Sylvain Mahuzier
Oiseaux et Mammifères
20 mars
2 avril 2016
Mars 2016, à bord de l'Eco-Galaxy
Sylvain Mahuzier
Oiseaux et Mammifères
En fin d’après-midi, nous arrivons à Quito, capitale de l’Équateur nichée à 2830 mètres d’altitude, ce qui en fait la seconde capitale la plus haute du monde. Installation à l’hôtel « Patio Andaluz », tout près du centre-ville historique. L’hôtel porte bien son nom, les patios et nombreux balcons et passages donnent à l’édifice un charme certain. Dîner de cuisine locale sur place, puis tentative de repos après une longue journée de voyage.
La journée s’annonce bien, la lumière est déjà belle. Nous partons à pied vers le centre historique de Quito, première ville classée au patrimoine mondial de l’Unesco en 1978, pour une visite complète en compagnie de notre guide Gustavo, qui parle un français impeccable.
Première étape, le monastère Saint-Augustin, son cloître et son retable en bois typique du style espagnol. Puis, nos pas nous mènent sur la Plaza Grande, que bordent la cathédrale, le palais du Gouverneur ou encore le palais de l’Archevêché. Non loin, l’église de la Compagnie de Jésus nous émerveille par ses multiples décorations dorées à l’or fin. Nous découvrons ensuite la magnifique Plaza San Francisco, vaste place pavée entourée de maisons coloniales colorées, et visitons la remarquable église du monastère San Francisco, à nouveau emplie de sculptures et de décorations de style baroque. Le musée « Del Alabado » nous en apprend un peu plus sur l’histoire préhispanique de la région à travers de très nombreuses pièces archéologiques. Déjeuner au restaurant « El Pobrediablo », fréquenté par de nombreux artistes, puis cap sur la « Chapelle de l’Homme », dessinée et peinte par l’artiste Oswaldo Guayasamin en hommage à l’humanité. Enfin, nous passons deux heures au jardin botanique qui présente toute la diversité de la flore équatorienne, sans oublier les somptueuses serres à orchidées. Dîner à deux pas de l’hôtel, au restaurant Vista Hermosa, d’où nous avons effectivement une très belle vue crépusculaire puis nocturne sur la vieille ville.
Encore une journée ensoleillée. Départ tôt le matin pour l’aéroport et toutes les formalités à accomplir. Escale de trente minutes à Guayaquil, grand port et ville la plus importante d’Équateur (2,5 millions d’habitants) puis cap sur l’archipel des Galapagos. Nous sommes accueillis par Jorge, qui vit depuis 18 ans aux Galapagos et sera notre guide pour toute la croisière. Les marins nous conduisent jusqu’au Galaxy 2, notre élégant et spacieux yacht. Pour nous mettre directement dans l’ambiance, de nombreux lions de mer (ou otaries) des Galapagos – sous-espèce endémique du lion de mer de Californie -, se reposent jusque sur les bancs situés sur les quais, pendant que les frégates font des cercles au-dessus du port. Après le déjeuner à bord et l’exercice de sécurité, nous ne tardons pas à entrer dans le vif du sujet : navigation accompagnée par les puffins d’Audubon, oiseaux de mer bruns et blancs aux ailes effilées, puis débarquement sur une plage de l’île San Cristobal à l’aide des deux pneumatiques. Les frégates sont là, ainsi que nos premiers fous à pieds bleus qui plongeant comme des fusées, et quelques pélicans bruns. Sable blanc, lave ébène et eaux turquoises contrastent merveilleusement, et commencent à nous livrer leurs premiers trésors : otaries des Galapagos allaitant leurs bébés, lézards des laves, parulines jaunes, moqueurs de Chatham et notre premier géospize, l’un des fameux « pinsons » de Darwin… Plusieurs espèces endémiques des Galapagos dès la première sortie !
