4 août
13 août 2016
À bord de l'Ortélius, du 4 au 13 août 2016
Comme pour de nombreux départs vers le Grand Nord, nous nous sommes retrouvés à l’aéroport de Paris Charles de Gaulle dès 5 heures du matin. Un avion de la compagnie ASL spécialement affrété par Grands Espaces nous attendait. Quatre heures plus tard et un vol direct, nous quittions l’été parisien pour l’air frais et vivifiant de Longyearbyen. 78° de latitude nord, 9°C et un léger vent d’ouest… Nous étions au Spitzberg.
Avant d’embarquer à bord de notre navire polaire l’Ortélius, nous sommes partis en bus pour une excursion de la vallée de l’Advent, « l’Adventdalen ». Avant-goût de ce qu’allait nous offrir le Spitzberg avec une première observation de rennes et des groupes de bernaches nonnettes. Puis, nous avons découvert Longyearbyen, avec ses baraques en bois sur pilotis profondément ancrées dans le sol. Mais aussi ses mines de charbon, ses wagonnets sur leurs téléphériques, son église et ses meutes de chiens. La toundra aux abords de la ville était couverte de ses jolies linaigrettes de Scheuchzer. Sur les collines environnantes, de larges antennes ont retenu notre attention. Ces infrastructures permettent d’étudier les aurores boréales.
Embarquement à bord de l’Ortélius aux alentours de 17h. Après avoir participé à l’exercice obligatoire d’abandon du bateau, nous avons largué les amarres et quitté l’Isfjord, cap au nord. L »île du Prince Karl Land défile sur tribord, il est 23h et un souffle de baleine bleue est observé. Bienvenue à bord pour 9 jours d’expédition polaire.
Après une nuit de navigation le long de la côte nord ouest du Spitzberg, nous sommes arrivés dans la baie de la Croix au cours de la matinée. Celle-ci a débuté par une croisière zodiac le long d’un des plus beaux glaciers de l’archipel: le glacier de Lilliehook. Avec un front de glace de 7km de large et une hauteur comprise entre 30 et 40m, c’est sans conteste l’un des glaciers les plus impressionnants de ce coin du Sptizberg. Lors de cette excursion, nous avons observé une partie de la faune du Spitzberg. Les oiseaux ont été nombreux! Nous avons admiré quantité de sternes arctiques (qui peuplent les îles), mais aussi des goélands bourgmestres, des bécasseaux violets et autres Guillemots à miroir. Après deux heures de navigation dans ce cadre magnifique et glacial, l’heure était venue de repartir à bord de l’Ortélius.
C’est en début d’après-midi que nous avons débarqué à Camp Zoé, où nous avons pu voir l’ancien camp de base de la Norhtern Exploration Compagny (NEC), une entreprise d’exploration et d’exploitation minière, installé au Spitzberg au début du XXe siècle. Une partie du groupe s’en est allé randonner. 5km de toundra où nous avons approché et observé un troupeau de rennes, des couples de labbes parasites ainsi qu’un couple de plongeon catmarin. Lors de cette excursion, Alain nous a exposé la géomorphologie du lieu. Un paysage morainique marqué par la dernière avancée glaciaire des années 1600 à 1850. Le reste du groupe a longé la côte en zodiac et découvert la plage de Tinayrebukta. En fin d’après midi, après notre retour à bord, nous avons tous eu l’honneur de recevoir notre capitaine Ernesto Barria pour le traditionnel pot du commandant. Après une coupe de champagne, notre chef d’expédition nous annonce que l’Ortélius navigue désormais en direction de la banquise: cap plein Nord!
Au réveil nous naviguons vers le Nord Ouest sur une mer calme avec une très bonne visibilité sous un ciel d’une infinie variété de gris comme seul l’Arctique sait en produire. Les Sept îles sont par notre travers tribord à une vingtaine de miles.
Après le petit déjeuner, Bruno nous introduit à l’Arctique géographique, météorologique, physique, biologique et politique au cours d’une conférence des plus intéressantes pendant que les veilleurs à la passerelle nous annoncent les premières taches blanches sur l’horizon. Dès l’entrée dans la banquise, vers 10.30, les oiseaux sont soudain plus nombreux avec de nouvelles espèces qui apparaissent : les Labbes.
