19 août
31 août 2018
À bord du Sea Endurance, 19 août 2018
Nous nous envolons de Paris aux alentours de 8h du matin vers… le Grand Nord. Notre avion, un charter de la compagnie Germania, est spécialement affrété par GE. Il nous permet de gagner LYR en moins de 5h par un vol direct.
C’est donc avant 13h que notre aventure polaire commence… Notre après-midi sera rythmé par la découverte de LYR et de sa vallée : l’Advental. L’air est frais, 8 et la lumière magnifique.
Après un bon petit-déjeuner au Funken Lodge, un bus vient nous chercher et nous prenons la direction du port de Longyearbyen où nous embarquons à bord de l’Aurora Explorer. Après environ 1h20 de navigation, nous arrivons dans la ville russe de Barentsburg. La première vision que nous avons de Barentsburg est saisissante ; une cheminée crache une fumée noire, des bâtiments datant de l’époque soviétique sont en ruine. Une ambiance, à la fois mystérieuse et étonnante, règne sur cette ville. Une fois arrivés, nous faisons la connaissance de notre guide locale russe francophone. Notre guide, Anja, habite à Barentsburg 3 mois par année et accompagne les touristes à la découverte de cette étrange cité minière. Anja nous parle d’histoire, de vie quotidienne, de mines de charbon et de culture. La population de Barentsburg s’élève à 370 habitants, dont 130 femmes et 32 enfants. Le charbon est exploité par l’entreprise russe Trust Arktikugol et extrait environ 100’000 tonnes de charbon par an.
Après environ 1h45 sur place, nous reprenons l’Auroa Explorer en direction de Longyearbyen afin d’aller chercher une partie du groupe qui est restée flâner en ville et au musée. Nous avons traversé l’Isfjord en direction de Pyramdien. En arrivant au glacier du Nordenskiöldbreen, nous avons la chance extraordinaire de voir 5 ours !! Après cette observation, nous prenons la direction de Pyramiden où nous sommes accueillis par notre guide Tatiana avec laquelle nous nous promenons dans Pyramiden. Cette ville, à la différence de Barentsburg, n’est plus habitée. Il y règne une atmosphère hors du temps. Nous visitons le centre culturel et la cantine qui sont restés en l’état depuis l’année d’abandon de la ville en 1998. La visite se termine à l’Hotel où nous prenons un verre dans une ambiance soviétique. En fin de journée, nous reprenons l’Aurora Explorer jusqu’à Longyearbyen.
Ce matin après un copieux petit-déjeuner à l’hôtel Funken nous partons visiter la mine N°3, l’unique mine que l’on peut visiter au Spitzberg.
Nous sommes ainsi initiés à l’une des activités économiques qui ont donné son visage actuel à l’archipel.
Pendant plus de deux heures, nous visitons les installations qui ont fonctionné de 1971 à 1996. Un ancien mineur nous rejoint en cours de visite et témoigne de son expérience.
Certains expérimentent la dureté du travail des mineurs d’ici, qui exploitaient des filons de 60 à 90cm d’épaisseur dans une température avoisinant les 0°C : équipés de casques, de lampes et de combinaisons de mineurs, ils rampent dans une galerie reconstituée sur quelques dizaines de mètres.
Après ces quelques heures d’obscurité, nous reprenons le bus vers l’hôtel puis nous nous dirigeons vers le centre-ville de Longyearbyen faire quelques emplettes. À 15h, nous avons rendez-vous avec Nathanaël qui nous accompagne au musée du Spitzberg pendant que les autres guides participent à un exercice de tir (ici il faut être armé pour se protéger d’une éventuelle rencontre avec un ours).
Nous embarquons finalement sur le Sea Endurance aux alentours de 16h30. S’en suivent un exercice d’abandon du navire puis un rapide descriptif de l’esprit du voyage.
Nous faisons le plein de carburant à couple d’un tanker puis partons vers la pleine mer.
Ce soir, après notre premier repas nous avons la chance de voir deux ours qui évoluent au pied de la falaise d’Alkhornet. Ils finissent par se coucher et nous reprenons notre route avec de belles lumières de crépuscule.
Glacier de Smeerenburg (79°38’N, 11°27’E) et île d’Amsterdamoya (79°44’N, 10°60’E)
Après notre première suite à bord, nous nous réveillons près de la côte des Terres Albert 1er et découvrons les paysages typiques du Sptizberg. Les montagnes pointues percent les nuages hauts de ce début de matinée.
