Fabrice Capber
Guide Polaire
28 juin
2 juillet 2021
Fabrice Capber
Guide Polaire
Les glaciers blancs, la mer bleue et les volcans rougeoyants constituent autant de couleurs figées dans le drapeau de ce beau pays que nous allons découvrir.
Nous sommes ravis d’être enfin arrivés après tant de mois de privations en raison de cette terrible pandémie qui aura marqué les esprits. Le volcan nous a fait un premier clin d’œil au moment de l’atterrissage nous offrant son panache et ses champs de lave noire comme messages de bienvenue. Nous rencontrons notre guide Fabrice à la sortie de l’aéroport de Keflavik. Le parcours du combattant sanitaire n’est cependant pas encore terminé. Après un test PCR avant notre départ, il aura encore fallu subir ce supplice une deuxième fois en quelques jours. Les résultats sont tombés dans les heures suivantes, nous sommes négatifs et désormais tous libres d’entamer le séjour. Il faut bien comprendre que l’Islande est une île qui doit continuellement se protéger contre l’introduction de toute maladie humaine ou animale, et pas seulement la covid-19, une île qui garde le souvenir sombre d’épidémies de peste noire et de variole qui ont marqué son histoire millénaire. Pendant la route vers Reykjavik où se trouve notre hôtel, Fabrice nous avait donné un aperçu de ce qui nous attend au cours de ce séjour qui promet d’être dense.
La météo annonce un ciel couvert et de la pluie pour l’après-midi. Après que notre guide nous ait forcé à avaler une cuillère à café d’huile de foie de morue (indispensable en Islande pour son apport en vitamine D), nous partons au volcan. Nous n’avons pas beaucoup de route à parcourir car il se trouve que l’éruption se produit sur la péninsule de Reykjanes (qui signifie péninsule des fumées) non loin de l’aéroport de Keflavik. Le panache du volcan est également visible depuis la capitale islandaise par beau temps. C’est dans la vallée de Geldingadalur qu’une première coulée de lave a jailli le 19 mars après 800 ans de calme sur les flancs de la « montagne de la belle vallée » ou Fagradalsfjall. Avec 200 volcans actifs et une éruption tous les 4 à 5 ans, l’Islande est le « paradis des vulcanologues » selon les dires des célèbres vulcanologues alsaciens Maurice et Katia Krafft qui se rendaient régulièrement en ces terres incandescentes avant de rejoindre pour toujours un autre paradis il y a tout juste 30 ans. Les volcans sont dangereux, nous en tiendrons compte pendant notre séjour. Mais avant d’atteindre le site nous faisons plusieurs haltes en route. Tout d’abord sur les rives du lac Kleifarvatn, un lac d’origine naturelle de toute beauté.
Ce lac s’est partiellement vidé en 2000 suite à un tremblement de terre qui a ouvert des fissures dans lesquelles ses eaux se sont engouffrées. Plus loin nous découvrons la solfatare de Seltún, encore un paysage volcanique différent avec ces marmites de boues chaudes et ces fumerolles soufrées démontrant s’il en était encore besoin, la grande diversité de ce que le volcanisme peut nous offrir.
La variété des couleurs que nous observons correspond aux différents minéraux (soufre, gypse, hématite, silice, etc.) arrachés aux profondeurs de la terre et déposés en surface par les remontées de gaz et d’eaux chaudes. Enfin, nous approchons à pied de la zone éruptive par la vallée de Nátthagi. Quelle surprise ! Alors que la coulée n’avançait plus depuis 15 jours et semblait figée pour l’éternité, la voilà qui se réveille devant nous. Un spectacle unique. Elle aura avancé de 20 mètres le temps de notre présence sur le site. La température mesurée par des vulcanologues présents sur place indique 1104°C.
Nous ressentons cette forte chaleur même à 10 mètres du champ de lave qui embrase la végétation alentour. Le ciel est toujours bas, mais certains d’entre nous montent tout de même en direction de la colline en face du volcan en espérant que le vent souffle les nuages. Nos espoirs sont déçus, une brume tenace nous englobe et nous empêche de voir le cratère. Nous redescendons dans la vallée pour observer la coulée de lave et nous réchauffer. Nous restons cependant vigilants car si ce type d’éruptions ne paraît pas dangereux, les gaz produits le sont, eux. Des bénévoles et des rangers contrôlent régulièrement les émissions toxiques afin d’éloigner les badauds si besoin. Nous assistons ici au résultat d’une éruption fissurale de type rouge dite effusive. La lave fluide émane des profondeurs à partir de plusieurs fissures apparues successivement et mesurant plusieurs centaines de mètres de long. Nous observons la naissance d’un volcan, jour après jour des cônes de scories prennent forme, les vallées alentour se remplissent, après Geldingadalur et Meradalir, c’est au tour de Nátthagi.