Nous repérons notre premier Phoque barbu : une grosse saucisse alanguie sur la banquise, il se retourne sur le dos en étirant ses membres, à la fois détendu mais toujours vigilant pour repérer les ours polaires qui rodent peut-être non loin, à la recherche de leur prochain repas. Autour de lui, mais dans l’eau, de nombreux Phoques du Groenland, plus grégaires, nous observent en dressant leur tête au-dessus de la surface ; les Phoques du Groenland ne sortent que très rarement sur la banquise en dehors de la période de mise bas en mai.
Ensuite, c’est au tour d’un oiseau presque mythique pour les ornithologues de faire son apparition précédée par son cri un peu rauque : la Mouette ivoire, amoureuse de la glace et l’un des oiseaux les plus septentrionaux du monde.
En guise d’apéritif, la nature nous a servi un mets fort rare : un mâle de Phoque à capuchon hissé sur la banquise, offrant son beau pelage contrasté entre un fond clair marbré de nombreuses taches noires.
Enfin, Benjamin découvre un ours au loin qui semble en chasse et bientôt tout le monde en profite. Le bateau se dirige vers lui qui suit sa route déterminée, se jetant à l’eau plusieurs fois pour ne pas en dévier, ce qui nous permet d’admirer l’aisance avec laquelle il se hisse sur la glace. Sa trajectoire l’amène à passer à 50 m devant la proue du navire derrière laquelle les photographes sont agglutinés.
Lorsque l’ours est de nouveau un point sur l’horizon, il est l’heure de se préparer pour le diner, vous noterez au passage l’excellence du timing de Grands Espaces ! Ensuite vient la preuve que l’on ne maîtrise pas tout et que « flexibilité » est le maître mot : pendant le diner, un deuxième ours s’approche tout prés du bateau ! Et presque tout le monde abandonne sa table au milieu du service mais cela valait la peine car, nous avons eu droit à un show de la part d’une jeune ourse curieuse et bien grasse.
Nous passerons la nuit dans les glaces….
Il est 7h30, l’heure du réveil dans une belle banquise compacte. Après le petit-déjeuner, un phoque marbré se laisse admirer sur sa plaque de glace, l’approche calme et progressive nous permet d’admirer cette grosse « saucisse pour » ours. Notre progression dans cette banquise est lente et les guetteurs sont à l’affut, mais seul un phoque du Groenland laissera admirer sa façon étrange de nager sur le dos. Dans une conférence très complète, Nicolas Vogel, notre glaciologue, nous dévoile tous les secrets de la banquise. En début d’après midi, nous admirons une navigation à travers les plaques de glace aux couleurs variant du gris, au bleu des plus éclatants. Tout autour du bateau, de nombreux oiseaux viennent profiter d’une nourriture libérée par le fracas des glaces : Mouette tridactyle, mouette blanche, labbe Pomarin, mergule nain… et mouette de Sabine. Cela justifie largement une conférence sur les oiseaux par Alexis Révillon. A 16h, la décision est prise d’aller voir cette banquise de plus près. 17h: débarquement sur cette même banquise! Un moment de pur bonheur que beaucoup n’oublieront jamais…
Réveil matinal pour un petit-déjeuner à 7h00 permettant un embarquement dès 8h00 dans les zodiacs pour aller découvrir la grande falaise aux oiseaux d’Alkefjellet. La mer calme attendue s’avère agitée par un clapot marqué levé par un petit vent de Nord-Est. L’activité au sein de la colonie de guillemots de Brünnich bat son plein avec près de 80 000 couples nicheurs exploitant toutes les vires de l’impressionnant épanchement de dolérite. Les renards polaires s’activent au pied de la falaise à collecter les jeunes guillemots qui ont commencé à se jeter dans le vide après 21 jours passés à se faire nourrir par leurs deux parents. Pour ceux qui échapperont à la dent du renard et au gosier des goélands bourgmestre, un long voyage de deux mois les attend, accompagnés de leur père qui continuera à les nourrir pendant la descente vers la mer de Barentz.
