16 juillet
26 juillet 2021
Les premières lueurs du jour révèlent la 1ère « maison » de notre périple ougandais que nous avons rejoint hier soir, une fois la nuit tombée.
Nous sommes donc bien arrivés sur les bords du mythique lac Victoria, tout près de la latitude 0.
Quelques ibis hagedash patrouillent déjà sur le gazon de l’hôtel alors que nous nous retrouvons au restaurant.
Nous faisons plus amples connaissances après le petit-déjeuner avec l’équipe Ougandaise qui nous guidera pendant tout le voyage. Julius sera notre guide principal au volant de son Cruiser assisté de Moses qui nous suivra avec son van où nos bagages ont pris place. Le jeune Emmanuel, guide stagiaire, épaulera Moses à l’arrière. Tous de l’ethnie ankole, ces ougandais sont originaires de la région du même nom au sud-ouest du pays.
Le début de notre étape est haut en couleurs. Nous découvrons les quartiers animés de la banlieue de Kampala, la capitale de l’Ouganda, dont nous évitons le centre pour nous diriger plein nord.
Une fois sortie de la ville nous découvrons une nature luxuriante. Des papyrus, des pins, des manguiers, des eucalyptus… et bien entendu des bananiers, omniprésents. Les paysages vallonnés alternent ce camaïeu de vert avec en toile de fond cette terre rouge typique de la région des grands lacs africains.
Nous avons quitté la ville mais la vie humaine est toujours présente, des habitations très simple présentent régulièrement des petits jardins coquets faits de fleurs et d’arbres fruitiers. Les femmes vendent des fruits de la passion ou des ananas. Les hommes transportent d’énormes fagots de canne à sucre ou tout simplement une chèvre sur leur moto.
Après une matinée de route nous arrivons à notre première activité du voyage : une marche à la recherche des rhinocéros blancs dans la réserve de Ziwa à mi-chemin de notre parcours du jour.
Une fois arrivés, les rangers nous racontent l’histoire du site. Dans les années 80, le dernier rhinocéros d’Ouganda a été tué par les braconniers. Les périodes de guerre ont eu raison de ces animaux. Mais depuis les années 90, l’association Rhino found Ouganda a pour objectif de recréer une population de rhinocéros viable en Ouganda. Et depuis l’arrivée des premiers individus importés du Kenya dans les années 2000, le sanctuaire en compte désormais une trentaine. Une fois la barre des 50 atteinte, certains seront relâchés dans les parcs nationaux.
Les consignes passées, nous partons à pieds à la rencontre de ces étranges animaux. La chance est avec nous puisque nous découvrons à l’ombre d’un acacia, une mère et son jeune de 8 mois en pleine sieste. Et surprise il y a également un mâle couché un peu plus loin. Il est apparemment venu se renseigner sur la condition de cette femelle mais il devra repasser car elle ne sera pas réceptive à ses avances avant bien 6 mois, le temps de finir le sevrage de son petit.
Nous approchons peu à peu et finissons par les observer à une quinzaine de mètres. Une belle observation, sereine et respectueuse. À notre départ le petit se lève comme pour nous saluer, suivi par sa mère qui nous fait comprendre un peu plus à quel point ces animaux sont massifs et puissants.
Sur le chemin du retour nous croisons près du restaurant une magnifique grue royale, oiseau emblème du pays, présent sur le drapeau national !
Une habituée semble-t-il puisqu’elle se laisse approcher avec facilité.
Le déjeuner englouti nous reprenons la route du nord pour rejoindre notre lodge dans le parc Murchison falls. Le paysage évolue, des plaines ouvertes occupent maintenant l’espace. De nombreux acacias et nos premiers euphorbes s’intègrent au tableau qui se déroule sous nos yeux.
Une troupe de babouins olive semble nous attendre à l’entrée du parc. Au final ils étaient en pleine séance de nettoyage collectif.
Nous nous rapprochons du Nil et la forêt s’épaissit. Les habitations et la circulation ont disparu. La nature sauvage s’offre à nous.
Au détour d’un virage Julius s’engage sur un petit sentier menant à un parking désert. Le grondement du Nil est saisissant. Il est là devant nous, le fleuve mythique. Il s’engouffre dans une chute de 47 mètres de haut et seulement 4 mètres de large. Dernière épreuve avant son arrivée dans le lac Albert que nous découvrirons demain.
Nos vêtements mouillés par les embruns sèchent très vite sur le chemin du lodge que nous découvrons avec les dernières lueurs de cette longue et belle journée ougandaise.
Demain nous partons en safari dans le parc.
En safari le maître du temps est le soleil. La faune est en général plus active à l’aurore et au crépuscule.
Nous prenons donc un petit-déjeuner aux aurores et retrouvons Julius pour notre premier safari du voyage.
Le parc national des chutes de Murchison est le plus ancien du pays, créé en 1952 par les autorités coloniales britanniques, il s’étend sur une superficie de 3800 km carrés. Nous commençons par emprunter le tout nouveau pont qui enjambe le Nil Victoria pour nous rendre sur la rive nord. La végétation s’éclaircit et s’ouvre devant nous des vallons couverts de graminées ponctués de quelques palmiers et acacias.
Les cobes Defassa sont les premiers à nous accueillir, ces antilopes viennent de boire et repartent dans la savane. Quelques vieux buffles solitaires terminent leur nuit près de la piste. Ces robustes bovidés, réputés pour leurs charges inattendues sont avec nous bien calmes. Nous les laissons à leur mastication matinale.
Les girafes de Rotschild quant à elles sont bien plus actives. Nous en observons des dizaines, réparties en petits groupes, déguster les petites feuilles des acacias aux épines tellement redoutées. Des jeunes, côte à côte, s’essaient aux techniques de combat de leurs pères en esquissant des grands coups de cou sur leur rival.
Les vieux mâles contrastent avec le reste du troupeau par leur robe très sombres. Une vraie image d’Épinal.
Les vautours africains et les vautours palmistes ( la seule espèce de vautours à consommer essentiellement des fruits), nous regardent déambuler du haut de leurs perchoirs.
