Jean Robert
Photographe et Journaliste
17 septembre
28 septembre 2019
Du 17 au 28 septembre 2019, à bord de l'Amazon Dream
Jean Robert
Photographe et Journaliste
Photos d’illustrations, prises lors de précédents circuits. Les photos seront mises à disposition lorsque le voyage sera terminé.
Bienvenue à Belem, à 1,5° au sud de l’Équateur dans la région nord du Brésil, dans l’État du Para. Partis de Genève, Paris ou en provenance de Récife, nous sommes arrivés dans la nuit dans cette ville de 2 millions d’habitants située dans le delta de l’Amazone sur le Rio Guama.
On se retrouve pour le petit déjeuner dans le beau patio de notre hôtel Quinta da Pedras, un ancien couvent situé dans la vieille ville.
Certains d’entre nous optent pour une balade sur le port, le marché et les docks de Bélem, d’autres optent pour un premier contact avec la nature amazonienne en se baladant dans le parc voisin Mangal das Garças, littéralement « la mangrove des aigrettes ». Dans le soleil du matin, les grandes aigrettes sont nombreuses à se pavaner devant les bassins du parc ainsi que des ibis rouges, des flamants roses ou des vanneaux taro perchés sur leurs longues pattes. Des iguanes de toute taille se régalent d’un plat de carottes râpées sur la pelouse. La plupart de ces animaux ont été confisqués et saisis par les autorités, car issus du commerce illégal de faune sauvage.
Depuis le sommet du phare, on a une vue panoramique sur la ville, son port baigné d’un côté par le Rio Guama et de l’autre par la baie de Guajara.
Vers le Rio, un ponton au bois domine une étendue sauvage d’aningas aussi appelé moukou moukou en Guyane voisine. D’étranges plantes de plus de trois mètres de haut aux fleurs blanches et aux feuilles cirées ressemblant à celles du philodendron. En fin d’après-midi, nous prenons l’avion pour rejoindre Santarem en survolant l’immense delta de l’Amazone. Un petit transfert en bus et nous embarquons enfin à bord de l’Amazon Dream pour une caïpirhina d’accueil bien méritée !
Au lever du soleil, l’Amazon Dream lève l’ancre pour aller visiter le lac Maica plus en aval sur l’Amazone. Au point de rencontre entre le géant Amazone et le Rio Tapajos, on assiste à un spectacle étonnant. Sur plusieurs kilomètres, les eaux bleues du Tapajos côtoient les eaux limoneuses de l’Amazone sans se mêler. Un phénomène dû à une différence importante de densité, d’acidité et de vitesse d’écoulement entre les deux fleuves. Depuis le pont supérieur, on admire les jeux des dauphins roses (botos) et des dauphins gris ou tucuxis. Des cétacés étonnants qui nous accompagneront tout le long du voyage. Nous montons dans les annexes pour pénétrer dans les vastes marécages du lac Maica. C’est un écosystème complexe de forêts inondées plusieurs mois par an. On l’appelle ici les varzeas. Notre pilote cherche du regard, de grands arbres aux troncs blancs le cécropia ou imbauba du Brésil. C’est un bel arbre, mais c’est surtout parce que les paresseux sont friands de ses feuilles gorgées d’eau qu’il nous intéresse ! Bingo ! À dix mètres au-dessus de nos têtes, on repère notre premier paresseux. On a de la chance, il nous observe nonchalamment avant de monter de quelques mètres dans un espace dénué de feuilles. Idéal pour les photographes !
À la jumelle, on voit bien sa patte avec 3 griffes qui lui permettent de se maintenir sur le tronc. C’est un paresseux à trois doigts plus connu des cruciverbistes sous le nom d’aï. Les ornithologues sont aussi au paradis pour cette première sortie. De petits perroquets verts (touis été, touis à ailes variées) nous survolent en nous invectivant. Des hirondelles à gorge rousse, des canaris et des sicles voletant de branche en branche. Sur les rives engazonnées, les hérons striés, les aigrettes pique-boeuf, les aigrettes neigeuses et les grandes aigrettes cherchent leur pitance. Les martins-pêcheurs à ventre roux, les plus gros de l’Amazonie, sont nombreux et filent comme un éclair se percher sur les blanches basses. Perchés dans les grands arbres, les urubus à tête noire — les vautours locaux, les milans des marais et les buses à tête blanche nous observent avec intérêt. Mais l’Amazone c’est aussi les habitants qui peuplent ses rives ou Caboclos, ces descendants du métissage des Portugais et d’Indiens. Les canaux que l’on parcourt sont comme des livres ouverts sur leur mode de vie. La maison sur pilotis avec les hamacs et les filets qui séchent, les longs pontons de bois qui témoignent de la différence de niveau d’eau entre saison sèche et saison des pluies.