La journée commence par les réunions obligatoires de sécurité concernant les ours, les zodiacs et les recommandations de l’AECO en attendant d’arriver devant le glacier de Smeerenburg. Nos passagers vont expérimenter leur premier embarquement en zodiac avec l’excitation de la perspective d’approcher un premier ours repéré dans l’eau. Le temps de partir, l’ours rejoint un massif pierreux avec un phoque dans la gueule. Nous approcherons progressivement et ferons une très belle observation devant le majestueux glacier de Smeerenburg.
La poursuite de la matinée se fera au pied du glacier découvrant le monde de la glace et les premiers phoques barbus. Retour au bateau pour le déjeuner avant d’envisager une sortie à la découverte d’une dizaine de morses repérés sur la plage sur l’île d’Amsterdamoya. La sortie se déroulera en deux temps, observation en zodiac, et débarquement sur la plage pour une observation à terre sous les directives de notre chef d’expédition, Christophe.
Avant de rejoindre le Sea Endurance, nous aurons la chance d’observer quelques phoques Vaux-Marins, qui ont la particularité de s’étendre sur des roches en adoptant une position de banane. Prés de nous, se trouve le site de Virgohamna, lieu historique du départ de l’expédition d’Andrée qui tenta de rejoindre le Pôle Nord à bord d’un ballon.
Une journée exceptionnelle remplie d’émotions pour commencer notre croisière. Après le dîner, un récapitulatif des événements apportera les réponses aux questions de nos passagers.
Par Philippe
Banquise par 82° de latitude nord (82°05’N, 13°22’E)
Parti depuis la fin d’après-midi, nous avons navigué cap plein Nord toute la nuit pour arriver en vue des premières plaques dérivantes vers 8h00 du matin.
Dès 9h00, alors que nous avons commencé à nous engager dans une banquise plus resserrée, Nathanaël ainsi qu’un des marins de quart, en veille à la passerelle, repèrent à l’horizon un ours sur un floe. En nous rapprochant, nous nous apercevons qu’il se trouve sur une minuscule plaque de banquise rougie du sang du phoque dont il s’est repu. Une autre plaque proche est également maculée de traînées rouges, probablement le lieu de la capture de sa proie. L’ours, probablement inquiet de se faire dérober le reste de son festin par un concurrent, racle frénétiquement la neige autour de lui pour accumuler un sorbet rose imbibé du sang du phoque. Il finit par se coucher sur le monticule et s’endormir. Nous stoppons notre avance pour ne pas inquiéter l’animal et éventuellement réveiller ses craintes de perte de son butin.
Tout autour, dans les chenaux d’eau libre, des phoques du Groenland viennent reprendre leur respiration, certains semblent même venir narguer le prédateur, à quelques mètres seulement de son radeau de glace. À quelques encablures, un plus gros floe supporte une demi-douzaine de phoques du Groenland, une femelle adulte, des immatures et un jeune de l’année au vu de sa taille bien plus petite. Un comportement tout à fait inhabituel pour cette espèce pélagique à cette saison de l’année, qui ne monte sur la banquise qu’au moment des naissances, en mars-avril, et pendant le printemps, au sud du Groenland ou du Spitzberg. Autour de notre ours, un adulte de belle taille qui ne nous donnera pas d’occasion de déterminer son sexe, Goélands bourgmestres et Mouettes ivoire attendent patiemment que celui-ci leur laisse la place. Il n’est manifestement pas décidé à cela et leur a signifié à plusieurs reprises, par une brusque charge, que c’était son casse-croûte, personne d’autre que lui n’ayant le droit d’y toucher.
Nous continuons notre route après avoir prévenu le navire Expedition de la présence de cet ours dont il se trouve éloigné de 10 miles dans le Nord-Est. Le brouillard est désormais tombé et nous suivons le bord de ce monde glacé vers l’Est à la recherche de zones plus compactées et de plaques de plus grande superficie. La fin de matinée est occupée par la conférence de Nicolas sur les différents types de banquise et la dramatique diminution de superficie de la banquise arctique d’années en années.