Nous arrivons enfin sur la rive du Lac Albert, dans la zone du delta. Une zone assez spéciale puisque nous nous trouvons entre le Nil Victoria et le Nil Albert. En effet le Nil change de nom au cours de son avancée vers le Nord. En arrivant dans le lac il se nomme le Nil Victoria et en sortant il devient le Nil Albert.
Julius nous propose de goûter les ananas locaux tandis que nous observons l’avifaune abondante de la rive. Jacanas, jabirus, aigrettes, ombrettes, ouettes d’Égypte, martin-pêcheurs… ils sont tous là !
Les hippopotames occupent l’espace sonore et les éléphants sont en pleine dégustation d’herbes fraîches un peu plus loin. Nous serions bien restés plus longtemps mais l’heure tourne et nous décidons de rentrer au lodge pour le déjeuner.
Après le repas nous embarquons sur un bateau et partons à la découverte des rives du Nil Victoria. L’objectif sont les chutes de Murchison que nous allons cette fois-ci observer depuis le bas.
En chemin nous observons de nombreux crocodiles en train de se reposer sur la berge. Des guêpièrs à gorge-rouge sortent de leur nids creuser dans les hautes berges pour se protéger des prédateurs. Les martin-pêcheurs sont en pleine partie de pêche. Un peu plus loin nous avons la chance de rencontrer un couple de pygargues vocifer, magnifiques aigles pêcheurs au plumage noir et blanc. Un éléphant solitaire prend son bain et disparaît entièrement sous l’eau avant de ressortir en soufflant un immense jet avec sa trompe.
Puis enfin les chutes, toutes aussi puissantes qu’hier. Avec cette fois-ci une vue d’ensemble du site, nous réalisons la force de ces eaux que le bateau peine à remonter. Nous nous laissons alors repartir en aval pour rentrer à l’embarcadère.
Le soleil baisse et nous retrouvons notre joyeuse équipe ougandaise qui nous ramènent au lodge. La fin de journée est douce et chacun profite de ces quelques moments de repos après cette journée pleine de belles rencontres.
La journée commence autour d’un café sur la terrasse du lodge. Les discussions s’animent car des hippopotames sont passés près des chambres quelques minutes avant notre réveil pour retourner dans les eaux du Nil. Ces animaux qui peuvent peser près de 2 tonnes passent le jour à se protéger du soleil dans les rivières mais profitent de la nuit pour partir brouter dans quelques prairies éloignées.
Puis nous retrouvons Julius pour notre second safari dans le parc de Murchison. Aujourd’hui nous essayons de rouler rapidement en direction du lac pour aller voir ce que la chance nous a réservé de ce côté. Mais rapidement Julius obtient une information pour le moins excitante… Un léopard a été repéré. Nous changeons d’itinéraire et finissons par le repérer. Perché sur une branche d’acacia un peu éloigné, il semble nous observer lui aussi. Nous discernons aux jumelles la magnifique robe de cet animal si discret. Soudain il se lève, descend sur la ramure inférieure et disparaît d’un bond dans les hautes herbes de la savane.
Nous reprenons le safari, de grands troupeaux de cobes d’Ouganda, quelques girafes et phacochères et au loin un rassemblement de 4×4. Et surprise, nous observons de nouveau un léopard ! Même schéma, un individu couché sur la première branche d’un acacia, avec les vallons couverts de graminées en arrière plan. Bien visible aux jumelles, c’est une femelle, et nous croisons par moment son regard félin intense.
Observer deux léopards en une sortie reste extraordinaire et nous terminons la matinée le sourire aux lèvres.
Sur le chemin du retour nous rencontrons un singe patas, lui aussi installé sur une branche. Un mâle solitaire. Ces singes de tailles moyennes, et à la couleur fauve vivent dans des zones ouvertes et préfèrent vivre au sol plutôt que dans les arbres. Leur vitesse est leur principal atout puisqu’il peut courir jusqu’à 55 km/h, les locaux l’appellent d’ailleurs le « cheetah monkey » littéralement le « singe guépard ».
Après s’être restaurer au lodge nous retrouvons nos véhicules et prenons la route du sud.
Julius emprunte des petites pistes qui nous fait découvrir des villages authentiques. Toits de chaume, mur en terre, petits lopins de maïs et arbres fruitiers. De nombreuses cases sont en construction. Julius explique que des populations sont déplacés ici par le gouvernement pour permettre l’exploitation prochaine du pétrole du lac Albert et la construction des infrastructures nécessaires, notamment les routes, dont les chantiers sont menés par des entreprises chinoises. Nous longeons le lac Albert puis attaquons une route sinueuse qui nous fait remonter sur le plateau central du pays et repasser au dessus des 1000 mètres d’altitude. Nous retrouvons une végétation un peu plus dense et nous arrivons au lodge en milieu d’après-midi.
En fin de journée, Alexandre, notre accompagnateur Grands Espaces, nous invite à boire un verre dans le jardin luxuriant de la propriété. Il en profite pour nous présenter l’Ouganda avec quelques cartes et photos. Il nous explique notamment l’histoire complexe de ce petit pays des grands lacs où l’on parle plus de 50 langues différentes. Une culture ancienne, avec les légendes médiévales des dynasties Tembuzi et Chwezi, les épopées des explorateurs occidentaux à la recherche du Nil au 19e siècle, la colonisation britannique, la terrible période de la dictature d’Amin Dada le cannibal, dont les opposants étaient jetés aux crocodiles du Nil…
Et c’est avec plaisir que nous partons prendre notre dîner en échangeant sur ces histoires.
