Marianne Duruel
Coordination et Photographie
6 mars
21 mars 2015
Mars 2015, en direct du « ROYAUME DU TIGRE »
Marianne Duruel
Coordination et Photographie
Début de notre voyage : nous décollons sous le soleil pour un vol fort agréable avec de beaux survols enneigés. Nous atterrissons à Delhi le second jour de Holi, la fête des couleurs qui marque la fin de l’hiver et le début du printemps. Ces joyeuses festivités sont l’occasion pour petits et grands de s’asperger de poudre de couleurs et d’eau. À l’heure où nous arrivons, les « bombes » à eau sont épuisées et nous partons nous coucher secs…
En route pour le « Corbett national park », la sortie de Delhi est rendue facile par ce week-end festif. Mais dans les campagnes, la récolte de la canne à sucre bat son plein et les lourds chargements tractés par bœufs, buffles, chevaux, tracteurs compliquent rapidement les choses… Nous « slalomons » vers les contreforts de l’Himalaya. Le spectacle devient fascinant lors des traversées de villes et villages dans une cacophonie de klaxons… Après le déjeuner pris dans notre lodge, nous filons vers le parc… Nos petites jeeps démarrent pour notre premier safari et nous rencontrons nos premiers chitals ou axis. Leurs faons tachetés de blanc, comme les adultes, sont de vrais « bambis ». Puis surgissent macaques rhésus, langurs sacrés ou entelle Hanuman à la face noire et « choupette » claire… Soudain, des cris d’alerte retentissent et le grand chat rayé sort de la forêt… Bon début ! …
Le lever du jour nous voit à dos d’éléphants. 3 grandes dames nous font traverser la rivière Ramganga pour passer dans la forêt de l’autre côté. Les cornacs les laissent se nourrir de-ci de-là. Tandis que nous nous enfonçons silencieusement dans les fourrés, surgissent chitals et femelles sambars au beau pelage fauve foncé. Les oiseaux chantent avec enthousiasme… Un grand duc nous fait un beau décollage et disparaît dans les feuillages… À la fin de cet agréable safari « d’altitude », madame Leshmi, l’éléphante de notre lodge, nous laisse avec bonheur tester le contact avec sa peau aux multiples circonvolutions… Elle y prend goût et bientôt bâille… Quant à nous, devant la tendre mastodonte, nous nous attardons… et c’est le coeur plein d’allégresse que nous allons prendre notre petit-déjeuner. Elle nous gratifie même, avant notre départ, d’un grondement complice de communication. Notre oreille perçoit si peu des conversations « éléphantesques »… Nous repartons en 4×4 pour explorer les hauteurs vers lesquelles se dirigeaient les belles empreintes de tigre observées de nos montures. Forêts de tecks, de sals, arbres couverts d’épiphytes sur les hauteurs… L’orage nous a rattrapés et nous essuyons une belle averse. Les arbres arborent des feuilles clinquantes dans la brume. Le retour du soleil permet finalement de retirer la capote et bien profiter du beau couvert forestier. Mais point de tigre !
Le 3e safari se déroule en 4×4 dans un autre secteur du parc. C’est un festival de singes et d’oiseaux ! Nous croisons, entre autres, un beau mâle sambar et toute une famille d’éléphants sauvages sont en plein repas près de la piste. Une journée bien remplie !