Au petit matin, nous sommes en vue des côtes de Santa Fe. Dès le lever du soleil, le lagon bleu paradisiaque resplendit, le fond sablonneux blanc n’est qu’à quelques mètres sous la surface. Nous débarquons au fond du lagon pour une promenade parmi les cactus à raquettes « Opuntia », au pied desquels nous faisons la connaissance de l’iguane terrestre de Santa Fe, endémique de l’île, c’est-à-dire qu’il ne vit qu’à Santa Fe ! Le moqueur des Galapagos nous accompagne, et la délicate tourterelle des Galapagos, aux yeux cerclés de bleu et aux pattes rouges, fait quelques apparitions. Il fait déjà bien chaud, et justement la suite du programme est rafraîchissante : « Snorkeling » dans les eaux claires du lagon. Raies et poissons colorés de toutes sortes nous accompagnent sous la surface, tandis que sur les rochers un pélican brun nous observe. Non loin, un jeune héron strié est immobile, à l’affût d’une proie. Juste après le déjeuner, exercice de sécurité, puis cap sur la petite île de South Plaza, à l’ouest de Santa Cruz. La végétation aride est spécifique ; des tapis interminables et rougeoyants de « Sesuvium », plantes grasses annuelles de la famille des succulentes, au milieu desquelles poussent les cactus Opuntia. Le tout sur la lave, comme d’habitude. Nous observons de très nombreux iguanes terrestres tirant sur le jaune, pigment qu’ils tirent des fleurs de cactus dont ils se nourrissent abondamment. Côté oiseaux, quatre nouvelles rencontres : le fou de Nazca, à la livrée noire et blanche et au masque caractéristique ; la mouette à queue d’aronde, particulièrement élégante avec son cercle orbital rouge que souligne la tête noire ; le noddi brun, parent sombre des sternes ; le phaéton éthéré à bec rouge au vol d’autant pus gracieux qu’il « traîne » deux brins de queue très longs et très fins derrière lui. Journée à nouveau marquante, clôturée par le cocktail de bienvenue du commandant. Après le dîner, quelques dernières observations dignes d’intérêt : des Requins des Galapagos chassent autour du bateau, attirés par les projecteurs du bateau.
Au nord de Baltra, il y a une île plate de 2 km2, Nord Seymour. C’est là que nous accostons ce matin tôt. Petite par la taille mais grande par son intérêt faunistique, l’île de Nord Seymour est elle aussi un paradis pour les naturalistes. Dans un paysage aride où dominent les arbustes « Palos Satos » et les cactus Opuntia, vivent en bonne harmonie les grandes frégates et les frégates magnifiques. Elles construisent leurs nids de branchages sur les Palos Santos ainsi que dans les buissons salés en bordure de plage. Mâles au jabot écarlate resplendissant, femelles au cercle orbital bleu ou rouge selon l’espèce, poussins encore en duvet et juvéniles, nous avons droit à un tableau très complet et passionnant de la reproduction des deux espèces de frégates, et de leurs différences. Autre espèce remarquable, le Fou à pieds bleus. C’est la saison des amours, et nous assistons à quelques parades nuptiales : le mâle danse avec ses pattes bleu turquoise, les levant l’une après l’autre, déploie ses ailes en arrière et siffle longuement en pointant son bec vers le ciel. Pendant ce temps-là, la femelle se pâme en rentrant son bec dans son poitrail blanc… Les nids des Fous à pieds bleus seront simplement installés au sol, dans une dépression.
