Alain Desbrosse
Spitzberg
12 janvier
23 janvier 2018
À bord de l'Ortélius, Janvier 2018
Alain Desbrosse
Spitzberg
Partis de France et de Suisse, nous nous retrouvons pour la grande majorité du groupe à Buenos Aires. Bienvenue en Argentine!
La température n’y a rien de polaire… Finalement, c’est le dernier tronçon, de Buenos Aires à Ushuaia, environ 3000 km. Nous survolons de vastes étendues plates et désertiques. Puis c’est Trelew, au milieu de nulle part… et la Terre de Feu. Les montagnes annoncent Ushuaia, la ville du bout du monde. La baie est superbe dans son écrin de pics ponctués de neige et sous le soleil. Nous nous installons dans notre hôtel et chacun profite du lieu. C’est le premier contact avec ce climat si changeant. Nous commençons sous le soleil, un nuage sombre passe et quelques gouttes fusent. Un arc-en-ciel se forme au-dessus des montagnes. Dans le port, des pétrels géants se laissent bercer par la houle. Les goélands de Scoresby, au bec et pattes rouge vif, nous survolent. Un trois mât hollandais est amarré.
Ici, c’est l’été et les lupins fleurissent en abondance dans les parcs et jardins. La rue principale regorge de boutiques et de petits restaurants. Ce soir, le dîner est selon les goûts, sous le signe des crabes géants et fruits de mer ou de la célèbre viande d’Argentine.
Un repos bien mérité clot cette première journée argentine.
Ushuaïa, Parc National de la Terre de Feu, départ de l’Ortélius vers le Sud
Ça y est, voilà l’heure de notre première excursion ! Après avoir préparé nos bagages qui seront emmenés à bord de l’Ortélius, une partie du groupe reste à Ushuaia et l’autre visite le Parc National de la Terre de Feu. Départ à 9h30 en bus en direction de l’Ouest pour rentrer dans les forêts exubérantes de Patagonie. Nos guides argentins nous expliquent le passé de cette capitale de la Patagonie Argentine qu’est Ushuaia et ses alentours.
Nous arrivons bientôt au bord des premiers lacs, puis laissons le bus quelques minutes pour découvrir de plus près la forêt du bout du monde. Le temps est maussade en ce début de matinée et on perçoit bien toute l’humidité dont se nourrit cette forêt pluviale.
Petit à petit, le temps se découvre, les averses cessent et la Terre de feu nous montre son plus beau visage en arrivant devant la Baie de Lapataia… mille nuances de bleus de gris et de verts. Nous cheminons maintenant entre les faux-hêtres, sur lesquels poussent le pain des indiens (petit champignon comestible utilisé par les premiers hommes de Patagonie) ; de nombreux oiseaux nous entourent et lancent quelques cris presque familiers. C’est ensuite le moment de profiter de ces paysages pour faire un pique-nique au bord d’une belle rivière.
C’est l’occasion que choisit un magnifique condor pour sortir et nous impressionner par son envergure, puis au tour d’un aigle busard et enfin d’un caracara !
De retour de cette excursion, nous embarquons bientôt à bord de notre bateau où l’équipe de guides nous attend. S’en suivent les réunions habituelles de sécurité et d’abandon du navire, avec exercice à la clé. Nous fêtons ensuite notre départ vers le Grand Sud une coupe de champagne à la main en compagnie du capitaine Mika Appel.
Après notre premier repas à bord, nombreux sont ceux qui profitent du magnifique panorama qu’offre la navigation dans le Canal de Beagle, avec nos premiers albatros, pétrels et même dauphins pour les plus chanceux !
Demain, nous seront en haute mer, d’ici là chacun regagne petit à petit sa cabine…
Nous nous réveillons ce matin avec les douces voix de Cheryl et de Marianne pour nous annoncer que nous avons des conditions optimales pour passer le Drake : 36 km/h de vent, des vagues de 2m à 2,5m et une température de 7°C. Nous nous amarinons petit à petit.