Après le repas, nous mettons les zodiacs à l’eau et partons explorer cet univers noir et blanc sous une lumière laiteuse magnifique, idéale pour les prises de vue. Les plaques restent de petite dimension et relativement lâches (banquise à 40 % de recouvrement de l’océan), mais présentent quelques belles crêtes de compression dont en particulier un hummock où deux plaques se sont empilées de manière parfaite, la dalle de banquise annuelle d’un mètre d’épaisseur étant venue se poser horizontalement sur une plaque beaucoup plus épaisse, donnant un amoncellement s’enfonçant de plusieurs mètres, refuge pour les morues polaires, proies des phoques du Groenland aperçus le matin même.
De retour au bateau, nous ne tardons pas à trouver une vaste zone de banquise très compacte, recouvrant l’océan à près de 80 %. Un nouvel ours est détecté par un des marins de quart à la passerelle. Il s’agit manifestement d’un jeune individu qui remonte activement au vent une trace olfactive. Il passe de plaque en plaque, sautant parfois un chenal étroit. Au bout d’une course qui dure une bonne demi-heure, il semble avoir perdu cette information et s’arrête près d’un hummock redressé à la verticale et commence à se frotter et se rouler sur le dos pour se débarrasser du sel accumulé dans son pelage immaculé. Nous constatons qu’il s’agit d’un jeune mâle et que l’approche du Sea Endurance ne l’inquiète en aucune manière. Au bout de quelques minutes, il vient même inspecter la proue du navire après un sprint donnant une bonne idée de la capacité d’accélération de ce chasseur de phoques. Il termine sa course à une dizaine de mètres à l’avant du bateau pour le plus grand bonheur des passagers qui peuvent admirer l’anatomie magnifique de cette bête en pleine santé, au poil touffu et lustré, aux griffes puissantes dépassant de ses grosses paluches poilues. Réalisant qu’il ne pourra rien tirer de cet énorme monstre marin bleu et blanc, il retourne à ses hummocks qui lui offrent un parfait oreiller pour une sieste bien méritée, pendant qu’au loin, un très gros phoque profite du soleil d’automne qui baigne la banquise en cette fin de journée.
Nous repartons vers le Sud, écartant la banquise de nouveau lâche à l’impressionnante vitesse de 11 nœuds, cap plein Sud vers la côte de la Terre du Nord-Est, Nordauslandet. Après le dîner, nous projetons le film de Luc Jacquet retraçant la vie de Claude Lorius.
Ile Karl XII (80°39’N, 24°60’E) et Albertinibukta (80°14’N, 25°20’E)
La douce voix de Christophe nous sort doucement de nos rêves. Tiens, il est déjà 7h30 ?! Eh bien non. Ce matin, l’annonce sonne 15 minutes en avance. Nous sommes à l’approche de la très isolée ile de Karl XII. Un autre navire fait route vers ce rocher perdu de l’océan Arctique, à plus de 40 Kms de la Terre du Nord Est. En effet, l’Ortélius souhaite lui aussi faire une excursion en zodiac. La diplomatie polaire de notre chef d’expédition nous permet trouver un compromis. Nous serons les premiers à partir en zodiac. C’est ainsi à 8h30 que nos guides montent dans les zodiacs pour débuter les opérations.
Cette île, culminant à 105 m d’altitude, est caractérisée par une particularité géologique. Un tombolo (un isthme de sable) s’est formé entre les deux promontoires rocheux. Au gré des tempêtes, les galets relient les iles et les séparent. Aujourd’hui, nous pouvons apercevoir un bras de mer au milieu de l’ile. Ce sera donc le tour des Iles de Karl XII. Ces rochers sont le lieu de nidifications de centaines de mouettes tridactyles. Comme souvent dans le haut arctique, le vert de la toundra s’explique par l’apport de guano.
Nous partons en zodiac à travers les vagues. Ce matin, ce n’est plus le calme plat que nous avons connu dans la banquise. Les embruns sont bien là et certaines personnes goutent ainsi à l’eau froide de l’océan glacial. Puis, après seulement 10 minutes de zodiac, la chance nous sourit de nouveau. Un ours, là-haut, dans la toundra. Celui-ci semble tranquille, peu actif. Nous comprenons qu’il est resté ici, au beau milieu de rien, lorsque la banquise s’est retirée plus au nord. Son calme nous indique qu’il est entré en économie d’énergie. Les mois seront encore longs avant que la glace ne revienne autour de l’ile. D’ici là il lui faudra attendre… ou partir à la nage.