C’est la pluie qui accompagne notre réveil aujourd’hui. Une grosse averse qui nous rappelle à quelle latitude nous nous trouvons. Le temps du petit-déjeuner et le ciel se calme pour accompagner notre départ. Au programme, la route vers le parc national de Kibale à l’ouest du pays. Une étape de transition entre la savane du Murchison et la forêt aux singes de Kibale. Nous allons donc profiter de la route pour découvrir un peu plus la culture locale. Le marché central de la ville de Hoima est parfait pour découvrir la gastronomie ougandaise. Un marché très coloré s’ouvrant sur les étales de fruits et légumes. La terre ougandaise est fertile. Ananas et avocats géants. Papayes, fruits de la passion et mangues au goût si difficile à retrouver en Europe. Julius et Moses prennent le temps de nous expliquer les usages locaux. Le gingembre est consommé en tisane ou bien accompagne le thé du soir. Le café est quand à lui consommé le matin.
Nous rencontrons une dame qui vend du miel local, souvenirs gourmands facile à ramener. Les feuilles de bananiers sont vendues et utilisées en cuisine en couvrant les marmites pour une cuisson à l’étuvée.
Les petits pois sont vendus frais ou séchés. Les farines de maïs, de sorgho et de millet sont consommées sous forme de polenta épaisse. Il y a 2 variétés de manioc, le premier que l’on sèche et réduit en farine et le second qui se mange bouilli tout comme l’igname.
Côté poisson on retrouve des tilapias et la fameuse perche du Nil, introduite à l’époque coloniale, faisant des ravages dans le lac Victoria. De belles prises arrivent devant nous, 3 kgs et 10kgs ! Les bouchers travaillent sur du bœuf et de la chèvre. Les intestins sont préparés avec de la banane et consommés au petit-déjeuner, c’est le katogo. Des zones du marché sont dédiées aux bananes (le pays compte des dizaines de variétés) et aux « irish ». Étrange d’entendre ce nom ici, mais « l’irlandais » désigne en Ouganda la pomme de terre !
Nous reprenons la route. Après quelques kilomètres Julius nous propose un arrêt café dans la campagne Ougandaise. Derrière les avocatiers nous découvrons une colonie de tisserins. Ces petits oiseaux jaunes vifs dont les mâles tissent de magnifiques nids au bout des branches. Une fois terminé il chante en secouant leurs ailes pour attirer les femelles. À leur arrivée elles visitent et décident de s’installer ou bien vont visiter ce que propose le voisin.
Nous grimpons dans le 4×4 et continuons notre traversée de la campagne ougandaise. L’altitude augmente petit à petit, et la vie du bord de route est toujours présente et intéressante à observer. Les motos, appelées les « boda-bodas » sont partout. Ces petites motos transportent tantôt des cochons sanglés sur le porte bagage, tantôt des aciers de plusieurs mètres et parfois, en comptant bien, on réalise qu’il y a 5 personnes assises dessus ! Nous décidons de goûter quelques fruits achetés plus tôt au marché en attendant le repas de midi.
Puis le paysage change, des étendus d’un vert nouveau attire notre regard. Ce sont des cultures de thé. L’Ouganda est un gros producteur de café mais aussi de thé. Les vallons en sont recouverts et nous en profitons pour faire une pause et prendre quelques photos.
Sur la fin de notre trajet nous longeons un petit lac de cratère, caractéristique de la région. Nous sommes en effet dans une zone de volcans avec la legendaire chaîne de montagnes des Rwenzori. La météo ne permet pas de les voir mais elles sont bien là, un peu plus à l’ouest avec leur sommet, le Mont Speke, qui culmine à plus de 5000 mètres.
Nous finissons par atteindre le Parc National de Kibale et notre lodge en fin d’après-midi où un touraco géant semble nous attendre près de la réception.
Le ciel est déjà dégagé à notre réveil. Après quelques pancakes et omelettes avalés nous retrouvons Julius pour rejoindre le bureau central des rangers du Parc National de Kibale.
D’une superficie de 770 km carrés et à une altitude d’environ 1500 mètres, ce parc est réputé mondialement pour ces populations de singes. Treize espèces en peuplent la forêt. Quatre nocturnes, que nous ne verrons donc pas et surtout neuf diurnes, parmi lesquelles babouins, cercopithèques et colobes.
Le chimpanzé est bien évidemment l’espèce reine de la zone. Une population d’environ 1450 individus, divisée en 8 communautés, est recensé dans le parc. Parmi ces 8 communautés, 3 sont étudiés par les scientifiques et leurs sont strictement réservées, 3 sont laissées vierges de toute activité humaine, et 2 ont été « ouvertes » au tourisme grâce à la technique de l’habituation. Long processus de 5 à 6 ans, rendant possible notre présence auprès d’eux. Toutes ces informations nous sont expliquées par les rangers au bureau central. Quelques babouins nous observent et en profitent pour vérifier les poubelles…
Nous sommes aujourd’hui 24 visiteurs divisés en plusieurs groupes, chacun mené par un guide, nous serons pour notre part en compagnie d’Edson.
Nous nous enfonçons alors dans la forêt. Dense et haute, la canopée doit atteindre les 25 mètres de haut. Le sentier sinueux s’enfonce entre lianes, racines et troncs imposants. Dans cet environnement clos chaque bruit est amplifié, surtout lorsque l’on recherche nos plus proches cousins primates. Des cris de calaos à joues grises résonnent au loin. Des bruits de branchages se rapprochent. Nous découvrons près du chemin une colonne de fourmis rouges. Une véritable autoroute à sens unique de ses insectes voraces dont notre guide nous dit de se méfier.
Les bruits des branches se révèlent être ceux du passage d’un ascagne, petit singe à la longue queue et au nez blanc. Quelques mètres plus loin nous observons une nouvelle espèce. Des colobes bai (ou colobe rouge), à la robe rousse et caractérisé par l’absence de pouce à leurs pattes avant. Nous reprenons notre marche. Quand soudain nous entendons au loin nos premiers cris de chimpanzés. Aucun doute, stridents mais aussi sourds comme ceux des babouins. Les cris semblent venir de l’avant mais aussi de notre gauche. Edson communique avec ses collègues et réajuste notre direction. Nous entamons alors une montée lorsqu’il nous demande de stopper et de nous retourner.