Après un copieux petit déjeuner, chacun va chercher des bottes et un gilet de sauvetage pour nos sorties prochaines en Antarctique. Puis, une conférence nous entraîne dans l’univers de la glace: glace, glaciers, icebergs, banquise. Nous sommes parés pour découvrir de visu les différents types de glaciers, les grands icebergs tabulaires, la banquise… Bref, toute la déclinaison glaciaire…
Après un déjeuner sous forme de buffet servi avec le sourire du personnel de bord, nous commençons notre après-midi avec la réunion obligatoire IAATO. Nous avons maintenant tous les outils en main pour découvrir l’Antarctique selon leur réglementation éthique. Leur but étant la protection permanente de l’Antarctique et sa conservation. S’en est suivi la « fête de l’aspirateur » où nous nettoyons minutieusement notre équipement afin de ne pas contaminer le continent avec des graines, par exemple.
Tout ce travail aura bien mérité un peu de repos!
Nous nous retrouvons un peu avant le dîner pour un récapitulatif de la journée. Après une première journée en pleine mer, nous faisons toujours cap au Sud pour continuer notre parcours de 600 miles marins qui séparent Ushuaia de la Péninsule Antarctique. Pour ce premier « récap », sont évoqués la convergence Antarctique que nous allons passer durant la nuit et les oiseaux marins présents. Aujourd’hui, nous avons pu faire des observations magnifiques : des albatros hurleurs (qui sont les plus grands oiseaux volants, pouvoir faire 2,60 m d’envergure); des albatros à sourcils noirs (jusqu’à 2,40 m d’envergure); des océanites de Wilson (petits, vol chaotique proche de l’eau); des prions de désolation.
Après le dîner, Alain nous convie dans la salle de conférence pour nous présenter « Les Albatros ». Nous allons rêver de ces magnifiques créatures ce soir et espérons en revoir demain!
7h30 : 988 hectopascal, air : 6°C, eau : 3°C, houle inférieure à un mètre, vent : 5 nœuds (2 à 3 Beaufort)
Réveil matutinal par les douces voix de Cheryl et Marianne nous extirpant des torpeurs d’une nuit salvatrice de récupération des décalages horaires et désordres gastriques de la veille dans un Drake s’acheminant lentement vers des eaux au calme olympien. Le passage dans la nuit de la convergence antarctique nous laisse espérer de riches observations ornithologiques pour la journée à venir.
Les activités de la matinée se partagent entre l’observation de quelques trop rares oiseaux marins : damiers du Cap, grand albatros, pétrel bleu, prions, océanite. Les conférences se succèdent:
9h15 : conseils photographiques pour une bonne pratique par Nathanaël
11h00 : histoire de l’exploration antarctique par Marianne et Christophe
Dans l’après-midi, alors que l’Ortelius file ses 11,5 nœuds, cap plein Sud – 173° au compas – les consignes pour la sécurité en zodiac sont données au bar, puis une seconde conférence de Nathanaël sur la biologie des manchots nous introduit à l’environnement antarctique qui se trouve désormais juste derrière notre ligne d’horizon.
Vers 18h00, un tout premier iceberg fantomatique sur la ligne d’horizon bâbord émerge du rideau de brume qui nimbe les parages des 60e degrés de latitude sud dans lesquels nous voguons.
À 18h30, récapitulatif de la journée et présentation des sorties à terre de demain : île Cuverville et Port Lockroy.
À 21h00, présentation du film sur la base anglaise historique de Port Lockroy et la poste la plus australe de la planète, sous la traduction simultanée d’Elza. Bonne nuit à toutes et tous avec de beaux rêves de manchots papous !
Enfin l’Antarctique ! Nous sommes dans le détroit de Gerlache par 64°37.630 Sud et 52°36.340 Ouest. La température est de 2°C et celle de l’eau de 1°C. Un petit peu de vent qui est en train de se calmer.
Une première vision extraordinaire à notre réveil dans les icebergs de toutes tailles et toujours avec ces couleurs de bleu et de blanc.
C’est magnifique ! Et déjà deux baleines à bosse qui soufflent à 200m du bateau. Ce matin, après le départ d’une vingtaine de kayakistes chaudement vêtu, nous embarquons à notre tour pour une petite croisière en Zodiac. Nos premiers icebergs sont déjà habités par des adorables manchots papous qui n’arrêtent pas de marsouiner. Je saute, je nage, je plonge… C’est un mouvement perpétuel de ces oiseaux. Nous avons la chance de repérer un petit groupe de phoques crabiers qui se repose sur un gros glaçon. Nous tournons autour ; cela ne les émeut pas le moins du monde. Encore quelques souffles de baleine que nous repérons dans ce secteur de Cuverville.
