Fabrice Capber
Guide Polaire
16 juin
20 juin 2021
Fabrice Capber
Guide Polaire
Qui n’a pas rêvé un jour de voyager en Islande ? Le feu, la glace, la mer sont autant de couleurs figées dans le drapeau de ce beau pays. Nous sommes ravis d’être arrivés après tant de mois de privations en raison de cette terrible pandémie qui aura durablement changé nos vies. Le volcan nous a fait un premier clin d’œil au moment de l’atterrissage nous offrant ses volutes blanchâtres à tribord. Le parcourt du combattant sanitaire n’est cependant pas encore terminé. Après un test PCR au départ de France, il aura encore fallu se faire trifouiller les narines – et la bouche – une énième fois à l’aéroport de Keflavik. Le résultat de ce dernier test PCR nous ouvrira enfin les portes du pays. Il faut bien comprendre que l’Islande est une île qui doit continuellement se protéger contre l’introduction de toute maladie humaine ou animale, et pas seulement la Covid-19, une île qui garde le souvenir sombre d’épidémies de peste noire et de variole qui ont marqué son histoire millénaire. Nous rencontrons notre guide local, Nathanaël qui chemin faisant vers Reykjavik nous donne un aperçu de ce qui nous attend au cours de ce séjour qui promet de nous faire vivre du très froid et du très chaud. Les résultats des tests PCR sont tombés dans la soirée, nous sommes négatifs et désormais tous libres d’entamer le séjour.
C’est le jour J, nous partons au volcan ! Mais n’oublions pas que c’est également la fête nationale islandaise, le jour commémorant l’indépendance du pays par rapport au Danemark, une nouvelle liberté acquise en 1944 très attendue par les Islandais à l’époque. Nous n’avons pas beaucoup de route à parcourir car il se trouve que l’éruption se produit sur la péninsule de Reykjanes, où se situe l’aéroport de Keflavik. C’est plus précisément dans la vallée de Geldingadalur qu’une première coulée de lave a jailli le 19 mars sur les flancs de la « montagne de la belle vallée », ou Fagradalsfjall, après 800 ans de sommeil. Avec 200 volcans actifs et une éruption tous les 4 à 5 ans, l’Islande est le « paradis des vulcanologues » selon les dires des célèbres vulcanologues alsaciens Maurice et Katia Krafft qui se rendaient régulièrement en ces terres incandescentes avant de rejoindre pour toujours un autre paradis un triste jour de juin 1991.
Les volcans sont dangereux, nous en tiendrons compte pendant notre séjour. Mais avant d’atteindre le site nous faisons plusieurs haltes en route. Tout d’abord sur les rives du lac Kleifarvatn, un lac d’origine naturelle aux plages de sable noir dans un environnement basaltique typique. Plus loin nous découvrons la solfatare de Seltún, encore un paysage volcanique différent avec ces fumerolles soufrées démontrant s’il en était encore besoin, la grande diversité de ce que le volcanisme peut nous offrir. Enfin, le moment tant attendu approche lorsque nous approchons de la zone éruptive.
La météo est plutôt clémente, un ciel couvert mais pas de pluie ni de vent et une excellente visibilité horizontale. C’est à pied que nous nous rendons au plus près du spectacle. Tout se mérite, il n’est pas facile de marcher dans un champ de lave, puis de gravir une longue pente à l’aide d’une corde spécialement installée tellement la montée est raide. Mais la motivation est belle et bien là. Nous assistons émerveillés à une éruption de type rouge dite effusive. Il s’agit plus précisément d’une éruption fissurale, de la lave fluide émane des profondeurs à partir de plusieurs fissures apparues successivement et mesurant plusieurs centaines de mètres de long. Nous observons la naissance d’un volcan, jour après jour des cônes de scories prennent forme.
On imagine facilement comment toute l’Islande a été formée à partir de montées de magma provenant de la dorsale médio- atlantique et du point chaud à partir desquels ce jeune pays – à l’échelle géologique – a été formé voilà 15 millions d’années. Être témoin de la formation de nouvelles terres est très émouvant. Le champ de lave qui a totalement envahi la vallée sous nos pieds est incroyable. Nous avons le privilège de pique-niquer devant cette scène peu banale. Tout le monde n’a pas réussi l’ascension, mais les deux personnes restées en bas ont pu par un autre sentier accéder à une autre vallée et s’approcher de la langue de lave rougeoyante en progression permanente. Mais il est temps de partir enivrés de tant d’émotions après un tel spectacle.
En route, nous faisons un arrêt à Brimketill pour y admirer des piscines naturelles formées dans une falaise de lave par les affronts répétés de l’océan. Puis, nous partons en direction du lagon bleu afin de profiter des spectaculaires eaux chaudes de ce lac artificielle issu de la géothermie, le tout sous l’œil du volcan et de son panache de fumée toujours visibles au loin. Ce sont des cyanobactéries, mais aussi les cristaux de silicate présents en abondance qui donnent cette couleur incroyable à ces eaux par le miracle des lois de l’optique qui réfléchissent la lumière du soleil dans ces longueurs d’onde bleutées. Mais nous sommes en vacances pas en cours de sciences, alors il est temps de profiter de ce début de soirée avec une collation et une trempette aux allures de cure thermale salvatrice pour nos muscles après notre ascension. Nous nous sommes véritablement régalés au cours de cette journée somptueuse et nous nous sommes encore plus régalés avec le délicieux dîner servi au restaurant Viking d’une typicité sans égal.