Régulièrement, nous croisons un iguane terrestre bien jaune, souvent en train de dévorer un cactus. C’est le long de la côte sud que nous nageons un peu plus tard, avec une eau moins claire qu’hier, ce qui ne nous empêche pas de croiser poissons chirurgiens, poissons perroquets, et pour quelques-uns d’entre nous plusieurs requins à pointe blanche, et un banc de poissons aiguille. Pendant le déjeuner, nous nous rapprochons de Baltra pour une opération de « refueling », c’est-à-dire que nous allons faire le plein de carburant au port. Puis nous repartons vers l’îlot de Mosquero pour débarquer sur sa grande plage de sable blanc. Les lions de mer des Galapagos vivent tout autour de l’îlot. Certains d’entre nous choisissent la baignade, d’autres revêtent masques et palmes, les autres se promènent d’un bout à l’autre de cette petite île. Quelques petits échassiers vadrouillent sur la plage : bécasseau Sanderling, gravelot semi-palmé, tournepierre à collier, tandis qu’une jeune mouette obscure nous observe. De jeunes iguanes marins se prélassent en bord de mer, sur les rochers, entourés d’une myriade de crabes des Galapagos. Les reptiles sombres sur fond de lave obscure et les crustacés écarlates contrastent joliment…
Dans la nuit, nous avons navigué plein nord-ouest, et nous trouvons au petit matin devant l’île de Genovesa, grande caldeira ouverte sur la mer. Débarquement à Darwin Bay, au fond du cratère, sur une petite plage corallienne d’un blanc éclatant. Dans les endroits un peu plus découverts, ce sont les frégates qui paradent, et les jabots rouge vif des mâles sont autant de spots lumineux sur la végétation bien verte. Puis, en cheminant le long des palétuviers, l’excitation croît : nous observons notre premier fou à pieds rouges, puis des dizaines et des centaines d’autres. La plupart ont le corps couleur café au lait, quelques-uns ont le plumage blanc. Tous ont le bec bleu. Fous et frégates cohabitent plutôt pacifiquement, mais nous observons quelques interactions amusantes, comme ce fou à pieds rouges adulte volant quelques brindilles dans le nid d’une frégate pour garnir son propre nid, non sans protestations de la part de la frégate. Les fous de Nazca sont présents aussi, souvent perchés sur un ressaut de la petite falaise. Sous la végétation ou dans des creux de rochers, quelques couples de Mouettes à queue d’aronde sont installés pour la reproduction. Deux « pinsons » de Darwin s’activent à rechercher leur nourriture dans les buissons : le Géospize à gros bec, qui comme son nom l’indique est muni d’un appendice aussi long que haut, et le Géospize des cactus. Une baignade avec « snorkeling » dans les eaux turquoise de la baie de Darwin nous rafraîchit après les heures bien chaudes de la matinée.
En après-midi, plongée en eaux profondes près de la falaise, puis nous nous équipons pour la marche. Une promenade en zodiac le long de la falaise nous permet de rencontrer nos premières Otaries à fourrure des Galapagos, encore une espèce endémique. Puis, nous débarquons dans les « Pas du Prince Philippe », partie de la falaise appelée ainsi en l’honneur du prince de la couronne britannique qui a visité le site. Après avoir grimpé de 25 mètres, on arrive sur un plateau aride couvert d’arbustes Palos Santos où nichent frégates et fous à pieds rouges, tandis que les fous de Nazca nichent au sol. La lave est omniprésente, et nous arrivons sur un vaste champ de lave qui suit une longue fracture. Marcher au milieu de cette multitude d’oiseaux qui se manifestent sans cesse, dans un paysage quasi-lunaire, est une expérience vraiment forte. Au bord de la falaise opposée, des centaines d’océanitesthétys volent. Un de leurs prédateurs, le Hibou des marais (ou « brachyote »), parcourt le champ de lave, et nous finissons par avoir la chance inouïe de l’observer longuement dans une faille, à quelques mètres seulement… Une journée forte en émotions naturalistes, assurément !
Sur la route de retour de Genovesa, nous repassons la ligne de l’Équateur dans la nuit. Sortie du matin en annexe à Punta Carrion, au nord-ouest de l’île de Santa Cruz. En longeant la falaise, nous retrouvons quelques otaries se reposant sur les rochers. Les murs de lave torturée sont spectaculaires, oscillant entre le noir, le gris et le rouge, et criblés de grottes, de fractures, de trous composant d’étonnants motifs. Les noddis bruns font des allers-retours incessants, tandis que les Pélicans bruns sont juchés sur des corniches ou des blocs. Un héron des laves, bien camouflé grâce à sa couleur cendrée qui se fond avec le bloc de lave sur lequel il est perché, est immobile, en arrêt, l’oeil fixe, attendant de détendre son cou de manière foudroyante pour prélever le petit poisson qui passera.