Des cochons et des poules sous la maison. Le bateau amarré au bout du ponton. La vie de la majorité des Caboclos est déterminée par le niveau du fleuve. Pendant les hautes eaux, ou l’Amazone prend ses aises sur des kilomètres, ils vivent sur la terra firma jamais inondée… Dès que la décrue s’amorce, on transporte tout par bateau vers les maisons sur pilotis au bord des rois et des iguarapés. Le bétail — quant à lui — est amené sur des barges spéciales. On navigue par le canal d’Ituqui pour rejoindre l’Amazone et s’amarrer à l’entrée du Rio Curua Una. Pendant la navigation, une petite présentation de l’Amazonie est organisée dans la salle du restaurant. En fin d’après-midi, on embarque en annexe pour la visite du village de Pacoval. Le chef de cette petite ville de 1300 habitants nous attend sur le débarcadère. Il nous explique que sa communauté, les Quilombolas, descend des esclaves africains réfugiés au 18e siècle en Amazonie. Leurs principales ressources proviennent de la culture des bananes pacoval qu’ils avaient emportées dans leur fuite. Balade au coucher du soleil dans les rues paisibles plantées de fleurs et d’arbres fruitiers. Une sérénité toute tropicale !
Petit-déjeuner à 5h30 pour un départ en navettes à 6h. Ici, au coeur de l’Amazonie, mieux vaut se lever pour découvrir la vie des purros et canaux qui forment un dédale aquatique le long de l’Amazone. Le soleil n’est pas encore levé, mais les jacanas noirs et des vanneaux téros arpentent déjà les rives à la recherche d’insectes et de petites grenouilles, juchés sur leurs longues pattes. Un courlan brun que l’on peut confondre de loin avec un ibis s’envole furtivement suivi par trois dendrocygnes à ventre noir. Plus loquaces, un beau couple d’ibis mandore (bicolores) se chamaillent à la pointe d’un arbre. Imperturbable, un beau balbuzard pêcheur passe au-dessus de nos têtes avec un poisson encore frétillant dans ses serres. Sur les buissons déjà éclairés par le soleil levant, des iguanes engourdis se réchauffent après une nuit fraîche pour eux (26 degrés Celsius au plus bas.).
L’astre solaire se lève très rapidement si près de l’Équateur et les photographes ont peu de temps pour profiter de la lumière qui sublime les rives du Curua Una. Au détour d’un méandre, on tombe sur un troupeau de buffles d’eau dont on ne distingue que les cornes et les naseaux soufflants. Ils sont suivis par un « berger » en pirogue qui les guide vers ses pâturages à peine émergés. Sur les rives, les habitants se lavent, les enfants attendent le bateau scolaire qui les mènera à l’école, des pirogues reviennent de la pêche, des agriculteurs s’activent dans les plantations de banane. Une vie laborieuse et simple. On s’enfonce dans une zone plus sauvage. Le canal devient étroit et on pénètre dans une étrange forêt de moucou coucou ou moko moko. Ces grandes tiges aquatiques de près de 4 m de haut sont ornées à leurs cimes de grandes feuilles à cuticule épaisse et cireuse. De grandes fleurs blanches en tube ornent certains plants. Les botanistes se sont aperçus que la fleur produisait de la chaleur la nuit afin d’attirer ses insectes pollinisateurs (en particulier une espèce de scarabée). L’inflorescence peut atteindre les 45°C, un bel exemple de thermogenèse. En traversant cette forêt aquatique, sombre et serrée, on imagine aisément un caïman noir, impassible entre deux troncs, en train de guetter sa proie. Deux kamichis cornus s’envolent pesamment. Ces oiseaux de la taille d’un dindon ont un cri rauque et une crête du plus bel effet.