L’après-midi est consacrée à la visite du site de Torellneset, ses plages surélevées et son troupeau de morses se prélassant dans la brume pluvieuse qui daigne s’évaporer pour laisser place au soleil. Ce désert polaire est constitué par les plages fossiles qui s’accumulent depuis les dix derniers millénaires sur tout le pourtour du Spitzberg.
Après le souper, nous approchons lentement la grande barrière de glace du Brasvellbreen, l’extrémité occidentale de la grande barrière de glace (170 km) que constitue la calotte recouvrant Nordauslandet et qui vient mourir en mer, libérant depuis 4 ans des quantités considérables de glace. Les bancs de brume laissent place à un soleil illuminant la calotte et les nombreuses indentations du front glaciaire. La soirée restera dans les yeux de tous, petit moment de grâce comme savent en offrir ces contrées fondamentalement inhospitalières.
Notre navigation dans la banquise s’est terminée dans la nuit et nous nous réveillons à l’Ile Blanche : 80° 06 » nord et 31° 21′ est.
Ce site magnifique couvert à 90% d’une calotte de glace nous permet de débarquer sur la petite plage proche du monument de Salomon August Andrée. Ce personnage hors du commun et célèbre pour avoir tenté une traversée de l’Arctique en ballon à hydrogène, le Ornen. On ne le reverra pas vivant et un grand mystère entoure encore cette expédition. Quelques morses sur notre route et lorsque nous rentrons, à regret vers l’Ortélius, une lumière formidable éclaire l’île ! Une couronne de ciel bleu autour de cette coupole de glace, un glacier bleuté. Kvitoya est toujours aussi belle…
Cet après-midi, une conférence passionnante de Pascal sur le seigneur des lieux, l’ours polaire, suivie par une intervention de Christophe Bouchoux à propos de l’expédition d’Andrée.
Puis c’est Christophe Bassous qui nous éclaire sur une petite partie du monde sous-marin arctique avec de superbes images de méduses.
La surprise du soir, c’est un barbecue organisé par l’équipe du bord, qui nous attend sur le pont hélicoptère. Il fait frais et une faible neige tombe sur le pont… mais soudain, Caroline repère un magnifique ours sur une plaque de glace. A notre approche, il déneige sa proie, c’est un gros phoque qu’il dévore sous nos yeux.
A bord c’est du bonheur…
0 h 45, le réveil sonne. Cette nuit, un tour de garde s’organise pour scruter la banquise. À 2 h 20, un premier ours croise les jumelles de Benjamin. L’approche se fait en douceur et les passagers sont réveillés 30 minutes plus tard pour l’observation. C’est un jeune ours en pleine santé, mais qui s’endort calmement sur une plaque de glace dérivante, légèrement distrait par ce spectacle inhabituel. C’est alors qu’un second ours est localisé à 90° du premier sur notre gauche. Il avance droit sur nous, puis soudainement, s’arrête, fait demi-tour, et vient chercher les restes d’une vieille carcasse de phoque.
Petit déjeuner à 8 h 00 suivi d’une conférence passionnante de Christophe sur la dérive transpolaire de Nansen à bord du Fram. À 12 h 15, deux nouveaux ours se détachent progressivement à l’horizon. Benjamin les voit se dresser sur leurs pattes arrière face à face. Ils semblent se disputer. Le temps de rapidement déjeuner, nous sommes déjà en vue de ces deux colosses. Le sang recouvre la fourrure de leurs cous, de leurs têtes et de leurs pattes avant. La carcasse sombre et rouge écarlate d’un phoque barbu fraîchement dépecé contraste fortement sur la banquise où l’on peut encore lire le déroulé de cette fructueuse chasse. La scène est superbe. Nous les quittons après presque deux heures d’observation. Un régal.
À 15 h 30, après un arrêt thé et chocolat chaud, c’est Nicolas qui s’installe en salle de conférence pour une intervention sur les glaciers et la climatologie. 17 h 30, récapitulatif de journée sur l’ours polaire, les données techniques du navire Ortélius et le programme de la journée de demain.