Un chimpanzé arrive, il emprunte le même sentier que nous et nous dépasse en nous effleurant. C’est le mâle alpha. Le leader de la communauté que nous recherchons. Nous le suivons et arrivons dans la zone principale d’où sont émis les cris où nous retrouvons d’autres groupes et leurs rangers. Des chimpanzés sont un peu partout dans les arbres. Ils sont en train de manger et des fruits tombent sur le sol. Nous prenons quelques clichés et vidéos.
Certains grimpent, d’autres descendent. Nous rencontrons une femelle au sol avec son dernier né. Un jeune s’amuse sur le tronc juste à côté. Un peu plus loin nous retrouvons le mâle alpha, également au sol, se faisant épouiller par un autre mâle. Nous nous approchons et partageons un moment avec eux. Cette communauté compte environ 120 membres mais ils ne se déplacent pas tous ensemble. Nous en avons certainement vu une vingtaine, peut-être plus, difficile à dire dans cette forêt dense.
Nous rentrons au bureau central en échangeant sur cette incroyable expérience.
Après une étape au lodge pour midi, nous partons dans le village de Bigodi tout proche. Nous rejoignons Stella, une guide du village qui nous accompagne sur la demi-journée. Une activité en deux temps, la vie du village et une balade dans le marais à la recherche de la faune.
Elle nous montre les champs de bananiers et de maïs. Nous parle des termitières. Nous fait sentir les fleurs des caféiers. Une habitante nous montre la torréfaction des grains de café robusta, et nous en prépare un pour le goûter. Nous échangeons avec le vieux guérisseur du village autour des bienfaits des plantes. Des femmes nous exposent leur vannerie. Et enfin un villageois nous fait déguster sa bière et son gin à base de banane.
Nous finissons l’activité par une petite marche près des marais du village. Nous pensions croiser quelques oiseaux et ce sont finalement de nouveau des singes qui viennent à nous. Nous recroisons des petits ascagnes avec leur nez blanc. Et surtout des colobes bais. Connu pour leur tempérament agressif, notre présence ne plaît pas vraiment et ils nous le font bien comprendre. Nous passons donc notre chemin après avoir toutefois réussi de belles observations avec les lumières douces de la fin de journée.
Une fois n’est pas coutume mais la fraîcheur accompagne notre réveil. Une légère brume voile le ciel qui s’annonce bien bleu aujourd’hui. Pour cette journée notre objectif est le Parc National Queen Élizabeth au sud. Notre petite équipe grimpe dans le 4×4, les bagages sont au chaud avec Moses et Emmanuel dans le van et nous voilà partis de nouveau sur les routes d’Ouganda.
Routes ou plutôt pistes car Julius tourne rapidement sur la gauche et s’engage dans les collines. « That’s à shortcut ! ». Autrement dit un raccourci ! Mais quelle belle idée. Les chemins de terre nous font déambuler au travers d’innombrables petits villages. Au milieu des champs de bananiers ou de maïs, des forêts… les boda-bodas et les vélos sont partout. Des toiles blanches sont étendues devant les maisons pour faire sécher les grains de maïs blancs avant qu’ils ne soient réduits en farine. Les régimes de bananes sont empilés sur les vieilles bicyclettes, tellement chargées que leurs propriétaires ne peuvent pédaler et doivent les pousser. Des églises colorées occupent les petits sommets environnants. Les enfants nous font « coucou » en criant « Muzungu ! » L’équivalent du « toubab » de l’Afrique de l’ouest, désignant les occidentaux.
Puis nous arrivons dans la zone des lacs de cratères du royaume de Toro. Des lacs d’altitude, occupant les caldeiras d’anciens volcans. L’Ouganda est situé en plein cœur du grand rift africain. La zone de scission du continent. La plaque somalienne se sépare lentement mais sûrement du reste de l’Afrique et part vers l’océan indien. D’ici 10 millions d’années une mer prendra place entre les deux plaques. Mais pour l’heure nous évoquons au loin les monts Rwenzori, à la frontière avec le Congo, montant à plus de 5000 mètres et résultant de ce processus titanesque. Aucun danger aujourd’hui ici puisque cette zone n’est plus active. Le point chaud se trouve bien plus au sud dans les montagnes Virungas, côté Congolais. Ces lacs sont splendides. Au détour d’un chemin, ils se révèlent dans leurs écrins de verdure tropicale. Milans et vautours palmistes passent nous saluer, quelques pêcheurs lancent leur filet…
Après une pause photographie et contemplation nous reprenons la route et finissons par rejoindre le goudron un peu au nord de Kasese. Nous redescendons sous la barre des 1000 mètres d’altitude. Le paysage est plus sec. Les jaunes viennent doucement estomper les verts du tableau. Nous dépassons un peu avant midi la latitude 0, nous sommes maintenant dans l’hémisphère sud ! Julius nous amène à un point de vue.
Devant nous une immense plaine, le parc Queen Élizabeth, créé en 1952, il prit le nom de la reine d’Angleterre en 1954 après son passage à l’endroit où nous nous tenons. Nous continuons au sud, entrons dans le parc et nous dirigeons vers ces toits que nous distinguons au loin sur une petite colline, notre lodge. Juste avant notre arrivée nous laissons la priorité à un troupeau d’éléphants qui traversent la route pour aller boire au lac. De même avec les buffles puis, après ces amabilités, nous pouvons enfin aller nous installer et manger un bout sur la magnifique terrasse du lodge qui domine le parc.
À 16h nous descendons à l’embarcadère et sautons dans un petit bateau. Franck est notre capitaine et nous partons tous les 7 pour une croisière sur le canal de Kazinga. Un canal naturel de 40 kilomètres de long, profond de 8 mètres et qui relie le lac Georges au nord-est, au lac Edward au sud-ouest, que notre lodge domine depuis la péninsule.
Nous atteignons la rive sud et le safari commence. La petite taille du bateau nous permet une approche optimale. Nous commençons par observer des hippopotames qui, à ces heures-ci, se protègent du soleil dans les eaux peu profondes au milieu des jacinthes d’eau et leur fleurs mauves. Nous réalisons la présence d’un bébé, peut-être un mois, collé aux flancs de sa mère.