On revient sur le Curua Una pour une partie de pêche aux piranhas. La technique est simple, une gaule, 3 m de fil, un hameçon et un morceau de viande suffisent. Tapez l’eau une ou deux fois, laissez l’hameçon immergé et attendez quelques minutes. Le piranha est vorace et il faut le remonter d’un coup une fois qu’il a mordu. Les touches s’enchainent et Valérie est notre championne avec plusieurs captures.
Vu de près, les dents du piranha, coupantes comme des poignards sont impressionnantes. Mais sur la cinquantaine d’espèces de piranhas recensées, à peine 5 sont carnivores. On relâche les poissons capturés et l’on rejoint l’Amazon Dream. On remonte l’Amazone. La remontée est plus lente avec un courant d’environ 6-8 km/h. Assis sur le pont supérieur, on regarde les berges défiler en essayant de photographier les dauphins roses qui émergent toujours là ou l’on ne les attend pas ! On remonte vers le nord pour venir accoster à l’embouchure de l’île de Tapara, notre abri pour la nuit.
Départ à 6h15 au lever du jour. À l’entrée du chenal qui traverse l’isthme d’ouest en est jusqu’au Lago Monte Allegre, on croise un couple en pirogue en train de pêcher à l’épervier. À l’avant de son embarcation, le vieil homme ramène de façon très précise son filet sur son bras avant de le lancer avec art devant lui. Des écailles brillent quand il remonte son filet : quelques petits aracus sans doute. À bord des annexes, les photographes essaient de saisir l’instant où l’épervier se déploie au-dessus de la surface de l’eau.
La pêche à l’épervier est pratiquée en bord de rives où les poissons prédateurs guettent leurs proies s’abritant dans les racines des plantes des berges. Le pêcheur – comme tous les Cabocles rencontrés dans cette région – joue le jeu de la photo avec plaisir ! On repart le long du canal. On dérange un héron cocoï posté en factionnaire au bord de l’eau. Un dauphin rose trouble l’eau paisible d’un souffle d’air expulsé comme un discret éternuement. Nous nous engageons dans un tout petit canal sous le regard étonné d’un honoré rayé. Dix mètres plus loin, un caïman jacaré prend le soleil sur la berge. Cette espèce endémique à l’Amérique du Sud est assez craintive et ne dépasse pas la taille de 2,5 m (queue comprise). Rien à voir avec le caïman noir, redouté des habitants du fleuve, dangereux avec sa puissance et sa taille qui peut atteindre les cinq mètres. Notre petit caïman, quant à lui, se laisse observer et photographier à moins d’un mètre ! Retour au bateau par le même canal. Les berges sont plantées de manioc, bananiers, papayers… Dans les buissons, des iguanes se chauffent au soleil après une nuit plus fraîche (à peine 25 °C).
L’Amazon Dream met le cap sur Santarem. Arrêt technique pour refaire le plein de provisions et de carburant. Nous sommes ancrés face au gigantesque complexe de transbordement de l’entreprise américaine Cargill. Plus de 7,5 millions de tonnes de soja et maïs transgéniques issus du Mato Grosso transitent par ce site avant d’être chargées sur des cargos à destination de la Chine et des États-Unis. 95 % du tonnage est transporté en camion du Mato Grosso jusqu’à Porto Velho ou Miritituba et amené en barges jusqu’à Santarem. Le reste arrive en camion directement au terminal de chargement. L’escale nous permet de faire une présentation générale sur l’Amazonie que nous découvrons depuis quelques jours ainsi que la projection de l’excellente émission d’Arte Le Dessous des Cartes, consacrée à l’Amazonie. C’est sans regret que nous larguons les amarres pour rejoindre l’embouchure du Canal de Jari. Avec une arrivée somptueuse au coucher du soleil saluée par les dauphins gris à la nageoire triangulaire ou tucuxis et les grands dauphins roses ou botos. Après le diner, sortie nocturne à la recherche des caïmans. Au spot, on recherche les lumières des yeux dans la nuit. On verra 4 caïmans jacaré assez petits, mais toujours pas de caïman noir.