Dernier safari à Corbett, cette fois-ci, les rapaces font le show : aigles, vautours posent, décollent… Chitals, sambars et langurs sont au rendez-vous. Le tigre est repéré mais… par ses proies potentielles uniquement…
Nous sortons du parc après avoir croisé un amour de petit faon chital tout fier de nous montrer ses belles taches blanches… Il est surtout très curieux et très imprudent. Sa mère, en désespoir de cause, finit par le rejoindre, le renifler pour savoir s’il va bien et les 2 s’élancent élégamment dans le bush. Belle rencontre ! Puis c’est le retour, d’abord sur les routes campagnardes au pittoresque absolu puis sur de plus grands axes, mais non moins surprenants pour nous… La circulation y est un inextricable mélange de moyens de locomotion d’un autre âge et de véhicules plus modernes et plus rapides… Tout cet enchevêtrement de flux à des vitesses si différentes tient du miracle, car au moment où tout semble perdu… tout le monde passe et continue son chemin comme si de rien n’était…
Notre rentrée dans Delhi à l’heure de pointe vaut le déplacement… Nous finissons notre journée dans un lieu plus paisible : au temple Sikh. L’atmosphère y est mystique. Les fidèles sont nombreux, une cérémonie est en cours. Ils chantent, accompagnés par un orchestre traditionnel au sein duquel la cythare tient une grande place. L’architecture y est particulièrement soignée, tout comme les tenues des Sikhs présents. Un bel exemple de raffinement et d’architecture !
Le vol de Delhi vers le centre du pays nous fait complètement changer d’univers. Nous passons d’une ville tentaculaire de 23 millions d’habitants à des régions beaucoup plus sèches à l’habitat dispersé. Les traditions y sont encore de mise, d’abord dans l’État tribal du Chhattisgarh puis celui du Madhya Pradesh.
Quid des tracteurs, des hautes cheminées des briqueteries et de la riche plaine parcourue par les canaux en provenance de la rivière Yamuna… Ici, les petites parcelles sont closes par des talus de terre pour conserver l’eau de la mousson et labourées à l’araire tiré par des vaches. On y cultive céréales, lentilles, pois chiches, arachides, un peu de canne à sucre… Les femmes marchent au bord de la route, chargées sur la tête de ballots de fourrage, de fagots de bois, de la récolte de pois chiches… Le lait est transporté à moto dans de grands bidons. Sur la route circulent plus de bicyclettes et de motos que de voitures. S’y pressent tracteurs de transport, camions et bus collectifs remplis à ne plus pouvoir respirer, parfois galerie comprise… L’ébéniste, le mécanicien, le ferronnier… travaillent au bord de la route. On cloue, on scie, on soude… De place en place un petit temple ponctue le paysage de ses couleurs pimpantes. La route devient escarpée, les paysages sont superbes, Kanha est proche…
Ce matin, le soleil se lève sur le parc de Kanha. Des écharpes de brume s’accrochent aux branches des arbres. Les rayons du soleil levant s’immiscent en grandes raies lumineuses dans les sous-bois. Les petits chitals tout auréolés de soleil portent une robe fauve et blanche au contraste intensifié par l’humidité de la rosée. Des cerfs de Duvaucel ou barasinghas, l’espèce pour la protection de laquelle fut créé en 1955 le parc de Kanha, ruminent tranquillement dans les hautes graminées. Dans les forêts de roseaux, certains sont en fleurs. Des chaos rocheux ponctuent le paysage. Ce parc est bien celui qui inspira à Rudyard Kipling son célèbre « Livre de la jungle ». Régulièrement retentissent des cris d’alerte synonymes de présence d’un prédateur détecté par ses proies potentielles. Mais, point de tigre…
L’après-midi, après pour les uns une petite sieste réparatrice, pour les autres un bain à la piscine, le tri des photos… nous partons pour une balade à pied avec un guide local ornithologue. Chevêchette de jungle, drongos variés à la noire silhouette, martins-pêcheurs, martins-chasseurs, guêpiers… nous entrainent jusqu’à une retenue d’eau dans laquelle un homme pêche à l’aide d’un tronc creux tandis que sur la rive une femme fait sa lessive et que retentissent les rires des enfants jouant dans l’eau. Les maisons traditionnelles sont très particulières, avec des toits à 2 niveaux et des murs de terre battue peints en bleu et blanc. Vaches, buffles, cochons noirs vaquent à leurs occupations. Le soleil descend et les villageois rentrent des champs. Il faut dire qu’en ce moment le labour bat son plein…
Notre safari matinal commence avec un chacal doré et, dans une clairière, chitals et gaurs (le bison indien). Près d’une mare, de belles empreintes ont été laissées récemment : grandes et petites… Une mère et ses 2 jeunes sont passés par là… Soudain des cris d’alerte de sambar… nous nous arrêtons de suite tous les sens en éveil. Peut-être le tigre est-il proche ? Nous attendons, attendons et… notre patience est récompensée : un léopard traverse la piste à « bride abattue »… Cela pourrait signifier qu’un tigre est à proximité et l’a effrayé. Nouvelle écoute attentive et nouveaux cris d’alerte, un cerf sambar bondit de la forêt, s’immobilise sur la piste et plonge dans les taillis de l’autre côté. Nous tentons quelques déplacements stratégiques, rien. En chemin, nous croisons chitals et langurs.