Quatre heures nous sont nécessaires pour arriver au sud de l’île Santa Cruz, à Puerto Ayora, capitale des Galapagos. Sylvain profite de la navigation pour nous parler longuement de Charles Darwin : son voyage sur le Beagle et son passage aux Galapagos, la genèse de sa théorie de la sélection naturelle…
Nous déambulons dans la petite ville en fin de matinée, puis après le déjeuner, un bus nous fait traverser les « hautes terres », où la végétation exubérante et bien verte contraste avec les paysages volcaniques récents dont nous avons profité jusqu’à présent. Destination : une grande ferme/parc où de nombreuses tortues géantes des Galapagos (la sous-espèce de Santa Cruz) évoluent dans les prairies et sous les goyaviers, en toute liberté. Certaines dorment, d’autres prennent un bain de boue, ou s’alimentent. Elles se nourrissent d’une cinquantaine de plantes différentes, qu’elles n’ont pas de mal à trouver sur place. Au milieu du domaine, nous parcourons un tunnel de lave dans lequel apparaissent clairement différentes couches correspondant aux éruptions successives.
Dernière halte : la Station de Recherche Charles Darwin, inaugurée au début des années 60. Ses fonctions principales : fournir des informations scientifiques, principalement sur les Tortues géantes des Galapagos, aider le Parc National avec des programmes d’éducation, et former les étudiants équatoriens. Puis retour sur le Galaxy II car la journée de demain s’annonce chargée…
Nous sommes arrivés cette nuit sur l’île d’Isabela. Lever à 5h30, départ à 6h00. Le jour vient de se lever quand nous embarquons sur les annexes, frégates et fous à pieds bleus commencent à se manifester, et un grand héron fait des effets de cou sur fond de lueurs matinales. Débarquement sur Tintoreras, petite île entièrement recouverte de coulées de lave bien noire qui contrastent avec les plages de corail blanc. Nous ne tardons pas à apercevoir les iguanes marins, pourtant bien camouflés. Ils sont dix, cent, il y en a partout. De nombreuses femelles, quelques mâles qui se chauffent aux premiers rayons du soleil et « éternuent » de temps à autre pour excréter le sel par leurs narines, ou pour nous signifier leur mécontentement lorsque involontairement nous passons trop près d’eux. Une bande de mangrove occupe une petite portion de l’île, et les lions de mer des Galapagos sont bien présents aussi. Au retour, nous effectuons nos premières observations des manchots des Galapagos, en train de nager dans les eaux turquoise de la baie. Nous les revoyons un peu plus tard, lorsque nous allons nager près du port de Puerto Villamil, la modeste capitale d’Isabela. Mouettes obscures et iguanes marins sont aperçus sur la plage, ainsi qu’un courlis corlieu.
En début d’après-midi, nous partons visiter la station de recherche et de reproduction des tortues d’Isabela, qui se répartissent en 5 variétés, isolées les unes des autres par les volcans qui sont entrés en éruption les uns après les autres. Certaines présentent des cicatrices ou des amputations, qu’elles doivent à une éruption récente et dont elles ont été sauvées par hélicoptère. Un sentier recouvert de platelages nous conduit ensuite à travers les marais et la mangrove. L’eau a une couleur rouille en raison du tanin que la végétation libère, ce qui met en valeur les couleurs et formes gracieuses des flamants roses que nous y découvrons. La lagune nous offre aussi l’observation de poules d’eau, de canards des Bahamas et de quelques jolies échasses d’Amérique. Retour par la plage, le long de laquelle les petits bécasseaux Sanderling courent sans fin au rythme du flux et du reflux, jusqu’à la place centrale. Les statues de Darwin, qui a fait escale sur Isabela, et du fondateur de Puerto Villamil sont bien mises en valeur. Enfin, en ce dimanche de Pâques, quoi de plus naturel que de visiter l’église originale, pittoresque et émouvante, décorée entre autres de vitraux représentant une frégate, un iguane, un fou, un hippocampe…