Nous sommes désormais rodés pour les excursions du matin ! Ce qui nous permet d’être sur l’eau pour le lever de soleil que les photographes essayent de cadrer entre les piliers d’une maison sur pilotis installé sur un isthme étroit. Des enclos abritent des troupeaux de buffles et de zébus qui attendent avec impatience la décrue pour pâturer librement sur les terres émergées. Ce matin, nous avons rendez-vous avec Rosa-Angela. Il y a sept ans, cette femme d’une cinquantaine d’années a demandé au gouvernement le droit de s’installer sur 500 m de littoral pour créer une réserve de faune. Abritée sous les pilotis de sa maison, elle nous raconte, en nous faisant goûter des noix de sapucaia fraîches, comment un gigantesque caïman noir avait trouvé refuge sous son plancher en plein coeur de la saison des pluies !
Aujourd’hui, c’est à pied sec et 4 mètres plus bas que sa maison que nous partons à la découverte de sa petite réserve de faune sauvage privée. Dix mètres plus loin, elle nous montre du doigt un étrange oiseau grisâtre immobile comme une statue perché dans la fourche d’un énorme noyer. C’est un grand ibijau, un étrange oiseau de nuit, cousin des engoulevents, il dort profondément, exactement de la même couleur que la branche sur laquelle il a trouvé refuge. Un peu plus loin, on observe une femelle paresseux et son petit qu’elle serre sur son ventre. Le petit lève la tête et nous regarde avec curiosité. Sa mère nous observe à son tour et fait tourner sa tête à plus de 180° (elle peut en fait la tourner à 270°) et décide de se cacher dans le feuillage en avançant lentement ses pieds à trois doigts équipés de longues griffes crochetés dans l’écorce. Puis c’est au tour d’un grand-duc d’Amérique, juché sur le faite d’un arbre de plus de 30 mètres de haut d’être la star du matin. À force de regarder à la jumelle ou dans l’objectif d’autres paresseux disséminés autour de la maison de Rosa Angela, nous sommes vite à la limite du torticolis. En bord de propriété, nous voyons le terrain débroussaillé par le bétail de ses voisins éleveurs. En à peine sept ans, la propriété de Rosa est revenue à l’état sauvage avec une végétation arbustive déjà bien développée et surtout une faune déjà bien présente. Comme pour nous conforter dans cette idée, une bande de saïmiris, ou singes écureuil vient nous rendre visite. Curieux, vifs et insouciants, rigolos comme tout avec leurs yeux malicieux cerclés de blanc.
Après cette visite riche en découvertes, une annexe rentre au bateau alors que l’autre repart le long du canal du Jari. À l’ombre d’un arbre, on distingue une longue silhouette dans l’herbe. Un serpent, un jararaca venimeux, ou vipère brésilienne de près de deux mètres de long. On a quelques secondes pour l’observer avant qu’il ne disparaisse rapidement dans les broussailles. Un peu plus loin, on s’arrête avec Ruthe dans une ferme pour acheter du fromage et du lait de bufflonne. Une belle rencontre avec cette famille installée sur les bords du canal depuis plus de vingt ans. L’Amazon Dream reprend sa navigation pour rejoindre la jonction entre le canal de Jari, le fleuve Tapajos et le fleuve Arapuins. L’équipage manoeuvre le navire pour échouer sa proue dans le sable fin d’un blanc immaculé de la magnifique anse d’Urucurea. Un endroit idyllique pour se baigner dans une eau qui doit friser les 28°C. Et l’on comprend pourquoi le Rio Tapajos est aussi appelé les Caraïbes de l’Amazonie ! Sortie au coucher de soleil et retour de nuit pour découvrir que l’équipage nous a fait une surprise. Une soirée barbecue installée sur la plage nous attend !
Ce matin, c’est presque grasse matinée avec un petit déjeuner à 6h30 et une baignade pour les plus courageux. Sur la plage, nous sommes accueillis par Juvanao qui va nous guider dans la forêt jusqu’à la communauté d’Urucurea. Après un début de croisière sur l’Amazone, c’est notre premier vrai contact avec la forêt primaire de « terra firma ». Dans les grands arbres, des saïmiris nous suivent du regard. Un peu plus loin, alerté par des grognements, on aperçoit les ombres fugitives de singes hurleurs. Et ce n’est pas fini ! Notre guide repère un singe un peu plus petit appelé localement zog zog. On ne voit qu’un éclair noir et blanc. C’est une sous espèce endémique du singe capucin.