Plus loin, c’est un cadavre d’ours que nous observons. Dans ces contrées, la vie est rude. La mort de celui-ci a certainement permis de nourrir les autres. Puis de nouveau un ours couché, gardant ces forces pour une chasse providentielle. Nous poursuivons vers le sud de l’ile, croisons quelques morses et observons de beaux affleurements géologiques.
Sur notre chemin du retour, les zodiacs doivent de nouveau ralentir. Un 4e ours est aperçu en haut d’une falaise. Celui-ci, certainement bien jeune, se montre curieux et décide de désescalader vers la côte. Il nous renifle, nous regarde… puis décide de se mettre à l’eau en direction de nos zodiacs. Quelle scène ! En 3 jours, nous aurons eu la chance d’observer de nombreux comportements de ces grands prédateurs du Nord.
Nous remontons à la coupée du Sea Endurance et laissons dernière nous cette ile désolée. La brume s’installe, nous nous réchauffons autour d’un thé… certain qu’Hergé aurait trouvé l’inspiration près de cette ile mystérieuse.
À bord, Nicolas nous introduit à l’archipel du Svalbard, littéralement les « côtes froides ». Sa géographie, son histoire, les conquêtes polaires. Nous passons en revue 4 siècles d’une vie rude, débutée au XVIIe par les baleiniers jusqu’à nos jours avec les scientifiques.
En début d’après-midi, nous nous dirigeons vers le nord de la Terre du Nord Est. Cette fois, c’est l’aventure pour tous. Notre objectif sera Albertinibukta. Personne ne connait cette baie. D’après les cartes, un beau glacier vient se jeter en mer. C’est aux alentours de 15h que nous arrivons sur zone. La météo est difficile, avec du brouillard et du vent. Notre équipe d’expédition décide tout de même de tenter une excursion. Pour une partie du groupe, nous partons en zodiac vers le Kapp Brun. Encore une fois, nous croisons des ours sur le rivage ou sur les icebergs. L’un des deux est maigre, Christophe nous expliquera plus tard que cet ours, s’il ne trouve pas une carcasse rapidement, est condamné.
Nos zodiacs pénètrent dans la baie de Dyna. La mer est ici calme, le paysage grandiose. Nous débarquons sur une plage pour faire un petit tour afin d’observer la côte au vent, où un chaos de glaces recouvre le sable. Ce n’est quand même pas tous les jours que le sable est recouvert de glaçons : ambiance exceptionnelle. Vers 17h30, nous regagnons le bateau qui est venu à notre rencontre. Le Sea Endurance réapparait, au beau milieu des Icebergs, avec pour arrière-plan, le Nilsenbreen.
Après un excellent diner, la journée se termine par notre récap quotidien. Élodie nous initie à la géomorphologie, cette science qui s’amuse à lire le paysage. Christophe nous parle de l’Histoire de ces iles du Grand Nord. Il évoque l’expédition de Umberto Nobile. Ce général italien qui tentait une traversée de l’océan arctique avec son ballon Italia. Nous apprenons que c’est en tentant de le sauver que Roald Amundsen, l’un des plus grands explorateurs polaires, perdit la vie.
La nuit fut relativement agitée ; des creux de 2-3 mètres ont en partie réveillé les passagers. Nos intentions de la veille de nous rendre à Storoya et à l’île Blanche ont dû être revues en raison des conditions de navigation qui étaient difficiles. Néanmoins, malgré le changement de programme, le spectacle qui s’offre à nos yeux est époustouflant. Nous sommes en train de naviguer le long du Brasvellbreen, une barrière de glace de plus de 160 kilomètres, la plus longue de l’hémisphère nord. La température est très fraiche, mais le soleil matinal qui éclaire le front de glace donne une ambiance extraordinaire. Nous profitons des talents du Capitaine et de son équipe pour naviguer relativement proche de la glace et passons même entre le front de glace et l’île d’Isisoya ; île qui est apparue il y a quelques années suite à la fonte de la calotte.
Plus tard dans la matinée, nous assistons à la traditionnelle conférence sur l’ours polaire donnée par Nathanaël et Alain. Après le déjeuner, nous passons une après-midi tranquille à naviguer avec le Sea Endurance entre une mer d’icebergs et le front de glace du Brasvellbreen. Le soleil commence à être caché par quelques nuages, mais la lumière est splendide et donne des airs de bout du monde.