On imagine facilement comment toute l’Islande est née grâce aux montées de magma provenant de la dorsale médio-atlantique et du point chaud à partir desquels ce jeune pays s’est formé il y a seulement 15 à 20 millions d’années. Être témoin de l’apparition de nouvelles terres est très émouvant. Le champ de lave incandescent qui a totalement envahi la vallée sous nos pieds est incroyable. C’est devant cette coulée que nous nous installons pour pique-niquer. Mais il est déjà temps de partir. En route, nous faisons un arrêt à Brimketill pour y admirer des piscines naturelles formées dans une falaise de lave par les affronts répétés de l’océan.
Puis, nous partons en direction du magnifique Lagon Bleu afin de profiter des spectaculaires eaux chaudes de ce lac artificiel dont les eaux proviennent de la centrale géothermique de Svartsengi. Ce sont des cyanobactéries, mais aussi les cristaux de silicate présents en abondance qui donnent cette couleur incroyable à ces eaux par le miracle des lois de l’optique qui réfléchissent la lumière du soleil dans ces longueurs d’onde bleutées. Nous profitons de ce début de soirée avec une collation et une trempette aux allures de cure thermale. Après ce bain de jouvence, nous dînons au restaurant Viking au style scandinave où nous dégustons de l’agneau local, un plat très islandais.
Nous partons découvrir d’autres merveilles de la nature que l’Islande sait offrir, le tout teinté d’un peu d’histoire.
Nous débutons la journée par un voyage au centre de la Terre ! En effet, nous visitons le tunnel de lave de Raufarhólshellir afin de parfaire nos connaissances de vulcanologues en herbe. Ce tunnel aux roches colorées
de 1400 mètres de long est un plaisir pour les yeux et certainement un paradis pour le géologue averti.
En tout cas, nous profitons d’une balade troglodyte peu commune. Nous apprenons avec étonnement qu’une
« bactérie des grottes » comme la dénomme les scientifiques islandais, vit et se nourrit de cette roche volcanique.
Nous nous dirigeons ensuite vers un secteur touristique dénommé le « Cercle d’Or » où nous visitons respectivement trois sites géologiques incontournables d’Islande. Nous sommes en terre volcanique, et une autre manifestation spectaculaire du volcanisme est constituée par les champs de geysers, comme celui de Geysir. Les geysers naissent et meurent, c’est le cas du geyser Geysir qui a donné son nom au site et au phénomène lui-même avant de s’éteindre en 2000 suite à un tremblement de terre. C’est le geyser Strokkur qui se donne en spectacle désormais. Les explosions de bulles de gaz géantes bleutées projetant dans les airs des jets d’eaux chaudes à 30 mètres de haut sont saisissantes. Encore une belle image du volcanisme islandais en incessante mutation.
Nous continuons notre périple vers les chutes d’eau de Gullfoss, deux magnifiques chutes de 30 et 70 mètres de haut offrant un spectacle qui n’est pas sans rappeler d’autres splendeurs de la nature telles les chutes du
Niagara ou les chutes Victoria avec lesquelles elles rivalisent. On ne se lasse pas de regarder s’écouler ces flots continuels dans cet environnement sauvage d’autant plus que les pluies abondantes tombées depuis deux jours ont gonflé la cascade.
Nous nous rendons ensuite sur le site de Thingvellir. C’est ici que la première assemblée législative islandaise dénommée Althing s’est réunie en l’an 930, soit 56 ans à peine après la colonisation pérenne de l’île par le viking Ingólfur Arnarson. Le premier parlement du monde venait de naître ! Tous les mois de juin la session du parlement était ouverte, les participants venaient de tout le pays pour y assister. Mais l’Islande n’en n’est pas restée là pour les premières. C’est dans ce pays ou la question du genre n’existe pour ainsi dire pas que Vigdis Finnbogadottir fut la première femme au monde à être élue et réélue présidente quatre fois d’affilé en 1980. L’Islande est sans conteste un pays avant- gardiste ! Mais revenons à Thingvellir qui a été choisi comme siège du parlement en raison de sa géologie offrant un piédestal naturel à l’orateur qui depuis une plateforme rocheuse (le rocher de la loi) pouvait dominer l’assemblée et se faire entendre de tous. Mais un autre aspect géologique de premier ordre est observable sur le site : le rift créé par l’écartement de la plaque nord-américaine et de la plaque eurasienne de part et d’autre de la dorsale médio-atlantique. Nous marchons dans les fissures géantes provoquées par l’éloignement de ces deux plaques tectoniques, une balade unique au monde ! Devant nous s’étalent les plaines et le lac de Thingvellir, le plus grand lac naturel du pays alimenté par les eaux de fonte du glacier Langjökull. Un paysage époustouflant. Pour finir cette journée, c’est dans le joli village d’Eyrarbakki en bord de mer que nous dînons juste à côté d’une charmante petite église autour de langoustines locales excellement cuisinées par le restaurant Rauda Húsid (la maison rouge).