Arrivés à l’entrée du village, nous allons faire une visite à l’école qui accueille près de 80 élèves du primaire. Sous le hall de la cour centrale, les enfants chantent en coeur pour notre passage. C’est le moment choisi par Marcel et Françoise, nos deux sympathiques passagers suisses, pour sortir leurs cors des Alpes pliables (en carbone) et de souffler dans leurs instruments de plus de 2,5 m de long. Les enfants sont captivés et nous aussi ! De tels instruments ne sont pas très courants en Amazonie ! À tour de rôle, les enfants essayent de tirer un son mélodieux, des cors, ce qui n‘est pas un exercice facile ! Nous allons ensuite voir la coopérative de vannerie du village. Dans la boutique sommaire, on peut acheter des paniers, des dessous de plats et des objets tressés et décorés avec soin. Juchées sur de petits tabourets, quatre femmes sont en train de travailler et nous expliquent comment elles utilisent les techniques anciennes de teinture et de traitement du feuillage de palmiers avec une serpette fixée à un long bâton, il faut d’abord couper la palme du palmier Tucuma hérissé d’épines. Puis séparer la fibre de la nervure, la plier et la faire sécher deux jours. Les fibres sont ensuite teintes en les faisant chauffer dans des marmites avec des pigments naturels. Le Curcumin donne le jaune orangé, le Genipapo un violet tirant vers le noir, le roucou ou urucum une teinte rouge pétard.
Les objets sont ensuite vendus sur place par la coopérative ou dans les boutiques de Santarem. Nous reprenons notre navigation pour traverser le Rio Tapajos qui prend des allures de mer intérieure (plus de 15 km de large) en passant devant les plages d’Alter de Chao pour rejoindre Maguari, 30 miles plus au sud. Dans l’après-midi, on se retrouve sur le pont supérieur ouvert du bateau pour une conférence sur l’Amazonie et la science, l’occasion d’aborder les dernières recherches en cours comme la responsabilité des arbres pour déclencher leur propre saison des pluies, les fleuves aériens qui seraient produits par la forêt et arroseraient le sud du brésil, l’importance de la biodiversité par km2 de forêt et l’existence probable d’un seuil de non-retour de la forêt amazonienne si la déforestation se poursuivait à grande échelle.
C’est ensuite l’arrivée sur une nouvelle plage de rêve ! Un paysage balnéaire qui se modifie en quelques semaines en fonction de la décrue qui découvre de nouvelles langues de sable.
Débarquement à Maguari pour la randonnée en forêt. Afin de rendre visite au Sumaúma, l’un des plus grands arbres de cette région amazonienne. Accompagnés de guides locaux, nous entrons dans la forêt nationale des Tapajós, une réserve écologique de plus de 600 000 hectares créée il y a plus de 35 ans avec comme but de concilier conservation environnementale et activités économiques pour les communautés traditionnelles de la région. Avec plus d’une trentaine de guides se relayant pour faire découvrir leur forêt aux visiteurs, la communauté de Maguari est devenue un modèle pour la région, recevant notamment la visite du Prince Charles en 2009. Notre première halte est consacrée aux hévéas. Ici, les arbres d’environ une soixantaine d’années sont incisés au petit matin pour récolter le latex riche à 45 % de caoutchouc qui sert aujourd’hui à une production artisanale d’objets en caoutchouc. On progresse lentement dans la forêt et les troncs de plus de 30 mètres s’élancent vers la lumière, colonisés par nombre de lianes et de plantes épiphytes perchées sur les branches. Le guide nous montre un grand tronc lisse. C’est l’andiroba. L’arbre produit des fruits à coque contenant une douzaine de graines. Elles sont cuites et pressées pour en extraire l’huile. Une huile miracle, à la fois cicatrisante, et anti-inflammatoire. Elle soigne aussi les bronches. On l’utilise en massage ou pour soigner les maux de gorge des enfants en leur badigeonnant la gorge avec le doigt trempé dans l’huile. Un peu plus loin, Jean nous fait la montre des fourmis tashi. Écrasées sur la peau, elles servent de répulsif et cachent l’odeur de l’homme chez les chasseurs. Il ne faut pas se tromper avant de plonger la main dans la fourmilière ! D’autres espèces risquent de vous infliger de