En fin d’après-midi, nous arrivons dans un magnifique champ d’icebergs proche du front de glace du Brasvellbreen et décidons de mettre les zodiacs à l’eau. Nous voici partis pour une magnifique sortie zodiac à travers des icebergs aux formes les plus biscornues et les plus improbables. Nous assistons même à un magnifique vêlage sous-marin !
Lors de la soirée, nous passons par le site de Torellneset et observons presque une centaine de morses qui se prélassent sur de belles plages surélevées ! Le spectacle est magnifique. Nous sommes très chanceux d’avoir vécu cette journée polaire dans cet environnement si magique !
Après une nuit calme, nous nous réveillons ce matin au pied de l’immense falaise d’Alkefjellet. Nous partons en excursion zodiac découvrir ce site exceptionnel. Ici la géologie a permis à une colonie de près de 60 000 couples de guillemots de Brünnich de s’installer sur les petits replats créés par la dolérite.
Nous avons la chance de voir plusieurs renards polaires qui guettent l’envol des jeunes guillemots. Deux renardeaux évoluent à côté de plusieurs adultes et nous offrent un superbe spectacle.
Au retour sur le Sea Endurance, le bateau reprend sa route vers le Lomfjord. Ce petit fjord est souvent bien abrité des vents et vu les prévisions d’hier cette option devrait nous permettre de sortir cette après-midi.
En effet, arrivés dans la baie de Fåksevagen nous allons à terre pour aller se dégourdir un peu les jambes. Trois groupes sont créés ; certains se concentrent sur le littoral, d’autres montent sur les crêtes profiter de la vue sur l’immense vallée glaciaire.
Ce soir au récap Élodie nous fait un point sur les différentes roches que nous avons vues aujourd’hui. Alain revient en détail sur la biologie du guillemot de Brünnich et Nathanaël nous parle des spécificités du renard polaire.
Nous repartons ensuite vers le Nord du détroit d’Hinlopen, à la recherche d’éventuelles baleines.
Réveil ce matin au 79°39.49N et 014°15.03E, nous avons navigué en évitant les coups de vent et nous sommes maintenant à l’abri dans la baie de Mushamna dans le Liefdefjord.
Nous envisageons une sortie zodiac pour la matinée, la mer est un miroir devant ces montagnes partiellement enneigées de la nuit. Le temps est beau et nous ressentons à peine les quelques degrés de la température. Nous prendrons du temps pour débarquer à terre et visiter une cabane de trappeur. Ce moment est très apaisant et nous profitons tous grandement de cette plénitude.
L’après-midi, nous irons un peu plus loin dans le Liefdefjord pour une marche sur les moraines du glacier Erikbreen et profiterons du sommet pour admirer les glaciers du fjord.
La soirée sera celle du BBQ devant le glacier de Monaco, dans une ambiance de fête ! C’était encore une journée bien remplie…
Glacier du 14 juillet et Baie du Roi
Nous nous réveillons par un soleil radieux entrecoupé de nuages à l’entrée du fjord au fond duquel s’écoule le glacier du 14 juillet, nommé en l’honneur des Français et des expéditions du Prince Albert Ier de Monaco. Un ours déambule du côté des falaises à oiseaux, dans la toundra fréquentée habituellement par des hardes de rennes. Ce vingtième ours du voyage descend d’un pas décidé à la plage et se met à l’eau pour traverser la baie en direction du Sud. Nous mettons deux premiers zodiacs à l’eau pour suivre de loin l’avancée de l’animal que nous finissons par perdre dans le brash du côté sud. Il restera introuvable malgré la patrouille des 5 zodiacs dans cet univers de glace pilée.
Nous partons en direction des falaises où nous attendent quelques macareux attardés dans les anfractuosités des marbres vieux de près d’un milliard d’années. Ils continuent à faire des allers et venues régulières, pêchant dans la baie pour nourrir les jeunes qui restent cachés jusqu’à leur envol dans quelque fissure protectrice de la paroi.
Peu de temps après être rentrés de cette excursion, nous retrouvons l’ours qui déambule sur la côte sud du glacier, dans un univers de moraines du Petit Age Glaciaire et de toundra couvrant les pentes en direction de la Baie du Roi. Grâce à la conduite experte d’Alexander, nous suivons au plus près le trait de côte au-dessus duquel le plantigrade avance de son pas chaloupé qui le conduit vers le Sud.