Bientôt de nouveaux cris d’alerte confirment la supposition. Silencieux et attentifs, nous scrutons les fourrés. Dans la clairière d’en face, les chitals sont pétrifiés, tous tournés dans la même direction. Et : le tigre apparait, impérial ! C’est une jeune femelle encore un peu timide. Elle longe l’orée de la forêt, foulant la clairière avec souplesse. Elle déclenche des « explosions » de chitals sautant et courant éperdument, d’autres restent figés. Au niveau d’un beau tronc sur lequel son pelage ressort bien, elle marque une borne olfactive, continue un peu et se fond dans le décor… Quel beau moment partagé ! Pour certains, il y a la « cerise sur le gâteau » : un ours lippu traverse la piste juste devant leur jeep… Après un excellent déjeuner indien à notre lodge, nous prenons la route pour Bandhavgahr.
Quelle surprise pour demain ?
Bandhavgarh, nouvel écosystème, nouveau paysage : 1500 km² dédiés à la protection du tigre. Ce parc national est très bien géré, seuls 20 % de la superficie totale sont ouverts au public. Quelques 69 à 72 tigres vivent sur la totalité de la zone dont une douzaine sur le secteur autorisé à la visite. La partie haute du parc, ce plateau qui domine le site et sur lequel se trouvait le fort, est maintenant interdit d’accès : les tigres ont repris possession de leur territoire. L’histoire est parfois chargée de clins d’yeux étonnants et de retournements de situation…
Nous commençons notre safari au lever du soleil, le ciel rosit et les roches au beau dégradé d’ocre rougeoient entre les branches vert tendre des jeunes pousses de sals. Il ne faut que 7 jours à cet arbre pour produire feuilles et fleurs… Quand la sécheresse devient une contrainte, la nature s’adapte et la végétation doit avoir des cycles végétatifs rapides. La piste est de toute beauté ! Elle monte, redescend, passe sur la roche nue, des secteurs sablonneux, croise de petites rivières et points d’eau dans lesquels les arbres se reflètent… Parfait pour une photo de tigre qui boit… Mais chitals et langurs, s’ils nous offrent l’occasion de beaux clichés, sont complètement détendus et manifestement nullement préoccupés par la proximité d’un tigre… La star se fait attendre… Normal ! …
Pour le safari de l’après-midi, nous sommes en première position pour rentrer dans le parc. Les chitals, que nous avions quittés paisiblement installés à l’ombre en train de ruminer, sont à nouveau en train de brouter. Les langurs sont aussi en plein pique-nique et soudain, c’est l’alerte. Le cri caractéristique du primate annonçant à tous la présence d’un prédateur. Les cris redoublent, premier arrêt, rien… Les alertes continuent par intermittence. Nous avançons un peu et… Elle apparait : une superbe jeune panthère. Elle est timide, hésite à traverser, se cache derrière les buissons. Elle rampe pour en sortir discrètement puis se décide à entreprendre une sortie à découvert. Elle crache un peu, nous montre les crocs pour se donner du courage et nous intimider… Finalement, elle prend son élan, se « ré-aplatit » et s’élance pour traverser la piste. Nous la regardons disparaitre furtivement derrière arbres et buissons de l’autre côté. Quelle belle apparition !
Le reste de notre safari se déroule sans nouvelle alerte dans un paysage superbe où se mêlent roches et végétation. D’énormes lianes enserrent certains arbres et courent parfois d’un arbre à l’autre. Au loin, l’orage gronde, nous rentrons au lodge.
