Sylvain Mahuzier
Oiseaux et Mammifères
20 avril
3 mai 2018
Du 20 avril au 3 mai 2018
Sylvain Mahuzier
Oiseaux et Mammifères
Départ très tôt de Paris, Genève ou Bruxelles, escale à Madrid où nous nous retrouvons. Arrivée à San Jose dans l’après-midi, et accueil de notre guide costaricien Keyler. Le temps est couvert et la température raisonnable, presque plus supportable que celle que nous avions en Europe dans les grandes villes. Nous rejoignons l’hôtel Presidente situé sur l’avenida Zero, c’est à dire en plein centre-ville comme l’indique le numéro de la voie.
Après un petit déjeuner consistant – dont les ananas savoureux et le gallo pinto, mélange typique de riz et haricots, nous quittons San Jose et nous dirigeons vers Cartago, ancienne capitale du Costa Rica. Première halte : la basilique Notre-Dame des Anges, principal centre de pèlerinage catholique du pays, où affluent des centaines de milliers de costariciens chaque 2 août, fête de la vierge des anges. Une messe est en cours, et nous nous faisons discrets pour admirer l’architecture particulière de cet édifice de style byzantin, dont le somptueux plafond. Comme les autres bâtiments de Cartago, la basilique a été détruite lors du grand tremblement de terre de 1910, puis a été reconstruite en plusieurs fois. Puis nous nous rendons au marché tout proche, où le choix de fruits est particulièrement riche, et goûtons avec plaisir bananes, mangues, fruits de la passion et d’autres que nous connaissons peu ou pas. En fin de matinée, direction plein sud vers la région de Dota, nous empruntons la fameuse route panaméricaine qui traverse les Amériques du nord au sud, depuis l’Alaska jusqu’à la Terre de Feu en traversant 19 pays… Déjeuner dans un soda, restaurant typique essentiellement fréquenté par des costariciens ; le choix est large et les plats savoureux. Etape suivante : Santa Maria de Dota que nous rejoignons par une petite route qui descend pendant quelques kilomètres vers l’ouest.
Objectif « tour de café » à la Copedota, coopérative qui réunit tous les petits producteurs de café de la région ; 90% des habitants dépendent d’ailleurs plus ou moins directement du café. Tout nous est expliqué sur la culture et la production du café, depuis la récolte – à la main et sur des terrains souvent très pentus -, jusqu’à la consommation, nous finissons d’ailleurs par une dégustation de café chaud ou glacé. Puis nous rejoignons la panaméricaine et repartons au sud-ouest, à travers la cordillère de Talamanca. Arrivés à l’altitude de 3000 mètres, une petite route plein sud assez vertigineuse nous fait redescendre aux alentours de 2200 mètres dans la petite ville de San Gerardo de Dota, où nous trouvons notre lodge, magnifiquement situé au fond d’une petite vallée perdue dans la forêt de nuages…
San Gerardo de Dota est considéré comme la « capitale » du fameux Quetzal resplendissant, l’oiseau mythique, et nous comptons bien en profiter ce matin…
Lever 5h, café 5h30, départ du Trogon Lodge à 6h00, afin de profiter des heures fraîches, celles que l’oiseau préfère. Nous n’allons pas très loin en réalité, nous remontons simplement sur quelques kilomètres la route que nous avons descendue hier soir, afin de trouver les fameux aguacadillas, ces arbres qui produisent des avocats miniatures dont les quetzals raffolent. Nous avons beaucoup de chance, car peu après notre arrivée une femelle vient se percher à une dizaine de mètres au-dessus de nous et nous montre son dos d’un très beau vert émeraude. Elle se laisse observer quelques minutes puis repart. Nous sommes en période de nidification et comme les conjoints se relaient au nid, on peut imaginer que la femelle est partie remplacer le mâle… gagné ! Décidément, la chance nous sourit, le mâle arrive et tourne autour de nous en nous « laissant » l’observer régulièrement : son dos émeraude contraste avec le devant de son corps rubis, mais ce sont les quatre longues plumes prolongeant sa queue qui attirent l’attention, et confèrent à son vol une grâce incomparable.