sérieuses morsures ! Pour ceux qui connaissent les plantes, la forêt est à la fois une gigantesque pharmacopée et un immense magasin de bricolage. Le latex du figuier étrangleur est utilisé pour soigner les maux d’estomac. La liane « escalier de tortue » ou « échelle de singe » reconnaissable à sa forme étrange est utilisée en tisane pour les reins. Le palmier Curua fournit les palmes parfaites pour faire les toitures. La sève du Breu d’Amazonie (ou Breu Branco) est employé comme cicatrisant et purifiant. On dit que son odeur fine et balsamique stimule l’esprit et aide à la concentration. Concentrés sur les commentaires de nos guides, fins connaisseurs de la forêt, nous nous retrouvons sans nous en rendre compte au niveau du mirador (6 km tout de même) qui offre une vue sur les cimes de la forêt de Tapajos. La végétation se densifie, arbres et lianes s’entremêlent et l’on admire des ficus géants et des cipó Apuí multicentenaires. Encore deux kilomètres et l’on découvre le célèbre Samauma, surnommé ici le grand Père, un fromager immense avec un tronc gigantesque. Il mesurerait plus de 60 mètres de hauteur et aurait près de 800 ans. Une trentaine de personnes se tenant la main serait nécessaire pour en faire le tour. On raconte que la Sumaúma est la maison du Curupira, un démon protecteur des forêts, qui parcourt les sous-bois et hante les chasseurs. Retour au village et visite de l’atelier du caoutchouc. On y trouve d’élégants bijoux et d’étonnantes chaussures en latex. On embarque sur l’Amazon Dream pour une navigation vers la région de Braganca, le territoire des Indiens Munduruku. Ce peuple guerrier lutte depuis plusieurs siècles pour la défense de leur territoire de plusieurs centaines de milliers d’hectares de forêt protégée au Brésil et contre les projets de barrages hydrauliques qui menacent le Tapajos. Ils sont aujourd’hui environ 250 à vivre près du lac de Bragança. À la nuit tombée, leurs pirogues encerclent l’Amazon Dream. Ils viennent nous chercher pour assister au rituel des Mundurukus, un appel de l’homme à la nature. Après une navigation en pirogue dans la forêt inondée qui embaume de senteurs, on rentre sous le dôme communautaire. Réunis autour du feu central, les Mundurukus rendent hommage aux esprits guerriers disparus puis remercient la nature pour les récoltes, pour l’eau, le feu… au travers de chants harmonieux chantés par les adultes comme par les enfants. Pour les remercier, Marcel et Françoise, nos deux Suisses de choc, ont amené leurs cors des Alpes et font un petit concert improvisé. Les Mundurukus qui utilisent aussi des sortes de grosses flutes d’un mètre de longueur sont très intrigués par les instruments en carbone et les essayent avec curiosité. À la lumière des bougies, on regarde ensuite leur artisanat et nous sommes nombreux à craquer pour leurs sculptures de jaguars en bois ou leurs bijoux en perles.
Torse nu et parés de leurs coiffes en plume, nos amis Mundurukus sont de retour ce matin pour nous embarquer sur leurs pirogues. Direction : la forêt inondée voisine ou varzea où ils chassent le caïman et pêchent le poisson. En Amazonie, on distingue la forêt qui reste toute l’année immergée nommée igapo de celle partiellement inondée appelée Varzea. Ici, les sont arbres capables de survivre pendant plusieurs mois une partie du tronc complètement immergée et les feuilles recouvertes de cire se décomposent très lentement. Bien qu’elles représentent qu’un peu moins de 5% de l’Amazonie (250 000 km2 tout de même), les varzeas sont des milieux très importants pour la ressource halieutique et pour les populations riveraines qui y vivent. Nous naviguons entre les troncs et les branches avec dextérité. Et en silence, cela fait du bien d’avancer à la pagaie tout en douceur. Les troncs se reflètent dans l’eau qui se ride à peine sur notre passage. Des sternes nous contemplent perplexes avant de plonger sur un banc de poissons. Sur les souches, des hirondelles à ailes blanches nous observent. Les rayons de soleil lancent des éclairs cuivrés sur leurs plumages sombres. Les eaux sont noires et on ne peut qu’imaginer les botos et dauphins gris virevoltant entre les troncs là où normalement devraient vivre des singes !