Pendant la nuit, nous avons navigué autour de la partie sud de l’île Isabela, et nous nous retrouvons ce matin plein ouest, en baie Elisabeth. Nous allons explorer cette baie avec les annexes, afin d’approcher la faune autant que possible. Première destination : les îles Mariela, gros rochers largement repeint au guano et dont le sommet est tout de même garni d’arbres, autour duquel nous croisons à distance respectable pour éviter le dérangement. Pélicans bruns et fous à pieds bleus sont omniprésents, et parmi les autres pêcheurs, deux sont nouveaux-venus pour nous : les manchots des Galapagos, que nous n’avons aperçu que furtivement hier, et les cormorans aptères. Tous deux sont des nageurs et plongeurs remarquables. Les cormorans sont appelés « aptères » car ils ont perdu la faculté de voler, qui ne s’avérait plus nécessaire en l’absence de prédateurs terrestres. Nous observons les manchots essentiellement dans l’eau, en pêche active. Nous nous dirigeons ensuite vers la mangrove littorale de la baie, havre de paix où les rencontres sont cependant multiples : grand héron, lions de mer, tortues marines… nous avons même droit à un festival de raies qui évoluent harmonieusement dans l’eau claire et peu profonde ; la plupart sont des raies aigles, mais nous identifions deux autres espèces. Pendant le déjeuner, deux heures de navigation plein nord pour arriver à Urbina Bay, près du volcan Alcedo. Nous commençons par l’activité nautique, dans des eaux un peu agitées. Le haut de plage est truffé de trous de ponte de tortues marines. Et sur un rocher proche, un gros crabe des Galapagos commence à dévorer un bébé tortue qui a probablement quitté le nid il y a peu… Puis, nous effectuons une marche à travers une forêt d’arbustes sur un champ de lave surélevé par un gigantesque soulèvement de terrain volcanique il y a quelques décennies. Le sol est un mélange de cendres volcaniques et de corail, et nous arrivons un kilomètre après le trait de côte, à un endroit où les traces de l’ancien rivage sont manifestes. Tout au long de la randonnée, nous aurons rencontré de nombreux iguanes terrestres des Galapagos, principalement des mâles imposants, tous de couleur jaune. Leurs terriers sont bien visibles au bord des chemins. Après le dîner, au cours de notre « récap » habituel, nous reparlons des manchots des Galapagos, de leur biologie et des menaces qui pèsent sur eux.
Nous voici à l’ancre, en vue de Punta Espinoza, située sur Fernandina, l’île à l’ouest immédiat d’Isabela et 3e plus grande île des Galapagos par sa taille. La première activité nous conduit à la rencontre des iguanes marins, une fois encore en harmonie avec leur milieu, noir de lave. Dès le débarquement, il est difficile de se frayer un chemin à travers les centaines de reptiles rassemblés par groupes. Nous évoluons sur les plaques de laves, cordées pour la plupart, en oreillers par endroits (« pillow lavas »), et qui témoignent du passé volcanique tumultueux de la région. Les légions d’iguanes marins ne se révèlent à nous qu’au dernier moment, le ton sur ton fonctionne bien. Quelques iguanes adultes laissent un lézard des laves se percher sur leur tête. Deux huîtriers d’Amérique se disputent un gros crabe des Galapagos, qui est loin de se laisser faire. Sur les plages, nous apercevons plusieurs cormorans aptères. Juste avant de quitter le site, une buse des Galapagos (encore une espèce endémique !) se manifeste, perchée au sommet des arbres de la petite forêt derrière la mangrove. Au retour, quelques minutes de nage autour du Galaxy II nous rafraîchissent salutairement…
Le début de l’après-midi nous voit de retour à l’île Isabela, après deux heures de navigation. Punta Vicente Roca, falaise de lave vertigineuse et multicolore – gris, rouge, brun – accueille notre deuxième sortie aquatique de la journée. L’eau est moins claire, le soleil moins présent, mais les Tortues vertes sont là, nombreuses à se nourrir, nous rencontrons même une tortue carey. Apparemment pas du tout importunées par notre présence, les tortues semblent voler au ralenti, et leur élégance est infinie. Nous passons de bons moments à nager avec ces créatures étonnantes, pas trop longs néanmoins compte tenu de la fraîcheur de