Retour joyeux pour le petit déjeuner, puis nous partons dans les jardins du lodge observer quelques oiseaux, comme les colibris scintillants butinant fébrilement fuchsias et autres fleurs, ou d’élégants ptilogons à queue, sortes de gobemouches jaunes au dos ardoise dont la tête est ornée d’une crête. Une belle balade dans la forêt de nuages suit, le long de la rivière Savegre jusqu’à une petite cascade. Au retour, deux pics glandivores et deux urubus noirs (vautours) complètent nos observations de cette riche matinée. Déjeuner au lodge, puis départ vers la Panaméricaine à nouveau. Peu après l’avoir rejointe, nous passons un col à 3300 mètres, puis redescendons progressivement vers l’océan Pacifique, en passant par la ville de San Isidro Del General. Arrivée en fin d’après-midi à notre lodge, tout près de la mer.
Départ de notre lodge Rio Mar à Dominical, pour quelques kilomètres de route seulement, jusqu’à la réserve naturelle privée Hacienda Baru, 250 hectares de forêt tropicale humide au bord de l’océan Pacifique. Malgré la faible superficie de cet espace naturel, notre balade durera plus de trois heures, compte tenu de la diversité de nos observations. Rapidement, nous rencontrons nos premiers singes, une bande de capucins à face blanche qui traverse la canopée bruyamment et acrobatiquement.
A plusieurs reprises, des Agoutis, gros rongeurs de couleur fauve, se laissent apercevoir dans les sous-bois. Quant aux Paresseux, nous avons la chance de rencontrer à quelques minutes d’intervalle les deux espèces, le paresseux à trois doigts et celui à deux doigts, comme toujours peu actifs compte tenu de leur métabolisme lent de mangeurs exclusifs de feuilles.
Côté oiseaux, la moisson est riche également. Le grand hocco, qui ressemble à un gros dindon noir frisé à la caroncule jaune (mais majestueux tout de même…) traverse juste devant nous. Notre guide Keyler a aperçu deux toucans de Swainson, et nous les montre à travers sa longue vue : leur bec étonnant, qui sert aussi de climatiseur, est bicolore, chocolat et banane. Un peu plus loin, nous assistons à la parade nuptiale particulièrement originale du manakin à col orange, petit passereau très coloré endémique du Costa Rica et de l’ouest du Panama : plusieurs mâles sautent d’arbuste en arbuste au ras du sol en faisant claquer leurs ailes d’un coup sec, ce qui a pour effet à la fois d’aménager une piste de danse en nettoyant le sol, et d’attirer la femelle pour l’inviter à une danse, et plus si affinités… Et n’oublions pas les reptiles : iguane vert, ctenosaure (un iguane au « look » dinosaurien »), anolis (petit lézard) et basilic commun.
Retour à l’entrée de la réserve pour un casado, déjeuner traditionnel costaricien, où Keyler échange quelques informations naturalistes avec un autre guide local : un oiseau très étrange, le grand ibijau peut être observé à seulement 20 minutes de marche dans la réserve. Nous nous partageons, quelques-uns d’entre nous rentrent au lodge afin d’aller découvrir la grande plage de Dominical, très réputée chez les surfeurs, les autres repartent dans la réserve pour tenter d’observer le grand ibijau. L’œil de lynx de notre guide ne tarde pas à être efficace, et jumelles et longue-vue nous révèlent un oiseau champion du camouflage : non seulement son plumage est en parfaite harmonie avec le tronc d’arbre mort au sommet duquel il est perché, mais il en a choisi un qui a le même diamètre que son corps, et il pointe le bec vers le ciel pour passer complètement inaperçu ! Cerise sur le gâteau ornithologique : l’adulte est accompagné d’un jeune encore en duvet… Puis retour au lodge et repos ou promenades en tous genres. Après le dîner, causerie sur les singes capucins et les toucans. Encore une journée fertile en émotions !
Journée chargée, avec une agréable alternance entre la forêt et l’eau. En effet, nous partons tôt le matin et longeons la côte pacifique vers le nord, en direction du parc national Carara. Encore une belle promenade en forêt tropicale, mais cette fois intermédiaire entre la forêt humide du Pacifique centre, et la forêt sèche du Guanacaste où nous nous rendrons demain. Le parc est connu pour sa richesse, et nous offre de multiples opportunités de découverte de la flore : Kapok, guanacaste, ficus et bien d’autres arbres.