Nous croisons maintenant un phoque léopard complètement alangui sur un petit iceberg. C’est à peine s’il relève la tête quand il nous voit. C’est une beau mâle d’environ 3m de long. Lorsqu’il baille, c’est une impressionnante rangée de dent que nous apercevons !
Nous débarquons ensuite sur la plage de Cuverville, où stationne une immense colonie de manchots papous. Et ça piaille, et ça braille et ça remue des petits cailloux piqués chez le voisin… Là encore ils ne sont pas impressionnés par notre présence. Nous faisons très attention à ne pas leur couper la route et nous ne nous éloignons pas du chemin balisé par quelques piquets. Il y a tant à voir ! Quelques adultes en train de nourrir leur petit, d’autres se disputant à coup de bec … Et aussi une partie de la nature, belle et cruelle à la fois. C’est un grand labbe qui emporte les restes d’un petit manchot. Soudain, un craquement énorme se fait entendre et c’est un splendide vêlage de glacier qui se produit. Après une bonne heure d’observation nous rentrons à bord ; juste avant le déjeuner, encore quelques souffles dans la mer et trois silhouettes de baleines de Minke font leur apparition. Le temps de reprendre de l’air elles sondent à nouveau.
Point de sieste tant le panorama est beau ; nous sommes dans l’environnement de pics englacés du canal Neumayer, c’est magnifique. Et le soleil pointe son nez… Notre navigation de l’après-midi nous amène à Port Lockroy, cette station Britannique qui a été rénovée comme à l’époque épique des explorateurs polaires. Il y a le fameux bureau de poste le plus au sud du monde entier, et d’où partiront de très nombreuses cartes postales et autres lettres que nous avons été beaucoup à écrire ! Il y a un petit musée très bien fait sur les explorateurs du siècle dernier. Il y a bien sûr un petit magasin pour acheter quelques souvenirs, et surtout une colonie de manchots papous qui peuple les alentours des bâtiments de la base. Ils nous approchent si près que l’on pourrait les toucher, les uns avec un ou deux petits qui restent au chaud sous papa papou ou maman papou… Une sortie zodiac se fait en parallèle, puisque l’on ne peut débarquer que 60 personnes à la fois. Et lorsque les uns ont fini la visite de la base, ils vont en zodiac (et vice versa bien évidemment). Les glaciers qui font entendre des craquements formidables sont notre paysage fabuleux. Nous voyons même quelques manchots à jugulaire pour la première fois.
Et une cerise supplémentaire… un phoque léopard à la chasse. Quelle journée, mais quelle première journée dans cet Antarctique!
Fantastique !
Réveil par 64°57 Sud et 63°42 Ouest – Baromètre: 946 hectopascals – Température extérieure: 4°C, dans l’eau: 2°C. Le plafond est bas, des écharpes de brume enserrent les premières montagnes de l’entrée du passage Lemaire. Des baleines de Minke sont en plein petit-déjeuner.
Le vent est tombé, la mer d’huile. Nous pénétrons lentement dans l’étroit chenal. Il est bordé de montagnes de basalte et de monumentaux glaciers dont le front est manifestement actif. Certains séracs sont impressionnant et des blocs largement fissurés annoncent de futur vêlages spectaculaires. Quelques petits manchots marsouinent, des phoques crabiers somnolent sur quelques icebergs ou sont en pleine pêche. C’est l’heure du petit-déjeuner pour tout le monde, nous y allons…
Nous naviguons jusqu’à l’île Petermann où nous faisons notre escale du matin. Certains vont directement sur la plage où ils sont accueillis par les premières petites colonies de manchots papous. Les charmants rejetons sont régulièrement nourris par les parents et appareils photos et caméras ne chôment pas… En suivant le parcours balisé vers la droite, on arrive à une colonie de manchots Adélie. Ils sont plus petits que les papous et arborent un anneau blanc tout autour de chaque oeil. Leurs bébés sont de grosses boules de duvet brun, rien à voir avec les petits gris au bec déjà bien rouge des parents papous. Le tracé vers la gauche mène vers l’abri en cas d’urgence et une croix sur un monticule, érigée à la mémoire de 3 alpinistes disparus à proximité.