De petit matin, nous parvenons au nord-est de la terre Albert Ier, à Reinsdyrflya (autrement dit, le plateau des rennes ; environ 79°40N-13°50E). Là, nous débarquons vers 9H00 pour visiter une ancienne hutte de trappeur, avant de nous engager dans la toundra où nous herborisons à souhait, en raison de la multitude de plantes arctico-alpines : Dryas à 8 pétales, Renoncule arctique, Saule arctique, Oxirie digyna… tout un stock de nourriture potentiel pour les oies à bec court que nous croisons de loin. Finalement, nous apercevons un groupe de 6 rennes (mâles, femelles et jeunes) qui tolèrent un moment notre approche, avant de s’éloigner sur la crête. Durant ce temps, deux groupes de passagers, partis en croisière zodiac, effectuent une visite des baies et anses voisines, notant par-ci des sternes arctiques nourrissant leurs jeunes, ou des mouettes tridactyles opérant un festin d’enfer à la vue d’alevins de poissons. Mais, alors que tout ce beau monde retourne enfin au navire pour le repas de midi, quelqu’un s’écrie subitement : -« des bélougas ! ». En effet, le long du rivage, une bande de 9 animaux au moins, blancs ivoire, nous narguent à distance en faisant remarquer que, à 10 minutes près, (les zodiacs étant désormais sur le pont) nous aurions pu les suivre de près.
Durant l’après-midi, nous remontons sur les zodiacs afin de gagner le brash du glacier de Monaco. Le brash constitue l’ensemble des morceaux, blocs, fragments, glaçons… que le glacier déverse en mer lorsque le front glaciaire se disloque, créant par la même occasion de grandes vagues déferlantes. Il faut dire aussi que le glacier est impressionnant, avec un mur considérablement haut. Un phoque barbu nous rend visite, trop rapidement à notre goût. Après une longue promenade, nous arrimons tous les zodiacs ensemble parmi les glaces et fêtons doucement la fin du voyage avec un apéritif improvisé. Certes, deux journées nous attendent encore, mais la surprise puis le bonheur se lisent tour à tour sur le visage des passagers. « Encore une chouette journée ! » entend-on ici. « Ah, vous avez l’art de nous surprendre » renchérit-on par là. Vers 18H00 a lieu le récapitulatif de la journée, avec quelques notions de géologie abordées, puis une présentation de l’oeuvre de Albert Ier, océanographe mondialement reconnu pour ses recherches sur le Spitzberg, et autres parties du globe. Après le diner, nous approchons de l’île de Moffen sur laquelle résident des morses que nous ne nous privons pas d’observer depuis le pont (environ 80 individus), sous un magnifique soleil de fin de journée. De là, nous admirons les évolutions de 2 petits rorquals sur fond de montagnes enneigées, dont les sommets luisent sous le soleil couchant.
Ce matin, nous sommes arrivés tôt devant Ossian Sarsfellet (Baie du Roy). Nous avons pu voir le village habité le plus au nord « Ny-Ålesund », base scientifique. Ensuite débarquement zodiac devant cette superbe falaise, pour une marche où nous avons pu voir deux beaux rennes mâles que nous avons pu approcher de très près, un renard polaire curieux qui a fini par venir faire un festin d’une carcasse de renne et tous les oiseaux de cette petite falaise. Au cours de cette marche, nous avons pu admirer les 3 couronnes illuminées d’un joli soleil polaire. Pendant ce temps, une petite partie du groupe fait une croisière zodiac où ils ont pu admirer des oies à bec court, des bernaches, des labbes et un petit détour par le front du glacier Conwaybreen qui avait volé de magnifiques icebergs bleus. Retour sur l’Ortelius pour un repas bien mérité. A 15h nous partons cette fois pour le front du glacier du 14 juillet. Nous partons pour une croisière zodiac suivie d’un débarquement. Et surprise, un bel ours impassible est le locataire de la plage. Indifférent, il se couche et nous surveille de loin. Nous partons alors pour la petite falaise, refuge des macareux et autres mouettes, goélands, bécasseaux violet. le front de glace est magnifique, mais une petite pluie vient à bout de nos ardeurs et nous oblige à nous réfugier sur le bateau. Le Capitaine nous convie à l’apéritif d’au revoir. Après le repas, Alain nous convie à son show où nous avons pu revoir toutes les merveilleuses aventures de cette croisière. A cette heure, nous sommes tous affairés à faire nos valises. Bonne dernière nuit polaire à tous…