Les rencontres animales sont intéressantes aussi, avec dès le début des singes capucins sautant de branche en branche. Parmi les oiseaux, le magnifique trogon aurore, cousin du quetzal, et un drôle de passereau brun à moustaches blanches, grand amateur de fourmis : le tamatia de Lafresnaye. Le seigneur des lieux, le majestueux ara rouge ou ara macao, fait entendre son cri rauque et puissant à plusieurs reprises lorsqu’il survole les lieux, mais nous sommes un peu déçus de ne pas le voir. Heureusement, quelques kilomètres après avoir quitté le parc, l’œil aiguisé de Michel, l’un d’entre nous, nous permet une observation de qualité du grand perroquet rouge dans un arbre à l’entrée de Tarcoles.
Déjeuner au bord de la rivière du même nom, puis nous embarquons pour un long tour en bateau, qui va nous faire remonter le cours d’eau, puis le redescendre jusqu’à l’embouchure et finir par un bras de mangrove. La rivière Tárcoles est une référence en matière de biodiversité.
Les crocodiles américains qui y ont élu domicile sont énormes, le plus grand que nous rencontrons mesure plus de 5 mètres. Et en matière de reptiles, ce n’est pas tout : Cténosaures, iguanes verts et basilics communs sont bien présents. Quant à l’avifaune, c’est une réussite. Pour commencer, nous longeons des microfalaises de terre au pied desquelles quelques hérons verts pêchent à l’affût, parfaitement immobiles. Plus loin, bihoreau violacé, aigrette tricolore et grande aigrette font de même. Les talus sont criblés de trous, utilisés entre autres par les Motmots. Un martin-pêcheur à ventre roux nous dépasse et l’un de ses cousins, le martin-pêcheur d’Amazonie au plumage vert, orange et blanc, est perché à l’extrémité d’une branche échouée au milieu de la rivière. Demi-tour et en aval le relief s’adoucit et des bancs de sable apparaissent. Une troupe d’ibis blancs y flâne, en compagnie d’une magnifique spatule rosée.
Nous nous approchons de l’embouchure, et découvrons des dizaines de pélicans bruns, les uns perchés dans les arbres, d’autres sur la plage en bordure du Pacifique en compagnie de nombreuses sternes royales. Quelques frégates superbes nous survolent, puis nous empruntons un canal qui pénètre dans la mangrove. Francine aperçoit notre premier raton-laveur qui fouille dans la vase sous les palétuviers, probablement à la recherche des crabes dont il raffole. La végétation se resserre et nous devinons, caché dans les entrelacs de branches, un petit groupe de Savacous Huppés, étranges hérons au bec qui rappelle curieusement un bateau couvert… Plus loin, un élégant martin-pêcheur vert est à l’affût et dans les hauteurs, une buse des mangroves se perche. Le temps a passé très vite et il nous faut rejoindre l’embarcadère, toujours accompagnés par une ribambelle d’hirondelles des mangroves qui papillonne autour du bateau depuis le début… Un vrai festival, cette croisière, et au total aujourd’hui, une cinquantaine d’espèces d’oiseaux différentes auront été identifiées depuis ce matin ! A 10 minutes seulement de Tarcoles, nous trouvons l’hôtel Villa Lapas, ce dernier mot désignant les aras rouges, un des points forts de cette belle journée.
Première surprise en partant ce matin : nouveau rendez-vous avec les crocodiles ! Nous nous arrêtons à peine 5 minutes après notre départ de l’hôtel, pour franchir le pont de Tarcoles à pied, et découvrons sur les berges de la rivière une dizaine d’énormes crocodiles américains, dont certains baillent et nous révèlent ainsi leur dentition impressionnante. A quelques mètres, une grosse poule d’eau – talève violacée de son petit nom – déambule tranquillement, inconsciente du danger.
Trois heures de route nous attendent pour remonter vers le nord-ouest du Costa Rica, avec quelques haltes dont celle de Limonal où nous apercevons un ara rouge. C’est à Liberia que nous quittons la Panaméricaine et obliquons vers le nord-est pour atteindre les contreforts du volcan Rincon de la Vieja. Déjeuner à l’Hacienda Guachipelin, où nous passerons deux nuits. Cet après-midi, deux options : la moitié d’entre nous partent avec notre chauffeur Melvin pour prendre des bains de boue volcanique et se délasser dans les eaux thermales du Rio Negro. Certains bassins atteignent une température de 40°C.