Des buffles sont tout proches et se reposent sur la terre ferme. Des crocodiles prennent le soleil. Au milieu de ces imposants animaux, de nombreux oiseaux sont aux affaires. Les pic-boeufs enlèvent les parasites de la peau de leur gros voisins. Les aigrettes garzettes se jettent sur les insectes délogés par le passage d’un buffle. Les jacanas marchent sur les jacinthes d’eau grâce à leurs immenses pieds. Un majestueux héron goliath, la plus grande espèce au monde, domine la scène du haut de son grand cou. Les ibis hagedash donnent de la voix. Les cormorans sèchent leurs ailes au soleil.
Nous longeons la berge et découvrons une zone de niche d’Alcyon-pie, des martin-pêcheurs noirs et blancs. Ils sont des dizaines. Entrant ou sortant de leur nid, creusés directement dans la berge. Certains trous sont en mauvaise état, certainement visités par un varan. Au milieu de la foule nous croisons quelques martin-pêcheurs huppés, modèle plus petit aux couleurs vives. Bleu, orange, rouge et blanc.
Mais ils ne sont pas seul, loin de là. Échasse blanche, tantale ibis, héron crabier, bec-ouvert, gobe-mouche du paradis, oedicnème vermiculé, guêpière à gorge rouge, ombrette, vanneau éperonné, soui-manga, gravelots triple bande, râle à bec jaune, ibis sacré… C’est le paradis des ornithologues. Franck accélère pour rejoindre un troupeau d’éléphants. La plupart sont en plein repas dans les hauteurs mais un gros mâle est à l’écart, en train de déguster quelques feuillages les pieds dans l’eau. Ses défenses sont impressionnantes. Un couple d’aigles pêcheurs nous laissent les approcher. Nous dépassons le village de pêcheurs de Kazinga et ses barques pour arriver à une colonie de pélicans accompagnés de marabouts et de mouettes à tête grise.
La soleil baisse et nous rentrons vers la berge nord. Le coucher de soleil rougeoyant clôture cette belle journée en Ouganda.
Les premiers lueurs du soleil éclairent notre lodge toujours perché au dessus du lac Edward. Un ranger hisse les couleurs Ougandaises et nous nous retrouvons autour d’une tasse de café. Nous plaisantons sur l’hippopotame que nous avons croisons devant la réception en allant au lit hier soir.
Nous chargeons les bagages et partons pour le sud. Pour se faire nous devons prendre un bac pour rejoindre la rive sud du canal de Kazinga. Nous arrivons vers 8h à la traverse et sécurisons deux places pour le prochain bateau qui n’embarque que 6 voitures à la fois.
L’endroit est animé. Lieu de passage incontournable depuis la fermeture du pont reliant les deux rives. Les barques se préparent à partir pêcher, les femmes vendent à manger aux passants, une ou deux épiceries exposent leurs produits. La lumière est douce et les pélicans accompagnent le bac qui arrive. Nous embarquons, ainsi que des dizaines de locaux. Quelques bancs de part et d’autres des voitures et le vieux moteur se met à « pétarader ». Nous atteignons la rive sud où un bataillon de boda-bodas couverts de bananes attend son heure.
Nous reprenons la route au sud puis bifurquons plein ouest direction Ishasha. Une zone du parc Queen Élizabeth, un peu à l’écart, mais réputée pour sa population de lions arboricoles. Une des rares populations au monde à grimper dans les arbres comme le ferait un léopard. Imaginez un sapin de Noël, remplacez le sapin par un acacia et les guirlandes par des lions, voilà l’idée. La piste est en très bon état et nous arrivons vite à l’entrée d’Ishasha. Emmanuel nous propose une petite dégustation d’ananas et de papayes à l’ombre d’un arbre. Le site est apaisant, calme. La nature est de nouveau passé aux verts. Légèrement en hauteur nous avons devant nous un magnifique panorama de savane boisée.
Nous offrons les fruits restant aux rangers du parc qui nous saluent avec un grand sourire plein d’ananas.
Julius nous met à contribution, notre mission est de surveiller les arbres. Nous avançons, prospectons, vérifions les acacias, les figuiers et autres euphorbes. Pas de lions. Mais des troupeaux de topis, antilope à la robe brune, broutant avec leurs petits.
Un peu plus loin un nouveau venu, un holychère. À première vue un phacochère mais il n’a pas de défenses, a le dos bien arrondi et est un peu plus dodu. Nous laissons notre holychère et continuons notre safari. Quelques aigles sont repérés, un aigle martial plane au dessus de nous, il tient dans ses serres un serpent. Le soleil se reflète sur les écailles du malheureux réptile. Nous passons devant le panneau indiquant la frontière congolaise. Le Congo Kinshasa est juste là, à moins de 5 kilomètres. Vers midi nous sortons bredouilles de notre quête de lions. On ne gagne pas à chaque fois !
Le goudron retrouvé nous rejoignons notre étape de midi, un petit lodge aux jardins fleuris où notre repas nous attend. Notre équipe ougandaise nous conseillent avec un grand sourire de bien manger. Cet après-midi nous allons faire de la piste de montagne pour rejoindre notre prochain lodge. Plus nous mangeons et plus nous serons bien ancrés dans nos sièges !
60 kilomètres nous séparent de Rihuja, nous allons mettre environ 3 heures pour les réaliser. Le prix à payer pour aller visiter les gorilles de montagnes du Parc National de Bwindi. La piste est sinueuse. Les villages sont toujours aussi nombreux. Les champs de théiers font leur retour. Les collines deviennent montagnes. Nous nous rapprochons des 2000 mètres. Nous croisons des camions remplis de sacs de feuilles de thé. Les enfants nous proposent des petits bibelots à acheter ou crient « hello! » à notre passage. Les bananiers disparaissent. Ici le travail du bois prend une part plus importante. Les paysages en contrebas sont quasiment tous exploités ou habités. Les hommes travaillent à la hache et à la scie les eucalyptus fraîchement abattus. Des planches sont vendus au bord des chemins.