Domingos, le chef du village nous guide à travers les frondaisons. Une fois revenu sur les eaux libres, il donne le signal et toutes les pirogues font la course pour rejoindre l’Amazon Dream ! Et les jeunes rivalisent d’ardeur pour pagayer le plus rapidement possible. Nous quittons Bragança pour traverser le Tapajos et remonter vers le nord pour arriver sur le lac de Capixaua. On profite de la navigation pour raconter le boom économique du caoutchouc qui a propulsé l’Amazonie au coeur de l’économie mondiale entre 1860 et 1915.
Notre escale pour la nuit sur un isthme récemment sorti des eaux est comme d’habitude somptueuse. Et encore une fois, on se croit sur une plage des Caraïbes tellement le sable est blanc et l’eau chaude. Sans oublier un coucher de soleil incroyable qui sublime l’ensemble ! Le soir nous débarquons dans la petite communauté de Vista Alegre pour un spectacle de danse organisé par les enfants. Et nous sommes mis aussi à contribution pour une danse mémorable avec des rubans autour d’un poteau !
Retour à Vista Alegre de bon matin. Nous avons rendez-vous à la casa de farinha ou « maison de farine » communautaire. Au Brésil et tout particulièrement en Amazonie, le manioc est à la base de l’alimentation. Cultivées ou sauvages, les racines donnent la farine de manioc, le tapioca et le tucupi, une sauce à base de jus de manioc. Mais il faut les préparer de façon précise, car la plante contient du cyanure… Il faut d’abord gratter les grosses racines. Puis les racines sont broyées dans une machine propulsée par un moteur de bateau. La pulpe obtenue est mise dans un long manchon tressé avec soin appelé le tipiti. L’ensemble est ensuite pendu à une perche et tendu par un système de contrepoids. La pulpe est pressée par la gravitation et le jus toxique s’écoule par le bas. La pâte obtenue est ensuite sortie et tamisée avec soin. Puis les grains obtenus sont cuits sur une large plaque métallique et brassés régulièrement. Au bout d’une heure environ de cuisson, la « farine » de manioc est prête et conditionnée en sacs de 60 kg et expédiés sur le marché de Santarem.
Nous passons ensuite à l’école où nous sommes une fois de plus attendus de pied ferme. Le sentants nous ont préparé un petit spectacle avec la danse de la « farinha » dédiée à la fabrication du manioc.
Nous continuons notre chemin direction la forêt au milieu des palmiers, et de grands arbres. Au détour du sentier, c’est la surprise ! Au coeur de la végétation se niche une petite plage baignée par l’eau translucide d’une source voisine ! Enfin de l’eau fraîche – entre 22 et 25 degrés ! Un vrai plaisir de se rafraîchir après une longue balade dans la forêt. Des pirogues nous attendent pour descendre l’igarapé jusqu’à la mer… ou plutôt le Rio. Un retour au bateau tout en douceur et en silence. L’Amazon Dream traverse une dernière fois le Rio Tapajos pour arriver à Alter de Chao. Certains retrouvent la civilisation en allant se baigner une dernière fois sur la plage couverte de transat et de parasols au milieu des Brésiliens en weekend. Nous explorons ensuite le lac vert au coucher du soleil et un groupe de singes hurleurs nous gratifient de leur étrange concert… et d’une belle observation. C’est ensuite l’heure de l’apéritif dans un bar de cette petite station balnéaire avant de rejoindre le bateau de nuit. Avec encore une belle surprise de l’équipage qui nous a préparé un repas sur la plage avec un spectacle de danse. Place au carimbo, à la samba et à la Bossa Nova 8
Difficile de quitter l’Amazon Dream ce matin après ces dix jours endiablés passés à bord. Nous embarquons, une dernière fois dans les annexes, direction la halle aux poissons de Santarem située sur le Tapajos. L’orage menace et nous nous mettons à l’abri. À cette heure matinale, c’est l’effervescence avec un ballet de porteurs arrivant avec des paniers entiers de poissons ou de glace sur la tête. Ici, tous les pécheurs peuvent venir vendre leurs poissons librement. On côtoie d’énormes surubim, sortes de poissons-chats de près de deux mètres, on reconnait le tucunaré, et le jaraqui dont on a dégusté les filets dans nos assiettes. Des trombes d’eau s’abattent désormais sur Santarem, et même abrités sous la halle, le vent et les gouttes nous rafraîchissent. On prend un café au milieu des pêcheurs et des habitants. Le grain ne passe pas. Et au bout d’une heure, on se résout à rejoindre le bus sous des trombes d’eau, les coups de tonnerre, les éclairs dans le ciel, avec de l’eau jusqu’aux chevilles. La ville est inondée et l’on décide d’aller directement au restaurant pour un dernier repas de poissons et un transfert à l’aéroport. C’est la seule et unique averse que l’on a vécue de toute la croisière et c’était intéressant de voir à quel point les éléments peuvent se déchainer dans la région amazonienne !