Ce matin, départ par la route vers Khajuraho pour notre vol vers Delhi. Le pont de la route principale a été emporté par un orage… Le détour nous promet une longue route, on est en Inde… De nouveau, c’est le « grand spectacle » des routes indiennes… À 360°, il y a à voir. Les marchés sont hauts en couleurs. Les rickshaws regorgent de passagers. Les chargements des poids lourds sont souvent improbables et laissent envisager de les doubler uniquement à des chauffeurs optimistes. Puis, le miracle se produit, nous passons… La route, dont nous avions largement calculé le temps de parcours, se révèle plus rapide que prévu. Génial ! Nous en profitons pour visiter le mythique complexe de temples du site de Khajuraho, classé au patrimoine mondial de l’humanité. Le soleil brille à nouveau, c’est l’heure du déjeuner, les conditions sont idéales. L’occasion est belle pour immortaliser les temples dans leur milieu fleuri. Les fresques sont de toute beauté. Les élégantes apsaras y côtoient divers avatars de grandes divinités hindouistes, Ganesh (la divinité à tête d’éléphant) y est évidemment présente tout comme Hanuman (à la tête de singe)… Les fresques donnent parfois une impression de bande dessinée tant les batailles y sont bien représentées, les combats d’éléphants réalistes… Chaque éléphant a un harnachement différent… Un beau moment d’architecture et d’histoire découvert hors de la foule touristique !
Le déjeuner se passe dans un hôtel qui a tout d’une oasis. Heureusement, car le vol tarde… À l’aéroport, notre attente se prolonge… Qu’à cela ne tienne, j’improvise une conférence aéroport, interrompue par notre embarquement. Retour à Delhi !
Notre vol est bien matinal, mais garant de pouvoir arriver à temps en Assam pour prendre la route et pouvoir faire notre premier safari à Kaziranga dès notre arrivée. Nous quittons Guwahati sous le soleil. Le spectacle reprend avec notre nouveau trajet. L’Assam offre des paysages et une atmosphère très différentes de nos précédentes étapes. La route, tantôt à quatre voies, en quasi-piste, refaite, en travaux… nous fait apprécier nos confortables voitures climatisées… L’architecture des maisons villageoises fait la part belle au bambou et à la paille de riz. D’esthétiques panneaux tressés entourent souvent les humbles demeures. Les vaches traversent parfois la quatre voies avec un calme olympien… D’inconscientes chèvres ruminent sur la route, le dos confortablement appuyé sur le terre-plein central mais à quelques poignées de centimètres des camions et véhicules hurlants de leurs puissants klaxons… Amusante vision que celle de panneau interdisant l’utilisation du précieux et bruyant sésame… Nous progressons vers notre destination finale en suivant la vallée du grand Brahmapoutre dont les crues en période de mousson fertilisent toute la région. Les parties basses sont dédiées au riz tandis que les sommets des collines couvertes de plantations de thé ponctuées de poivriers. Vaches, chèvres et cochons s’activent. Un jeune veau tout juste né s’approche dangereusement de l’intense trafic qui sévit sur cet axe routier. Nous lui évitons de subir un mauvais sort… Il finit dans les bras de son propriétaire qui se confond en remerciements. Finalement, nous arrivons à notre lodge. C’est un éco-lodge de charme situé dans les rizières au bord de la rivière Diphlu. Les petits bungalows de bambou ont énormément de charme et nous découvrirons très vite qu’on y mange délicieusement bien.