Ce matin, certains ont choisi de faire une escapade en mer à la recherche de macareux moines et de baleines. Le macareux moine est l’une des quatre espèces de macareux reconnues mais la seule présente en Islande qui héberge la moitié de la population mondiale, soit environ trois millions d’individus. Quant aux cétacés, plusieurs espèces de baleines sont visibles dans les eaux aux portes de Reykjavik. La baleine de Minke (ou petit rorqual), la baleine à bosse (ou mégaptère), mais aussi le rorqual commun, le rorqual boréal ou la baleine bleue si la chance est au rendez-vous. Aujourd’hui, ce sont des baleines à bosses qui ont fait le show, accompagnée de macareux et de quelques dauphins à bec blanc. L’Islande est l’un des trois derniers pays à chasser la baleine avec la Norvège et le Japon, mais la bonne nouvelle est que cela devient de moins en moins populaire et que l’observation touristique est en train de sauver les cétacés car il est tout simplement plus intéressant économiquement de voir des baleines évoluer dans leur environnement naturel que découpées en morceaux dans une assiette de restaurant ! Il est d’ailleurs étrange de voir que les baleiniers et les bateaux d’observation des baleines sont amarrés face à face dans le port de Reykjavik. Des vols en hélicoptère était également prévus mais ils ont été annulés en raison du mauvais temps.
Cela a permis de profiter de temps libre en ville pour visiter des musées tels le musée des arts, musée des sagas et le musée phallologique unique en son genre. Après le déjeuner en ville, nous partons au volcan une seconde fois. Nous randonnons sur le sommet accessible le plus proche afin d’avoir le meilleur point de vue sur le cratère. Cette fois-ci le vent a chassé la brume et petit à petit le cratère se dévoile sous nos yeux au fur et à mesure que nous marchons. Nous entendons aussi le son émis par ce cratère bouillonnant. La plupart d’entre nous a du mal à quitter le site comme hypnotisé par ce spectacle que peu de gens ont la chance d’observer, et par les paysages grandioses tout autour de nous. Mais il est temps de redescendre. Nous prenons notre dernier repas en pique-niquant assis à quelques mètres de la coulée qui s’est désormais à nouveau figée depuis notre dernière visite 48h plus tôt.
C’est un type de volcan particulier qui prend forme devant nous, un volcan bouclier formé par une lave effusive. Cette immense coulée de lave qui semble endormie ne l’est pas vraiment, nous le savons désormais. Pendant notre balade, certains avaient choisi de continuer leur journée dans la capitale Reykjavik, littéralement « baie des fumées ». Il s’agit de la capitale la plus septentrionale du monde. Avec son agglomération, Reykjavik regroupe les deux tiers des 360 000 habitants du pays. Cette ville agréable se situe précisément à l’endroit où s’installèrent les premiers colonisateurs guidés par Ingólfur Arnarson en l’an 874 bien qu’elle n’ait été réellement fondée qu’en 1786. L’édifice le plus haut de la ville, visible de très loin avec ses 75 mètres, est l’impressionnante église Hallgrímskirkja dont l’architecture est inspirée des orgues… basaltiques bien sûr.
Il est déjà temps de se dire au revoir. Ce court voyage était néanmoins riche en émotions et toute la panoplie de la météo islandaise nous a été proposée ! C’est avec l’envie de revenir bientôt que nous quittons l’hôtel tôt le matin et rejoignons l’aéroport de Keflavik.
> Réservez votre circuit en Islande !
Suivez nos voyages en cours, grâce aux carnets de voyages rédigés par nos guides.
Messages
Il n'y a pas de messages pour le moment
N'hésitez pas à leur en laisser un !