Tout autour de la calotte enneigée, chaque affleurement rocheux est occupé par une colonie de manchots papous en pleine période de reproduction. Un lieu un peu peuplé… Pendant ce temps, les amateurs de croisière zodiac naviguent entre les icebergs et les manchots papous en pleine pêche: ça marsouine à droite, ça marsouine à gauche… Nous cherchons les souffles et les dos sombres, les baleines sont ici régulières… Un léopard de mer!!! Au pied d’un iceberg, il surgit, sort la tête de l’eau pour nous regarder et replonger. Un peu plus loin, un autre est repéré. C’est l’heure de la chasse aux manchots… Les icebergs environnant nous permettent de laisser libre cours à notre imagination… Nous avons de la matière… Cet après-midi, c’est l’île Pléneau, du nom du photographe qui accompagnait Jean-Baptiste Charcot lors de son premier hivernage en Antarctique. Nous fonctionnons en deux groupes, en zodiac ou en balade d’exploration. Les manchots sont partout mais il y a aussi les très beaux cormorans antarctiques que les anglais nomment cormorans aux yeux bleus et ils les ont vraiment… Les uns comme les autres se concentrent pour se toiletter en groupe. D’autres pêchent, il y a de l’animation, d’autant qu’à certains moments les baleines de Minke sont de la partie.
Certaines passent incroyablement près… C’est magique! Ce matin, c’étaient les baleines à bosse qui avaient ravi ceux qui avaient eu la chance de les voir à proximité. Aujourd’hui, nous aurons eu les 4 saisons, des champs d’icebergs de toute beauté, des phoques crabiers,
Des léopards de mer, des baleines de Minke, des baleines à bosse et des centaines et centaines de manchots… Quelle journée!
Réveil par 64°53 Sud – 63°46 Ouest
Nous avons récupéré nos campeurs ce matin aux aurores… ravis de leur nuit dans les immensités du grand Sud !
La navigation s’est ensuite faite vers le Nord, à travers le fameux chenal Lemaire que les plus matinaux ont pu admirer. Au cours de cette matinée nous apercevrons de nombreuses baleines à bosses ; entre 20 et 25 individus !
Arrivés à Orne Harbour nous découvrons les alentours, encapuchonnés de brumes, lors d’une croisière en zodiac. C’est pour nous l’occasion de voir notre première colonie de manchots à jugulaire. Quelques otaries à fourrure antarctique sont également sur le rivage, en compagnie de cormorans et quelques chionis qui maraudent à la recherche de quelque nourriture.
Nous faisons ensuite notre premier débarquement sur le continent Antarctique ! Nos guides ont balisé un cheminement qui serpente jusqu’à un petit col. Les plus courageux braveront les pentes enneigées pour profiter de la vue imprenable sur la Baie. Arrivés en haut, après quelques minutes, une belle averse de neige nous rappelle où nous sommes et l’ambiance devient pour le moins australe !
Quel bonheur de se retrouver à bord de l’Ortelius, au chaud, un bon repas nous attendant. Nous nous dirigeons désormais vers la Station de recherche Argentine située dans Paradise Harbour.Un panorama glaciaire incroyable s’offre à nous d’autant plus que le soleil fait par moment son apparition. Nous profitons d’une nouvelle sortie zodiac pour explorer cette baie et découvrir d’immenses glaciers fendus de crevasses et séracs.De retour vers la Base Brown, un groupe de phoques crabiers nous accueille et nous débarquons au pied des bâtiments argentins. Une nouvelle ascension nous permet alors de monter sur un petit éperon rocheux qui surplombe la Baie.C’est ensuite l’heure de redescendre et pour certains de prendre leur premier « bain polaire » : une trentaine de courageux se relayent pour tâter la température. Personne ne reste bien longtemps, mais les sourires sont là, chacun fier d’avoir su aller au bout de lui-même dans cette eau glaciale ! De retour au bateau, et après une bonne douche chaude, nous nous régalons du Barbecue organisé par les cuisines. Notre chef d’expédition nous expose ensuite le programme de demain, puis c’est au tour d’une de nos guides de nous apprendre comment reconnaître les baleines qui peuplent les eaux antarctiques.