l’eau… Puis nous partons en pangas (nos bateaux pneumatiques) pour longer cette côte éminemment volcanique. Dykes, coulées de laves, couches de cendres, caldeira, le cadre est spectaculaire. Et la faune n’est pas en reste. Les lions de mer jouent dans l’eau, les iguanes marins se prélassent sur de gigantesques blocs de basalte, noddis bruns et fous à pieds bleus occupent les corniches et anfractuosités pour nicher. Dès notre retour à bord, le capitaine appareille pour le nord, afin que nous fassions le tour d’Isabela et atteignions demain matin l’île Santiago. Les puffins des Galapagos nous accompagnent, et plusieurs raies manta sautent non loin du bateau. Juste avant le coucher du soleil, nous franchissons l’Équateur et le Commandant nous offre à boire…
Egas Port, à l’ouest de l’île Santiago, nous accueille avec un temps lumineux. Le sentier que nous empruntons est volcanique à souhait, comme chaque jour… Cendres volcaniques, laves cordées, pont de lave et cavités dans lesquelles la mer pénètre. Nous sommes à marée basse et la mer a laissé dans les nombreuses vasques naturelles que forme la lave, de véritables piscines d’eau chaude où les iguanes marins peuvent se chauffer confortablement. Les hérons des laves sont à l’affût d’organismes marins de passage. Huîtriers américains, courlis corlieu et gravelots semi-palmés, pour ne citer qu’eux, s’affairent autour des vasques. La végétation est assez fournie dans l’intérieur, et fréquentée par quelques passereaux (parulines, géospizes, moqueurs) et la buse des Galapagos. Revenus aux plages (l’une de sable blanc, l’autre de sable sombre), nous revêtons palmes et masques et partons à la découverte de la faune sous-marine autour de quelques rochers. Certains d’entre nous aperçoivent des raies et une tortue carey. Pour le reste, Poissons chirurgiens, perroquets, napoléon et bien d’autres sans oublier les oursins crayons, suffisent à nous ravir. En milieu de journée, cap au sud pour atteindre l’est de l’île Rabida. Ici, le sable et la falaise dont il est issu sont rouge brique foncé. Il s’agit d’un matériel volcanique très poreux qui a été oxydé par la pluie, l’eau salée et les vents marins. Cette couleur brique contraste avec l’écume des vagues qui viennent lécher la plage, et avec la végétation bien verte de l’arrière-plage. Nous remettons palmes et masques, et investiguons la bordure sous-marine de la paroi brique, où quelques nouvelles espèces de poissons colorés nous enchantent une fois encore. Derrière le cordon littoral, une lagune entourée d’arbres a pris elle aussi la dominante brique. Promenade découverte sur un chemin bordé de cactus Opuntia, qui domine la lagune. Géospizes, moqueurs des Galapagos sont de la partie, et nous observons une nouvelle espèce : La journée se termine par une navigation vers l’île Santa Cruz, au cours de laquelle nous sommes accompagnés par un vol de frégates qui, malgré notre vitesse, donnent à peine un coup d’aile de temps en temps.
Arrivée au petit matin à Bahia Tortuga Negra, au nord de l’île Santa Cruz. Le temps est clair et le soleil chauffe déjà, nous partons en panga longer les criques où des centaines de fous à pieds bleus, perchés sur les rochers ou posés en mer, attendent le passage d’un banc de poissons. Régulièrement, les sentinelles volant autour plongent lorsqu’elles aperçoivent les proies, donnant le signal d’une véritable salve de plongeons impressionnants, assez bien synchronisés… un spectacle époustouflant ! Puis nous partons explorer une vaste et magnifique mangrove, en empruntant un dédale de canaux bordés de palétuviers. Quelques frégates nous survolent, quelques pélicans ou fous se perchent, et les petits hérons des Galapagos alarment lorsque nous nous approchons involontairement des racines sur lesquelles ils font le guet. Mais l’intérêt réside aussi dans la faune subaquatique. L’eau est moyennement claire mais la profondeur est faible, cela nous permet d’apercevoir de très jeunes requins à pointes noires, deux ou trois raies aigle ainsi que moult tortues vertes qui évoluent tranquillement dans la mangrove pour se nourrir.
