nous passons cette 7e heure, mais dans une ambiance exceptionnelle qui marquera notre mémoire. Vers 20 heures, le bateau lève l’ancre et nous partons sous le soleil qui bientôt enfin se couchera et éclaire les montagnes de couleurs rougeâtres.