Le reste du groupe, accompagné par Keyler, se rend à pied depuis l’hacienda, jusqu’à la cascade Las Chorrreras. L’eau de la rivière est hautement bienfaitrice, compte tenu de la température extérieure (à priori 32°C réels, 36°C ressentis…). En chemin, nous effectuons quelques rencontres intéressantes dans la forêt sèche, tels le trogon à tête noire, le geai à face blanche, la buse à gros bec, le pic ouentou, et deux petits perroquets appelés Amazones à front blanc à l’entrée de l’hacienda. Avant le dîner, réunion au bord de la piscine, non pas pour un bain mais pour… goûter les rhums d’Amérique centrale ! Keyler nous a concocté une séance de dégustation, et nous testons successivement un rhum du Nicaragua, du Costa Rica et du Panama… avec grand plaisir mais modération, afin de trouver la route du restaurant, et de nous rendre compte que ce cri étrange dans la nuit n’est pas le fruit de notre imagination mais bien celui d’un engoulevent, oiseau nocturne au plumage d’un parfait camouflage.
Départ pour le Parc National Rincon de la Vieja, qui signifie « le coin de la vieille ». Nous sommes en réalité sur le massif volcanique Rincon lui-même, et allons profiter à la fois du secteur de forêt sèche et de celui de la savane. D’abord la forêt, avec de très beaux arbres, dont le plus étonnant est sans conteste le ficus étrangleur, qui étouffe littéralement d’autres arbres, avec ses branches-troncs qui montent à l’assaut et se resserrent jusqu’à la mort de la victime. Non loin de l’entrée du parc, première rencontre : une femelle de singe hurleur dans la canopée qui nous fascine pendant quelques minutes. Le grand hocco déjà observé dans la réserve de Baru, le motmot à sourcils bleus aperçu à Tarcoles, quelques papillons morpho qui volètent ça et là, éclairs bleu métallique éphémères, puis Keyler nous arrête : il vient d’apercevoir un animal au sol, rare si l’on en croit l’expression grave de notre guide. Une approche discrète nous permet enfin d’observer, en partie car la végétation est dense, l’impressionnant tapir, cousin des rhinocéros et des chevaux. Il est couché dans la boue et remue régulièrement ses grandes oreilles, levant parfois son espèce de trompe. C’est une bête qui doit peser au moins 250 kg, même au sol elle est impressionnante. Le tapir de Baird est en voie de disparition, et nous ne nous attardons pas, conscients de la chance que nous avons eue. Plus loin, nos premières fumerolles, en plein boisement. L’odeur de soufre est bien présente.
Puis nous sortons de la forêt sèche et marchons au milieu de la savane et des broussailles sèches. Le sommet du volcan Rincon de la Vieja est caché dans les nuages, mais sa silhouette apparaît clairement. De nombreux arbustes aux fleurs jaunes ou rouges au milieu des herbes jaunies par la saison sèche donnent au paysage des couleurs chaudes et harmonieuses, et en parlant de chaleur nous la ressentons nettement plus que lorsque nous étions à couvert dans la forêt. D’autant que les solfatares et les marmites bouillonnantes que nous approchons – prudemment – ne doivent pas rafraîchir l’atmosphère… Après une dernière visite volcanique, un petit lac acide vert pâle bordé de solfatares, retour vers l’entrée du parc à travers la forêt. Comme à l’aller, un oiseau que nous ne verrons pas mais aurons cherché activement chante très régulièrement : il s’agit du manakin fastueux, célèbre pour ses danses nuptiales.