Nous atteignons les 2200 mètres d’altitude et évoluons dans la forêt. Nous apercevons par moment les sommets voisins. Cette nature est impressionnante. À la fois hostile par ses pentes et douces par les formes arrondis de ses sommets. Nous entrons dans le village de Rihuja. Une des 4 entrée pour la forêt de Bwindi où nous irons demain pister les gorilles. C’est un petit village construit sur la crête de la montagne. Les maisons de gauche sont sur pilotis pour compenser la pente. Toutes les habitations sont construites en planches et rondins de bois. Comme un petit air de trappeurs dans cette Afrique. Notre lodge est accroché au sommet de la montagne. Une vue incroyable nous y attend.
Enfin le grand jour. L’objectif de notre voyage, rencontrer les gorilles de montagnes de la forêt impénétrable de Bwindi.
Réveil au frais puisqu’il fait 14° avec un ciel voilé. Les bouillottes découvertes dans nos lits n’étaient pas de trop. Le vent se calme et nous montons au petit-déjeuner. Nous partons avec le casse-croûte de midi car nous ne savons combien de temps va durer le pistage.
Julius nous emmène au bureau des rangers de Ruhija, un des quatre du parc. Nous écoutons avec attention les informations et consignes données.
Il existe les gorilles de l’ouest et les gorilles de l’est. Parmi les gorilles de l’est, deux sous-espèces, les gorilles des plaines et les gorilles de montagnes. Nous venons rencontrer ces derniers. Il en reste 1006. 450 sont dans le parc national de Bwindi, classé comme site du patrimoine mondial de l’UNESCO. 21 groupes ont été « habitué » à l’humain après 2 années de travail. 4 groupes sont dans notre secteur.
Nous sommes confiés à Luke, notre guide/ranger pour le pistage. Le groupe que nous recherchons s’appelle Oruzogo, composé de 16 membres, dont 2 dos argentés, les fameux gros mâles. Les rangers insistent sur la difficulté potentielle de cette marche, dans des pentes vertigineuses et une végétation dense. Deux rangers armés nous encadrent avec leur AK-47. Sécurité en cas de mauvaise rencontre, comme des éléphants de forêt par exemple. Le but étant seulement de les effrayer en tirant en l’air.
Nous reprenons la voiture pour nous rapprocher de la zone de pistage. Tous les matins des pisteurs partent retrouver les groupes de gorilles qu’ils ont laissé la veille à la nuit. De vrais anges gardiens, utiles aux touristes comme nous, mais aussi en charge de la lutte anti-braconnage. Le gorille étant consommer comme viande de brousse dans ces contrées très pauvres. Le tourisme permet une manne financière plus intéressante et surtout plus durable pour la population locale. Une part de nos permis est d’ailleurs donnée aux autorités locales.
Une fois sur place nous rencontrons la suite de notre escorte. Des porteurs, hommes et femmes du coin qui viennent nous aider à progresser dans cette forêt « impénétrable ».
Une fois échanger quelques mots nous commençons l’approche. La pente est raide, le sol incertain. Parfois glissant, parfois couverts de ronces ou de lianes. Les rangers ouvrent la voie à la machette. Nous arrivons dans une zone un peu plus humide, un petit vallon.
Luke nous demande de nous arrêter. Quatre pisteurs partis ce matin aux aurores nous rejoignent. Les gorilles ne sont pas loin. Nous laissons sacs et bâtons pour être plus à l’aise et ne pas effrayer les primates.
Nous avançons à petits pas et surprise. Un gorille est à 10 mètres de nous. Assis dans les feuillages nous aurions pu passer 10 fois près de lui sans le voir. Les appareils photos crépitent. Lui ne semble pas troubler le moins du monde. C’est un « black back« , un dos noir, ce qui signifie que c’est un jeune mâle.
Nous continuons notre avancée est arrivons dans une zone plus ouverte. Au fond du vallon, une clairière au milieu des arbres géants. Nous distinguons quelques masses noires au milieu des hautes herbes. La différence avec l’approche des chimpanzés est incroyable. Les chimpanzés sont bruyants, leurs cris sont saisissant. Ils se déplacent beaucoup, sont plus actifs. L’ambiance auprès des gorilles est à l’inverse très calme et silencieux. La force tranquille. Nous approchons du mâle dominant. Un des 2 « silver back » ou dos argentés (avec l’âge l’épaisseur de leur pelage diminue au niveau de leurs reins, donnant une teinte argentée). Il est assis, attrape et engloutit toutes les feuilles autour de lui. Il est massif, des bras musclés, le torse dégarni, le regard rouge/brun…
Il s’appelle Kaganga et à 18 ans. Il a pris le pouvoir dans le groupe après la mort du précédent mâle alpha. Il a pris le dessus sur Kasumali, le second dos argenté du groupe qui a lui 25 ans et que nous observons un peu plus loin. Les gorilles peuvent vivre 50 ans et Kaganga est bien parti pour rester de longues années à la tête de ce groupe. En arrière plan des jeunes grimpent sur des troncs pour accéder à certaines feuilles. Les gros mâles eux les arrachent pour les faire venir à eux, au sol. Luke repére une femelle. C’est Katoto, elle a 13 ans. Elle porte sur son dos une petite peluche de poil noir, un bébé gorille. Ils disparaissent un peu plus haut dans la pente. Nous les suivons tranquillement pour ne pas les stresser.
Les rangers dégagent un peu les broussailles et nous les retrouvons assis. Katogo mange et le petit Sabaato nous regarde, se demandant certainement à quel espèce de primates nous appartenons. Il est encore totalement dépendant de sa mère. Il a 1 an ! Son anniversaire est demain car il est né le 25 juillet 2020.
Le temps imparti à notre visite arrive à son terme. Nous rejoignons le vallon et attendons les porteurs quelques minutes. Nous en profitons pour observer une dernière fois ces incroyable créatures dans cette ambiance si calme et sereine. Nous remontons la pente et retrouvons la piste. Nous avons au final très peu marché, nous sommes très chanceux. Et puis nous avons vu certainement une douzaine !