C’est repu, après une petite sieste réparatrice, que nous repartons en 4X4. Notre premier safari nous conduit dans la partie Ouest du parc. Juste après le passage de la limite du parc, un spectacle attractif nous attend : en contrebas du pont, c’est l’heure du bain des éléphants et un jeune cornac joue avec son animal dans l’eau. On ne sait qui de l’éléphant ou de son conducteur y prend le plus de plaisir. Leur complicité est agréable à regarder. Un éléphanteau tout petit, âgé d’un mois, fait rire tout le monde par sa détermination à se rouler dans la poussière… Et voici nos premiers rhinocéros unicornes, buffles sauvages…
Ce matin, départ pour une belle journée d’exploration du parc national de Kaziranga, nous quittons notre lodge intime au bord de la rivière Diphlu pour une balade à dos d’éléphants. Le soleil est déjà de la partie quand nous traversons tout un secteur de rizières et de plantations de thé. Puis, nous arrivons à l’entrée « centre », notre secteur de découverte du matin. Au point de rendez-vous des éléphants, c’est l’effervescence : les grandes silhouettes sortent tranquillement du bush et débarquent leurs passagers ravis sur la tourelle prévue à cet effet. Pour nous c’est le plaisir de voir arriver de grande femelle avec des petits. Ils sont 3 : 3 mois, 1 an et 1 an 1/2. Après avoir bu pour récupérer de leur trajet, ils se pressent vers les touristes enthousiastes. C’est alors l’incroyable privilège de pouvoir établir un contact sympathique avec ces grandes créatures si sensibles et sociables que d’aucun abattent sans vergogne pour l’ivoire… Pour l’heure, la joie et l’insouciance sont à l’ordre du jour. Par deux, nous retrouvons nos éléphants et cornacs. Un safari à dos d’éléphants nous permet une approche de proximité incroyable avec les rhinocéros. Des adultes de belle taille, une mère et son petit avec ses grandes oreilles… La lumière est belle, les éléphanteaux prennent leur petit-déjeuner en chemin. Nous explorons tout un secteur : cochons sauvages et leurs petits, cerfs cochons, cerfs de Duvaucel (dits des marais en anglais), buffles sauvages aux cornes impressionnantes… Mais, vraiment, les rhinocéros indiens et leur « armure » antédiluvienne sont la grande attraction. Ils sont plus de 2320 aujourd’hui contre 100 à 200 en 1910 quand des mesures furent prises pour tenter de sauver l’espèce. Le succès est ici évident ! Mais une autre surprise nous attend : un tigre avait été vu et nous l’avions attendu sans succès. Mais la chance nous sourit et le beau tigre prend son bain de l’autre côté du plan d’eau. Bientôt, nous avons côte à côte un éléphant sauvage, un rhinocéros et le tigre dans l’eau… Et… quelques pélicans… Quel beau spectacle ! Dommage, un peu loin…
Après notre matinée dans la partie dans la partie centrale, nous partons explorer le secteur Ouest à nouveau. Le passage du pont est à nouveau l’occasion d’assister au bain des éléphants. Un rhinocéros nous fait une belle démonstration en traversant la piste juste devant nous et en nous faisant bien sentir que nul ne doit se mettre en travers de sa route… personne n’insiste… Après une patiente attente du passage d’un tigre ayant provoqué des alertes, en vain, nous rentrons. Le soleil s’empourpre, le feu de brousse crépite un peu plus loin… Et avant de sortir, un ultime cadeau : une femelle rhinocéros unicorne et son tout petit, juste en contrebas de la piste.
Nouveau trajet vers la ville de Guwahati pour notre vol vers Jaipur et la suite de notre exploration de la diversité des parcs indiens. Le trajet est haut en couleurs. Les camions peints de couleurs vives sont nombreux sur cet axe qui traverse l’Assam entre Bengladesh, Bhoutan, Chine et Birmanie. Entre poids-lourds, véhicules légers, motos, vélos, charrettes à bras… dans une cacophonie de klaxons, des vaches ruminent sur le terre-plein central de la quatre voies, une chèvre fait de même, mais… calmement couchée sur la route, le dos confortablement a appuyé au trottoir… Inconscience ou fatalité ?