Pendant les vols, Santarem Belem, demandez à être placée côté hublot. Du ciel, on découvre les immensités inondées de l’Amazone et de son embouchure; une démesure d’eau et de forêt difficile à décrire. Belem, nous voilà ! À l’unanimité et sur les conseils avisés de Rute, nous allons diner à la Casa D’Noca en centre-ville. Une belle tablée face à un orchestre de samba et un dernier apéritif (caïpirhina bien sûr) tous ensemble. Pura vida !
Belem, nous voilà ! Après une nuit réparatrice, rendez-vous avec Marcello pour une visite de la capitale du Para. Premier arrêt à la cathédrale de Belem. Simple cabane en bois érigée par les Portugais à leur arrivée. la Catedral da Sé fut reconstruite en 1755 par l’architecte italien Antônio Landi dans un mélange des styles néoclassique et baroco-colonial. Aujourd’hui, c’est l’effervescence dans l’église où l’on installe les tapis rouges et les autels d’apparat. Dans deux semaines, le second dimanche d’octobre comme chaque année, c’est la grande procession du Cirio qui réunit plus de 2 millions de personnes. C’est d’ici que la statue de la Vierge est portée jusqu’à la basilique N. S. de Nazaré. En face, nous visitons le fort portugais de Presépio construit pour protéger le prétendu or du Para d’une possible arrivée de Français ou de Hollandais. Depuis ses remparts, on admire les superbes halles inspirées des réalisations de Gustave Eiffel et inaugurées en 1901 du Mercado Ver-o-Peso, ou marché aux poissons. Recouvertes de zinc, elles sont dotées de quatre tours d’angle polygonales et permettent de découvrir tous les poissons de l’Amazonie. En face, le marché à la viande tout de fonte verte, vaut le coup d’oeil pour son surprenant escalier métallique en hélice. Ensuite, on déambule dans les allées du marché dédiées à la pharmacopée, aux légumes, fruits, manioc, artisanat, sans oublier les petits restaurants installés au bord du fleuve. Direction, le théâtre de la Paix, sur la place de la République. Construit au XIXe, à la grande période du boom du caoutchouc, le théâtre concurrence l’opéra de Manaus. Les fines mosaïques du sol et le plafond de la salle de spectacle reprennent les motifs symboliques indiens. Une vaste réserve d’eau dans la salle était prévue pour lutter contre les flammes en cas d’incendie. Et pendant les spectacles, un ingénieux système de climatisation permettait d’échapper à la chaleur tropicale à l’aide de glace amenée d’Angleterre ! Un petit arrêt à la basilique de Nazaré avant de déjeuner dans les jardins du procureur. On continue la balade en taxi avec la visite du parc zoologique Emílio Goeldi fondé en 1866 par un groupe de naturalistes. Il offre, en plein centre de Belém, une vision miniature de la forêt amazonienne.avec plus de 2 000 espèces de plantes. On poursuit en direction du Bosque Rodrigues Alves où l’on a la chance d’admirer deux splendides aras. Retour aux,docks, un décor industriel très bien mis en valeur pour embarquer pour une dernière croisière au coucher du soleil avec démonstrations de danses. Un bon moyen de dire au revoir à l’Amazonie ! Cette nuit et demain, nous prenons tous des vols pour l’Europe ou différentes villes du Brésil. Merci à vous tous pour ces beaux moments de découverte et d’amitié en votre compagnie. Et à bientôt pour de nouvelles aventures !
Suivez nos voyages en cours, grâce aux carnets de voyages rédigés par nos guides.
Messages
Il n'y a pas de messages pour le moment
N'hésitez pas à leur en laisser un !