Nous rentrons au lodge tous avec l’esprit encore un peu avec les gorilles.
L’après-midi est de repos. Notre lodge est construit dans un site superbe, face à la forêt de Bwindi. Certains échangent autour d’un café, d’autres trient les photos. Alexandre nous propose une balade dans le centre du village. Nous flanons dans la seule rue du village où les micro-commerces se concentrent. Ces cabanes n’en ont pas l’air mais ce sont bien des boutiques. Un coiffeur ici, un vendeur de chaussures, des épiceries…
De retour pour le coucher de soleil aux couleurs pastel nous profitons de notre dernière soirée dans ce bout du monde hors du temps.
Nouveau réveil dans la fraîcheur des montagnes de Bwindi. Le paysage est toujours aussi beau. Le ciel est bien dégagé. En scrutant bien l’horizon au sud nous apercevons un des volcans des Virungas. Cette zone active qui a fait parler d’elle cette année avec une éruption qui a entraîné l’évacuation de la ville de Goma. Mais tout ceci est en RD Congo.
Nous saluons nos hôtes et embarquons dans nos voiture. Nous retraversons le village de Rihuja, passons devant le bureau des rangers et nous enfonçons dans la forêt. Nous quittons le massif de Bwindi par le sud après y être entrer par le nord. Le premier objectif est de rejoindre le goudron pour ensuite filer en direction de Kagale, la porte de sortie de cette région. Notre équipe reprend donc son rythme de croisière sur les routes sinueuses de Bwindi. Les têtes et les corps se balancent de gauche à droite au grès des virages et des ornières. La pente est telle que depuis la route nous observons le sommet des arbres en contrebas.
Quand soudain au détour d’un virage nous tombons sur un arbre. La route est bloquée, impossible de le bouger malgré nos solides gaillards. Par chance un homme passant par là accepte d’amener Julius au premier village pour emprunter une hâche.
Pendant leur absence nous observons la forêt. Des singes Guérezas sautent de branches en branches en contrebas. Toujours aussi élégants dans leur tenue noire et blanche, il nous montre leur agilité et disparaissent de façon déroutante. Le moteur de la moto résonnent. Ils sont de retour. Julius ramène une hâche et un panga. Une de ces machettes que les rangers utilisaient pour ouvrir la voie des gorilles.
Une fois l’obstacle poussé dans le vide nous reprenons la route. Nous rendons les deux outils aux rangers de la sortie du parc en les remerciant et commençons à descendre. Nous l’avions déjà remarqué ces derniers jours mais peut-être pas à ce point. Les zones communautaires, c’est à dire en dehors du parc, sont totalement deboisées. Par moments nous voyons très bien sur les crêtes la frontière entre ces deux mondes. Celui de l’homme et celui de la nature. D’un côté des sommets pelés, de l’autre des forêts denses.
Les deux ont leur beauté bien sûr mais on se se rend compte de l’importance de ces parcs nationaux. On voit mal comment les gorilles pourraient résister à une telle avancée humaine autrement. Dans ce pays où la population est passée de 28 millions en 2002 à 45 millions aujourd’hui, la pression sur la terre est un vrai problème. D’autant plus que la population reste très largement rurale, nous avons pu le constater pendant notre voyage.
Le petit convoi continue sa route. Nous traversons les villages les uns après les autre. Les habitants cultivent dans les pentes vertigineuses des patates, des haricots, des oignons, des patates douces, un peu de blé, beaucoup de sorgho… Les grains sèchent devant les maisons en bord de route.
Nous sommes ravis de retrouver le goudron et faisons une halte à Kagale.
La route s’élargit, les gros semi-remorques sont de retour et Julius peut accélèrer l’allure. Nous passons sous la barre des 1500 mètres d’altitude. Le paysage redevient sec, les couleurs changent comme prêt de Kasase lors de notre étape vers le Parc Queen Élizabeth.
Les pentes des collines environnantes sont nues. Seules quelques tâches vertes se détachent. Les cultures de bananiers. Incroyable. Nous nous retrouvons dans une zone avec seulement 2 ou 3 essences d’arbres. Le bananier et l’eucalyptus, quelques rares pins, des zones de papyrus près des cours d’eau, une ou deux exploitations d’ananas. Sacré contraste avec ce matin. Nous arrivons à Mbarara. La chaleur est revenue et nous nous rafraîchissons dès notre arrivée au restaurant de la mi-journée. Deux infirmiers nous rejoignent après le repas. C’est l’heure des tests salivaires COVID, nous rentrons en Suisse demain déjà…
Une fois cette question réglée nous partons nous installer au dernier lodge du voyage, en bordure du Parc National du lac MBuro.
Sur la route nous nous arrêtons pour observer les troupeaux de vaches Ankolé. Typique de la région que nous traversons du même nom. Cette espèce aux cornes incroyablement longues sont la fierté de leurs propriétaires dont la culture se rapproche beaucoup de la culture Masaï du Kenya voisin.
Une fois installés dans nos chambres nous sortons en fin de journée pour un petit safari en 4×4 dans le parc. Des révisions pour la plupart. Hippopotames, cobes Defassa mais nous observons aussi nos premiers zèbres de plaines ainsi que des impalas.
Côté avifaune nous repérons martin-chasseurs striés et rolliers à longs brins. Le soleil baisse et nous accélérons l’allure pour aller dîner sous la belle charpente de notre lodge.
Ce matin nous saluons le départ de Moses. Notre fidèle chauffeur toujours prompt à nous aider, à discuter et à rire. Il remplace au pied levé un de ses collègues. Nous rencontrons son remplacement pour ce dernier jour de voyage. Également nommé Moses, il devient pour nous Moses 2. Nous prenons place pour une dernière virée ougandaise. Nous décollons en fin de soirée et nous avons le temps pour une journée bien remplie.
Nous commençons par avaler la route et les kilomètres. Toujours encadrés par ces scènes de la vie quotidienne des ougandais. La nouveauté du jour est peut-être la vente de gingembre en petits sachets de 1000 shillings, soit 25 cts d’euro, présents un peu partout.