Déjeuner à l’Hacienda Guachipelin, puis nous reprenons la route vers le fameux volcan Arenal. Retour vers la Panaméricaine, puis au sud vers Las Canas, et nous empruntons une route montagneuse qui va nous mener à la pointe ouest du lac Arenal. Les crêtes sont couvertes d’éoliennes et les arbres courbés vers l’ouest, preuve que le vent qui souffle au-dessus du lac est puissant . Nous apercevons nettement le volcan, « Fuji Yama » des Ticos, même s’il présente un chapeau de nuages. Arrêt dans un restaurant spécialisé dans les noix de Macadamia où nous « craquons » pour des desserts succulents et des jus de fruits savoureux, puis nous longeons le lac par une route en montagne russe qui offre de très beaux points de vue. Quelques rencontres en chemin – singes hurleurs, caracara huppé et le très beau toucan à carène au bec arc-en-ciel -, puis nous passons sur le barrage à l’extrémité est du lac et arrivons peu après à notre hôtel et à nos bungalows.
Au programme aujourd’hui : ponts suspendus ! Depuis l’hôtel nous rejoignons le barrage hydroélectrique de l’extrémité est du lac Arenal puis nous engageons dans une route en lacets qui mène à une réserve privée nommée Mistico. Départ pour une promenade de plus de 3 kilomètres à travers un beau morceau de forêt tropicale situé à flanc de coteau, qui emprunte 8 ponts fixes et 6 ponts suspendus. Comme le dit notre voyageur Denis, nous commençons le parcours « tambour battant », avec coup sur coup un coati qui traverse devant nous la queue en l’air, une magnifique araignée appelée néphile et connue pour l’extrême solidité du fil qu’elle utilise pour tisser ses toiles, puis un véritable show de quelques singes-araignées aux longs bras et d’une agilité incroyable, dont une mère avec son petit.
Les premiers ponts sont franchis sans problème et dans les règles de l’art – pas plus de quinze à la fois, cela tombe bien c’est la taille de notre groupe – et les dernières appréhensions sont vite vaincues. D‘autant que la forêt est somptueuse et que depuis la canopée, le panorama est dégagé vers le volcan, même si celui-ci conserve encore quelques nuages qui masquent son sommet. D’autres rencontres animales ponctuent notre balade : motmot à bec large avec son étonnante queue à palettes, trogon aurore et ermite vert, un colibri de couleur émeraude avec un immense bec recourbé. Nous avons également la joie d’observer pour la première fois la minuscule grenouille fraise bien rouge comme son nom l’indique, appelée « blue jeans » au Costa Rica en raison de ses pattes postérieures bleues.
Autre surprise : en contrebas du chemin, un énorme serpent, la vipère Picada, est immobile parmi les feuilles mortes, vraiment bien camouflée – nous nous demandons encore comment les guides locaux l’ont aperçue. C’est l’un des serpents les plus dangereux du Costa Rica, ce qui ne l’empêche pas d’être assez beau… Déjeuner à La Fortuna, puis quelques courses en ville dont un passage à la poste pour acheter des timbres, et nous nous rendons dans un jardin botanique proche, l’écocentre Danaus. Principale attraction : la serre à papillons. Keyler nous explique précisément en quoi consiste le « commerce » des papillons et nous décrit les différents stades de transformation de ces insectes, cocons et chenilles à l’appui. Puis nous entrons dans la serre elle-même et observons à loisir les différentes espèces évoluant dans cet espace, incluant les fabuleux morpho bleu métallique et les grands migrateurs que sont les monarques.
Outre les nombreuses plantes ornementales ou natives de ce beau jardin – heliconia, orchidées, roses de porcelaine… – , nous rencontrons quelques colibris, et apercevons plusieurs savacous huppés, ces hérons au drôle de bec que nous avions déjà vu dans la mangrove de la rivière Tarcoles, ainsi qu’une nouvelle de basilic, cette fois de couleur émeraude. Mais le point d’orgue de cette visite est incontestablement notre longue observation de deux paresseux à trois doigts : une mère qui nous montre son visage masqué de noir et blanc semblant esquisser un sourire, et son petit âgé de quelques semaines qui apparemment apprend comment se gratter… inoubliable !
Cap sur Puerto Viejo de Sarapiqui ce samedi. Nous sommes maintenant très nettement sur le versant caraïbe, et en marge nord du Parc National Braulio Carillo. Forêt tropicale humide, rivières impétueuses mais c’est aussi une région agricole. Notre première étape : visite d’une plantation d’ananas. Don Rodolfo Gomez, le propriétaire, moustachu bienveillant et plein d’humour, a fondé avec sa femme et ses 8 enfants – 6 filles et 2 garçons – un domaine agricole très varié. La culture des ananas « bios », sans aucun produit phytosanitaire ajouté, occupe la famille toute l’année, ainsi qu’une plantation de papayers, la production d’épices et un élevage de tilapias dans des étangs aménagés. L’une des filles assiste son père pour la partie éco-agrotouristique. Don Rodolfo nous explique les tenants et les aboutissants de cette culture et nous goûtons à plusieurs reprises à des ananas qu’il cueille spécialement pour nous et découpe à la machette avec une précision artistique.