Réveil par 64°47 Sud – 62°49 Ouest
Nous sommes dans la Baie de Andvord. Cheryl et Marianne nous réveillent avec une merveilleuse surprise. 5 baleines à bosse se trouvent à quelques mètres devant le bateau!
En un éclair, tout le monde s’habille dans sa cabine et sort pour un spectacle particulièrement sensationnel: les baleines sont en train de se nourrir, en s’approchant jusqu’à 5m du bateau! Elles descendent en tourbillonnant et remontent la tête la première. 2 d’entre elles sortent bien le museau de l’eau. Après quelques respirations, elles montrent leur queue une à une en replongeant dans les profondeurs de la mer faire leurs provisions de Krill. Nous restons 45 minutes à observer ces cétacés. Plus loin, nous voyons même une baleine sur le dos en train de se rouler de gauche à droite en faisant claquer ses nageoires pectorales sur l’eau; une autre se met à taper l’eau avec sa queue; et une troisième saute entièrement hors de l’eau à plusieurs reprises! Tout le monde est comblé par ce réveil incroyable.
Nous approchons de Port Neko. Nous commençons par une croisière zodiac et croisons plusieurs phoques crabiers faisant la sieste sur des icebergs. Port Neko est entouré de gigantesques glaciers. Nous assistons à quelques vêlages et faisons le tour de l’île en croisant les routes des manchots papous. La colonie est un peu dispersée et il faut monter au-dessus de la colline pour en voir les autres membres. On peut y observer des jeunes de toutes tailles mais certains font déjà la moitié de celle des adultes!
Après un déjeuner très rapide, nous retournons à nos postes pour les observations.
Le capitaine Mika Appel est à la barre pour passer la Baie de Andvord et le Détroit de Gerlache en direction de la Baie de Wilhelmina.
Il donne ses ordres (bâbord 5… midship… tribord 15… midship…) et son bras droit les exécute en les répétant. Ils naviguent à vue pour éviter les icebergs. Le paysage défile avec ses magnifiques montagnes enneigées. Nous voyons de nouveau des baleines à bosse et également des baleines de Minke.
Arrivée dans la Baie de Wilhelmina, nous embarquons à bord des zodiacs pour une petite croisière. Léopards de mer, phoques de Weddell et phoques crabiers nous attendent sur leurs icebergs respectifs pour leur séance de photos… La baie est monumentale et nous profitons de quelques rayons de Soleil pour faire de magnifique photos des glaciers et montagnes environnants. Encore une bien belle journée!
En mer, première journée de traversée du Passage de Drake
Une longue houle de noroît nous a bercé toute la nuit depuis la sortie des îles Melchior, les Damiers du Cap, ces pétrels des mers du
Sud au plumage bigarré de noir et blanc, ont établi leur ronde incessante autour de l’Ortelius qui vogue imperturbablement en direction du Canal de Beagle dont nous séparent les fameux 50e et 40e rugissant et hurlant où un coup de vent de 35-40 nœuds nous attend.
Cette dépression a justifié notre départ avancé de la péninsule antarctique annoncé hier soir au récapitulatif de la journée. En prévision d’une marche ralentie par le coup de tabac qui nous barrera la route demain, capitaine et chef d’expédition ont pris la décision d’écourter notre séjour d’une demi-journée pour pouvoir faire une première partie du trajet dans des conditions de confort acceptable. La vitesse du bateau devant être significativement abaissée pour affronter une mer déferlante par notre trois-quart bâbord avant, il a été décidé de consacrer 12 heures supplémentaires à la traversée de ce trop fameux et mythique passage dans la grande lessiveuse des mers du Sud.
La matinée se déroule avec une petite mer moutonneuse levée par un vent de 20 25 nœuds. A l’intérieur, les présentations s’enchaînent: Louise pour les explorations de Charcot en Antarctique, Christophe pour l’acoustique sous-marine.