Julius s’arrête sur le bas côté. Nous sommes sur l’équateur ! Vérification au GPS et validation. Nous sommes bien sur la latitude 0. La photo d’usage devant le panneau est faite puis nous avons un petit temps pour acheter quelques souvenirs dans les nombreuses boutiques autour de nous.
À midi nous entrons dans la zone des marais de Mabamba. Proche de la capitale, cette zone humide est le lieu de notre dernier safari. Nous venons y chercher le fameux bec-en-sabot. Un oiseau mythique, présent dans toute la zone des grands lacs africains, mais difficile à voir par sa faible population.
Seul représentant de la famille des balaenicipitidés, il est aussi appelé « oiseau à tête de baleine ». Étrange animal ressemblant à la fois à une cigogne, un pélican et un héron. Nous discutons de tout ceci à l’ombre d’un arbre en mangeant notre casse-croûte préparé par le lodge de ce matin. Nous observons le ballet des canots en bois qui transportent les piétons, les motos et les marchandises à travers le dédale du marais.
Près de nous une bandes de minots jouent aux petits chevaux sur un plateau géant. Chacun défendant les couleurs de son club de football anglais préféré !
Une fois le repas terminé nous rencontrons notre guide pour la sortie, Innocent. Nous nous séparons en 2 groupes de 3 et grimpons sur les longues embarcations en bois. Les moteurs pètent et nous disparaissons dans le marais. Les canaux s’enchaînent, les jacanas et les martin-pêcheurs sont au rendez-vous. Innocent grimpe à la proue et scrute les papyrus aux jumelles. Nous arrivons dans une zone plus ouverte où nous prenons un peu de vitesse quand soudain un animal est repéré. Nous avons du mal à le voir au loin. Mais nous sommes chanceux une nouvelle fois car le bec-en-sabot s’envole pour venir se poser à quelques dizaines de mètres de nous. Nos pilotes se replacent et nous pouvons parfaitement observer cet oiseau. Immobile, chassant à l’affût tel un héron, c’est sa robe grise qui le rend visible. Une petite huppe surmonte sa tête et bouge au gré du vent. Son bec est incroyablement large, d’où son nom. D’ailleurs en vol nous avons pu remarquer qu’il plie le cou tel un pélican. Mais le plus fascinant sont certainement ses yeux. Deux grosses billes jaunes hypnotisantes qui semblent ne plus vous lâcher une fois que vos yeux les ont croisés.
Ayant une espérance de vie de 35 ans, ces oiseaux ont un taux de reproduction faible, avec une couvée de 2 à 3 poussins tous les 5 ans. Couvée au sein de laquelle est pratiquée le caïnisme, c’est à dire que le plus fort va tuer ses frères et sœurs pour assurer sa survie.
Après cette très belle observation nous rentrons au point de départ en prenant le temps de regarder les nénuphars qui colorent de mauve le marais. De retour à l’embarcadère, Julius nous propose d’enchaîner rapidement pour aller se présenter au ferry de Buwaya et rejoindre ainsi la rive opposée et notre hôtel à Entebbe.
Double avantage, plus rapide et moins fatigant que les ornières des pistes. Nous nous présentons à ce qu’il conviendrait d’appeler une berge plutôt qu’un ferry. Une plate-forme pouvant accueillir 8 véhicules, du fret, des 2 roues et des piétons sur les quelques bancs présents de chaque côté.
Nous nous enregistrons et attendons l’arrivée du navire. Julius et le responsable de l’embarquement palabrent un bon moment. Il semblerait que nous soyons prévu sur la prochaine traversée. Encore faut-il qu’elle arrive ! Nous attendons un long moment, en nous demandant ce qui se passe sur la rive d’en face.
Les petits canots en bois, payants, embarquent des piétons et filent à toute allure vers Entebbe. Les motos et leurs chargements s’agglutinent dans la file. Les pêcheurs rentrent de leur journée. La berge finit par arriver et le ballet commence. Un joyeux meli-melo à nos yeux mais qui est très bien organisé. Une fois vidée, la barge est chargée du fret porter par les motards qui repartent aussitôt. Le plein des réservoirs est effectué. Une dame nettoie les résidus de carburant, en prenant garde qu’il n’y est pas un crocodile dans l’eau lorsqu’elle remplit son seau. Les voitures et camions sont parqués au millimètres. Julius et Moses 2 parviennent à se frayer un chemin. Puis le tour des piétons. Et enfin les motos qui viennent combler les derniers espaces de cette barge qui semble prête pour un débarquement.
Le gros moteur se met en route, du reggaeton sort des grosses enceintes à l’avant, un homme prêche la parole de dieu, la bible à la main, à moitié possédé dans un « brouhaha » incroyable…
Nous n’avons certainement pas gagné de temps en prenant ce « ferry » mais quelle aventure !
Et puis n’oublions jamais la formule africaine : « Vous en Europe vous avez les montres, mais nous autres en Afrique nous avons le temps ! »
Nous sommes de retour à notre premier hôtel du séjour, près de l’aéroport. Nous avons des chambres pour nous rafraîchir, nous changer ou bien refaire les valises. À 19h nous retrouvons notre joyeuse équipe ougandaise accompagnée de leurs managers. Nous échangeons sur le pays et les beautés que nous avons vu et partageons notre dernier repas ougandais en leur compagnie. Perche du Nil, curry de légumes, pièces de bœuf…
À 20h15 nous montons pour l’aéroport. Nous remercions Julius, Moses 2 et le jeune Emmanuel pour tout ces bons moments vécus ensemble et repartons pour l’Europe.
Chacun avec ses souvenirs, ses coups de cœur. Que ce soit les girafes du Murchison, l’approche « sonore » des chimpanzés à Kibale, l’abondance des oiseaux du canal de Kazinga, la puissance du Nil, les hippopotames de minuit où bien les paysages sauvages de la forêt de Bwindi… L’Ouganda n’a certainement pas dévoilé tout ses secrets mais nous a donné une belle idée de la variété de son patrimoine naturel extraordinaire.
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