Après le déjeuner, nous abordons l’île de Bloomstrand où le site de Ny-London nous parle des expériences passées de l’exploitation des ressources naturelles du Spitzberg, en l’occurrence une gigantesque colline de marbre qui attisa les appétits de la compagnie anglaise NEC dans les années 1910. Machines à vapeurs, grue, quai d’embarquement sont restés à rouiller dans les tempêtes de l’Arctique depuis cette époque quand le marbre en question s’est révélé non utilisable. Les grands marcheurs partent à l’assaut des blocs erratiques qui dominent les sommets tandis que celui des petits marcheurs découvre à son rythme, les restes historiques et quelques saxifrages encore en fleurs à cette époque bien tardive en saison pour ces très hautes latitudes. Dans le ciel, le ballet de trois Plongeons catmarins aux cancanages sonores nous accompagne pendant toute la ballade sous un ciel riche en nuages galopants dans les cieux dominant ce fjord sur la côte duquel est implanté le village de Ny-Ålesund, base scientifique fréquentée par toutes les nations qui viennent faire de la recherche dans l’archipel.
Le récapitulatif du jour est orchestré par Alain avec les Macareux, Élodie avec les sols polygonaux et autres formes géomorphologiques des zones périglaciaires de l’Arctique, Christophe avec l’épopée des expéditions du Prince Albert Ier de Monaco qui ont laissé de nombreuses traces dans la toponymie du Spitzberg. Christophe, grâce à des fichiers GRIB captés dans la journée au passage devant Ny-Ålesund, nous expose les prévisions de vent fort qui nous poussent à aller chercher un abri dans l’Isfjord pour les deux derniers jours du voyage.
En soirée, l’excellent documentaire sur la vie et l’œuvre de Charcot, diffusé originellement sur Arte, est donné au salon panoramique pendant que le Sea Endurance s’apprête à passer le détroit séparant l’Avant Terre du Prince Charles de la côte ouest du Spitzberg.
Diabassoden, Isfjord, 78°20’ N – 15°35’ E
Chères exploratrices, chers explorateurs polaires, bonjour ! Il est 8h30 quand le micro résonne, ce matin nous avons le droit à une heure de grasse matinée. La nuit fut agitée, avec des creux de plus de 1m50 et des rafales de vent à 30 nœuds. Le coup de vent annoncé a tenu ses promesses et il fait bon se réfugier dans l’Isfjord : le plus grand fjord du Spitzberg.
Nous laissons Longyearbyen sur tribord aux alentours de 9h30. Le monde moderne refait son apparition avec ses quelques ding, ouip, whoup de nos téléphones portables. Cette parenthèse numérique ne sera que de quelques instants. En nous enfonçant dans le fjord, nous sommes de nouveau seuls au monde.
Sur les berges de Diabassoden, non loin d’un petit cap et d’une cabane, un ours est aperçu. Génial, celui-ci marche sur la grève et ne semble pas farouche. Nous pourrions l’approcher en zodiac… L’équipe d’expé se réunit à la passerelle pour s’organiser quand un deuxième, puis un troisième ours sont identifiés. Les zodiacs sont rapidement mis à l’eau. Malgré une légère pluie, nous sommes tous très enthousiastes et avançons vers les plantigrades. Il s’agit d’une mère et de ses 2 jeunes, des oursons nés au printemps 2017, il y a un peu plus d’un an. L’observation est excellente, les ours marchent en bord de plage et ils ne semblent pas perturbés par ces 5 zodiacs. L’odeur de caoutchouc et de parfum ne les intéresse clairement pas.
Sur leur chemin ils croisent une cabane de vacances. Un de ces lieux où les norvégiens aiment passer des weekends « into the wild ». Nous avons la chance de vivre une scène unique. L’interaction entre la faune sauvage et une habitation. La cabane ne s’avère pas en bon état. Une fenêtre cassée permettra à cette famille ours d’explorer l’extérieur, mais aussi l’intérieur de ce campement. Les jeunes semblent particulièrement apprécier les mousses et sortent des morceaux de canapé par la fenêtre. Nous nous amusons à imaginer la scène de l’intérieur : jeune ourson couché sur le canapé, ou encore assis à table… sur tous les zodiacs, des éclats de rire se font entendre. La scène est en effet burlesque.