Dans l’après-midi, ce sont Nathanaël et Marianne qui présentent les menaces pesant sur les pôles, Alain pour une comparaison entre Arctique et Antarctique des caractéristiques physiques, biologiques et géopolitiques de nos deux pôles.
L’état de la mer reste stationnaire jusque tard dans la soirée, nous laissant une première journée de traversée du Drake relativement confortable avec une après-midi bien ensoleillée découvrant le bleu profond des mers du Sud qui nous environnent à l’infini. Les prévisions de coup de vent sont confirmées au récapitulatif du soir pendant que les Damiers du Cap maintiennent leurs virevoltes aériennes autour du bateau. Notre soirée se termine à la base Dumont D’Urville par le biais d’un film commenté par Daniel qui y a passé 15 mois…
Nous sommes en plein milieu du Passage de Drake… Par : 59 ° 06 Sud et 64° 58 Ouest, avec 2 à 3000 m de fond…
T° de l’air : 6°C – T° de l’eau : 2°C – Vitesse du vent : force 10 ! Vitesse du bateau: 6 nœuds – Baromètre calé sur 975 hectopascals.
Et bien oui c’est la tempête, toutes les écoutilles et autres hublots sont fermés et interdiction de sortir !
Tout remue pour le petit-déjeuner et l’on doit se tenir à tout ce que l’on trouve, tables, chaises… La conférence prévue ce matin est annulée tant il est difficile de se tenir debout et sans parler du remue-ménage dans la salle obscure de conférences, la bien nommée « chapelle » ! Pour ceux qui souhaitaient voir le Drake fidèle à sa réputation, le spectacle est là et la nature s’exprime dans toute sa splendeur sous le soleil.
Notre matinée sera tout de même ponctuée par une conférence bilingue de Louise sur l’histoire de la pêche baleinière au bar du bateau.
Puis, c’est le repas de midi au cours duquel des bruits incongrus de chutes d’assiettes et ustensiles variés évoquent quelques soucis de stabilité…
Une première conférence en traduction simultanée, par Michael dont le sujet porte sur le photographe de l’expédition Shackelton, Franck Hurley. C’est passionnant de voir la qualité de ces photographies, malgré les rudesses du climat et les dures conditions en ce temps-là.
Une deuxième intervention par Daniel sur le Biomimétisme polaire et toutes les inventions que l’homme a su mettre à profit en imitant certaines qualités des animaux polaires.
Pendant le « récap » avant le dîner, c’est Sara qui nous offre une causerie sur les superstitions maritimes. Après le dîner, nous profitons de l’excellent film de Luc Jacquet « La glace et le ciel ». La houle est toujours là, et devrait nous accompagner ainsi jusqu’au passage devant le Cap Horn et l’entrée dans le canal Beagle.
Réveil par 56°21 Sud et 66°39 Ouest
Nous avons fait une bonne progression et ne sommes plus qu’à environ 100 km du Cap Horn. Les creux ont sensiblement diminué et le baromètre remonte un peu. Mais la tempête est toujours là, sous un beau soleil. La température de l’air est de 7°C et celle de l’eau à 7°C aussi, nous avons bien passé la fameuse convergence antarctique.
Le capitaine positionne le bateau de manière à rendre le buffet du petit-déjeuner plus confortable. Puis, tandis que nous reprenons notre cap, c’est une véritable épopée qui est évoquée avec l’histoire de « L’Endurance et le voyage incroyable de Shackleton ». Cela se passe entre 1914 et 1917. Devancé par Amundsen et Scott pour arriver le premier au Pôle Sud, Shackleton, déçu, conçoit l’ambitieux projet de se faire déposer au bout de la mer de Weddell pour passer par le Pôle et rejoindre la mer de Ross de l’autre côté du continent, soit 3300 km… Il part avec 2 bateaux: L’Endurance et l’Aurora et 56 hommes… Après différentes escales, ils entrent dans les glaces le 19 décembre.
Le 19 janvier 1915, ils sont bloqués dans les glaces. Un mois plus tard, ils sont au point le plus au Sud jamais atteint par un bateau.