Les fruits sont tout simplement savoureux, un véritable délice. Puis il nous guide parmi les poivriers et nous rappelle que poivre vert, rouge et noir appartiennent à la même plante, mais à des degrés de maturation différents. Enfin, nous assistons à la production de jus de canne à sucre, sur une presse traditionnelle appelée trapiche. Menu au déjeuner : tilapias et manioc arrosés de jus de fruits. Nous quittons Don Rodolfo et les siens pour rejoindre la Réserve de la Tirimbina, quelques kilomètres plus loin, le long de la rivière Sarapiqui. L’une de leurs activités consiste à produire du cacao de manière traditionnelle sur une ancienne plantation, à des fins pédagogiques. Après un rappel historique de l’utilisation du cacao par les populations indigènes avant l’arrivée des colons espagnols, on nous présente ainsi toutes les étapes de la transformation de cette plante jusqu’à la production du chocolat, avec dégustation à l’appui. En quittant la réserve nous observons un paresseux à 3 doigts allongé sur une branche juste au-dessus du parking. De retour au lodge Selva Verde, cela incite notre guide et notre accompagnateur à nous faire un exposé sur cet animal étrange après le dîner, non sans avoir passé auparavant quelques minutes à « chasser » les batraciens. Butin : un crapaud-buffle et deux rainettes aux yeux rouges, ces dernières encore un peu endormies…
Ce matin nous partons vers la côte caraïbe. Routes n°4 puis 32 vers Guapiles au sud-est, puis nous remontons plein nord-est par une petite route qui traverse le village de Cariari, et finissons par une piste qui nous mène à l’embarcadère de La Pavona ». C’est le grand départ pour l’un des sites protégés les plus célèbres du Costa Rica : le Parc National de Tortuguero. Nous embarquons avec nos valises dans une grande lancha couverte, munie d’un puissant moteur de 110 chevaux, et descendons les méandres de la rivière Suerte, qui débouche sur le grand canal appelé aussi lagune. Une belle croisière de plus d’une heure qui nous mène le long du village de Tortuguero, et un peu plus loin vers notre hébergement, le Laguna Lodge. Ce dernier est en réalité « coincé » entre le canal et la mer des Caraïbes, sur une bande de terre de quelques centaines de mètres de large. Traditionnel jus de fruits d’accueil, nous intégrons nos chambres tout en bois puis déjeuner. L’après-midi est consacré à la visite du village de Tortuguero, à l’entrée duquel nous nous arrêtons d’abord pour visiter le petit musée pédagogique de la « Sea Turtle Conservancy », organisme à but non lucratif qui œuvre depuis des décennies pour la préservation des tortues marines. Le groupe adopte une tortue afin de soutenir les projets de protection et Mara fait de même pour son propre compte, autant d’initiatives qui aideront à financer les projets pédagogiques et de préservation de cette ONG. Puis, sur la plage – priorité au terrain -, Keyler nous fait un brillant exposé sur la vie et les mœurs des tortues vertes, juste devant d’anciens nids creusés par ces reptiles lors de la dernière saison de ponte, en juin et juillet dernier.
Il nous trouve même les reliefs d’un œuf probablement mangé par un prédateur, on dirait une balle de ping-pong souple. Sur le chemin qui longe la plage, un mouvement attire notre attention à mi-hauteur d’un amandier : un petit passereau semble voler sur place, frénétiquement. En réalité, il vient d’être capturé par un long serpent-liane que sa couleur verte rend presque invisible. Il a attrapé l’oiseau par la tête, et l’avale lentement mais sûrement. A la fin, on ne distingue plus que la forme de la proie malchanceuse… Au village, nous passons devant l’école très colorée et badigeonnée par les enfants de sympathiques slogans exhortant à protéger la nature. Il n’y a qu’une rue principale, de nombreux magasins de souvenirs et toute une vie locale. Des vendeurs proposent des noix de coco fraîches percées d’une paille, certains proposent discrètement d’y ajouter du rhum ! La petite église est charmante, et la place principale est en même temps le petit port où attendent les bateaux-bus ramenant les voyageurs à leurs lodges, ou les locaux chez eux. La musique caribéenne est bien présente, et nous rappelle les origines harmonieusement mélangées de la population locale.