Après avoir profité de fantastiques perspectives sur l’Himalaya, car nous avions tous un hublot lors de notre dernier vol, nous survolons cette fois-ci le Brahmapoutre puis les Sundernans pour une escale à Calcutta et atterrir à Jaipur. Débarquer dans une ville de 7 millions d’habitants, qui plus est très touristique et bruyante, est un contraste fort par rapport à nos séjours bucoliques dans des lodges de campagne… Là, l’enchevêtrement routier et les embouteillages dépassent tout ce que nous avons vu jusqu’ici… Il faut ajouter les carrioles tirées par des dromadaires… La vieille ville prend par moment des accents de cour des miracles… Bien entendu, en ville, nous nous « urbanisons » et ce soir, l’hébergement nous ramène au temps des maharajas.
Départ de Jaipur, notre journée débute par un parcours de découverte des points forts architecturaux de la ville rose. Le palais des vents se présente sous son plus beau jour avec la lumière du matin. Puis, nous traversons toute une partie de la cité pour atteindre le fort d’Amber. En chemin, outre l’effervescence de la ville, nous assistons à l’arrivée des éléphants chargés de faire monter les touristes, qui se pressent déjà en nombre, au sommet de la colline sur laquelle est bâti le vénérable fort. Pour notre part, nous profitons de son reflet dans l’eau et de la vaste perspective qui s’offre d’en bas. Un vieil indien est en pleine partie de pêche : il nous fait une belle démonstration de pêche à l’épervier. Plus loin, avant de sortir de la ville, le Jah Mahal pris du bord du lac présente en contrejour ses arabesques.
La sortie de la ville est encore une fois dantesque… Puis nous « plongeons » dans la campagne du Rajasthan. À nouveau, l’architecture des villages est différente. L’aridité est plus perceptible. On moissonne les céréales arrivées à maturité. Au bord des routes se vendent des goyaves. Sur ces routes se croisent maintenant, en plus des moyens de transport déjà cités, des dromadaires hautains qui tirent des charrettes en bois et d’incroyables engins motorisés dont le moteur est… une pompe… Oui, oui, celles utilisées pour l’irrigation… Et ça marche, bruyamment certes, mais ça permet de transporter de très grosses charges… Enfin, c’est l’arrivée à Sawai Madhopur, ville près de laquelle est situé le parc national de Ranthambore.
Après le déjeuner, en route pour le mythique parc… L’entrée par le canyon d’accès ne dément pas la réputation du site. Qu’en sera-t-il de la présence des tigres en son sein et surtout de la facilité à les voir… C’est la question du jour. Notre premier safari laisse le suspense entier, car nous profitons davantage de la beauté du milieu que de l’intense présence du tigre…
Ce matin, second départ vers Ranthambore, la route nous emmène rapidement au coeur de l’action. Sur l’autre versant du canyon, un léopard est repéré… loin… Nous continuons après l’avoir plus deviné que vu. Un de nos 4X4 s’est vu attribuer le circuit 3, la nôtre le 1. Nous pénétrons sous des banyans géants et suivons un petit canyon, bientôt les empreintes fraîches d’un tigre adulte… Nous continuons notre exploration dans un écosystème complexe où se marient zones sèches, plans d’eau et escarpements. Nous faisons d’intéressantes observations ornithologiques et d’ongulés dans de très belles lumières. Mais, mais, mais, pendant ce temps-là, la chance fait un superbe cadeau à notre autre 4X4 : une mère et ses 3 jeunes… Non seulement ils les voient mais peuvent passer près d’une heure à pouvoir les observer. La petite famille s’adonne, en effet, largement aux joies du bain. L’occasion est extraordinaire de pouvoir faire ces séquences de jeux entre les jeunes, d’assister au bain, de les voir boire et se rafraîchir puis… se laisser tomber non loin des véhicules pour les regarder… La curiosité n’est pas unilatérale… Après ce moment intense, ils sont tous rentrés avec des étoiles dans les yeux…
Notre sortie de l’après-midi voient certains calmes et d’autres beaucoup plus fébriles… Ceux qui n’avaient pas vu la petite famille le matin partent sur la piste de la grande femelle et ses jeunes d’un an, le coeur battant. Cette partie du parc au pied du fort est une merveille de grands plans d’eau sur lesquels se mirent par endroits d’anciens temples et demeures…
Les magnifiques félins font bientôt une sortie au bord du lac mais, malheureusement, les conditions ne sont pas les mêmes que le matin… Tout le monde s’est passé le mot et c’est la « foire d’empoigne »… Mais tout le monde les a au moins vu…
Aujourd’hui, dernier safari et retour vers le monde urbain… Ce matin, nous « décrochons » le secteur 8 du parc de Ranthambore.