Frank Hurley le photographe immortalise le bateau pris par la glace… En attente du dégel, ils chassent pour se nourrir… Le bateau dérive toujours, pris dans la glace… Il commence à remonter vers le Nord. Sous la pression des glaces, l’Endurance est considéré comme perdu et abandonné par – 27°C. Il coule le 27 novembre 1915… Ils embarquent alors des vivres dans des canots qu’ils tirent. En 7 jours, ils font 18 km… Shackleton renonce à son plan de rejoindre l’île Paulet et ils montent un camp sur la glace. En avril 1915, la banquise se disloque. Ils sautent dans les canots… Ils sont vers la pointe de la Péninsule Antarctique. Ils vont vers l’île Déception, rament, rament…
Après 6 jours, ils mettent pied à terre sur l’île Eléphant, hors des routes maritimes connues… Shackleton veut repartir pour chercher du secours. Ils partent à 6 à bord d’un canot, le 24 avril, pour se faire pousser par vents et courants vers la Géorgie du Sud à 1300 km de là. Ils y arrivent le 8 mai mais ne peuvent débarquer que le 10 à cause de la tempête… A 3, ils traversent l’île montagneuse à pied, non-stop à cause du froid… Le 20 mai, ils entendent une cloche, passent un col et arrivent à Stromness, une station baleinière… Ses compagnons de canot sont récupérés peu après. Les 22 rescapés attendent toujours… Shackleton repart chercher ses hommes. Après 3 tentatives et 10 semaines passées, il y arrive avec un bateau argentin. Ils sont tous là!!! Quelle incroyable histoire, dans des conditions extrêmes avec des vêtements gelés, des duvets devenus inefficaces…
Un film, en début d’après-midi, nous entraîne au passage du Cap Horn à bord des derniers grands bateaux à voiles. Puis, c’est l’heure de passer aux travaux pratiques: le retour des bottes et gilets de sauvetage… La mer s’assagit et la navigation redevient peu à peu agréable. Les grands oiseaux voiliers comme les pétrels géants et les albatros hurleurs, forts de leurs 3m60 d’envergure, se laissent porter par le vent sans effort et font des arabesques autour du bateau. Terre! Peu à peu, la côte se précise et nous pénétrons bientôt dans le canal de Beagle. C’est l’heure des derniers récapitulatifs de notre croisière, de l’au-revoir du commandant et du dernier dîner à bord. Alain nous fait revivre avec humour notre expédition en Antarctique. Que de beaux souvenirs!
Réveil à Ushuaia, la ville du bout du monde: 54°48 Sud et 68°18 Ouest – Température de l’air 15°C et de l’eau 8°C
L’Ortélius est amarré au quai. La ville s’éveille doucement dans son écrin de montagnes. Les bâtiments de couleurs ressortent bien sous ce soleil printanier… À bord, nous sommes presque étonnés de ce petit-déjeuner pris complètement à l’horizontale… Bientôt, le quai grouille de monde, arrivé en avance ou pas encore parti, ils sont 5 puis 6 bateaux de croisière réfugiés dans le port mythique. L’ortélius est de taille bien agréable, surtout face au gigantesque bateau de 4000 passagers qui se présente dans la baie…
Pour nous, l’heure est aux bagages et aux adieux… Certains rentrent en Belgique, en France, en Suisse. Pour les plus chanceux, l’aventure continue à Ushuaia, vers Iguaçu, ses 273 chutes en pleine jungle tropicale… ou encore vers Buenos Aires et son ambiance européenne par son architecture, son rythme de vie, sa mode… tout en distillant une atmosphère si latino…
Pour ceux qui rentrent, le décollage permet une perspective parfaite sur Ushuaia et sa baie, le passage des montagnes de la pointe de Patagonie. Puis le paysage change du tout au tout lors de la rapide escale de Trelew. Là, c’est l’aridité de la pampa qui domine, hormis quelques secteurs de cultures irriguées.
Parfois la côte se dessine sous l’aile tandis que nous remontons vers Buenos Aires. À l’atterrissage, la Ville de Buenos Aires dévoile ses piscines, ses toits bleus et sa marée de maisons qui nous dépaysent un peu… Puis, c’est le vol transatlantique, l’Europe et le retour vers Genève, Nice, Paris et… Merci à vous toutes et tous pour ces beaux moments partagés au coeur du pays des baleines et des manchots!
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