Ce lundi restera l’un des grands moments de ce voyage. En effet, nos deux promenades aquatiques dans la même journée, le long des canaux de Tortuguero, nous ont apporté tant d’émotions naturalistes ! Et encore une fois nous sommes passés « entre les gouttes », ce qui facilite grandement les observations… Tout d’abord nous revoyons les deux paresseux, celui qui a 3 doigts à la patte antérieure et celui qui en a 2. Les rencontres avec les singes se succèdent aussi : les hurleurs dont nous distinguons cette fois très bien la face et les expressions, les atèles (singes-araignées) qui tantôt nous régalent de leurs acrobaties, tantôt se distinguent bruyamment, et un capucin qui cherche des insectes dans des arbustes à quelques mètres du bateau. Trois loutres évoluent sur les berges et dans l’eau avec aisance et fluidité, cela ne dure que quelques dizaines de secondes, mais c’est un spectacle auquel on n’assiste pas souvent. Les reptiles ne sont pas en reste : iguanes verts, dont certains énormes , basilics qui exhibent leurs crêtes étonnantes et jolies taches bleues sur fond d’émeraude, et même un jeune crocodile, au fin fond d’un labyrinthe végétal, ce qui est très rare, l’espèce étant presque toujours associée aux grandes rivières proches des estuaires.
L’après-midi, nous apercevons quelques caïmans à lunettes, autres membres de la famille des crocodiles, plus petits, et avons même la chance de contempler un nid dans les hautes herbes aquatiques, avec cinq jeunes mesurant déjà 40 à 60 centimètres. Côté oiseaux, « carton plein » également, avec la plupart des représentants de la famille des hérons et aigrettes, dont deux hérons verts qui construisent activement leur nid, et un Onoré du Mexique accompagné de deux immatures tout rayés.
Les anhingas aussi sont très présents, et nous tombons sur un arbre équipé de deux nids pour le même couple, avec trois jeunes encore bien duveteux. Nous apercevons en outre un cousin du quetzal, le trogon de Massena, qui flamboie des mêmes couleurs émeraude et rubis, mais sans les longues plumes…
Les deux toucans font partie du spectacle – celui au bec « banane et chocolat » (toucan de Swainson) et celui au bec arc-en-ciel (toucan à carène) -, ainsi que les aras verts (ou ara de Buffon), proches parents des aras rouges mais qui les remplacent côté caraïbe. Sans oublier l’incroyable grand ibijau, cet as du camouflage qui prolonge littéralement une branche ou en « ajoute » une nouvelle ; nous l’avions aperçu dans la forêt de l’Hacienda Baru au bord de l’océan Pacifque. Au-dessus de l’embarcadère du lodge, les cassiques de Montezuma paradent et s’activent dans leur petite colonie. Et comme le dit très justement Denise : « de la belle ouvrage, ces nids-besaces » ! Le soir, Grands Espaces nous offre un savoureux cocktail, et nous profitons de la petite salle de conférences du lodge pour reparler des loutres, des tortues et de la fabuleuse biodiversité costaricienne.
Dernier tour sur la belle plage de Tortuguero après le petit déjeuner, puis nous embarquons dans le bateau-bus avec nos bagages. Le niveau de la rivière Suerte a nettement monté compte tenu des pluies nocturnes, et le capitaine Urias peut naviguer sensiblement plus vite qu’à l’aller. D’ailleurs, quelques virages un peu trop rapides dans les méandres trempent quelques-uns d’entre nous… Notre fidèle et sympathique chauffeur Melvin nous attend, et nous reprenons la route vers l’ouest, cap sur San Jose. Juste avant de retrouver la route goudronnée – nous sommes encore sur la piste – arrêt de quelques minutes au bord d’une immense bananeraie. Keyler nous explique avec précision, fruits et fleurs à l’appui, la croissance de ces plantes, la manière dont les bananes sont récoltées puis exportées pour une grande partie d’entre elles. De l’autre côté de la petite ville de Guapiles, arrêt-déjeuner au restaurant El Jugo, sorte de self avec un énorme choix de plats costariciens, sans oublier les nombreux jus de fruits naturels.