L’après-midi, non loin de Bahia Tortuga Negra, nous piquons une tête avec masque et palmes afin de visiter un groupe de rochers qui nous inspirent au bord de la plage de Bachas. Pas grand chose de plus que d’habitude en matière d’espèces de poissons, sinon une énorme tortue verte. Puis, nous randonnons sur la plage blanche au bord de laquelle sont enfouis les vestiges des barges américaines utilisées à Baltra pendant la deuxième guerre mondiale, seuls quelques morceaux de ferraille surgissent encore du sable. Sur le haut de plage, de vastes trous creusés par les tortues vertes abritent des centaines d’oeufs. Les frégates survolent sans relâche la plage, à l’affût du moindre mouvement de sable susceptible de révéler la sortie imminente à l’air libre d’un bébé tortue. Une petite lagune arrière-littorale accueille un flamant rose, un iguane marin et quelques limicoles – échasse américaine, gravelot semi-palmé…
Sullivan, c’est ainsi qu’a été nommée la baie où nous débarquons aujourd’hui pour une excursion sur un vaste champ de lave noire. Cette coulée date de 1892, et les laves cordées à l’épanchement visqueux déclinent de multiples motifs très graphiques. Parfois nous croyons apercevoir la silhouette d’une tortue, d’un iguane, ou, avec encore plus d’imagination, des personnages. La chaleur est déjà conséquente, nous avons bien fait d’effectuer cette promenade volcanologique en début de matinée. Quelques rares plantes ont commencé à coloniser ce milieu hostile, et nous n’apercevons en tout et pour tout qu’un lézard des laves. Un peu plus tard, nous nous rafraîchissons dans les eaux de la baie, en essayant comme toujours d’observer quelques créatures marines. La luminosité est bonne et de nombreux poissons circulent. Une grosse tortue verte se nourrit paisiblement, quelques raies fouillent le sable du fond et un manchot des Galapagos fait quelques apparitions.
Cet après-midi cap sur Bartolomé, en face de la baie de Sullivan, à quelques centaines de mètres seulement. Tout d’abord, une baignade masque/tuba/palmes au pied du pinacle de Bartolomé, sorte de « tour de Pise » de lave autour de laquelle nous croisons poissons divers et nous trouvons nez à nez avec quelques otaries. Puis nos pangas nous déposent au pied des 365 marches qui mènent au sommet de cette petite île. Panorama somptueux assuré, vue sur le système volcanique de l’île et les différents cônes et bombes. Au-delà, on aperçoit l’immense champ de lave que nous avons foulé ce matin. Au nord, les îles de Marchena et Pinta sont bien visibles grâce au temps très clair. Retour au Galaxy II, qui navigue vers Seymour afin de nous trouver un endroit calme, car la houle s’est sérieusement levée. Avant le dîner, c’est le temps du « cocktail de l’au-revoir » du capitaine.
C’est le jour du départ, mais nous n’avons pas pour autant terminé notre programme d’activités ! Nous quittons le Galaxy II à 7h00. Les valises partent d’abord en annexe, puis c’est notre tour. Un bus nous attend à Puerto Ayora, et nous fait traverser les « hautes terres », où la végétation exubérante et bien verte contraste avec les paysages volcaniques récents dont nous avons profité jusqu’à présent. Nous arrivons à l’étape prévue, « Los Gemmelos », les jumeaux, site ainsi appelé, car deux impressionnants cratères d’effondrement se côtoient, l’un profond de 80 mètres et l’autre de 60. La végétation est dense jusqu’au fond des cratères, et quelques passereaux chantent dans les arbres. Nous roulons ensuite vers le chenal qui sépare Santa Cruz de Baltra où se trouve l’aéroport. Un petit traversier nous emmène sur l’autre rive avec nos bagages. Avant de prendre le bus ultime qui nous conduira vers nos vols de retour, quelques fous (à pieds bleus, bien sûr !), pélicans et noddis viennent nous saluer non loin de l’embarcadère. Un clin d’oeil pour clore cette croisière riche en émotions naturalistes dans cet archipel du bout du monde, si justement appelé parfois « les Îles Enchantées »…