Nous démarrons au petit jour et traversons des fermettes et petits villages ruraux. La vie quotidienne reprend son cours. C’est le moment des ablutions, du thé chaud et des premiers échanges… On discute près du brasero. Certains sortent les buffles, d’autres les chèvres… Nous arrivons à l’entrée du parc… Le paysage est très différent des autres secteurs : c’est beaucoup plus vert. Sur ces hauteurs sur lesquelles se hissent nos 4X4, il a plu très récemment… D’abord, nous trouvons des traces de tigre.
Puis nous croisons un beau nilgaut ou « taureau bleu ». Cet ongulé à la taille conséquente possède un pelage gris souris bleuté, à la différence de sa femelle au pelage fauve soutenu. Un peu plus loin, nous découvrons deux chinkaras. Ces petites gazelles indiennes manquaient à notre palmarès… Nous finissons notre safari avec un stop pour une belle perspective cette fertile région du Rajasthan vue des hauteurs…
Nous laissons nos 4X4 pour prendre la route vers Agra et le célèbre Taj Mahal. Chemin faisant, nous nous arrêtons pour déjeuner à Bharatpur. Le Golbagh Palace où notre repas a lieu est un palais construit par un maharajah au tout début du XXe siècle puis transformé en hôtel. Les mets y sont raffinés et les jardins superbes.
Nous continuons notre route pour, après l’incroyable spectacle des routes dont on ne se lasse pas, arriver à Agra. Avant que Delhi devienne la capitale de l’Inde, aux XVIe et XVIIe siècles, Agra abritait la cour impériale moghole. Nous nous faufilons dans les rues où commerçants et clients s’activent pour arriver à la rivière Yamuna. Nous passons le grand pont fébrile pour arriver sur l’autre rive et profiter des derniers rayons du soleil et de son coucher face au… Taj Mahal. Ce jardin offre vraiment un cadre parfait pour une première approche du joyau…
Ce matin, le petit jour est dédié au génie architectural et le voile se lève sur tout un pan de la fabuleuse histoire indienne. Dans une lumière diaphane, le sublime mausolée se mire dans son bassin. C’est sûrement le plan d’eau le plus photographié du monde… Mais il se révèle irrésistible. Le mausolée et ses jardins conçus comme une représentation du paradis islamique présentent des proportions parfaites. Sa vision est toujours un choc esthétique… La magie fonctionne bien, même pour les récidivistes… Puis le fort rouge, construit par l’empereur Akbar entre 1565 et 1573, nous présente ses puissants remparts en grès rouge. Des macaques nous accueillent dès le monumental portail. Puis nous parcourons les palais du fort : harem, cachots, grand bassin en marbre, pavillons dorés, élégante salle en marbre surplombant la rivière Yamuna. C’est dans une tour que Shah Jahan, emprisonné par son fils a passé les deux dernières années de sa vie. Dans sa grande mansuétude, il lui laissa la vue sur le tombeau de sa belle : le Taj Mahal pour ligne d’horizon…
Notre dernière visite est réservée à une petite merveille : le mausolée d’Itimad-Ud-Daulah, un véritable « écrin de marbre ». Ce tombeau-jardin offre de multiples trésors : panneaux en marbre ajouré, marbre poli incrusté de pierres, stalactites peintes, niches ornées motifs floraux, bouquets, fruits… Et « cerise sur le gâteau » : vue sur la Yamuna…
À la sortie, quelques dernières scènes de rues : coiffeur, barbier, sculpteur… Et, c’est le départ pour Delhi.
Le spectacle d’une ville de 23 millions d’habitants en Inde, un samedi soir, vaut vraiment le déplacement… Dernière folie urbaine, dernier repas indien et c’est le vol de retour. Namaste !