Puis traversée de la cordillère et du Parc National Braulio Carillo – col à 2200 mètres -, et descente vers la vallée centrale jusqu’à San Jose, 1000 mètres plus bas. Le musée de l’or que nous avons prévu de visiter aujourd’hui dans la capitale est fermé le 1er mai. Mais nous ne perdons pas au change, car le « plan B » consiste à faire le tour du « vieux » San Jose, qui s’avère fort intéressant : le musée national, avec la statue du président Figuerres Ferrer, celui qui a aboli l’armée en 1948; l’assemblée nationale, devant laquelle trois nouveaux députés se sont arrêtés pour nous remercier de visiter leur pays ! le monument national sculpté par un Français, Louis Carrière Beluse, qui commémore les batailles de Santa Rosa (Costa Rica) et Rivas (Nicaragua) en 1856, au cours desquelles le Costa Rica, le Salvador, le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua se sont unis pour combattre le mercenaire William Walker qui attaquait leurs pays; le tribunal électoral et la bibliothèque nationale; le ministère de la culture et de la jeunesse, sur le site de l’ancienne fabrique nationale de liqueurs; l’ancienne ambassade américaine devenue le ministère des affaires extérieures, dans le parc duquel est érigé un morceau du mur de Berlin offert au Costa Rica par les Nations Unies, pour les remercier de ne pas avoir pris part à la 2e guerre mondiale; l’école métallique offerte par un roi belge en 1890; le parc Morazan avec son temple de la musique, où les soupirants jouaient la sérénade et devaient convaincre les mères de leur accorder la main de leur fille; le théâtre national construit entre 1890 et 1897, dont les différentes parties proviennent de plusieurs pays d’Europe et qui à l’intérieur serait la réplique de l’opéra de Paris; la poste… chacun de ces sites et monuments est accompagné par autant d’histoires et d’anecdotes passionnantes de Keyler. Puis dernier dîner tous ensemble, sur la terrasse de notre hôtel.
Lever tôt pour cette dernière journée, afin d’arriver parmi les premiers au volcan Irazu. Cinquante kilomètres dont la moitié à monter par une route en lacets, puisque le volcan culmine à 3400 mètres d’altitude. Pari gagné : nous sommes pratiquement seuls au sommet; de plus le ciel est d’un bleu intense et les cratères complètement dégagés, ce qui est loin d’être le cas tous les jours, nous disent Keyler et Sylvain. Le premier cratère visible depuis le parking est ancien : Playa Hermosa est comme son nom l’indique une grande et belle plage de sable.
Puis sur la droite du sentier, nous apercevons en contrebas le cratère Diego de La Haya. Mais le plus beau spectacle est incontestablement celui qu’offre le cratère principal, que l’on découvre au dernier moment : un lac – réapparu l’année dernière seulement – de couleur turquoise matinée d’émeraude par endroits, qui resplendit dans la lumière chaude du matin. Quelques oiseaux gazouillent dans les plantes d’altitude, les plus étonnantes parmi ces dernières sont les Gunnera aux très grandes feuilles appelées « parapluie du pauvre », et la température est très agréable. Retour et descente vers San Jose, avec halte pour jouir de la vue sur une bonne partie de la vallée centrale (dont Cartago et San Jose), qui regroupe 1,5 million d’habitants soit 30 % de la population du Costa Rica. Déjeuner puis route vers l’aéroport, et embarquement vers Paris, Genève et Bruxelles, le tout via Madrid, sauf Diane et Frédéric qui restent un peu au Costa Rica.
Adieux chaleureux à Keyler, notre guide et à Melvin, notre chauffeur après un joli voyage au pays de la PURA VIDA !
Merci à toutes les voyageuses, Françoise, Denise, Jacqueline, Mara, Francine, Diane, Danielle, et à tous les voyageurs, Jean-Louis, Denis, Michel, Christian, Alain, Régis, Frédéric pour votre bonne humeur permanente !