A peine remis de nos émotions de la veille, nous partons découvrir d’autres merveilles de la nature que l’Islande peut offrir, le tout teinté d’un peu d’histoire. Cette journée commence par la visite du tunnel de lave de Raufarhólshellir afin de parfaire nos connaissances de vulcanologues en herbe. Ce tunnel bariolés de plus d’un kilomètre de long est un plaisir pour les yeux et certainement un paradis pour le géologue averti. En tout cas, nous profitons d’une balade troglodyte peu commune. Nous nous dirigeons ensuite vers un secteur touristique dénommé le « cercle d’or » où nous visitons respectivement le champ géothermique de Geysir, les chutes d’eau de Gullfoss et « les plaines du parlement » ou Thingvellir.
Nous sommes en terre volcanique, et une autre manifestation spectaculaire du volcanisme est constituée par les champs de geysers, comme celui de Geysir. Les geysers naissent et meurent, c’est le cas du geyser Geysir qui a donné son nom au site mais qui n’existe plus. C’est Strokkur que nous admirons. Le spectacle de ces explosions de bulles de gaz géantes projetant dans les airs des jets d’eaux bouillantes à 30 m de haut est saisissant. Encore une belle image du volcanisme islandais en incessante
mutation. Nous continuons notre périple vers les chutes d’eau de Gullfoss, deux magnifiques chutes de 30 et 70 mètres de haut offrant un spectacle qui n’est pas sans rappeler d’autres splendeurs de la nature telles les chutes du Niagara ou les chutes Victoria avec lesquelles elles rivalisent. On ne se lasse pas de regarder s’écouler ces flots continuels dans cet environnement sauvage, mais il faut nous rendre désormais sur le site de Thingvellir.
C’est ici que la première dénommée Althing s’est réunie pour la première fois en l’an 930, soit 56 ans à peine après la colonisation pérenne de l’île par le viking Ingólfur Arnarson. Le premier parlement du monde venait de naître ! Mais l’Islande n’en n’est pas restée là pour les premières. C’est dans ce pays ou la question du genre n’existe pour ainsi dire pas que Vigdis Finnbogadottir fut la première femme au monde à être élue présidente en 1980. L’Islande est sans conteste un pays avant-gardiste ! Mais revenons à Thingvellir qui a été choisi comme siège du parlement en raison de sa géologie offrant un piédestal naturel à l’orateur qui depuis une plateforme rocheuse (le rocher de la loi) pouvait dominer l’assemblée et se faire entendre de tous. Mais un autre aspect géologique de premier ordre est observable sur le site : l’écartement de la plaque nord-américaine et de la plaque eurasienne de part et d’autre de la dorsale médio-atlantique. Nous marchons dans les fissures géantes provoquées par l’éloignement de ces deux plaques tectoniques, une balade unique au monde ! Devant nous s’étalent les plaines et le lac de Thingvellir, le plus grand lac naturel du pays alimenté par les eaux de fonte des glaciers. Un paysage époustouflant. Pour finir cette journée, c’est dans le joli village d’Eyrarbakki en bord de mer sous un ciel bleu que nous dînons autour d’excellentes langoustines locales admirablement cuisinées.
Dans la matinée, certains ont choisi de faire une escapade en mer à la recherche de macareux moines, alors que d’autres ont opté pour une option plus aérienne pour revoir le volcan : l’hélicoptère. Le macareux moine est l’une des quatre espèces de macareux reconnues mais la seule présente en Islande qui héberge la moitié de la population mondiale, soit environ trois millions d’individus. Pour les observer, nous sommes donc au bon endroit.
Quant aux vols en hélicoptère, ils ont permis de véritablement se rendre compte de la puissance du volcan, et d’observer le magma transformé en lave jaillir et littéralement remplir toute la vallée de Geldingadalur. Les rivières de lave sont bien visibles. L’après-midi nous retournons au volcan Fagradalsfjall pour une deuxième journée d’exploration du site sous un ciel radieux. On ne se lasse pas d’admirer un tel phénomène naturel. C’est un type de volcan particulier qui prend forme devant nous, un volcan bouclier formé par une lave effusive. C’est en direction de cette coulée de lave que nous nous rendons à pied. Nous observons à bonne distance le phénomène avec un mélange de crainte et de fascination. Cette immense coulée de lave est impressionnante. Nous prenons notre dernier repas en pique-niquant assis à quelques mètres de la coulée qui nous réchauffe.
Il est déjà temps de se dire au revoir. Ce court voyage n’en était pas moins époustouflant, il n’est pas donné à tout un chacun d’assister dans sa vie à la formation d’un nouveau volcan. C’est avec l’envie de revenir bientôt que nous quittons l’hôtel tôt le matin et rejoignons l’aéroport de Keflavik.
> Réservez votre circuit en Islande !
Suivez nos voyages en cours, grâce aux carnets de voyages rédigés par nos guides.
Messages
Il n'y a pas de messages pour le moment
N'hésitez pas à leur en laisser un !