Après une heure de ce spectacle polaire, la mère décide de continuer sa route. Les oursons la suivent au galop. C’est à ce moment que nous repérons des souffles et des dos ronds à la surface. Une dizaine de narvals fait route vers nous. Les baleines tant attendues font leur apparition, merveilleux. Nous suivons pendant une quinzaine de minutes ces magnifiques baleines blanches. Elles nous emmènent proche d’un cadavre de rorqual échoué. Les goélands sont en plein festin, tandis qu’un minuscule renard passe son chemin.
Humide mais heureux, la pluie ne nous aura finalement que peu perturbés, nous remontons à bord du navire pour une soupe fumante. Le dessert à peine terminé que la voie de Christophe résonne de nouveau au micro… des baleines à bosse sont annoncés. Vite, sur les ponts extérieurs. La scène est à la hauteur de ces paysages arctiques : féérique. Ces deux baleines se décident de nous montrer leurs nageoires caudales et de sonder en levant la dorsale. Les sourires sont là et ces instants de nature gravés dans nos têtes. Puisse la vie sauvage retrouver sa part sur cette belle planète qui est la Terre.
En deuxième partie d’après-midi, nous posons les pieds sur de magnifiques plages surélevées. Le désert polaire, minéral et froid, prend ici tout son sens. Le Sea Endurance est ancré dans la lagune de Bjonhamna.
Une présentation des baleines, odontocètes versus misthycètes, est tout naturellement abordée par M. Alain Dé…bosse. Philippe nous régale par son travail d’artiste photographe. Quant à notre chef d’expédition, il nous parle du quotidien plan de navigation.
Après un diner anniversaire avec son désert spécial fontaine au chocolat, nous croisons le long de Templebreen. La lumière tamisée donne aux roches environnantes une couleur rougeâtre très chaleureuse. Les vêlages, nombreux, ajoutent une touche de son à ce spectacle de lumière.
Ekmanfjord (78°21’N, 15°51’E)
Après la belle navigation d’hier soir au crépuscule et un nouvel ours observé en train de nager dans le Templefjord, nous nous réveillons ce matin dans le Ekmanfjord.
Nous partons sous une pluie fine atour de l’îlot Flintholmen, qui jusqu’au 19e siècle était recouverte par l’immense Sefströmbreen. Ce glacier a recouvert la moitié de l’île d’une moraine rouge qui lui donne des allures martiennes !
Nous continuons notre périple et passons devant une belle cascade, mais la marée basse nous amène à faire demi-tour. Nous laissons une petite cabane de trappeur sur notre gauche et filons vers le fond du fjord et un petit îlot nommé Breviksøyane.
Un phoque vient à proximité du zodiac, mais nous décidons, la pluie ayant forci, de rentrer sur le Sea Endurance.
En fin de matinée, Nicolas et Nathanaël nous racontent leurs hivernages respectifs dans les TAAF, en Terre Adélie et aux îles Kerguelen à la demande de certaines personnes.
Plus tard dans l’après-midi c’est au tour de l’équipage de nous faire visiter les entrailles du navire : la salle des machines !
Nous continuons notre route vers Longyearbyen afin d’être à quai dès ce soir et ne pas être dérangés par la tempête qui s’annonce.
Avant le pot du capitaine, Philippe et Alain reviennent en photo sur ce voyage que nous venons de finir.
Longyearbyen (78°13’N, 15°37’E)
Étant arrivés la veille au quai du port de Longyearbyen, nous sommes déjà en place pour procéder au déchargement des bagages. À 9h, le bus vient nous chercher afin de nous déposer au centre-ville de Longyearbyen pour environ 2 h de temps libre.
Vers les 14h, l’avion décolle et nous survolons avec une bonne visibilité le fjord de Bellsund. Aux alentours de 17h, nous nous posons à Oslo et nous nous dirigeons vers le Park Inn pour passer la nuit. En effet, les vols de correspondances pour Paris et Genève partent seulement le lendemain.
Nous rentrons à la maison avec de magnifiques images plein la tête !
Suivez nos voyages en cours, grâce aux carnets de voyages rédigés par nos guides.
Messages
Bonjour à tous,
Merci pour ce compte-rendu très détaillé, lu à haute voix pour la famille. Avez-vous la possibilité de poster des photos (là ce sont les plus jeunes qui demandent …)
Belle expédition à vous,
Virginie
Bonjour à vous,
les photos sont malheureusement trop lourdes pour les transmissions satellites…